Ce tome comprend les 4 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2010/2011, écrits par
Jonathan Hickman, dessinés par
Carlos Pacheco, encrés par Dexter Vines (aidé par Jason Paz et Jeff Huet). La mise en couleurs a été réalisée par Edgar Delgado, avec l'aide de J. Aburtov et Jorge Gonzales.
Le récit s'ouvre sur une séquence ne précisant pas la date. Les géants du froid s'approchent d'Yggdrasil, et Asgard est en ruine. Il ne reste plus que Thor, Hogun, Fandral et Volstagg pour défendre l'Arbre Monde. de nos jours, James Braddock enregistre une nouvelle entrée pour indiquer qu'il n'a fait aucun progrès concernant le patient Thorlief Golmen qui se fait appeler Thor. Il en fait part à son fils Brian Braddock. Ensemble, ils reçoivent un nouveau docteur venu apporter son aide : Donald Blake.
En 1939, en Westphalie, Baron Zemo informe Himmler qu'il dispose des runes sacrées, et qu'il a localisé un point d'entrée. Cela convainc Himmler de lui accorder 100.000 hommes. Dans les environs d'Asgard, Thor, Loki et Balder s'amusent à chasser les géants de glace.
Le deuxième récit consacré aux Ultimates (voir Ultimates II, 2005-2007) avait établi sans ambages la nature divine de Thor. le lecteur retrouve donc ce personnage dans l'organisation gouvernementale qui lui avait fourni son harnais de puissance pour lui donner des pouvoirs, alors qu'il avait oublié sa véritable nature. Il n'a toujours par retrouvé Mjolnir.
Hickman joue avec la mythologie nordique, sous sa forme popularisée par les comics de Thor de l'univers partagé principal (616) de Marvel. Sans surprise, le lecteur retrouve Thor, Loki, Balder, les 3 Guerriers (Fandral, Hogun et Volstagg), Odin, Hugin & Munin, Heimdall, Asgard, etc. Hickman introduit quelques variations par rapport au canon de l'univers 616, rendues possibles par l'histoire relativement vierge de cette version de Thor. Globalement, le lecteur n'est pas dépaysé.
Carlos Pacheco introduit lui aussi des différences avec la version canonique, à commencer par l'architecture d'Asgard et le positionnement d'Yggdrasil. Il n'est pas très inspiré, Yggdrasil ressemblant à un chêne très noueux géant, et l'architecture d'Asgard évoquant vaguement l'Italie de la renaissance, sans raison apparente.
Le lecteur suit le récit au temps présent, en regardant Thor recouvrer peu à peu la mémoire, en s'interrogeant mollement sur l'identité réelle de Donald Blake (une différence avec la version 616, sans grand intérêt ludique). Il faut attendre le quatrième épisode pour que Thor retrouve un peu de personnalité, en choisissant ce qu'il va faire de ses capacités retrouvées. Pacheco le dépeint avec une très forte carrure et des cheveux filasse.
Concernant la partie du récit se situant en 1939, Hickman reprend ce qui est devenu un cliché : la soif des nazis pour découvrir des objets de pouvoir de type surnaturel. L'identité réelle du Baron Zemo est vite éventée, et l'attaque conjointe d'Asgard par des soldats nazis et des géants de glace (en provenance de Jotunheim, et menés par Mammoth) prête à sourire. D'une part il s'agit de méchants aux motivations plus que génériques, ensuite Pacheco s'amuse à coller des vareuses nazis sur les géants de glace pour un effet des plus kitsch (carrément ridicule même. Quel besoin peuvent avoir les géants de glace de se vêtir d'une veste kaki ? Qui a taillé ces vestes ? Comment le tissu peut-il résister au froid émanant des géants ?).
Au final, le lecteur assiste à une invasion générique d'Asgard en 1939, avec des personnages qui n'ont pas le temps de dépasser les clichés habituels. le récit au présent s'avère un peu plus intéressant car Hickman laisse le lecteur dans l'expectative d'où le récit se dirigera. le lecteur éprouve quelques difficultés à bien situer chaque époque, en particulier si le récit au présent se déroule vraiment au présent, ou plutôt un peu de temps avant la première saison d'Ultimates par
Mark Millar &
Bryan Hitch (cette dernière hypothèse semblant être la bonne, même si rien dans la narration ne vient l'expliciter).
De son côté,
Carlos Pacheco applique les consignes éditoriales qui exigent que tout récit estampillé "Ultimates" doit évoquer l'esthétique établie par
Bryan Hitch dans les 2 premières saisons des aventures de cette équipe. Cet artiste réussit plusieurs images saisissantes en respectant cette consigne, par exemple Thor en train de couvrir le sol de sa chambre avec des runes, Ulik en train de forger un marteau, ou Thorlief Golmen en train de dessiner une forme sur un tableau.
À d'autres moments, Pacheco n'arrive pas à dépasser les stéréotypes visuels propres aux comics de superhéros (Thor s'élançant vers son ennemi, marteau en avant), ou aux comics de Thor (les batailles dans la neige contre les géants de glace), ou même aux standards établis par
Bryan Hitch (l'arrivée en masse des géants sur Asgard). Les dessins sont soignés, avec une finition léchée, mais ils manquent de souffle.
Au final, l'appréciation du lecteur dépendra de ce qu'il est venu chercher. S'il se contente d'une histoire d'Ultimate Thor à la manière de
Mark Millar & Hitch, il pourra trouver son content dans ce prologue à la première histoire des Ultimates, avec une esthétique approchante, et un récit qui replace les apparitions de Thor dans une chronologie cohérente. 4 étoiles.
D'un autre côté, le lecteur peut avoir été attiré par la perspective d'un récit de
Jonathan Hickman faisant le pendant de celui réalisé pour Ultimate Comics Hawkeye (par le même scénariste) et établissant l'histoire personnelle de Thor, de manière substantielle et marquante. Il sera alors un peu déçu par une histoire en deçà. Hickman semble moins à l'aise avec ce personnage mythologique, moins inspiré que pour la saison réalisée pour les Ultimates, voir Ultimate Comics Ultimates vol. 1 & Ultimate Comics Ultimates vol. 2.
Il reste malgré tout un moment qui génère un frisson chez le lecteur familier des travaux d'Hickman. Dans la logique de ce récit (car il est question de Ragnarok), l'un des personnages indique que tout a une fin, sonnant comme une déclaration prémonitoire à la phrase prononcé par Reed Richards dans le premier tome des New Avengers (voir Everything dies) : tout meurt.