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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Une critique Babelio récente, captée au fil de publication, m'a incité à rouvrir ce petit livre de poche. C'est une pièce de théâtre (dont l'éditeur n'a pas encore pris l'option de changer le titre) ; écrite par l'auteur martiniquais Bernard-Marie Koltès, publiée et mise en scène à plusieurs reprises dans les années 80.

J'en avais un souvenir (version papier) plutôt positif avec l'exploration des dynamiques de pouvoir, les tensions entre les différents personnages, les rapports de force, bref tout ce qui influence les interactions humaines.
Le souvenir d'un langage expressif, imagé, voire réellement poétique.
Ma relecture s'est avérée plus sévère dans son appréciation, je comprends qu'elle puisse déconcerter les lecteurs, au vu de sa densité, de la complexité des interactions, du décodage mal aisé des motivations des personnages.

Peut-être plus facile à recevoir, jouée sur une scène, comme encore récemment au Théâtre de la Bastille je crois. Je n'ai pas eu cette chance.

Elle reste cependant une pièce émotionnellement riche, qui aborde des sujets dont on parle : le colonialisme, la marginalisation, les tensions entre les cultures, au-delà des grands thèmes de la trahison, de la manipulation et de la violence.
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Texte très dur sur le racisme, le colonialisme et l'impérialisme économique des pays développés dans les pays qui le sont moins, même si Koltès indique ne pas avoir voulu faire un livre sur ces thèmes.

Tout dépend de la mise en scène et du jeu des acteurs, bien sûr, mais la pièce offre beaucoup de possibilités.

A découvrir en tout cas. C'est du très bon théâtre.
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Bernard-Marie Koltès a abondamment mis en garde le lecteur/spectateur sur sa pièce. Elle n'est pas bâtie sur les thèmes du néo-colonialisme, du racisme, ou de l'impérialisme... Et pourtant, placer "nègre" dans le titre en l'accolant à chiens... c'est très parlant, déjà. le nègre, c'est Alboury, il vient chercher le corps d'un homme de sa tribu. On apprend vite que celui-ci est mort, abattu par Cal. Cal travaille sur un chantier, mené par une multinationale (qu'on devine française). Il a peur des noirs. Il les déteste, mais par peur. Par défiance. Il a abattu l'homme parce qu'il ne respectait pas les règles et qu'il en avait peur. Ensuite, il a cherché à cacher le corps, à s'en débarrasser par tous les moyens.

Horn, le patron de Cal, est plus pragmatique dans son rapport aux noirs. Il utilise l'alcool, les dollars, les paroles enjôleuses, les contrats tacites. Il parlemente, mais au final le résultat est assez semblable à celui obtenu par Cal.

Arrive Léone, une française qui envisage de se marier avec Horn. Elle ne sait pas trop pourquoi. Mais elle est là, à baragouiner l'allemand à Alboury qui lui répond en Ouolof. Léone a une attitude encore différente vis-à-vis des noirs. Elle s'émerveille de tout. Elle est dans un rapport de séduction, à la limite du raisonnable.

Par ces 3 attitudes "blanches", Koltès joue clairement, même s'il s'en défend, sur le plan du néo-colonialisme et du racisme. Mais on peut percevoir que c'est secondaire dans le propos de Koltès. Cal déteste Horn dès l'instant où il pense que celui-ci va le lâcher. Cal veut posséder Léone. Elle n'accorde à Horn qu'une attention assez faible. Et dès l'instant où il ne peut lui faire entendre raison, Horn remballe Léone en France.

L'essentiel, dès lors, ce sont les rapports humains. L'incompréhension mutuelle. Et la lutte des classes. Koltès ne renie pas un instant son passé de militant communiste et il vient greffer sur les antagonismes des 4 protagonistes une bonne couche de lutte sociale.

Par certains côtés, la pièce m'a fait penser à Coup de Torchon (et au livre de Thompson dont le film est tiré). On retrouve aussi la lenteur pesante, dont le rôle équivaut à celui d'un acteur, d'En Attendant Godot. Les dialogues qui sonnent comme un combat sont très bien réglés. Par contre, j'ai moins accroché aux longs monologues qui ralentissent souvent l'action et font retomber la tension. Un texte qui m'a fortement donné envie de voir la pièce. Savoir que Chéreau a souvent oeuvré pour Koltès fait également partie de cette envie.
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Dans un chantier bientôt démantelé de travaux publics d'une entreprise française en Afrique de l'Ouest, un ouvrier Noir a été tué. Quatre personnages s'entrecroisent, dont la différence des motivations est si profonde qu'ils ne parviennent pas à communiquer, sinon dans une spirale de violence et de terreur. Ce sont : Alboury, le frère de la victime ; Cal, l'ingénieur infâme, psychologiquement dérangé et probable assassin ; Horn, le vieux chef de chantier, manipulateur et fatigué ; Léone, la femme qu'il a fait venir en Afrique pour l'épouser, intéressée (par son argent) et en quête d'exotisme.
Comment un texte théâtral troué parvient, sans doute plus efficacement qu'un récit romanesque, à nourrir un crescendo d'émotions d'effroi et à camper des personnages très crédibles et emblématiques, pratiquement sans avancer du tout dans la narration... La valeur du bon théâtre contemporain, quoi...
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Koltès nous transporte en Afrique, au sein d'un chantier de génie civil. Deux homme, Horn et Carl, deux expatriés livrés à eux-mêmes dans cette contrée où, si vous blanc, il faut rester sur ses gardes. le colonialisme étant le principal responsable de ces rapports tendus entre blancs et nègres.
Mais lorsqu'on oublie que les locaux qui travaillent sur le chantier sont avant tout des êtres humains, il est normal qu'on se retrouve face à un problème : celui de voir débarquer Alboury, frère d'un ouvrier mort dans ce chantier, venu réclamer le corps de son frère dont les deux colonisateurs se sont débarrassé du corps.
Bien sûr, dans leur tête d'Européen méprisant, ce souci mineur doit pouvoir se régler facilement grâce à une poignée d'argent. Léone, une femme débarquée de France, venue rejoindre Horn, le chef de chantier, comprend rapidement qu'on ne peut pas, simplement d'un coup de baguette magique, bafouer la dignité de ces hommes et femmes qui vivent dans ce pays.
Alors de quoi elle traite cette pièce ? Juste de ce qui était intolérable dans le colonialisme : le mépris des blancs qui croyaient que ce grand pays ne contenait encore que des esclaves et des familles d'esclaves.
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Cette pièce resserrée sur quatre personnages confronte les trois blancs – trois ensembles de représentations et réactions typiques face à l'Africain et l'Afrique : racisme, paternalisme, fantasme – à un homme intègre qui fait donc ressortir le piège de leurs représentations. le chantier et le monde ouvrier, l'accident de travail sont les thèmes qui se mélangent à l'intrigue, et le prétexte à cette confrontation. Koltès se défend d'avoir voulu écrire sur l'Afrique, il ne la connaît pas assez bien. Mais il écrit sur le regard de l'Européen sur l'Afrique : certains monologues de l'Africain semblent décrire les documentaires d'époque comme "Les statues meurent aussi" de Chris Marker et Alain Resnais - cela dit une belle source. Koltès ne se permet pas non plus de parler de la condition ouvrière dans ces chantiers - seul l'ingénieur en témoigne - et la pièce est caractérisée par l'absence de la parole de l'ouvrier lui-même qu'on a tué ou de celles de ses compagnons. C'est là toute la symbolique recherchée par l'auteur : l'absurdité d'un monde occidental où le travailleur, celui qui crée la richesse, l'homme noir, l'ouvrier exploité par excellence (ce petit "négrillon" qui pédale dans la pièce arrirère pour activer le ventilateur...), est absent, écarté de la scène, caché derrière une superposition d'images créées par l'occidental, des représentations racistes aux fantasmes réducteurs de la jeune femme, qui subtilisent la parole de l'Africain, déforment l'homme derrière l'ouvrier. En cela, Koltès rejoint l'anticolonialisme radical de Franz Fanon et plus encore la pensée de Malcolm X et des Black Panthers qui annoncent les études de genre : le fait que les minorités ou classes dominées (noires, femmes, LGBT...) sont représentées dans le débat public par des membres des classes dominantes. En insistant sur cette absence, sur l'importance de rendre le corps de l'ouvrier africain tué, Koltès opère le lien entre les différentes luttes.
Lien : https://leluronum.art.blog/2..
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