« Approchez Mesdames et Messieurs ! Vous aussi, les enfants... Bienvenue dans le monde magique et merveilleux de
Joyland ! Venez visiter la maison de l'horreur, venez découvrir la grande roue, venez jouer et rire avec le chien Howie, venez frémir de peur dans le train fantôme... Vous ne serez pas prêts d'oublier cette journée. »
Intrigué par cette musique qui ressemble à une vieille rengaine un peu désuète, j'ai poussé alors la porte d'une grille rouillée par les âges et je suis entré à mon tour dans l'univers incroyable de
Joyland, attiré par l'odeur de barbes à papa et de popcorns, bousculé par les clameurs et les rires d'enfants.
Le nom de
Joyland s'écrit en lettres de lumière, scintillantes comme la lune décrochée du ciel étoilé, comme une gourmandise sucrée, comme les mistrals gagnants qui pétillent sous la langue.
Joyland, c'est un parc d'attractions comme on n'en fait plus, une ambiance foraine à la papa, il faut dire que nous sommes en 1973, à Heaven's Bay en Caroline du Nord. Longtemps après, le narrateur se souvient de cet été-là...
Dire que j'ai lu ce livre serait mentir. Roulant beaucoup en voiture quand je ne suis pas confiné en télétravail, c'est tout naturellement que l'idée m'est venue d'emprunter la version Audiolib auprès de ma médiathèque préférée et je dois avouer que l'effet a été particulièrement saisissant. J'ai été séduit par la voix d'Aurélien Ringelhein, jeune acteur belge, qui incarne à merveille le narrateur, mais prête aussi sa voix aux multiples personnages du récit, une voix tour à tour chaleureuse, naïve, triste, glaçante...
Au départ, l'histoire semble se dérouler comme une jolie tranche de vie pleine de nostalgie, celle d'un jeune étudiant de vingt-et-un ans, Devin Jones, dont on emprunte les pas avec jubilation. Cet été-là sera le plus bel été de sa vie en tant qu'employé à
Joyland, mais peut-être pour autre chose aussi...
Il y a de la légèreté, il y a de l'insouciance comme un été brûlant gorgé de soleil et d'illusions. Mais il y a aussi une forme d'inquiétude qui naît, grandit au fil du récit, parce qu'on se dit, peut-être après tout, c'est quand même
Stephen King qui est aux manettes et non la
Comtesse de Ségur... Et puis, brusquement on est emporté par le vertige d'une intrigue qui vous chavire, à moins que ce ne soit l'effet de la grande roue ou du train fantôme... Et pour peu qu'un soupçon de surnaturel vienne émoustiller votre adrénaline, vous n'êtes pas loin de croire de nouveau à ces histoires folles qui vous empêchaient, enfant, de trouver le sommeil, obligeait votre mère à laisser la porte de la chambre entrouverte et la lumière du couloir allumée.
En entrant dans cette histoire, c'était aussi pour moi une première incursion dans l'univers étrange, pour ne pas dire inquiétant, des livres de
Stephen King. Bien sûr,
Stephen King je le connaissais pour avoir vu certains films tirés de son oeuvre, notamment le formidable et inoubliable
Shining, mais je n'avais encore jamais rien lu de cet auteur. Je n'étais jusqu'alors pas forcément attiré par ses romans, jusqu'à ce que je découvre un soir d'été sur Babelio la critique pleine d'enthousiasme de mon amie Caroline, une chronique teintée de souvenirs de jeunesse, évoquant un parc d'attractions à taille humaine tout près de Paris, où elle avait travaillé durant tout un été.
Joyland, c'est bien plus qu'un thriller.
Joyland, c'est le charme suranné de ces lieux de notre enfance qu'on croyait hantés par les sortilèges. C'est l'émotion d'un jeune homme dans sa relation à son père, l'apprentissage de la vie, l'été où il devient un homme, sa rencontre et son amitié avec un enfant pas comme les autres qui vient au secours d'un chagrin d'amour...
Devin Jones, j'ai trouvé ce jeune homme incroyablement attachant, amoureux transi, follement épris de la vie, mélancolique aussi...
C'est aussi un roman initiatique, les premières blessures laissées par l'amour, l'innocence qui aborde l'autre versant des choses, l'intuition qui aide parfois à jeter ses pas plus facilement dans l'inconnu. Et puis cela ressemble au mouvement d'un cerf-volant qui continue de planer dans ce ciel blanc longtemps après la fin de l'histoire, comme si on l'avait oublié...
Cette lecture a été un coup de coeur pour tout cela... Merci Caroline.