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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
J'ai autant détesté la première partie qu'adoré la seconde partie de ce roman.
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Quels points communs entre Pol Pot, chef des Khmers rouges cambodgiens, et Nancy Huston, autrice franco-canadienne ? A priori aucun. Mais l'autrice retrace l'histoire de Saloth Sâr, qui prendra ensuite le nom de Pol Pot et mettra en place un régime communiste, responsable d'un génocide au Cambodge. Et elle trouve des points communs avec sa propre vie – où plutôt celle de Dorrit, son alter ego littéraire. Jeunesse où ils ne trouvent pas leur place, sourires de façade cachant leur mal-être, études à Paris… A partir de quelques éléments concordants, Nancy Huston tisse des liens entre leurs deux vies.

Utilisant un « tu » très personnel, Nancy Huston nous raconte l'histoire de Saloth Sâr, qui débute dans un Cambodge pauvre et rural, d'abord dans un monastère bouddhiste puis dans une école catholique française – la puissance colonisatrice. Enfant rêveur, il va d'échec en échec, et déçoit sa famille, proche de la famille royale. Il réussit finalement à partir en France, et c'est loin de sa famille qu'il se trouve enfin : il se rapproche des communistes et développe son idéologie qu'il compte mettre en place au Cambodge dès qu'il le peut. On découvre un homme empli de violence et d'excitation sexuelle.

Nancy Huston raconte dans la deuxième partie du livre, l'histoire de Dorrit, jeune fille canadienne qui déménage aux Etats-Unis alors que la guerre au Vietnam fait rage. Coincée dans des relations compliquées avec des hommes plus âgés qu'elle – souvent des professeurs -, elle vit par procuration. Elle sourit mais ne se sent pas à l'aise dans cette vie, elle devient anorexique, écrit mais ne réussit pas à être publiée, et se sent vieille à vingt ans. C'est elle aussi quand elle part pour Paris – qu'elle ne quittera finalement plus – qu'elle se découvre : elle devient féministe et communiste, et contribue à des journaux. Un beau roman, à la limite entre autofiction et exofiction, où récit personnel s'entremêle avec Histoire.
Lien : http://untitledmag.fr/ete-20..
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Excellent récit qui zigzague entre la vie de l'auteure est celle de Pol Pot tout en retombant toujours sur ses pieds.
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Je découvre l'écriture de Nancy Huston avec Lèvres de Pierre et je trouve que c'est une auteure exceptionnelle. Une autobiographie bien différente de toutes celles que j'ai lues (d'accord je n'en ai pas lu beaucoup). Les lèvres de pierre de bouddha partagées par Saloth Sâr et par Dorrit son double littéraire.
La première partie, avec ce tutoiement qui permet de découvrir de l'intérieur la montée en puissance d'un monstre est un récit dynamique et historique.
La seconde, avec la troisième personne du singulier permet de découvrir la vie de l'auteure avec un recul sans apitoiement comme dans bien des (auto)biographies.
Apparaissent alors les troublantes similitudes entre les deux destinées. Nancy Huston signe ici une oeuvre originale, elle apporte une vraie dimension littéraire à son histoire.
Lecture vivement conseillée.
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J'ai entendu dire, il y a longtemps, lors d'un débat télévisé ou bien d'une intervention d'historien, je ne sais plus, à vrai dire, que si Hitler avait été reçu au conservatoire des beaux arts de Vienne, sans doute ne serait-il pas devenu le führer, avec les conséquences qui ont suivi.
C'est une réflexion qui peut s'appliquer à chacun d'entre nous, en réalité. Le hasard, les circonstances influencent le parcours et le destin des êtres.
Réflexion banale en définitive qui laisseraient entendre que ces mêmes hasards et circonstances déterminent nos choix de vie et nos valeurs. Mais lorsque le destin, ainsi modelé fortuitement, est à l'origine de pages d'histoire sanglantes comme toutes les pages de l'Histoire, on peut comprendre que l'on soit tenté de poser la question, même si celle-ci est parfaitement inutile. L'Histoire est l'Histoire, on n'y peut rien changer...
Malgré tout, cette réflexion appelle les interrogations suivantes  : Avons-nous un libre arbitre ? Je crois que oui. Peut-il être influencé par les circonstances ? Je le crois aussi. Avons-nous le choix de nos actes, malgré ces influences  ? Je pense que nous avons toujours le choix.
Pourtant, il y a la Nécessité et, sans doute aussi, des facteurs de surdétermination qui conduisent presque fatalement à une action, à une situation, contraignant, ainsi, l'individu. Cependant, si la Nécessité fait le nécessiteux voleur pour se nourrir, celle-là n'implique pas que celui-ci doive tuer pour voler.
Nancy Houston est une écrivaine qui écrit de magnifiques ouvrages. Avec Les lèvres de pierre, elle nous propose une histoire construite audacieusement  : les destins croisés de Saloth Sâr et de Dorrit, destins façonnés par le hasard et les circonstances.
Je ne sais pas si j'ai bien compris la thèse de l'auteure, mais si le joli et efféminé Sâr n'avait pas été contrarié dans son éducation bouddhiste du monastère du Wat Botum Vaddei, ni continué à subir les vexations familiales suivies d'humiliations coloniales de toute nature, peut-être ne se serait-il pas passionné, lors de son séjour parisien, pour le communisme extrême, celui qui conduit à faire table rase du passé, des livres, de la culture et à moissonner les êtres humains comme le blé.
Malgré ce parcours d'échecs et d'humiliation, il n'y avait aucune nécessité à ce que Sâr devînt Pol Pot et pourtant, à lire Les lèvres de pierre, c'est comme si son destin au sourire du Bouddha avait été tout tracé.
D'un autre côté, plus modestement, à l'époque où la guerre du Viêt-Nam (et du Cambodge) fait rage, Dorrit aborde le sommet de son adolescence (15 ans) dans la gêne financière familiale, avec les frustrations professionnelles paternelles, le départ de sa mère, les déménagements et surtout, subjuguée par ses premiers émois en compagnie de son professeur de littérature de 10 ans son aîné.
La suite de son parcours devient chaotique : violence physique de son amant, source d'un immense traumatisme, quoiqu'elle ait été consentie, expérience éphémère de la prostitution dans un salon de massage pour quelques dollars, afin de payer ses études, propositions d'hommes d'avoir à tenir un bar les seins nus, avances facilement acceptées d'hommes, amants multiples, période d'anorexie pour se conformer au canon masculin, puis, exil.
Exil qui ne dira son nom que plus tard dans le Paris des années 70, post soixante-huitard où elle est immergée dans l'atmosphère et la pensée de la gauche révolutionnaire plutôt pour se montrer à la hauteur de ses fréquentations parisiennes que par conviction, dans un premier temps.
En tout cas cette ambiance contribue à son éducation politique et elle croit être devenue marxiste révolutionnaire. Elle prend conscience néanmoins de sa condition de femme, proie éternelle du mâle alpha, et elle se révolte, par l'écriture, le militantisme féministe, parfois les rencontres saphiques. Le féminisme montre assez que l'homme est parfaitement inutile à la femme.
Voilà donc un parcours dont chaque étape semble résulter de circonstances, mais aussi, d'une certaine fragilité psychologique qui la conduisent à se soumettre aux décisions des mâles alpha qu'elle rencontre. Pourtant, n'avait-elle pas le choix ? Les choses devaient-elles absolument se passer ainsi ?
Vient le moment où elle prend son destin en main, devient, certes, épouse, mère et grand mère, mais surtout une écrivaine à la plume furieuse, acérée, qui lui permet "de torturer, et de tuer, "comme bon lui semble et j'ajouterai, de défendre furieusement les femmes, tout en gardant ce sourire "de pierre", protection dont Sâr ne se départait jamais...
Justement, pourquoi, Sâr ? Quel rapport entre un génocidaire marqueur important de l'histoire du XXème siècle et une écrivaine, certes connue, mais dont la sphère d'influence est sans rapport avec celle de Pol Pot ? Ce qu'elle appelle l'écart !
N'y a t-il donc pas prétention à oser cette comparaison et ce parallèle ? L'auteur s'en explique et se justifie dans les premières pages du livre.
Ce n'est pas la première fois qu'elle écrit des récits à caractère autobiographique (ou autofictionnel comme on dit parfois, ce qui autorise des écarts par rapport à la réalité) ; Dorrit, dit-elle, c'est son alter ego littéraire, le double de Nancy.
Cependant, j'ai le sentiment ici que la difficulté qu'elle énonce, d'avoir à écrire un récit sur ce Cambodge martyrisé, après un voyage sur place a été levée, comme fortuitement, par révélation.
En effet, en étudiant de manière approfondie le parcours de Sâr, de son enfance aux maquis cambodgiens, elle s'aperçoit qu'il y a une certaine convergence, des coïncidences, des points de contact entre le cheminement de celui-ci et celui de Dorrit, à un moment de l'histoire du XXème siècle où les deux êtres accomplissaient leur si différent destin, à la même époque. Il y a là une découverte qui tient presque de la sérendipité.
Voilà donc la justification de la structure du récit dont les pages décrivent les étapes façonnées par les circonstances et qui semblent conduire comme par fatalité à un dénouement toujours provisoire.
En effet, libre arbitre ou détermination, on ne peut nier que chacune de nos décisions à toutes les étapes de notre existence, contribue à donner son caractère singulier à l'édifice humain, jamais achevé, (sinon par la mort) que constitue chaque individu.
Nancy allias Dorrit à la plume merveilleuse. Un très bon
récit !
Pat.




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Une auteure que je ne connaissais pas, ...Pol Pot...Il n'en fallait pas plus pour m'attirer, pour découvrir ce livre : deux destins parallèles mis en page.
Tout d'abord celui de Saloth Sâr, jeune gamin cambodgien, un gamin qui fait pipi au lit, et dont les autres gamins du village se moquent : il a une peau blanche, une peau de fille. Élève dans une école de curés français au Cambodge pour laquelle son frère Suong transfert des fonds pour payer sa scolarité... Parmi ces curés le père Mahé, un curé qui se prend d'affection pour le gamin. Je ne vous en dit pas plus.... le gamin obtient son certificat d'études à 18 ans, enfin... Un âge où l'on n'est plus un gamin. Ce fut laborieux mais suffisant pour permettre une scolarité tout aussi nulle en France afin de passer un diplôme de radioélectricité. Une scolarité qui lui permet de découvrir Paris, le marxisme.
Et puis il y a cette gamine américaine, Dorrit, fille d'un professeur dans un petit lycée du New Hampshire. Un père flirtant avec le milieu hippie, hostile à la guerre du Vietnam, Dorrit autre nom de plume de Nancy Huston
Deux destins mis en parallèle, dans deux parties distinctes du livre. Deux hasards qui m'ont troublé
Comment ne pas être troublé par une certaine forme d'empathie (...oui je sais je vais faire bondir...) face au destin du gamin Saloth Sâr, gamin allant d'échec en échec, sans doute peu doué mais aussi victime des curés...ceci ne pardonne pas cela, loin de là. Empathie qui se transforme en haine quelques pages plus loin quand il devient le sinistre Pol Pot, des pages fortes et terribles...
Indifférence presque face au destin de cette gamine américaine, une parmi des millions, sa vie familiale heurtée...
Parallèle aussi des destins de deux peuples, l'un invente Weigtwatcher, pour retrouver la ligne, l'autre invente la faim pour dresser et punir des opposants, des paysans, dont plus d'un million mourront dans d'atroces souffrances.
Un peuple fabrique des bombes, et des "B-52 (ces monstres volants que leur équipage appelle affectueusement Buff, pour Big Ugly Fat Fucker2)" des sinistres avions qui "ont fait [..] 228 sorties et lâché 25 000 bombes" ..Des bombes qui retomberont sur la tête d'un autre peuple, celui du Cambodge.
Curieux ouvrage, curieux rapprochement qui m'ont à la fois laissé perplexe et intéressé.
Un livre né dans l'esprit de l'auteure à la suite de la contemplation de photos vues sur un livre acheté d'occasion au Cambodge, livre du photographe irlandais Nic Dunlop "The Lost Executioner (Le Bourreau perdu) dans lequel se côtoient deux sourires, celui de Bouddah, et celui de Pol Pot...deux sourires énigmatiques
Mais n'est-ce pas l'une des forces de la littérature et des livres...à la fois nous étonner, nous donner à réfléchir, nous informer...nous surprendre
Alors gardons en mémoire cette phrase de William Shakespeare : “On peut sourire et sourire et pourtant être un scélérat.”
L'histoire nous l'a confirmé.
Et si une partie de l'Histoire était partie du sourire scélérat d'un curé.....?
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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J'ai beaucoup aimé les 2 parties de ce livre: la jeunesse de Pol Pot (partie 1), puis celle de Dorit, l'héroïne et sans doute l'auteure (partie 2). Toujours ce style plein de finesse. J'ai moins compris le parallèle entre les 2 protagonistes mais ce n'est pas très grave. J'ai beaucoup aimé.
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Déconcertant, instructif, terrifiant mais grandement captivant, ce livre m'a happée comme un trou de chasseur sa proie. J'ai aimé la plume, j'ai été un peu dérangée par ce parallèle qui pourtant existe entre ces êtres, l'un monstrueux, l'autre attachant, broyés par ces inégalités qui définissent notre monde. Une belle découverte.
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2 parties : Une sur Pol pot, le Cambodge, la folie du personnage et l'autre sur une jeune femme, Dorrit, américaine activiste, féministe.
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Au cours d'un voyage au Cambodge, l'auteure prend conscience que l'histoire de ce pays la concerne. Impression irrationnelle, diffuse. Mais en 2009 le procès des khmers rouges s'ouvre
et un de ses amis, ethnologue, ancienne victime des khmers, doit y témoigner. Son trouble augmente ; elle sent des liens entre l'histoire de ce tyran, Pol Pot, et elle.

L'auteure entreprend donc de raconter l'enfance et l'adolescence de Pol Pot. Son enfance fut très dure, et à dix ans il connut le monastère avec sa vie faite de soumission et de mutisme, puis un lycée où l'enseignement côtoyait l'érotisme. Il y apprend le français, ce qui lui permettra d'aller à Paris entre 1949 et 1953, où il rejoindra l'effervescence des militants communistes. de retour au Cambodge, toutes ses forces seront jetées dans la révolution khmer, jusqu'à l'année 1975 où l'armée Khmer rouge entre dans Phnom Penh. En trois jours 20 000 cambodgiens sont tués dans l'évacuation de la capitale. C'est le début d'un génocide qui fera 1 million de victimes.

Dans une seconde partie, elle raconte son histoire à elle, jeune bourgeoise canadienne blanche et « bobo ». Quelle ressemblance peut-elle se trouver avec un tyran ? Au fil de sa narration, on comprend mieux quelques similitudes avec le parcours de Pol Pot. Certaines étapes de leur vie sont les mêmes. Leur séjour à Paris par exemple, à l'époque du communisme militant, voire radical. Ils ont écouté les discours de Jean-Paul Sartre, qui les ont, tous les deux, galvanisés.

Alors, où se situe la bascule vers la barbarie ? Quel est le déclencheur ? Pourquoi les uns prennent un chemin et pas un autre, avec pourtant les mêmes idées ? Voici un livre troublant, qui nous fait prendre conscience que la fin ne justifie pas les moyens, mais que l'on peut tout à fait en être ignorant.

Lien : https://blogs.mediapart.fr/a..
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