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EAN : 9782916355849
153 pages
Editions Intervalles (13/06/2013)
4.4/5   10 notes
Résumé :
"Je m'appelle Europe" témoigne de la vie apparemment ordinaire d'un immigré qui s'immerge dans une nouvelle culture. C'est le roman d'une renaissance : découverte d'une autre langue, initiation aux sens cachés derrière les mots et expressions les plus banals, exploration de l'étrangeté fondamentale du statut d'immigré dans une société grecque en proie à de nombreux démons, apprivoisement de l'autre au moment de nouer les premiers liens affectifs dans une nouvelle pa... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Parti sur sa lancée de 2006 avec son ouvrage "Petit journal de bord des frontières" l'auteur albanais a continué, 4 ans plus tard, avec le présent livre édité en Grèce en 2010 et paru en Français en 2013 grâce aux Éditions Intervalles de Paris.
L'auteur, Gazmend Kapllani, sait de quoi il parle, puisqu'à 24 ans, en 1991, il a échangé son paradis marxiste d'Albanie contre la Grèce voisine.
Je me permets de vous rappeler ma critique du 18 janvier de cette année de son premier ouvrage.

Si dans son premier ouvrage le périple pénible du passage de la frontière se trouvait au centre de son récit, son second livre analyse les différents aspects d'une adaptation mentale et humaine à la réalité d'un nouvel État, en l'occurrence donc la Grèce.

Au moment d'écrire cet ouvrage, l'auteur ne pouvait pas prévoir les sérieuses difficultés qui se présenteront à la frontière greco-turque, 3 décennies plus tard à la suite des combats d'Idleb entre troupes turques d'Erdogan et soldats de Bashar al-Assad de Syrie et la politique dubieuse de l'inévitable Poutin qui défend pour des raisons obscures son pote Assad.
Cette situation est d'autant plus scandaleuse lorsqu'on entend la jeune pédiatre, Ammani Ballour, qui pendant 5 ans dans ĺ'hôpital souterrain de la ville de Douma en Syrie a tout fait pour sauver des enfants, victimes des bombardements de l'armée d'Assad.

Les Albanais ne sont guère appréciés chez leurs voisins grecs, qui les considèrent comme des ploucs tout juste bons aux travaux les plus ingrats.
Une façon de se faire moins remarquer et, qui sait, se faire accepter consiste à parler la langue du pays sans le moindre accent étranger. Pour notre auteur cela devient pratiquement une obsession et il est constamment en train d'apprendre du vocabulaire et de la grammaire grecs. Il étudie consciencieusement un manuel grec et lit un roman dans cette langue tout en notant fébrilement des mots et faisant des sacrés efforts de mémorisation. Même des graffitis du genre "La Macédoine est grecque" et "Dehors les Albanais" y passent.

La belle jeune fille "Europe" qu'il a rencontrée à l'université et avec qui il a des rapports très sages au début et après un peu moins, admiré ses efforts linguistiques continus et se réjouit de ses progrès.

Pour illustrer les peines et imprévus des réfugiés, Gazmend Kapllani mentionne le sort de 9 autres "cas" : Rozina qui vient de Téhéran ; Abas de Kaboul ; l'Albanaise Enke Fezolari qui se souvient encore de la visite de Mère Térésa à Tirana ; Nguyen Tang Hui du Vietnam ; Giorgos Koinas originaire de la Canée en Crète qui est passé par la Russie et la Pologne ; Anna qui sort de l'Arménie ; Illias Poulos qui est passé par Paris et Tachkent en Ouzbékistan ; Katerina Barbogia, qui est née à Athènes, mais de père ghanéen et de mère originaire du Kenya ; Andreas qui est né à Paris, mais d'un père qui vient de Kutahya en Anatolie (Turquie).

Autant de vies, autant de sorts différents ou comment Gazmend Kapllani, dans l'espace de peu de pages, réussit à nous brosser un vaste tableau de la misère humaine due à la bêtise humaine.

Enver Tokhti du Xinjiang en Chine raconte à l'auteur que pendant la période dictatoriale et de grande amitié entre Pékin et Tirana, plein de petits Enver naquirent au pays de Mao en honneur au Grand Guide Enver Hoxha. L'Enver chinois précise que rien que dans sa classe à l'école primaire des 18 garçons inscrits, 6 s'appelaient Enver.
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Très bon livre que je pensais être un roman au début de ma lecture en me rendant compte à la fin qu'il s'agit en fait d'un témoignage, ou plutôt de témoignages. Car l'auteur y livre le sien, celui d'un Albanais qui est parti en Grèce au moment de l'effondrement du régime communiste dictatorial d'Enver Hoxha, mais aussi ceux d'autres émigrés venus de partout. Ainsi, l'on découvre le retour de Gazmend en Albanie après de longues années (pour une seule journée) ainsi que des flash backs où il raconte comment se sont déroulés ses débuts en Grèce, combien il a été difficile de s'y faire une place parmi des personnes dont beaucoup détestaient les albanais, de quelle façon il a appris la langue, à la fois dans les livres, à l'université, dans ses conversations parmi les ouvriers ou les passants, et surtout, avec Europe, grecque dont il tombe amoureux, en même temps qu'il tombe amoureux d'une nouvelle langue. Ce qui est intéressant est qu'il livre plusieurs réflexions sur notre façon de voir les choses en fonction de notre langue, ce qu'une langue dit de ceux qui la parlent, ce qu'elle suscite chez des nouveaux locuteurs.
L'histoire d'amour avec Europe suscite aussi la curiosité, nous dévoile quelques tracasseries administratives surmontées ensemble ou des épisodes plus amusants basés sur leurs différences culturelles, bien que selon l'auteur, nul ne ressemble plus à un albanais qu'un grec malgré l'animosité réciproque de ces deux pays.
Les autres témoignages (en italique) sont tout aussi captivant bien que très brefs (et ils ont tous en commun la Grèce, où ils sont arrivés ou bien d'où ils sont partis) : celui d'une iranienne prisonnière des lois islamiques de l'ayatollah Khamenei et qui a dû fuir avec sa famille, celui d'un afghan qui a dû partir en Iran au moment du régime communiste (parce que son père était un opposant) puis qui est revenu en Afghanistan où ils vivent un second cauchemar avec les talibans, avant de partir seul vers la Grèce. Un autre réfugié albanais livre son témoignage de victime du racisme en Grèce durant ses jeunes années avant de rencontrer des gens ouverts au lycée. Un vietnamien qui a vécu la guerre civile entre Nord et Sud et qui a trouvé refuge à Rhodes où il a tout fait pour s'adapter aux nouvelles coutumes. Un Grec, lui, est parti en Russie, il avait besoin d'évasion et de quitter son pays jugé très chauvin pour en découvrir un autre, et qui jette un regard neuf et critique sur la Grèce lorsqu'il y revient. le pire témoignage est celui d'Anna, arménienne victime d'esclavage moderne en Grèce. Un autre est un réfugié grec ayant gagné l'Albanie suite à la guerre civile en Grèce entre communistes et monarchistes, puis revient en Grèce mais au moment de la junte... L'une, ghanéenne, vit un imbroglio administratif sans nom en Grèce alors qu'elle y est née, parce qu'on lui refuse le droit du sol, mais elle ne peut obtenir de passeport de la part du Ghana. Un grec a vécu à Paris puis en Grèce, un turc décide de comprendre le conflit opposant son pays à la Grèce en venant y étudier, et en rejetant tout nationalisme quel qu'il soit...
Un livre éclairant sur les comportements humains et les ressentis des gens , qu'ils soient des immigrés ou des citoyens des pays "d'accueil".
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"Je m'appelle Europe" est un texte fort, empreint de tolérance, d'humanité et de sagesse. L'histoire, largement autobiographique, d'un immigré confronté à la découverte d'une nouvelle culture, à l'apprentissage d'une nouvelle langue. Un récit entre fiction et réalité, des témoignages de migrants venus d'horizons divers jalonnant l'histoire. Un roman qui rappelle également que l'Albanie communiste fut un régime particulièrement autoritaire et totalement isolé du monde... bref, une lecture plutôt recommandée dans la période actuelle, où la haine et le rejet de l'autre ont malheureusement tendance à gagner du terrain.
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Second livre de cet auteur que j'ai littéralement dévoré comme le premier tant ce "roman", plus proche à vrai dire d'un récit documentaire, est saisissant d'actualité et hélas, de vérités dramatiques.
Souvent poignant voire bouleversant mais à lire et faire lire.
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Après le petit guide de bord des frontières écrit quatre années auparavant, Gazmend Kaplani récidive en 2010 avec cet ouvrage. Tout aussi saillant et brillant, ce livre parle toujours de son expérience d'immigré albanais arrivé en Grèce, après avoir passé la frontière en 1991. Il poursuit son oeuvre littéraire en abordant sa rencontre avec la jeune femme "Evropi" en grec ou "Europe" en français. C'est elle qui l'accompagne dans l'apprentissage de la langue grecque, langue qu'il maîtrise admirablement bien avec la version originale que j'ai lu en 2010.

Cet ouvrage parle d'immigration en 40 chapitres mais il mêle surtout le témoignage de 9 personnes d'origine étrangère ayant des parcours de vie originaux. Ils ont tous le point commun des langues et des cultures divergentes. Ils sont tous des immigrés, des étrangers, des réfugiés en Grèce.

Cette lecture, je l'ai appréciée particulièrement lors de mes voyages en train entre la Grèce du Nord et Athènes, alors que les compartiments évoquaient ce cosmopolitisme. Les longues heures du "train bleu" qui regagne la capitale m'ont permis de dévorer ce deuxième ouvrage de l'auteur.

Gazmend fait toujours usage de son humour et son ironie sur la vie et ses analyses.

Il donne surtout un merveilleux hymne pour l'humain, pour la différence, la richesse culturelle, la diversité, le monde et ce melting-pot qui nous environne chaque jour dans les grandes agglomérations.

L'expérience personnelle et ces rencontres argumentent idéalement l'Humain, elles lutent contre ces préjugés et nos idées reçues sur l'autre. Notre regard sur l'immigré est vu sous un autre angle, celui qui le magnifie comme un trésor.

Un livre à lire pour apprécier et retrouver ce qui fait de nous, notre particularité et notre richesse de part nos cultures et nos différences.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Tu comprends que tu es dans les Balkans lorsque tu vois que les musulmans sont des bons buveurs. Parce que c'est le seul endroit au monde où les musulmans boivent plus que les chrétiens.

[...]
Tu es dans les Balkans lorsque tu trouves toujours quelqu’un pour t'ouvrir sa porte et son âme, avant même de connaitre ton nom. [...]
Si un chauffeur de taxi t'arnaque, tu es à coup sûr dans les Balkans. [...]
Tu comprends que tu es dans les Balkans quand tu vois quelqu’un engloutir à s'en faire éclater la panse les spécialités culinaires du pays voisin qui est la bête noire du sien, et se trémousser à en perdre le souffle sur la musique de cet "ennemi national" le plus exécré
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Cela étant, il ne suffit pas de bien maîtriser une langue pour se lancer dans l’écriture. Écrire est à la fois un plaisir et une thérapie. Une joie et un besoin. Pour écrire, il faut avoir le goût du jeu, aimer jouer avec les mots et jongler avec l’intrigue. Avoir envie de s’amuser et de souffrir en même temps. Tu ne te mets pas à écrire sans un certain masochisme. Tu écris parce que tu as confiance en toi et, en même temps, parce que tu doutes de toi.
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Quoi qu’il en soit, il ne m’avait pas échappé que mes camarades de faculté – une partie du moins, pour ne pas généraliser arbitrairement – qui détestaient le mot « capitalisme » raffolaient de ses produits. C’était comme s’ils détestaient le magasin dans lequel ils prenaient un plaisir compulsif à faire leurs courses.
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Pour moi, les ennuis commençaient après Pâques, lorsque je croisais dans mon immeuble des voisins ou des inconnus qui me saluaient par ces mots : « Christ est ressuscité ! » La première fois, pris de court, je répondis avec chaleur : « Merci beaucoup ! Vous aussi ! » Mes interlocuteurs me regardèrent avec cet air étonné et légèrement inquiet que j’affrontais chaque fois qu’on me demandait en quel Dieu je croyais et que je répondais : « en aucun ». Ce genre de regard m’angoissait terriblement.
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« en écrivant dans une langue qui n’est pas la sienne, on recrée et on reconstruit son identité, une identité culturelle. A plus forte raison quad on choisit d’écrire des romans où on peut réinventer l’identité du narrateur…. »
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