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sur 690 notes
Le zéro et l'infini est avant tout un livre sur la violence politique. le fonctionnement des dictatures, ces êtres qui font partie de la tête de l'État et qui du jour au lendemain tombent de leur piédestal devant l'ambition de leur semblable. Tout est bon pour condamner et tuer. La justice n'existe pas dans ce monde. Seul le pouvoir compte. Même l'idéologie est dévoyée au nom de ce pouvoir. Un régime dérive vite...

Le "zéro et l'infini" se lit bien, mais dans ce style là (toute proportion gardée évidemment) "La ferme des animaux" m'est bien plus agréable. le langage est différent, les situations aussi, mais le but reste finalement le même. Dénoncer les dérives d'un régime sur l'idéologie, et la difficulté d'exister en son sein quand tu n'es pas le nombre dominant.
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Arthur Koestler a écrit le Zéro et l'Infini de l'été 1938 au printemps 1940. Alors qu'il était parvenu à la moitié, il a été enfermé dans un camp par la police française, qui le suspectait d'être un agent soviétique. Il continua à écrire pendant son internement. Il fut libéré par manque de preuve, mais assigné à résidence à Paris. Dans la France en guerre, il était dangereux de publier un livre. Aussi, sa jeune compagne anglaise, Daphne Hardy, traduisit le manuscrit en anglais, au fur et à mesure de l'écriture, et l'envoya à Londres, où il parut en 1940. Il fut édité et traduit à partir de la version anglaise, en France, par les Éditions Calmann-Lévy, en 1945. le texte original était considéré perdu depuis l'invasion des troupes allemandes. Or, en 2015, Matthias Wessel, un germaniste de Kassel, a découvert la version originale à la Bibliothèque centrale de Zurich. Celle-ci a été publiée en 2018, en Allemagne. En 2022, les Éditions Calmann-Lévy publient le Zéro et l'Infini à partir du manuscrit original, pour la première fois. Une préface de Michael Scammell décrit le contexte du travail de Arthur Koestler, les raisons de sa traduction en anglais et les analyses qui ont été faites de cet ouvrage.


L'exergue indique que « Les personnages de ce roman sont fictifs. Les données historiques qui régissent leur action sont réelles. le destin de l'homme N. S. Roubachov est composé à partir des destins d'un certain nombre d'hommes qui ont été les victimes de ce que l'on a appelé les « procès de Moscou ». Quelques-uns d'entre eux étaient des relations personnelles de l'auteur. C'est à leur mémoire qu'est dédié ce livre.

Paris, mars 1940 »


En effet, même si le pays n'est jamais nommé, nous comprenons très vite que l'histoire se déroule en Union Soviétique et qu'elle est inspirée des purges staliniennes. Elle commence avec l'arrestation de Nicolas Roubachov, accusé de trahison envers le parti. le nom du chef du parti n'est jamais dit, il apparaît sous le nom de « N°1 ». le prisonnier anticipe les prochains évènements : il a lui-même été l'instigateur des méthodes employées par ce régime totalitaire. Son arrivée ne laisse pas indifférents les autres détenus. Même s'ils n'ont pas le droit de communiquer, ils parviennent à le faire en frappant, contre le mur, des messages à l'aide de l'alphabet quadratique.


Roubachov marche dans sa geôle et réfléchit aux éléments qui l'ont conduit à être sacrifié au nom de l'idéologie. Ses déambulations sont interrompues par des interrogatoires, destinés à lui faire avouer n'importe quelle faute qui le conduira à la mort. Privé de sommeil, aveuglé par une lumière, il connaît l'issue de ce simulacre de justice. Les méthodes l'obligent à s'accuser, seule l'Histoire le réhabilitera peut-être. Il avait un rôle important au sein de ce système dans lequel le JE n'existe pas et qui s'est retourné contre lui.


Arthur Koestler était un communiste fervent. Après son arrestation, en 1937, en Espagne, où il a risqué l'exécution, il s'est interrogé sur les procès de personnages importants du parti, qui avaient avoué de crimes qu'ils n'avaient pas commis, au nom desquels ils ont été tués. le Zéro et l'Infini est le fruit de ses réflexions, étoffées par son expérience, il est une dénonciation du régime totalitaire soviétique. Il démontre de quelle manière un peuple se retrouve assujetti à une personne, sans possibilité de se révolter. Il n'est pas seulement une image du passé, mais une partie de l'analyse de celle du présent. C'est un livre puissant sur l'obscurantisme, qui résonne, hélas, encore très fort, aujourd'hui.


Lien : https://valmyvoyoulit.com/20..
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Livre un peu ardu à lire décrivant avec beaucoup de justesse un simulacre de justice sous une dictature… ces 2 mots étant par nature opposés! Les débuts de l'ère soviétique sont évidemment en filigrane derrière ce texte.

Le zéro de l'individu dans un régime totalitaire s'oppose à la vision humaniste dans laquelle l'individu est infini.

L'auteur détaille avec précision cette fiction grammaticale où le 'je ' se perd au profit de la collectivité.

Un livre qui comptera dans mon parcours de lecteur.

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Le roman d'Arthur Koestler, le Zéro et l'infini, écrit en 1940 et paru en 1945 en France fait partie des oeuvres qui ont marqué la deuxième partie du XX ème siècle. Son succès a été immense, quitte à porter de l'ombre au reste de son oeuvre, mais les critiques à son encontre furent également très violentes. Il est vrai qu'Arthur Koestler, dans cette oeuvre, démonte l'escroquerie intellectuelle, à laquelle d'ailleurs l'auteur a participé, du communisme. On imagine l'accueil qu'a reçu ce roman au sortir de la Seconde guerre mondiale, surtout en France, bien sûr de la part des intellectuels du PCF mais également de ses compagnons de route, notamment Simone de Beauvoir. « Renégat » est la plus modérée des épithètes qui lui furent adressées. Il est vrai que la Guerre froide battait son plein et qu'il « fallait choisir son camp, camarade » et une fois choisi, il ne fallait ni l'abandonner ni, surtout le trahir. Il est vrai aussi que ce roman, dont le sujet atteint les sommets du tragique, a aussi quelque chose de la farce de l'arroseur arrosé. Encore aujourd'hui, Arthur Koestler est signalé, parfois, comme un auteur « controversé » notamment à propos de ce roman, comme si L Histoire n'avait pas encore apporté une éclatante confirmation de ses propos.

Malgré tout, le roman d'Arthur Koestler s'est imposé comme une dénonciation du totalitarisme mais l'a-t-on lu avec toute l'attention requise ? Pas toujours, car il s'agit, au-delà d'une dénonciation, du démontage des outils qu'utilisent les totalitarismes.

Roman à clés, également. Assez transparent pour les lecteurs des années 40, beaucoup moins pour les lecteurs des années 20 du 21ème siècle. Aucun nom de la grande histoire n'y est cité, mais les lecteurs comprenaient que le roman avait pour décor l'entre-deux-guerres, la Révolution bolchévique, la Révolution de Novembre manquée en Allemagne et la montée du nazisme, les zigzags stratégiques du Parti communiste de l'URSS, passant de la stratégie  classe contre classe , à la lutte contre les sociaux-traitres au pacte germano-soviétique en passant par la stratégie de front populaire. Inspiré des purges staliniennes (bien que le nom de Staline n'y soit jamais cité), ce roman imagine l'itinéraire d'un dignitaire soviétique, Roubachof, qui, après une carrière d'aparatchik (diplomate, espion, fidèle du Chef et lui-même instructeur des grands procès), est jeté en prison et jugé. Ces purges staliniennes ne concernent donc pas le citoyen moyen mais l'élite communiste, intégrée, par définition dans l'appareil du parti et de l'Etat.

Arthur Koestler décrit les méthodes utilisées par l'appareil d'Etat communiste : travestissement de la réalité, contrôle du discours, manipulation et maîtrise de la pensée. La réalité n'existe pas en dehors du discours autorisé par l'appareil d'Etat. Lui seul décide de la réalité. L'individu doit renoncer à voir ce qu'il voit, à penser seul. Il doit voir le réel à travers ce que lui dit le Parti et ne penser que comme le Parti. En effet ce dernier détient la Vérité grâce à l'outil scientifique du marxisme-léninisme : L Histoire mène les peuples inéluctablement vers le socialisme puis le communisme. Un seul parti est le garant de la meilleure manière d'y parvenir : le parti communiste avant-garde du prolétariat. Donc contredire le parti, c'est ralentir L Histoire. Aucune action, aucune pensée ne peut se justifier en dehors de sa contribution à l'atteinte du but de la Révolution, le communisme. le « Je » n'existe plus, n'a de toute façon aucune valeur, c'est le « nous » soviétique qui prévaut ; autrement dit la fin justifie les moyens.

Roubachov, comme tous les « purgés » des années 30 a consacré sa vie à la Révolution. Et voilà que cette Révolution le broie, l'écrase. Il est désigné comme un ennemi. Il sait que ce dont on l'accuse est faux. Mais l'intérêt du Parti n'est-il pas qu'il reconnaisse les crimes dont on l'accuse ? C'est le dernier service qu'il peut rendre à la Révolution. du moment que cela sert la cause !

Tragédie grecque. Roubachov va-t-il aller au bout de la logique décrite par A. Koestler ? Va-t-il accepter de jouer le jeu et reconnaître ses crimes et apporter un dernier soutien à la Révolution ou va-t-il refuser et dénoncer la supercherie : L Histoire n'est pas encore écrite ?

Probablement un des meilleurs ouvrages d'Arthur Koestler, qui allie profondeur de la pensée à qualité de l'écriture et épaisseur des personnages. Son apport à la compréhension des totalitarismes passés est encore utile aux citoyens d'aujourd'hui pour veiller à tout retour intempestif de ces méthodes, fût-ce dans une version atténuée.

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Encore une fois merci à la boîte à livres parisienne qui m'a permis de découvrir ou redécouvrir ce magnifique ouvrage. La personne qui s'en est débarrassé ne savait pas ce qu'elle faisait. Un état totalitaire. Un parti dominant qui ne supporte pas les opposants ni les mous d'ailleurs. Une prison immense de deux mille politiques. Aucun prisonnier de droit commun. C'est facile à comprendre : si l'on commet une faute de jugement ou une maladresse qui met un grain dans le rouage de l'industrie, on est considéré comme un ennemi du peuple et conduit en prison. Même purge chez les paysans. Sans qu'il soit nommé de quelconque façon, le n°1, c'est Staline. Ivanof, Gletkin sont ses bras droits actuels. Roubachof lui a vieilli. Il appartenait à l'ancienne garde, en temps que commissaire du peuple donc haut placé et se croyant intouchable. Et pourtant ! Un jour, on vient l'arrêter pour le déferrer en prison. Il cherche à comprendre puis se laisse aller et c'en est fini pour lui. Confession. Exécution. C'est un livre très dur. Mais tout l'intérêt réside dans l'argumentation du citoyen Roubachof. Roubachof évoque la Révolution française et dit que Danton et ses amis se sont tout de même vu épargner toute cette comédie. Il lui est répliqué que son Danton et la Convention « n'étaient qu'enfantillages en face de qui est en jeu ici. Ces gens-là portaient des perruques poudrées et déclamaient au sujet de leur honneur personnel. Pour eux, tout ce qui comptait était de mourir avec un beau geste, sans se soucier de savoir si ce geste faisait du bien ou du mal. » Aller toujours plus loin dans le mal.
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Cinquante ans après l'avoir lu, je me souviens de l'escadre de cargos soviétiques qui vient briser une grève, de Roubachof emprisonné, du système qui, obéissant à une logique qui échappe au militant de base, broie dans sa progression infernale les humains et leur enthousiasme (ceci me rappelle « les dieux ont soif », d'A. France, qui se déroule un siècle et demi plus tôt).
J'encourage les jeunes lecteurs à lire ce livre.
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A partir du moment où Dieu se fait homme et partage la condition humaine chaque être humain devient une histoire sacrée. C'est la préoccupation sociale jusqu'à l'infini. le marxisme lénino-stalinien prend l'exact contre pied de cette vision: le parti c'est Dieu, c'est l'infini . L'être humain ne compte plus, il est totalement assujetti au parti, il n'est rien , c'est le zéro.
Dans ce roman écrit à l'origine en allemand sous le titre Sonnenfinsternis que l'on peut traduire par éclipse de soleil, le personnage principal , Roubachof se retrouve incarcéré malgré son dévouement à son parti. L'homme qui l'interroge s'appelle Ivanof. Il est chargé de lui faire avouer son appartenance à un parti clandestin d'opposition. C'est évidemment faux mais on comprend au fil de la lecture du roman que Roubachof a oseé s'interroger ouvertement devant sa secrétaire sur le bien fondé de la politique du parti. Ivanof exerce un chantage laissant entendre que des aveux le sauveront du peloton d'exécution. Roubachof dont les conditions de détention sont très dures, finit par céder. Dès lors, ses conditions s'améliorent mais il apprend l'élimination d'Ivanof et son remplacement par Gletkin. Si vous voulez connaître la fin lisez ce chef d'oeuvre. Car, à l'instar d'un Camus ou d'un Malraux, Koestler ne se contente pas de raconter une histoire qui vous prend aux tripes, il émaille son récit de questions fondamentales.
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Arthur Koestler ressemble beaucoup a St. Paul. Il est le grand apotre du message anti-communiste aûpres des communistes. le zero et l'infini constitue son epitre aux Bolcheviques de l'Ouest. Apres voir milité longtemps dans le parti communiste allemande, Koestler a eu sa revelation de Damas a Moscou lors du process en 1938 qui a traduit en justice les plus important chefs bolcheviques de premiere heure.

Ce process a été un spectacle de creve-coeur. Des hommes qui avaient consacré leurs vie entieres a la cause communiste sont arrives dans des conditions psychologiques tres fragiles au banc des temoins ou il faisaient des aveux completement rocambolesques sur leurs vies passes a saboter le mouvement communiste. Un observateur de la droite tel Fitzroy Maclean a trouve l'affaire riche en comédie. Koestler un communiste engage a été devasté.

Koestler est parti dans l'Ouest avec son message: les victimes de Stalines étaient des bons camarades condamnés a mort par un tyran paranoiaque qui voulait avoir tout le pouvoir à lui seul et qui n'etait plus capable de se fier a qui que ca soit. Son conseil aux communistes de l'oeust c'etait de prendre leurs distances à l'égard du parti controlé par Moscou. Plus on y militait, plus on courait le risqué de subir eventuellement le meme sort que les condamnes de Moscou.

Koestler a été assez charmeur pour imposer son point de vue aupres des intellectuals de la gauche a Paris. Simone de Beauvoir l'a tout de suite cru et l'a vigoreusement appuyé part la suite. Avec Koestler et son roman sur le process de Moscou un lueur de vérité a finallement percé chez les gauchistes de l'Ouest.

Koestler est demeuré en quelque sorte un bon communist. Il n'a jamais encouragé les gens a croire a la famine en Ukraine ou aux Goulags pour les masses. Il déploraient surtout le fait que des bons communistes sont devenus eux aussi des victimes du bourreau Staline. Avec ses revelations il nous a tous rendu un grand service. Cependant, il faut pas oublier qu'il a éte pendant longtemps du cote du bourreau.

De nos jours, on lit le Zero et l'infini parce qu'il raconte l'histoire du process de Moscou et de sess interrogatories (que l'on qualifie de nos jours de sessions de tortures) de facon efficace et directe. C'est un livre essential pour une bonne comprehension d'un des evenements marquants du 20e siècle.
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lu en 2018
Né en Hongrie de famille juive, il sera naturalisé anglais après la guerre. Communiste de 1931 jusqu'en 1938, date des procès de Moscou où Staline a fait exécuter la plupart des bolcheviks de la révolution russe de 1917. Il s'inspire du sujet pour écrire le zéro et l'infini. le zéro : l'homme ; l'infini : l'appareil. le zéro représente alors la place de l'individu au sein de la société communiste russe, l'être humain en tant qu'entité individuelle n'existe pas et doit se sacrifier au bénéfice de la communauté : l'infini. La communauté est tout et l'individu n'est rien. A partir de cettephilosophie, tout est alors excusable, peu importe que certains meurent de faim, peu importe que d'autres soient arrêtés et condamnés arbitrairement, tant que tout cela participe au bien collectif. Référence au livre Crimes et Châtiments de Dostoeivski. La fin justifie les moyens.
Le roman imagine l'itinéraire d'un dignitaire communiste, un de ceux qui ont fait la révolution au côté de Lénine et de Trosky, un de ceux qui pourrait se considérer comme intouchable. Mais Roubachof (lui-même exécuteur à une époque !) est jeté en prison soupçonné de haute trahison, sommé de s'accuser, jugé et fusillé. Difficile d'imaginer la vie à cette époque dans ce milieu où la suspicion et la délation sont la règle, et comment rester communiste chez les intellectuels, en France notamment ?
L'écriture de Koestler est d'une puissance qui nous scotche au texte. Sa grande culture, ses expériences de vie au travers de cette époque "mouvementée" et ses capacités à analyser tout ça et à transmettre honnêtement, font de lui un vrai passeur de l'histoire.


Lien : https://www.babelio.com/conf..
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La problématique de savoir comment de simple numéro on peut échapper aux réquisitoires foudroyants de la machine à penser à notre place préfiguree par la toute puissance que lui confère le pouvoir
Machine à broyer toute identité voulant essayer de se démarquer
la question de la place de l'individu sa problématique culpabilisation dirigée intentionnellement
Un livre abordant sous un angle terrifiant les faits et actes des sociétés des dirigeants notamment outrepassant leur pouvoir pour imposer leur domination parfois au détriment des peuples c.
Puissant réquisitoire en vérité de la liberté, ce livre nous livre comme un cri des libertés bafouées
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