Edouard Herriot. Dans la forêt normande/Edouard Herriot

Taillé comme une de ces anciennes armoires normandes qui faisaient autrefois le bonheur d'un trousseau, ce livre semble fait pour défier le temps.
Sa charpente massive est affinée par les moulures élégantes qui lui dessinent sa robe.
La littérature dont il est tissé est faite d'un mélange d'Histoire, de Géographie, d'Architecture religieuse et profane.
Il a été écrit, en 1925, par Edouard Herriot de l'Académie Française.
Comment un "horsain" peut-il avoir aussi bien pressenti l'âme normande ?
C'est pour moi un véritable mystère !
L'ouvrage s'ouvre sur une promenade en forêt.
Un premier chapitre évoque la terre et la race ...
Les longues descriptions sont comme autant de lourdes et anciennes peintures à l'huile, évocatrices de la beauté du bois normand où le chêne prévaut.
La riche Normandie s'épanouit entre les arbres et parmi les fleurs.
Mais du double combat que mena le paysan contre la forêt et contre le roi, est né le bocage.
Un deuxième chapitre fait le récit des temps héroïques ...
Une telle histoire, celle de la puissance normande et de son duché, vaut tous les romans d'aventure.
Un guide est nécessaire pour traverser, par de sûrs chemins, l'espace qui va de la Gaule à la France car, on le dit, le duché de Normandie aida la France à se constituer.
Un troisième chapitre s'intéresse à l'art gothique normand ...
Les trois cathédrales, celle de Lisieux, de Bayeux et celle de Coutances dont les flèches sont faites de pierres de Valognes, en sont les trois joyaux.
Elles sont, paradoxalement, les premiers témoins d'une laïcité naissante de la société.
Au début du XVème siècle, la Normandie est ensevelie sous les décombres ...
Le "pays" est dépeuplé, ruiné, dévasté.
Caen est devenu le quartier général de l'Angleterre.
La Renaissance signe le renouveau de la région.
Caen revit, Caen se relève et se recrée.
Un dernier chapitre, "Un couteau de quarante sous" évoque longuement et précisément les deux personnalités de Charlote Corday et de Marat qui furent tous deux également victimes de Jean-Jacques Rousseau ...
L'écriture d'Edouard Herriot est stylisée.
"Dans la forêt normande" est un beau livre, lent et instruit.
Il est bâti à l'ancienne pour durer ... et faire souffler l'esprit du "pays" sur chaque bibliothèque normande qu'il ornera de ses anciennes pages ...

Normand d'origine et amoureux des forêts, je ne pouvais pas passer à côté de ce livre écrit en 1925 par l'ancien homme politique et académicien Edouard Herriot.
Mais hélas, il y est peu question de forêts et je n'ai pas retrouvé la vision magique de Jean Giono, l'odeur de l'humus et cette sensation de pénétrer dans une cathédrale. En revanche, l'intérêt de l'ouvrage dépasse largement les frontières normandes.

L'auteur traîte et survole différents thèmes : L' Histoire et le paysage, bien sûr, mais aussi la mythologie, la vie et l'architecture religieuses.
Le chapitre deux (Aux Temps Héroïques) fait notamment la part belle à l'art roman mais pas que. Il ravira sans doute les amateurs de plastres et de chimères, de colonnes et retables.

A noter, des anecdotes intéressantes concernant le Mont Saint-Michel (là je tends le dos).

J'ai donc lu ce livre par curiosité, pour y retrouver des lieux connus de moi-même et jadis fréquentés par Honoré de Balzac et Paul Eluard. Mais j'avoue m'être ennuyé avec les querelles religieuses et infos people (Le Tourment de M. de Rancé). J'ai eu parfois du mal à suivre l'auteur dans ses déplacements géographiques. Je n'étais pas sûr de savoir où j'étais. le contenu historique manquait parfois de détails selon moi ou alors n'était pas de première importance. le dernier chapitre, par contre, qui nous éclaire sur la fin de Marat, a provoqué chez moi un regain d'intérêt. Mais c'est évidemment très personnel.

Ce livre se trouve encore facilement d'occasion. Sachez qu'il ne comporte ni carte ni illustration d'aucune sorte dans "mon" édition (Librairie Hachette 1925 voir photo). En revanche, les Editions de l'Estampe ont sorti une version semble-t-il joliment illustrée.

J'ai hâte à présent de lire ce que Léopold Sénar Senghor a à dire sur "La Normandité". Mais l'actualité désastreuse m'attire vers d'autres contrées...