Entre ses activités professionnelles et ses responsabilités politiques la vie d 'Alex Kan est bien chargée. Il entrevoit cependant une période plus calme qu'il décide de consacrer à lui seul pour retrouver les sensations passées de la marche et de la solitude.
Il décide de traverser la France à pieds, des Ardennes au Pays Basque. Il le fera seul mais jalonnera son parcours de conférences et alimentera quotidiennement son site internet de photos et de pensées en chemin...
J'ai apprécié les descriptions, les références historiques, et le partage sur les rencontre et la gastronomie locale, les galères sur la route. Outre cela il faut reconnaitre que c'est une belle performance que de parcourir 30 à 40km par jour pendant plusieurs mois d'affilés surtout pour un homme qui a dépassé l'âge de la retraite :)
J'ai par contre moins apprécié les remarques répétées sur le piteux état de l'économie locale et la désertification des campagnes, j'avais parfois l'impression qu'il préparait un thème de campagne éléctorale et ça m'a semblé passablement hors sujet. D'autant plus que traversant la France dans la diagonale du vide, il y avait peu de chance qu'il ait beaucoup de bonnes surprises.
Un bouquin que j'aurai préféré un peu plus détendu mais qui laisse cependant en tête de belles images de la France rurale.
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Il y a à coup sûr 100 façons de marcher: depuis les premiers pas chancelants du bébé, assomption jubilatoire, jusqu'au pas cadencé des soldats martelant la chaussée, depuis le pas pressé du banlieusard courant après son bus aux déambulations rêveuses des amoureux sous les tilleuls, pieds nus sur le sable, en sabots dans les champs, en espadrilles dans un chemin creux, en escarpins sur le bitume, en babouches, en soccoli, en cothurnes, en ballerines....
"Marchons, marchons, qu'un sang impur,
Abreuve nos sillons!" La République se fait en marchant!
Marcher, arpenter, piétiner, frôler le sol, s'y enfoncer, gagner du terrain, rebrousser chemin, être au ras des pâquerettes, dominer le paysage, franchir des précipices, se perdre en route, chercher son chemin, l'homme qui marche reprend possession de son corps, de ses sens, reprend conscience de sa faiblesse, mais la surmonte par le simple fait d'avancer.
Le voyageur à pied se distingue du simple marcheur du quotidien. Il a besoin d'être équipé de pied en cap, de s'orienter, et de réfléchir.
Pourquoi diantre a t-il voulu partir sur les routes? Pour s'amuser? Ou au contraire pour se mortifier? Pour oublier la routine quotidienne? Ou pour se pencher sur son passé? On ne sait ce qui l'emporte du plaisir ou de la souffrance, de l'exaltation ou de la mélancolie, du désir de solitude ou de l'attachement aux êtres chers. Il y a sans aucun doute une nostalgie de l'enfance et d'un passé révolu, de bergères gardant leur troupeaux et de charrettes à foin dans le crépuscule. Notre marcheur parle chaque soir avec sa tablette, mais regrette le son des cloches et le goût des confitures maison. Il cherche à remonter le temps, à retrouver l'odeur des fenaisons, le bruit de la pluie d'orage sur le toit de la grange, la lumière du Chemin de Saint-Jacques pour le guider.
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Axel Kahn, connu pour être généticien, a ressenti le besoin, le moment de la retraite venu, de parcourir à pied la France qu'il aime. Provincial d'origine, il cherche à revoir les scènes de son enfance, et à ressentir les émois intimes résultant de la vue d'un paysage, d'un torrent, d'une biche, d'un clocher lointain. A 69 ans, au printemps 2013, il se lance, seul et à pied, sur un parcours allant du confins des Ardennes à la limite sud-ouest du pays Basque français.
Le récit de son expérience a un fort contenu positif. Tout d'abord, on reconnaît le mérite de celui qui entreprend un tel périple: les "chemins de grande randonnée" ne sont pas des routes départementales: étroits, accidentés, pas toujours très bien entretenus, parfois mal signalés, ils ne cessent d'imposer des détours qui peuvent multiplier par deux la distance à parcourir, et aussi des différences de niveaux multiples et considérables. L'effort à produire est significatif, et nécessite une force mentale, plus encore que physique, extrêmement solide.
A.Kahn aura cette force. De plus, on comprend qu'il sait lire la nature: voir, c'est-à-dire regarder, une fleur, une sculpture dans la pierre du porche d'une maison de village.... A.Khan a cette qualité du marcheur observateur, qui se nourrit de toutes ces choses simples, en lien avec la nature ou avec les beautés que nous ont laissées les hommes du passé. En plus, l'auteur sait écrire. Il intercale opportunément dans son récit et selon l'usage des explications liées aux lieux traversés: liens avec l'histoire, traditions agricoles, etc..... Bref, il sait nous intéresser, ce qui est déjà bien.
A noter ce qui semble être une erreur: à différentes reprises, A.Khan désigne Vézelay comme étant la "colline inspirée" (cf Barrès). Or, la "colline inspirée", c'est la colline de Sion, en Meurthe et Moselle……
A.Khan ne se contente pas de jouir des beautés rencontrées, il est aussi en contact avec les gens du cru. Son périple est préparé, halte par halte, et les sommités locales, tout comme la presse régionale, l'attendent, le soir, bien souvent. Il aura aussi de très nombreux échanges avec ses hôtes d'un soir. Et là, il fera une terrible découverte: la France des campagnes et des villes moyennes est en déshérence. La désindustrialisation l'a tuée. Les hommes et les femmes réagissent: haine des élites parisiennes qui ignorent leur colère, isolement par le refus de suivre l'actualité nationale, mécontentement exprimé lors des élections par des votes de protestation…. Quand on va en province, on croit rencontrer les petits oiseaux, et l'on se trouve face à un peuple perdu, trompé, oublié, méprisé. Cette découverte - qu'il appelle "sécession" - fit fortement chanceler notre marcheur, qui aura l'honnêteté de le dire. Par contre, si l'on est un grand généticien, l'on n'est pas forcément un bon économiste. Et l'analyse que A.Kahn fait des causes des problèmes qu'on lui conte (tout serait dû à la "mondialisation"....) est simpliste. Chacun son métier.
Enfin, ce marcheur est différent des autres. Ceux-là, souvent tout aussi illustres parfois (S.Tesson, JC Rufin, B.Ollivier...), sont des discrets. Ils ne disent rien à personne, et ils partent, ils marchent, et restent seuls. Ce n'est qu'au retour qu'ils écriront. A.Kahn, lui, fait le contraire: ses haltes sont programmées, et annoncés aux échotiers. Il prévoit, dès son départ, de faire en chemin 4 "conférences sur la beauté"…. D'échanger avec des élus, des journalistes, des braves gens,.... le petit peuple de France va pouvoir profiter des idées du grand homme.
Ce marcheur a beaucoup de qualités liées à l'exercice, mais il lui en manque une: l'humilité.
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Un récit sympathique, vivant, intéressé par les hommes et leurs modes de vie,
qui m'a appris beaucoup de petits détails historiques,
et où j'ai retrouvé ces plaisirs si particuliers des longues marches.
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