AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,8

sur 191 notes
5
8 avis
4
6 avis
3
4 avis
2
1 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
« Les variations Goldberg » avec à la baguette Nancy Huston. Affiche au combien alléchante. Un soir d'été une jeune virtuose du clavecin offre à un cercle d'amis ce moment de grâce. Nancy Huston pénètre dans le cerveau de chacun au rythme des fameuses variations. La musique adoucit les moeurs, l'écriture talentueuse de la canadienne aussi. Finesse, intelligence, cette parenthèse enchantée est un vrai bonheur de lecture. Et histoire de prolonger le plaisir , on s'octroie le droit de prendre un trente et unième siège pour écouter la musicalité du texte sur la partition de Bach. Un peu de douceur dans ce monde de brutes. Merci Madame Huston.
Commenter  J’apprécie          720
Il est toujours étonnant d'entendre ses voisins de travée étouffer une bonne grosse toux dès que la lumière s'éteint dans la salle. Au théâtre, au concert, dès que les conversations cessent, le corps prend sa revanche : alors même qu'on s'apprête à célébrer l'Art et l'Absolu, voilà le grattement de gorge qui s'immisce.
Et quand bien même nous pourrions oublier nos narines qui picotent ou nos genoux qui atteignent presque notre menton (les places n'étaient pas chères, on aurait dû se méfier), en écoutons-nous pour autant les interprètes en frac ou robes longues pour qui nous faisons silence ? Bien sûr que non. La musique ne sert que de bruits de fond à nos pensées, des plus triviales (« Les Quatre Saisons », ah oui, faut que je rappelle Pôle emploi) aux plus cruelles (Ça lui fait quel âge, maintenant, à la mezzo ?) en passant surtout par un stream of consciousness carabiné qui nous emporte des dernières vacances ( con allegrezza) aux prochains motifs d'engueulade (rinforzando).
Nancy Huston s'immisce dans la tête de 30 spectateurs (et une claveciniste) et de cette forme un peu futile, c'est tout ce qui reste des variations Goldberg. La musique comme passe-temps. « Et est-ce qu'ils se rendent compte qu'ils vieillissent en m'écoutant ? » se demande l'interprète. La musique pour ne pas s'avouer qu'on n'a rien à se dire. « Vite ! la radio. Un peu de reggae. Ça nous remet ensemble. On risquait de partir chacun dans sa parano privée. Maintenant on peut taper du pied ensemble, ça montre qu'on est sur la même longueur d'onde. ». La musique pour se la péter. « La musique, c'est la fuite chic […] Tu peux prendre un air pénétré, ajuster ton corps dans la position numéro 52 dite de Béatitude esthétique, puis te payer une heure de fantaisies gratis et bye-bye Bach. » La musique pour s'endormir. « le silence a été maté, et je suis comme pulvérisé par la musique. Si je parviens à prolonger cet état encore quelques minutes, le temps de me déshabiller, de mettre mon pyjama, d'accrocher mes vêtements dans l'armoire et de me laver les dents, je tomberai enfin dans un sommeil de plomb. » La musique pour civiliser notre sauvagerie. « Les filles qui pleurent, les garçons qui rêvent d'être Mick Jagger ; les milliers de spectateurs qui se piétinent pour arriver plus près de la scène, plus près des cinq corps fétiches, si bien que ces corps doivent être entourés et protégés par une douzaine d'autres corps d'hommes forts, sans quoi la foule arracherait aux musiciens leurs chemises, leurs pantalons, leurs instruments, leurs chaussettes et leurs cheveux : la volonté de destruction inhérente à ces soirées ne pourrait plus être contenue. » La musique parce qu'il est bon d'y être sensible. « Je pleure parce que c'est beau ! Mais qui t'a dit que c'était beau ? N'est-ce pas parce que tu connais les noms de Bach et d'Oïstrakh que tu penses que ça doit être beau ? » La musique parce que le classique est une histoire de classes. « C'est ainsi que la musique que nous sommes en train d'entendre fut appréciée : par les grandes dames des salons littéraires et leurs amis oisifs, sous des chandeliers et des plafonds peints en or, alors que la grande majorité des Français vivait dans la misère. »
Enfin, ça, c'était avant. Aujourd'hui, il manque une 31° variation qui les engloberait toutes : la musique vivante parce qu'avoir des voisins qui se raclent la gorge, soufflent bruyamment et sont trop grands d'au moins 15 cm, depuis un an, on en rêve tous.
Commenter  J’apprécie          494
Quelle magnifique idée que ces variations…humaines ! Car qui n'a pas eu lors d'une audition, d'une conversation, d'un discours quelconque, son esprit qui partait de manière incontrôlée dans des pensées ou vers des horizons lointains, pour revenir, après quelques secondes d'égarement, vers l'objet duquel son esprit s'était détourné ? Nancy Huston nous fait découvrir, par ce stratagème, trente personnages, trente façons d'être, trente façons d'envisager la vie, l'image de soi, la relation aux autres,… le style est précis, rapide. On est comme dans un film Choral et on en sort enchanté. Un vrai régal.
Commenter  J’apprécie          240
Quelle belle mélodie que celle des mots de Nancy Huston! Tout comme j'avais adoré lire "Dolce Agonia", j'ai beaucoup apprécié "Les variations Goldberg", premier roman de l'auteur, où dans un style un peu différent mais avec la même finesse et une profondeur similaire, elle nous invite à découvrir tour à tour les pensées intimes de quelques humains qui se trouvent, plus ou moins par hasard, réunis ce soir de la Saint-Jean, autour d'un clavecin, pour écouter une amie commune interpréter les variations Goldberg de Bach.

30 variations - 30 invités - 30 tranches de pensées et de vies... le style change au fil du récit, selon le personnage qui pense, mais il reste tout au long puissant et prenant grâce à des phrases courtes et d'une grande force d'évocation. Portés par cette l'écriture belle et dense, les réflexions que les protagonistes partagent avec nous prennent une consistance et une intensité très touchantes.

Alors à quoi pensent-ils ces intellectuels de tous bords, que seul leur amour de la musique et peut-être leur amitié pour l'interprète rassemble ce soir? Ils pensent à la musique bien sûr! A Bach aussi. A l'art et à la culture, et à la place de celle-ci dans notre société. Mais ils pensent aussi à l'amour, à l'amitié, au passé, à la nourriture, au sexe... Quand on se lance dans le libre courant de la pensée, il ne faut pas s'attendre à quelque chose de compacte ni de linéaire, alors quand ce sont 30 personnes qui pensent, on s'imagine bien que ça explose dans tous les sens!

Avec une grande sensibilité et son habituel regard sur la nature humaine, acéré et doux à la fois, Nancy Huston nous offre avec "Les variations Goldberg" un joli petit bijoux d'intelligence. Je vous le recommande chaudement, et vous invite bien entendu à le lire en écoutant les fameuses variations de Bach que le récit épouse parfaitement!
Commenter  J’apprécie          180
J'avais déjà lu trois ou quatre livres de Nancy Huston dont Dolce agonia que j'avais beaucoup aimé pour sa réjouissante cruauté. Amoureux de musique classique (Les Variations Goldberg j'en possède quatre versions sans compter toutes celles que j'ai pu écouter sur You Tube ou en concert...), et sachant que ce titre éponyme était le premier livre de notre canadienne j'en ai commencé la lecture avec un à priori plus que favorable. L'ouvrage a la particularité de calquer l'oeuvre de Bach : trente variations donc trente chapitres. Plus le thème, une aria, qui revient après la trente et unième variation ; la boucle est bouclée. Liliane, claveciniste émérite (pas professionelle mais beaucoup plus qu'amateur) invite trente de ses amis a un petit concert privé. Les trente variations de Bach vont se transformer en trente variations hustoniennes sur chacun des invités. Je dois avouer (je devais être "à l'ouest" comme on ne dit pas chez moi :-) n'avoir pas du tout "embrayé" sur l'histoire. Dés le second chapitre j'ai perdu pied (mais c'est qui celle-là ? qui parle ?), heureusement les chapitres sont courts (on peut les lire le temps que la claveciniste joue une variation...si on lit vite...), et puis je me suis souvenu de Dolce agonia livre dans lequel Nancy Huston avait utilisé une technique semblable : passer chaque invité au scanner , lui faire accoucher ses pensées intimes hors la comédie sociale. Ici les trente invités monologuent loin de la musique de Bach. Comédie sociale, comédie, comédie...si proche de la tragédie pour certains de nos mélomanes d'un soir. Une fois compris le procédé ( même la lecture de la 4e de couverture ne m'avait pas parue très explicite...c'est dire) , je me suis délecté des tranches de vies, si exotiques pour moi, toutes plus ou moins reliées ensemble (c'est ça qui est dur, relier qui à qui ) . Certes, tous ces protagonistes fanfaronnent dans un milieu social bien défini (non, il y a un ouvrier, enfin un artisan, il est menuisier...), mais soyons prince, passons outre....
Et au fur et à mesure que Liliane enchaînait les variations mes impressions premières se sont évaporées : oui ce livre est une réussite magistrale , dès lors que l'on a compris le "procédé". Nancy Huston a composé son livre ,tel Bach, en écrivant trente variations sur un même thème : la difficulté de vivre : " Nous sommes tous au fond d'un enfer dont chaque instant est un miracle" , c'est de Cioran et je trouve que ça s'applique merveilleusement à ce livre et à l'oeuvre de Nancy Huston même si je crois savoir qu'elle n'aime pas trop ce penseur nihiliste....
Une fois terminé ce livre il faut écouter (ré-écouter) les Variations Goldberg. MA version : Zhu-Xiao-Mei. Au piano bien sûr (Liliane ne serait pas d'accord..). Pianiste chinoise qui me fait verser des larmes autant par ce qu'elle joue de Bach que par sa propre vie.
Commenter  J’apprécie          163
Les variations Goldberg/Nancy Huston
Nancy Huston est une écrivaine franco-canadienne née en 1953.
Sa carrière de romancière commence en 1981 par « Les Variations Goldberg ».
Musicienne avertie elle joue du piano, du clavecin et de la flûte et la musique intervient souvent en toile de fond dans ses romans et notamment dans celui-ci.
Le style de ce récit est assez différent de celui plus épuré et allégé de son roman « L'Empreinte de l'Ange » publié en 1998 et que j'ai commenté par ailleurs.
En effet l'auteur use de styles différents selon les variations c'est à dire selon les personnes concernées par cette réflexion.
Il faut reconnaître que Nancy Huston fait preuve d'une belle originalité en utilisant comme canevas de son roman l'aria et les trente variations du chef d'oeuvre de Bach pour nous offrir une mélodie des mots tout en finesse et subtilité qui analyse les pensées des trente personnes réunies autour de ce clavecin qui égrène ses notes dans la nuit de la Saint Jean sous les doigts magiques de Liliane, virtuose reconnue. Un moment où le temps suspend son vol.
Tous les grands thèmes sont abordés, l'art, la culture, la musique, l'amour, le sexe, l'amitié et cette romance s'épanche avec une grande sensibilité.
« La musique est bâtie sur le silence. » Paradoxe, mais vérité essentielle.
« Les Variations Goldberg reprennent non pas la mélodie du thème, mais seulement l'agencement de ses harmonies. »
« Je regarde les gens autour de moi, je me dis : est-ce qu'ils savent seulement qu'ils sont vivants ? »
Cependant l'intérêt des réflexions proposées par l'auteure est inégal : on ne voit pas toujours le rapport avec les Variations de Bach. de tourner trop souvent un avis en dérision finit par lasser.
Certains points de vue sont discutables et il est regrettable que de façon péremptoire Nancy Huston nous assène ses convictions. Ou alors ce sont celles des personnages présents. On ne sait pas. Comme par exemple :
« On est tellement habitué maintenant à la virtuosité qu'on joue Bach à toute vitesse comme si c'était du Chopin ou du Liszt et les pianistes bousillent la polyphonie…Quel scandale, quand même, les gens qui jouent Bach au piano ! » Assurément, Nancy Huston ne semble pas aimer le jeu de Glenn Gould !
En résumé un ouvrage original écrit par quelqu'un qui visiblement aime la musique.


Commenter  J’apprécie          20


Lecteurs (501) Voir plus



Quiz Voir plus

Arts et littérature ...

Quelle romancière publie "Les Hauts de Hurle-vent" en 1847 ?

Charlotte Brontë
Anne Brontë
Emily Brontë

16 questions
1086 lecteurs ont répondu
Thèmes : culture générale , littérature , art , musique , peinture , cinemaCréer un quiz sur ce livre

{* *}