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3,62

sur 2023 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Mon premier Houellebecq. C'est un livre déroutant. je ne sais toujours pas si j'ai adoré ou détesté, si c'est intellectuellement brillant ou si c'est un galimatias de thèses éculées, si la sexualité très présente dans le roman le sublime ou le rend vulgaire...bref si on est devant un chef d'oeuvre littéraire ou un navet.
Ce qui est certain c'est que je l'ai lu vite, avec plaisir et sans m'ennuyer. Pari réussi.
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« Tu sais comment on appelle le gras qu'y a autour du vagin ?
Non.
La femme. »

Daniel1 est comique. C'est un comique de notre temps qui joue avec le totem, le tabou, la provocation. Daniel25 est son clone du futur. Daniel25 doit commenter l'autobiographie de Daniel1. C'est un exercice qui constitue l'un des points clefs de l'enseignement de la mystérieuse Soeur suprême. Dans le futur, après les grandes guerres thermonucléaires et les bouleversements climatiques, les néo-humains sont des clones. Les autres humains, non clonés, des sauvages. Ils vivent séparément à la manière du Meilleur des mondes de Huxley. Daniel1, comme tous les humains du XXIème, a des sentiments, des convictions, des opinions. Il décrit à travers son autobiographie les péripéties de sa vie : de ses rencontres amoureuses à ses liaisons avec les élohimites - secte prônant la liberté des moeurs et la possibilité d'une vie éternelle à travers la résurrection. La possibilité d'une île est de ce fait un livre sur l'amour : l'amour physique, l'amour sentimental, l'amour politique. le récit de Daniel1 s'enrichit des réactions de ses multiples clones du futur.

C'est donc à travers le regard d'un comique, picaro des temps modernes, que nous découvrons la société du XXIème siècle. Daniel1 est un clown triste qui porte un regard cynique, cioranien, sur le monde. Sa plume percutante, acérée, sonne bien souvent juste. Notre protagoniste est lucide sur sa condition humaine comme sur sa condition personnelle. Il vieillit. Mais il aime. Et il aime l'amour et le sexe. Des désirs qui, eux, ne vieillissent pas. le temps est à ce titre une notion importante dans l'oeuvre de Houellebecq.

Si La possibilité d'une île parvient donc à éveiller notre curiosité grâce à un style direct, un regard critique sur la société contemporaine et au thème universel de l'amour, on ne peut toutefois s'empêcher de se poser des questions quant à l'honnêteté de l'auteur. Car si la construction du récit est intelligente, bien pensée, bien menée, alternant entre l'autobiographie de Daniel1 et les commentaires des clones du futur, le style de Houellebecq est quelque peu paradoxal. Certes, sa plume sonne juste, elle est percutante voire acérée... mais un peu à la manière du groupe FAUVE. C'est-à-dire qu'elle est efficace parce qu'elle est l'expression nerveuse de l'écrivain. On ne s'émerveillera pas devant une belle construction de phrase ou un style acerbe, mais on sera saisi par la brutalité avec laquelle l'auteur nous place devant telle ou telle idée. Souvent avec le goût de la provocation comme le rappelle la citation au début de cette critique.

Le style plaît ou ne plaît pas, des goûts et des couleurs on ne discute pas. En revanche, on peut discuter d'un autre aspect de l'oeuvre : la culture-confiture. Houellebecq multiplie ainsi les références et les débuts d'analyse, mais ne les pousse jamais à fond. On regrette que le personnage n'aille jamais trop loin dans ses pensées. Chaque début de réflexion sur les sentiments, la société ou la vie en général s'avère très intéressant mais ne dure jamais bien longtemps. Résultat : on reste sur notre faim et on se demande si l'auteur n'étale pas un peu sa culture. Toutefois, même si les analyses ne sont pas des plus poussées, le récit reste vraiment plaisant à lire.

La Possibilité d'une île est finalement difficile à critiquer. D'un côté, Houellebecq choisit un style nerveux, voire brutal par moments, de l'autre il construit son oeuvre avec finesse et élégance. Il porte un regard cynique avec des pistes de réflexions intéressantes sur l'amour, la société etc. mais ne prolonge jamais l'analyse. Lorsque Kundera analyse ses personnages, une situation ou un comportement, il le fait avec justesse et prend son temps. On a la sensation que Houellebecq fait exactement l'inverse : un paragraphe d'analyse de temps à autre et peu de véritables développements. le récit est suffisamment bien pensé pour nous pousser à le lire jusqu'à la fin mais après coup, on se demande : qu'est-ce qu'on a appris ? Houellebecq est comme un professeur qui veut enseigner mais qui ne sait pas enseigner. Au lecteur de trouver l'enseignement. Lorsque Franck Nouchi dans le Monde dit de ce roman que « vite vient l'envie de comparer sa propre lecture à celle des autres », il semble bel et bien avoir raison. Alors, qu'avez-vous pensé de cette oeuvre ?
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"La possibilité d'une île".


Ce titre, aussi magnifique qu'évocateur, n'a pas été sans me faire penser, toutes proportions gardées, à la manière dont Fitzgerald à choisi le titre de son chef-d'oeuvre absolu, Tendre est la nuit, également issu d'un poème, cette fois-ci celui du poète anglais Keats.


C'est avec un certain regret de quitter ce roman que je l'ai refermé il y a quelques semaines. Dans l'ensemble, Houellebecq se montre toujours aussi captivant et talentueux. Il m'est néanmoins arrivé de relever des passages, certes rares, qui ont pu me donner une impression quelque peu désagréable de banalité, notamment lorsqu'il fait asséner à son narrateur de fausses évidences. Cela explique que je m'en suis tenu à quatre étoiles et non pas cinq.


J'en citerai une seule: selon le narrateur, Daniel, les jeunes ne tomberaient plus amoureux, ou refusent le sentiment amoureux (je ne compte surtout pas me lancer dans l'autofiction, que je méprise, mais force est d'admettre que, bien qu'ayant 23 ans, je n'ai reconnu ni moi-même, ni un assez grand nombre de mes amis dans cette mentalité-là).


Cette unique réserve étant faite, le roman se révèle être d'une originalité assez peu commune, et d'une lecture fluide et agréable. Houellebecq réussit le tour de force de nous rendre sympathique une secte, inspirée de manière transparente des raëliens, dont l'objectif serait à terme de pouvoir donner à l'homme tout à la fois l'immortalité via le clonage et la délivrance des souffrances que causent les émotions, notamment liées au désir sexuel.


(ATTENTION: je ne cautionne en rien cette secte telle qu'elle existe dans la réalité, j'affirme juste que dans le monde FICTIONNEL construit par Houellebecq, elle est rendue avenante)


L'alternance du roman entre les mémoires de Daniel 1 (l'original) et les commentaires qu'en font ses différents clones nous montrent à terme que si l'immortalité et l'annihilation des désirs humains ont bien été atteints, les hommes n'en sont finalement pas plus heureux: cette nouvelle humanité ne vit plus que dans une torpeur sans fin...A tel point que Marie, une de ces transhumaines, finit par se lancer dans un voyage qui lui permettrait de rencontrer les anciens hommes (qui sont revenus à l'état préhistorique) supposés vivre dans un bonheur qu'elle ne possède pas...Comme si finalement la possibilité du bonheur était précisément indissociable à la capacité d'éprouver du désir, au risque d'en souffrir.


Une fois encore, dans cette incapacité radicale de l'humanité à atteindre le bonheur se trouve le pessimisme radical de Houellebecq...Ce pessimisme est bien ancré, si l'on observe de plus près la structure sous-jacente au roman:

1/Une secte dépeinte de manière positive.
Cela en dit long sur la faillite de la modernité, qui prétendait délivrer l'homme des questionnements liés au sens de son existence, ses origines, etc. par l'extension continue de la connaissance scientifique du monde d'une part, et par l'amélioration tout aussi grande de ses conditions matérielles d'existence (ce qui est un progrès énorme, cela va de soi).
Or le vide béant crée par la fin des religions traditionnelles n'a pu être rempli par le rationalisme moderne et les diverses constructions idéologiques apparentées (communisme notamment). La démocratie libérale elle-même semble s'être anémiée. Les sectes, dont celui au coeur du roman, semblent proliférer sur ce terrain-là.


2/Une secte qui finalement systématise l'usage de la science moderne
Le salut que propose la secte a évacué une grande partie des éléments surnaturels sur lesquels reposent les religions classiques. La seule lubie des Elohimites à cet égard est, à vrai dire, la profession de foi en la venue d'extraterrestres à accueillir dans une ambassade.


L'église Elohimite propose en effet un salut entièrement dépendant de l'avancée des recherches scientifiques de la secte, en matière de clonage et de modifications de l'organisme humain. En ce sens, cette secte est pleinement ancrée dans la modernité contemporaine d'où toute référence à une transcendance d'ordre surhumain, divin est largement disqualifié. A cet égard, les derniers chapitres du roman dépeignent bien l'effondrement des religions anciennes face à l'expansion de l'Elohimisme.


3/L'invalidation radicale de tout forme de salut.
Les objectifs scientifico-religieux de l'Eglise Elohimite atteints, plusieurs siècles après, la condition humaine nouvelle demeure guère reluisante. le salut n'est pas venu de cette spiritualité nouvelle, fondée sur la science, pas plus qu'elle n'est venue des sociétés anciennes que de la modernité actuelle.


Ce roman semble être presque une dystopie, si l'on considère finalement que Houellebecq prophétise d'une certaine manière le caractère insoluble du problème du bonheur, qui demeurera indépendamment des évolutions d'ordre techniques et sociales que peut connaître l'humanité.


P.S. D'après un article du Figaro, Houellebecq travaille sur un nouveau roman. J'ose affirmer que c'est le seul article d'actualité que j'ai eu plaisir à lire ces derniers temps...
http://www.lefigaro.fr/livres/2014/04/24/03005-20140424ARTFIG00009-michel-houellebecq-je-ne-compte-pas-mourir-prochainement.php
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Daniel24 est le descendant, cloné à partir de son ADN, de Daniel1. 2000 ans après la mort de celui-ci, Daniel24 découvre le récit de vie de son ancêtre et à travers lui, la fin de la civilisation humaine et les prémices de la civilisation des néo-humains.

On est globalement dans un roman de science-fiction mais Daniel1 est le personnage principal et le plus gros du roman se situe dans le monde actuel.

Daniel(1) est humoriste à succès. C'est un personnage cynique, misogyne, misanthrope même, autocentré, névrosé. de la vie, Daniel n'apprécie que les plaisirs charnels et encore, il faut qu'il soit bien disposé. Sa vision du monde est complètement noire, sans concession.

Vraiment le genre de personnage qu'on a envie de détester.
A partir de là, deux façon d'aborder le roman:

soit on trouve le type infect, on est tenté de confondre narrateur et auteur (Daniel ressemble foutrement à Houellebecq) et on referme le bouquin illico. Pas envie d'en savoir plus.

soit on accepte le personnage de Daniel comme un personnage de fiction et on sourit de son inconvenance, de son jusqu'au boutisme.

J'ai choisi cette option-là et j'ai jubilé à lire certains passages.

Daniel est certes un personnage très auto-centré, qui nous relate sa petite vie et ses déboires personnels (le vieillissement du corps qu'il a du mal à accepter) mais il est aussi un témoin de son époque. Son détachement par rapport au monde qui l'entoure lui permet d'analyser froidement la société et de voir la civilisation foncer droit dans le mur. C'est d'ailleurs pour ça que son récit de vie intéresse tant ses descendants. Grâce à lui, ils parviennent à comprendre comment est arrivée la fin de l'humanité. Et c'est pour ça qu'il est si intéressant pour le lecteur aussi. Pour la petite histoire (de Daniel) et la grande histoire (du monde dans lequel nous vivons). Il est vraiment troublant de constater avec quelle acuité Houellebecq voit le monde. Alors qu'il a écrit la possibilité d'une île en 2005, il y prévoit le printemps arabe (2010-2011).
Troublant...De là à ce qu'il voit juste et que les humains puissent être clonés...

En tout cas vous l'aurez compris, sa vision du monde est noire noire noire; rien de réjouissant ne semble nous attendre dans un futur proche, bref on est complètement foutu!

Le futur des êtres clonés sera-t-il meilleur? Vous le saurez en lisant le livre.

Lien : http://lesgridouillis.over-b..
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du houellebecq pur jus a ne pas mettre entre toute les mains!!!
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L'humour noir, le cynisme, les réflexions érotico-sociologiques, etc. Tout y est. C'est souvent très juste et extrêmement agréable à lire mais Houellebecq nous fait le coup de certaines provocations "obligées" pour maintenir le mythe du cynique désabusé et surtout il délaie la sauce. le roman aurait pu être plus court, plus ramassé et beaucoup plus fort. Néanmoins c'est un bon livre.
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emballée ! toujours surprenant l'homme et l'oeuvre
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L'enfer c'est les autres, le "clonage" de soi comme solution ?
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J'aime le titre. C'est visionnaire comme tout Houellebecq.
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Il est de bon ton d'encenser ou récuser Houellebecq, pas de demi-mesures avec cet écrivain que je juge désespéré. J'ai beaucoup aimé ce livre bien écrit, fluide et sans qu'il ne perde de son intérêt au fil des pages.
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