L’alchimie traditionnelle s’étant, nous le verrons, proposé pour grand but la progressive reconquête intégrale de tous les privilèges jadis perdus par l’homme à la suite de la chute originelle, le retour à l’immortalité glorieuse figurera, tout naturellement, au premier rang de ces magnifiques espoirs. D’ores et déjà — c’est du moins ce que nous affirment les alchimistes sans que nous ayons évidemment les moyens de contrôler scientifiquement la vérité des faits invoqués par eux — il existerait dans le monde des hommes ayant effectivement vaincu la mort physique et qui exercent ici-bas leur mission sacrée dans un corps régénéré, capable de traverser victorieusement les siècles. Le livre d’Artéphius, vieux traité alchimique traduit de l’arabe, nous précise dès la toute première page cette stupéfiante profession de foi : « Moi-même, Artéphius, qui écris ceci, depuis mille ans, ou peu s’en faut, que je suis au monde, par la grâce du seul Dieu tout- puissant et par l’usage de cette admirable quintessence. » Il s’agit du fameux « élixir de longue vie ».
Dans son ouvrage Ignis divinus, le professeur suédois Edsman fait la nécessaire distinction, dans tous les mythes et légendes de totale libération corporelle, entre l’immortalité physique proprement dite, le rajeunissement, la guérison, la résurrection aussi ; et il remarque, fort justement : « Quand on étudie le rôle du feu comme moyen de rajeunissement et d’immortalité ou de divinisation dans les contes, les légendes et les spectacles populaires, il est naturel que la fonction d’immortalisation s’efface : l’homme ne reçoit pas l’immortalité au cours de sa vie terrestre. Il est vrai que sa vie peut se prolonger et se renouveler, mais la mort en sera tôt ou tard la fin. L’acquisition de la jeunesse éternelle, au sens strict de ce terme, présuppose une autre forme d’existence ; ici-bas, il ne peut être question que d’une jeunesse renouvelée . » D’où la belle croyance, si courante dans les diverses traditions religieuses, que la conquête de l’immortalité au sens strict du terme ne sera vraiment possible que par un dépassement total de la condition humaine terrestre telle que nous l’assumons ici-bas. C’est déjà l’idée du surhomme, l’âme illuminée étant d’ailleurs susceptible, lors des expériences mystiques supérieures, de connaître intuitivement et par anticipation imaginative ce que sera son état transfiguré, lorsque la suprême libération corporelle aura enfin été atteinte par l’âme délivrée du corps physique. Voici, par exemple, un magnifique passage de l’Avesta (c’est-à-dire du Livre sacré des Zoroastriens), le vingt-deuxième yasht pour préciser, où nous est décrit le ravissement céleste de l’âme illuminée qui, après avoir perçu un vent parfumé, rencontre son propre « double » céleste, la partie féminine de son être : « Arrivant avec le vent, sa propre daêna se montre à lui dans le corps d’une belle jeune fille rayonnante, aux bras blancs, vigoureuse, bien découplée, magnifique, la poitrine saillante, le corps droit, noble, d’une ligne splendide, l’air d’une enfant de quinze ans, le corps aussi beau que les êtres les plus beaux. »
D’après l’état civil, l’alchimiste Nicolas Flamel mourut à Paris en 1418 ; mais, d’après la tradition hermétique, son enterrement aurait été simulé ; en réalité, il n’aurait fait que rejoindre incognito son épouse Pernelle en Asie, les obsèques de cette dévouée compagne, cinq années auparavant, ayant déjà été un leurre de même farine ! Sous le règne de Louis XIV, le voyageur français Paul Lucas recueillera même en Turquie, de la bouche d’un mystérieux initié musulman, l’étonnant récit que voici : « A Bournous-Bachi, ayant eu un entretien avec le dervis des Usbecs sur la philosophie hermétique, ce Levantin me dit que les vrais philosophes possédaient le secret de prolonger jusqu’à mille ans le terme de leur existence et de se préserver de toutes les maladies. Enfin, je lui parlais de l’illustre Flamel, et je lui dis que, malgré la pierre philosophale, il était mort dans toutes les formes. A ce nom, il se mit à rire de ma simplicité. Comme j’avais presque commencé de le croire sur le reste, j’étais extrêmement étonné de le voir douter de ce que j’avançais. S’étant aperçu de ma surprise, il me demanda sur le même ton si j’étais assez fou pour croire que Flamel fût mort. Non, non, me dit-il, vous vous trompez, Flamel est vivant ; ni lui ni sa femme ne savent encore ce que c’est que la mort. Il n’y a pas trois ans que je les ai laissés l’un et l’autre aux Indes, et c’est un de mes plus fidèles amis. »
Nostradamus ou le prophète en son pays : débat
Tribunal de l'impossible : Débat avec
Michel SUBIELA, le docteur
Gaston FERDIERE (vice-Président de la
société française de l'expression),
Serge HUTIN (écrivain),
Jean-Pierre DUBOIS-DUMEE (journaliste),
André BARBAULT (astrologue) et Michel ROUZÉ (journaliste
scientifique). Peut-on accorder
foi aux célèbres centuries de
Nostradamus ?