Ce roman pour adolescents dénotera des autres à plusieurs titres, pour son orientation masculine, son écriture et ses situations à tribulations extravagantes comme la littérature américaine peut en apprécier le genre. "
Le théorème des Katherine" est un roman écrit par un homme et présentant le monde amoureux masculin dans l'adolescence, ce qui est rare. Les garçons dévoreront plus facilement des oeuvres de l'imaginaire que des textes sur ce sentiment amoureux. Et bien là, ils auront enfin une proposition qui leur ressemble si besoin est, et ça, c'est original. Aussi les filles pourront apprécier de jeter un oeil curieux "aux vestiaires" de leurs petits coeurs et s'attendrirent de leurs questionnements les concernant.
Certaines lectrices ne seront pas forcément séduites par cette écriture potache- bienvenue dans le monde des garçons, mesmoiselles!, surfant sur les clichés communautaristes tant appréciés des caustiques Stand-Up Outre-Atlantique, l'association d'un juif et d'un arabe dans cette escapade atteste de la marque de fabrique. Cependant, l'ambiance est loin d'être lourde et nous profitons réellement sans déplaisir de ce duo improbable qui se "piquent" de répliques ironiques et s'apprécient à la vie à la mort. C'est aussi une histoire d'amitié longue et solide.
John Green a su proposer une alternative valable face à la recrudescence de romans pour filles du genre. L'auteur imagine un pauvre "loser", à l'instar de beaucoup de jeunes adolescents "boutonneux" et "puceaux", vous me le pardonnerez, qui à cet âge attendent aussi de décrocher leur bonne étoile avec la fille de leur rêve (mais n'en parle pas!). L'approche est en effet très masculine dans la façon de percevoir la relation, plus cérébrale et théorique qu'émotionnelle, crédible, même si le trait est forcée volontairement avec la nature surdouée de Colin, afin de présenter cet angle de vue des garçons "in Love".
John Green expose la difficulté des garçons a comprendre les filles dans l'acte même de ce génie désespéré qui cherche l'astuce qui pourrait le rendre irrésistible auprès de ses futures conquêtes.
Dans sa singularité, Colin Singleton ne comprend pas ce qui l'isole du monde ( attention jeu de mots voulu!! singularité, single=célibataire, Singleton), ce qui a échoué dans toutes ses dix-neuf approches de la relation amoureuse. Une incompréhension dans laquelle nombres de jeunes tout court se retrouveront probablement dans l'échec et l'assumation d'une image de vilain petit canard aux yeux des autres comme à cet âge. Hassan fait d'ailleurs référence à ses complexes sur ses excès de poids et sa gêne à se montrer torse nu devant ses copains. Cela ne l'empêchera pas non plus au final de trouver l'amour grâce à sa personnalité enjouée et caustique.
Cela offre une perspective réaliste et moins fantasmée de la relation. Exit les princes charmants et adonis aux corps parfaits, pour faire connaissance avec un duo de copains vraiment sympathiques, tels que les jeunes filles pourraient en rencontrer dans la vraie vie du lycée, pour qui saurait se laisser séduire par des personnalités naturelles et attachantes. Non, le terme "attachant" n'est pas uniquement réservé qu'à l'usage de la race canine mais aussi à l'amour vrai, celui qui fait fi des apparences et embrasse l'imperfection comme un charme. Colin "Roméo" trouvera sa "Juliette" -pas une Katherine"- en la personne d'une jeune adolescente qui aimerait au contraire se tenir dans l'ombre par réserve. Comme quoi la vie est bien faite!
Colin se révélera finalement l'homme charmant et exceptionnel qu'il rêve d'être, apprenant enfin à s'aimer lui-même et cessant de vouloir impressionner son entourage de peur d'être abandonner. Une assurance donc à la clé! Il mettra un peu son ordinateur de cerveau de côté et poussera son instinct vers l'inconnu, inconnue avec un e"" puisqu'elle s'appelle Lindsay. Un joli calcul qui séduira au final les deux lectorats, filles et garçons.