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sur 1347 notes
Je suis en cours...

Comme souvent, le père Hugo, faut s'le faire ! Vu de près c'est plein de mots savants, sur de longs chapitres bizarres (la marée, la tempête, fiches techniques sur la navigation...) ; Les personnages sont de vraies caricatures, il y a une certaine naïveté, une lourdeur psychologique ...

Et quand on se remémore ce qu'on vient de lire, cela a une force extraordinaire, mythique, je dirais... un souffle qui emporte tout...

Hugo a l'envergure d'un constructeur de mythes. Justement (sans doute) du fait de l'apparente naïveté de ses créatures.

Bon, je continue...

J'ai terminé... à force ça lasse... le souffle devient monotone et j'ai sauté des pages.

Il en fait trop, trop de digressions. Vaste esprit certes, mais un peu trop monsieur-je-sais-tout. Je me suis dit en passant qu'il ne devait pas être rigolo pour les femmes de sa vie... Et puis "L'homme qui rit" ne vaut pas Notre-Dame de Paris. Points communs : fascination pour la difformité, les grandes fresques, et le mal. Mais là où j'ai senti Frollo vibrer dans Notre Dame, je n'ai pas ressenti d'émotion dans "L'homme-qui-rit".
Quant au fond, celui qui importait vraiment à Hugo, il s'agit d'un plaidoyer contre la monarchie et pour la République. Intérêt historique sans doute, quoiqu'on dise que l'histoire ait été par lui un peu malmenée, mais cela importe-t-il ? Foin de l'anecdote, vive la substantifique moëlle !

Mais lourd, lourd ... plutôt plat en sauce que régime méditerranéen.

Fini ... je vais pouvoir passer à du léger...

Dostoïevski, tiens ! -;
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Un enfant abandonné sur les côtes anglaises est recueilli par un saltimbanque philosophe.

Sur 860 pages, on aurait pu en supprimer presque 600. C'est bourré de digressions plus longues les unes que les autres sur tout et n'importe quoi. Par ex, un navire est pris dans une tempête, et bien on a droit à un cours sur les vents, tempêtes et vagues; une leçon sur le genre de bateau comparé à d'autres; la liste de tous les récifs de la côte; des considérations sur les naufrages et le droit de prise, sur les bouteilles à la mer, etc. Il est question de la chambre des Lords, aussitôt on a plusieurs chapitres sur l'histoire du Parlement anglais, son cérémonial, ses membres, ses compétences. Et ainsi de suite.

La construction de l'intrigue rend en plus l'histoire hyper prévisible et la fin est bâclée en plus d'être niaise. Restent la plume d'Hugo, souvent sarcastique, et quelques thèmes intéressants, que l'auteur a déguisés sous forme d'un récit historique pour critiquer le système politique et social de son époque.

Je regrette de m'être accrochée jusqu'au bout, je me suis ennuyée à mourir la plupart du temps. Dommage, j'en attendais beaucoup (sûrement trop).
Lien : https://bienvenueducotedeche..
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Flaubert écrivait : "On peut juger de la beauté d'un livre à la vigueur des coups de poing qu'il vous a donnés et à la longueur du temps qu'on met ensuite à en revenir."

Chaque chapitre de ce roman possède la force visuelle d'un tableau et la puissance poétique de Victor Hugo.
L'ensemble fonctionne comme une fresque à la teinte à la fois réaliste et romantique. le drame de Gwynplaine est d avoir été capturé par les Comprachicos qui l'ont défiguré de telle sorte que personne puisse le reconnaître. Et pourtant, sa plus grande souffrance n'est pas le souvenir de cette mutilation mais ses conséquences : lorsqu'il pleure, son visage semble sourire de manière grotesque, il est moqué, marginalisé et sa "monstruosité" terrifie. le contraste puissant entre ses sentiments et son apparence, entre intérieur et extérieur, est d'une extrême violence.
Ceux qui deviendront ses amis, sa famille ne peuvent être que Dea, une jeune fille aveugle qu'il a sauvé lorsqu'elle était encore nourrisson, et Ursus et Homo dont le tandem fonctionne comme un miroir inversé puisque Homo est un chien tandis qu'Ursus est un homme.

Cela fait quatre ans que j'ai lu ce roman et j'y repense très souvent, les images teintées d'onirisme qu'il a fait naître dans mon imagination s'imposent à moi avec la régularité du balancier d'une pendule.
L'homme qui rit n'a rien à envier aux romans les plus célèbres de Hugo.
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L'Homme qui rit est un conte cruel, pour reprendre le fameux titre d'un recueil de L'Isle-Adam, qui se déroule dans l'Angleterre du début du XVIIIe siècle. C'est d'abord une rencontre entre deux malheurs : Dea, jeune fille aveugle, les yeux gelés lorsque, bébé et accrochée au sein de sa mère décédée, elle fut découverte dans la neige par Gwynplaine, un garçon défiguré, pour une raison qu'il serait évidemment malvenue d'expliquer ici. Ce dernier est donc affublé d'un rire perpétuel, d'où le titre du roman. Les malheurs de ces deux-là sont heureusement tempérés par la sagesse de celui qui les recueille et les élève : Ursus, un saltimbanque plein de sagesse. Hélas, un saltimbanque ne peut pas tout…
Ce roman d'Hugo porte aussi, et surtout, en lui une conscience morale et politique, qui confronte le monde de la misère à celui de l'opulence, lequel trône avec un superbe mépris pour ceux d'en bas. Parmi cette caste des dominants, se déploie la splendide et vénéneuse duchesse Josiane, créature sans foi ni loi sinon la sienne, exact opposé de Dea.
Tout est d'ailleurs opposition dans cette oeuvre excessive d'Hugo, comme si les digues s'étaient rompues et que l'auteur ne pouvait plus contenir ce flot exacerbé de révolte qui l'assaille depuis tant d'années. L'Homme qui rit, c'est l'antithèse des Misérables, dont le drame tendait vers la rédemption. Ici, tout n'est que cataclysme, avec une apothéose finale aussi tragique qu'injuste.
Le monde de L'Homme qui rit ne vaut rien de bon, est-on tenté de penser en cédant au même désespoir que Gwynplaine, qui s'exprime en ces termes devant un aréopage de lords : « Ce que je viens faire ici ? Je viens être terrible. Je suis un monstre, dites-vous. Non, je suis le peuple. Je suis une exception ? Non, je suis tout le monde. L'exception, c'est vous. Vous êtes la chimère, et je suis la réalité. Je suis l'Homme. Je suis l'effrayant Homme qui Rit. Qui rit de quoi ? de vous. de lui. de tout. Qu'est-ce que son rire ? Votre crime, et son supplice. Ce crime, il vous le jette à la face ; ce supplice, il vous le crache au visage. Je ris, cela veut dire : Je pleure. »
Pourquoi cruel, comme je l'ai écrit plus haut ? Parce que ce roman nous donne et nous reprend sans nous laisser le moindre espoir. La pureté de Dea et l'humanité profonde de Gwynplaine ne sont pas de taille à lutter contre la soif du pouvoir, qui jonche le sol de ses victimes avec délectation. Et nous en connaissons bien d'autres des Dea et des Gwynplaine !
Le 22 mai 1868, Hugo écrivit ceci à propos de son livre: « Dans l'intention de l'auteur, ce livre est un drame. le Drame de l'Âme. D'une part ce monstre, la matière, la chair, la lange, l'écume, le dénuement, la faim, la soif, l'opulence, la puissance, la force, l'infirmité, la mutilation, l'esclavage, l'affront, la chaîne, le supplice, la souffrance, la jouissance, la pesanteur, la gravitation, l'évolution sociale et humaine ; de l'autre ce lutteur, l'Esprit. »
Tout est dit…

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Il ne faut pas tourner autour du pot: nous sommes là face à un sommet de la littérature. Hugo nous conduit dans une histoire, un peu folle et fantastique, qui lui permet d'exprimer tout son art de l'écriture et de la construction romanesque. Et aussi et surtout: de décrire par le menu, avec une justesse et une précision redoutables, les forces et les faiblesses de la nature humaine. Quel observateur, ce Hugo, comment a-t'il compris tout cela en une seule vie, pour nous le restituer sous une forme aussi magistrale? Le personnage principal, le jeune Gwynplaine, défiguré dans son enfance pour pouvoir être exhibé dans les foires (!), est malin, sensible, presqu'optimiste, jamais revanchard. La magnifique Déa, jeune fille aveugle, a une beauté intérieure qui nous émeut à chaque page. Et le rustre Ursus, philosophe de foire, cache sous sa rudesse apparente une humanité désintéressée (qui l'a conduit à les sauver, puis à les éduquer, tous les deux). Il y a même un loup, curieusement nommé Homo, qui est là, on ne sait pourquoi. Son rôle sera pourtant décisif, à la fin. Evidemment, nous sommes chez Hugo: il faut mériter tout cela, et lire plus de 700 pages pour savourer la force de ce récit. On en reste saisi par un souffle incomparable: celui d'un des tout meilleurs écrivains Français.
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Comparée à sa production poétique (plus d'une vingtaine de recueils, dont au moins trois chefs-d'oeuvre absolus : « Les Châtiments », « Les Contemplations », « La Légende des siècles »), la production romanesque de Victor Hugo apparaît plus légère : seulement neuf romans : deux romans de jeunesse (« Bug-Jargal » et « Han d'Islande »), deux romans didactiques (« Claude Gueux » et « le dernier jour d'un condamné »), deux chefs-d'oeuvre absolus (« Notre-Dame de Paris » et « Les Misérables ») et enfin trois « grands romans » (« Les Travailleurs de la Mer », « L'Homme qui rit » et « Quatre-vingt-treize »).
Dans la plupart de ces romans, les lecteurs et lectrices attentifs et attentives (et je sais que vous l'êtes) auront remarqué la place importante qu'y tient l'Histoire : histoire contemporaine ou récente, ou bien plus ancienne.
« L'Homme qui rit » place son intrigue dans le XVIIIème siècle anglais. le choix de l'époque n'est pas innocent : En 1869, date de sortie du roman, la France est encore (mais plus pour longtemps) sous la botte de Napoléon III. Victor Hugo tient à dénoncer un pouvoir arbitraire, écrasant de richesse, et impitoyable pour les pauvres et les faibles. le XVIIIème siècle anglais est l'image même d'une noblesse oisive et insensible au peuple, et d'un peuple misérable mais qui accepte sa misère et cherche son « divertissement » dans le rire, fût-il à ses dépens. C'est l'un des thèmes exposés par l'auteur.
Mais il y en a d'autres : « Si l'on demande à l'auteur de ce livre pourquoi il a écrit « L'homme qui rit », il répondra que philosophe, il a voulu affirmer l'âme et la conscience, qu'historien, il a voulu révéler des faits monarchiques peu connus et renseigner la démocratie, et que, poète, il a voulu faire un drame (ébauche de préface - 22 mai 1868 - Choses vues) ».
Quand on lit « L'Homme qui rit », deux impressions viennent immédiatement à l'esprit : une érudition touffue, parfois bien venue, mais aussi parfois un peu lourde (on l'a vu dans d'autres ouvrages, y compris dans les meilleurs), et surtout un jeu permanent sur les contrastes, les antinomies, les contraires, les oppositions. On se souvient que dans les manifestes du Romantisme, l'alliance du grotesque et du sublime venait en bonne place. « L'Homme qui rit » en est l'illustration. Les infirmités physiques cachent des bontés d'âme : Gwynplaine, défiguré, et Déa, aveugle, sont des modèles de bonté et de pureté. En revanche Josiane sous une beauté éblouissante cache une noirceur de démone. La plupart des personnages ne sont pas ce qu'ils prétendent être. L'auteur joue même le paradoxe jusqu'à inverser l'homme et le loup : le loup qui a un nom d'homme (Homo) et l'homme qui a un nom d'animal (Ursus = ours, il aurait pu l'appeler Lupus).
L'histoire elle-même, débarrassée de toutes les considérations historiques et philosophiques, pourrait être celle d'un roman-feuilleton classique : on apprend que Gwynplaine, l'enfant abandonné et défiguré est en fait le fils et héritier d'un lord, et le roman bascule alors dans un mélo conventionnel.
Un grand roman, donc, pour son propos, et pour la façon dont Hugo le présente. Mais assez difficile à lire si on ne se résout pas, de temps à autres, à sauter quelques paragraphes, ou même quelques pages, plutôt indigestes.
Cela dit, cela reste du Victor Hugo. Dans Victor Hugo, comme dans le cochon, tout est bon. Cochon qui s'en dédit.
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De la plèbe à la seigneurie.
Lu il y a des décennies je ne l'avais jamais relu, contrairement à d'autres Hugo. Ce qui frappe dès les premières lignes : l'érudition étayée par l'abondance des mots, ce vocabulaire riche en permanence et également le plaidoyer politique prégnant.
Une densité qui s'inscrit dans trois principaux registres : le descriptif, l'analytique et le digressif.
Pour savourer il faut prendre le temps, c'est une richesse qui se mérite, qui vous imprègne.
Nous sommes en 1690 en Angleterre, l'histoire se déroule de la fin du XVIIe et le début du XVIIIe.
Nous découvrons Ursus et Homo, l'homme Ursus médecin, bonimenteur vivant dans une roulotte et le loup Homo. Clin d'oeil à Diogène et son mépris des honneurs et des convenances sociales.
« L'école de Salerne dit : « Mangez peu et souvent ». Ursus mangeait peu et rarement ; obéissant ainsi à une moitié du précepte et désobéissant à l'autre ; mais c'est la faute du public, qui n'affluait pas toujours et n'achetait pas fréquemment. »
Après Ursus et son compagnon, les lecteurs rencontrent Gwynplaine, un enfant d'environ dix ans qui est refoulé lors de l'embarquement d'hommes fuyant en bateau.
Il va errer, désorienté il cherche la ville la plus proche, la neige a tout envahi et il entend un cri. Après des recherche il trouve une femme morte, un bébé accroché à son sein gelé. Il n'hésite pas a sauvé cette petite fille. Il arrive en ville, mais les portes ne s'ouvrent pas.
Seul Ursus répondra à son désespoir.
Nous découvrons que les hommes qui s'enfuyaient sont des Comprachicos, entendez des « achète-petits » pour quelques pièces ils achetaient des enfants, qu'ils mutilaient afin d'en faire commerce, pour faire rire en général.
« Cela faisait des êtres dont la loi d'existence était monstrueusement simple : permission de souffrir, ordre d'amuser. »
Les deux chapitres préliminaires sont denses et passionnants pour planter le décor. Ils sollicitent la réflexion sur ce trafic d'enfants, ces mutilations, il y a un passage sur la fabrication de nains en Chine qui est impressionnant.
Puis il y a eu l'Habeas Corpus, cette loi a eu pour effet le « délaissement d'enfants ».
Ursus, Gwynplaine et la petite Dea qui est aveugle vont former une famille recomposée.
Gwynplaine fait partie de ces enfants mutilés, on lui a fendu la bouche jusqu'aux oreilles afin de lui faire un rire permanent.
Il y a d'autre personnage, notamment celui d'une femme fatale Josiane, soeur de la reine Anne.
C'est foisonnant, la profusion lassera probablement plus d'un lecteur contemporain, personnellement je suis plutôt éblouie par cette abondance érudite dans de multiples domaines de l'architecture à l'écologie avant l'heure.
Victor Hugo approfondit par de multiples détails, la route qui va le conduire vers l'analyse sociale, la conscience politique, thèmes qui lui sont chers.
Il y a l'histoire d'amour entre ces deux enfants, Dea voit avec son âme.
Quinze ans après nous découvrons que Ursus a créé un spectacle avec Gwynplaine Chaos Vaincu qu'ils vont présenter à Londres, Ursus est mis en cause pour sédition. Sa défense est juste aussi troublante qu'hilarante.
Ce qui faire dire à Hugo :
« le jugement, c'est le relatif. La justice c'est l'absolu. Réfléchissez à la différence entre un juge et un juste. »
N'est-ce pas toujours d'actualité ?
Gwynplaine sera arrêté et enfermé dans une prison souterraine. Là il apprendra ses origines.
Dans le discours, nous retrouvons Hugo défenseur des misérables dans une de ses plus belles diatribes.
Je ne vous raconterai rien d'autre.
Le talent de dramaturge de l'auteur est à son point culminant.
C'est le livre le plus « trop », l'excès, la vigueur, la critique sociale tout y est hors normes.
Publié en avril 1869, L'Homme qui rit devait être le premier volume d'une trilogie politique. Mais finalement ce fut un diptyque et je vais donc lire Quatrevingt-treize.
Hugo c'est une oeuvre foisonnante où la réflexion du lecteur est sollicitée en permanence et je ne m'en lasse pas.
©Chantal Lafon

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Dans l'Angleterre de la fin du 17ème siècle, un enfant est enlevé, torturé et défiguré par les comprachicos. Il s'appelle Gwynplaine. Abandonné à dix ans, il survit à une tempête de neige, après avoir sauvé une petite fille aveugle , Dea, qui deviendra son âme soeur et l'amour de sa vie. Tous deux sont recueillis par Ursus, un vieux saltimbanque qui vit dans une roulotte, avec pour seul compagnon, le loup Homo. Sur les planches, Gwinplaine devient « L'Homme qui Rit »…
A l'image de son personnage principal, l'Homme qui Rit est un roman monstrueux et grandiose car Victor Hugo y déchaîne tout son génie littéraire, sans mesure ni limites. C'est à la fois un texte historique, philosophique, poétique et romanesque où se mêlent érudition et émotion pure. C'est la description , la dissection, d'une société malade où l'aristocratie assassine le peuple. Un peuple incarné par L'Homme qui Rit, l'homme qui souffre derrière le masque, l'homme bon, pur et sacrifié.
Oeuvre à lire pour apprendre, pour vibrer, pour écouter Hugo, tout simplement.
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Allez … Un petit résumé ? Dans l'Angleterre du XVIIème siècle, un saltimbanque que tout le monde appelle par son sobriquet fait particulièrement sensation : l'Homme qui Rit. En effet, son visage a été transformé et remodelé dans sa prime enfance pour qu'un sinistre rictus laboure son visage d'une oreille à une autre. Sa vue inspire un sentiment étrange entre le dégoût et l'attirance. Et avec un tel faciès, on ne peut devenir qu'un phénomène de foire et au mieux un saltimbanque. Autour de lui gravitent également Ursus le chef de troupe et Dea, jeune femme aveugle ainsi que le loup Homo. Les personnages sont en place, maintenant laissez-faire Hugo pour vous amener dans une histoire riche aux multiples rebondissements …
A lire L'homme qui rit, j'ai eu l'impression d'avoir une lecture en technicolor. En effet, à l'instar des plus grands westerns, Hugo nous régale de descriptions en plan large de paysages de lande sous la lune, de mer déchaînée, de dédales de rues de Londres… de longs paragraphes et même des chapitres y sont consacrés et donc dépourvus de toute action. Loin de nuire à la narration, ces longs passages descriptifs permettent au lecteur de s'imprégner au mieux de l'atmosphère et de savourer d'autant plus le feu de l'action qui suit. Car il y a de l'action, apportant son lot de rebondissement. Mais ses plus belles envolées lyriques, c'est bien dans la critique sociale que Hugo la déploie. On se délecte à égrener ce collier aux perles belles et brillantes de citations, c'est un vrai régal !
A conseiller sans restriction, surtout les deux premières parties particulièrement époustouflantes relatant la fuite dans la lande en neige et le naufrage dans une mer déchaînée.
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À Londres, tout le monde connait Gwynplaine, "L'homme qui rit". Pas un homme qui n'ait entendu son nom, pas une femme qui n'ait ri et frémi à la vision de son terrible visage figé dans une grimace hilare et convulsive, pas un badaud qui ne se soit précipité pour assister à son spectacle… À lui seul, il fait la joie de la capitale et la fortune des hôteliers ! le destin de Gwynplaine n'a pourtant rien de réjouissant : enlevé dès son plus jeune âge, il a été défiguré afin d'esbaudir les foules ignorantes, avant d'être abandonné par ses tourmenteurs. Pourtant "l'homme qui rit" est un homme heureux : pour compenser la malveillance de l'humanité, la providence lui a offert un merveilleux cadeau, Déa, une jeune aveugle qu'il a sauvé des neiges quand elle n'était qu'un nourrisson et qui lui voue depuis un amour pur et profond.

Gwynplaine aime Déa. Déa aime Gwynplaine. Tout irait donc au mieux dans le meilleur des mondes, si ce n'était le destin malin qui – grandement aidé par le sadisme des uns et la haine des autres – bouleversera tout ce bel arrangement. Car Gwynplaine n'est pas pauvre, ni manant, mais pair d'Angleterre ! Fils d'un noble républicain, son héritage lui a été arraché bien des années auparavant par la vindicte royale. Mais voilà que cet héritage lui est soudain rendu et avec lui, titre, honneur, fortune, pouvoir, responsabilité… Gwynplaine va devoir faire un choix : conserver le bonheur simple de sa vie passée ou se risquer parmi ses égaux à la cour royale, véritable jungle où lords et duchesses, pareils à de grands fauves capricieux, profitent en esthètes du spectacle de la misère d'autrui.

Ouf…Voici encore un livre qui n'a pas été une mince affaire à terminer : puissant, complexe, sombre, parsemé de digressions labyrinthiques (la marque de fabrique de l'auteur, on ne peut y échapper)… Un livre qui demande du temps, de l'endurance, mais n'en vaut pas moins le coup d'oeil pour autant. Malgré quelques longueurs et une tendance à l'énumération fastidieuse dans certains passages, "L'homme qui rit" n'en reste pas moins un roman tout à fait fascinant à lire : roman d'amour, d'accord (et j'avoue que ce n'est pas la partie qui m'a le plus emballée), mais surtout palpitant roman historique et satire au vitriol de la monarchie anglaise ! Avec un sens de l'humour ravageur, Hugo s'y livre à un passage à tabac en règle de la royauté et de ses multiples excès, opposant la perversité de la cour à la misère du peuple. Schéma un peu manichéen ? Peut-être. Mais quand c'est dit avec autant d'esprit, de compassion et d'humanité, on aurait des scrupules à cracher dans la soupe.

Comme généralement chez Hugo, tous les personnages, y compris les plus secondaires, sont merveilleusement typés. Parfois malveillants, crétins ou hypocrites, ils n'en conservent pas moins une désarmante humanité qui nous poussent – à défaut de les aimer tous – à tenter du moins de les comprendre. J'avoue un très gros faible pour le vieil Ursus, philosophe ambulant au tempérament bourru et flanqué pour seul compagnon d'un loup famélique, Homo : un personnage selon mon coeur, cachant sa bonté sous des dehors misanthropiques et vociférants. Mais j'aime aussi la belle et sensuelle Lady Josiane, Lord David Dirry-Moir, ainsi que l'immonde traitre Barkilphedro (que voulez-vous, il en faut toujours un. Il a même le nom de l'emploi, le pauvre bougre…) Tant de portraits inoubliable tracés avec aisance et d'une plume toujours magnifique !

Gros bémol, tout de même : j'avoue être restée complètement hermétique à l'histoire d'amour centrale. À force de pureté et d'angélisme, la passion qui unit Gwynplaine à Déa en devient vaguement insipide et l'extrême pathos de leur relation finirait presque par arracher un sourire, à défaut des larmes attendues. de même, j'avoue que la manie de Hugo d'opposer systématiquement amour et sensualité a fini par me taper un peu sur les nerfs (tendance que je n'avais pas noté à ce point dans les romans de cet auteur lus précédemment). On finirait par croire que désirer sexuellement sa compagne est le plus grand crime qu'un jeune homme en bonne santé puisse commettre… Heureusement, "l'homme qui rit" ne se résume pas à cela et mon plaisir n'en a pas été gâché pour autant. Un fort beau classique à découvrir et à redécouvrir !
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