AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,95

sur 513 notes
5
80 avis
4
73 avis
3
27 avis
2
7 avis
1
0 avis
«  La peur du nucléaire est un luxe des pays riches. »

«  L'oisiveté n'est pas une soeur pour l'homme. »

Le sens de la vie a toujours échappé à l'homme » .

Quelques passages de ce roman formidable , explorant un passé récent tentant de mettre en lumière ce que la politique essaie maladroitement de cacher, cette catastrophe de Tchernobyl survenue le 26 avril 1986, tout près de Pripiat , où habitent Léna , fille de scientifiques éminents , privilégiée , qui partira avec sa famille en France , convaincue par les paroles de son père que son tendre amour Ivan, son ami d'enfance ——-ils ont grandi dans ce petit village ukrainien,——— ils se sont promis l'un à l'autre l'éternité , leurs prénoms se chevauchent , gravés sur leur arbre ——- ils s'aiment comme des enfants , vraiment , est mort lors de ce jour funeste. ….


Le nucléaire , cette énergie que l'homme pense à tort, maîtriser ,fournie chaque jour par ces centrales toutes proches , est au coeur de cette histoire d'amour , incroyablement réaliste , poétique , vibrante d'humanité et d'humilité face à cette centrale qui s'enflamme , les radiations se répandant à toute vitesse , amenant leur cortège de souffrances et de désespoir ,au coeur de ce coin d'Ukraine , ravagé par l'inconséquence , l'inconscience et la suffisance des hommes .
.
Nous vivons aux côtés de Léna, son exil———elle grandira sur une terre qui n'était pas la sienne———elle revit la panique , la fuite, la séparation douloureuse , la complicité qui était la sienne auprès d'Ivan, un lien devenu ténu au fil des années …

Léna s'acclimate , at - elle le choix? , s'efforce d'oublier , rongée par le poids du silence, le fantôme d'Ivan qui la hante malgré l'affection de sa chère grand - mère , Zenka , pilier de tendresse .

Un jour tout ce qui était enfoui remonte et revient lors de son retour dans les ruines de Tchernobyl ,vingt ans après ….

Ivan, de son côté , ne peut s'éloigner de la zone contaminée ,sacrifiée , il reste dans le pays de ses ancêtres et attend le retour de sa bien - Aimée …

L'émotion gagne le lecteur : ce livre est un véritable chant d'amour à une terre, roman sur l'exil, la transmission intergénérationnelle, une romance aussi , à la lecture des lettres d'Ivan, qu'il ne pouvait envoyer , puisqu'il ne connaissait pas l'adresse de Léna …

L'auteure restitue le contexte historique avec aisance : le sort des familles désormais indésirables, les populations laissées dans une ignorance crasse , beaucoup y perdront la vie , ces gens hébétés , pétrifiés, capharnaüm meurtrier, se retrouveront souvent dans la misère,….sur une terre figée à jamais, où la vie humaine a disparu , envahie par une végétation pourpre , rouge sang….

Que dire du sort des samossiols , les «  revenants » , qui reviendront vivre malgré tout dans «  la Zone Interdite ? …

Déchirement de l'exil , désespoir, effroi, sidération, conséquences innombrables …..

Ce premier roman initiatique - témoignage puissant , narrant un effondrement et une histoire d'amour parle au lecteur, pétri d'empathie pour des personnages attachants ,habilement campés , à l'aide d'une plume habitée, vibrante, nécessaire, juste, usant du pouvoir des contes et légendes …..
«  La tragédie était le chaudron des slaves » .

«  L'homme soumet la nature, il la polit à son image. Il a alors l'impression de lui être supérieur. » .

«  Les scientifiques n'avaient aucune limite .La Sibérie était vaste , sauvage ,loin de tout : il n'y aurait aucune conséquence et à coups d'explosions nucléaires , ils ont détourné des fleuves pour irriguer des champs de coton au détriment de la mer d'Aral qui a vu son cours d'eau s'assécher » .
Commenter  J’apprécie          344
Depuis que j'ai regardé la série « Chernobyl » à la télévision, j'ai cherché à lire des ouvrages sur cette catastrophe et je suis tombée sur ce roman. La couverture et le titre surtout m'ont immédiatement emballée et j'ai lu, très vite ce roman que je vois comme une histoire d'amour et de deuil. Je trouve que ces deux thèmes se comprennent de deux manières : il y a l'amour entre les deux adolescents Léna et Ivan qui perdure malgré la distance et la certitude pour Léna de la mort d'Ivan. Mais on trouve aussi l'amour de la patrie, très forte chez Léna même si celui-ci n'est pas tout de suite conscient chez elle. Mais ses études, ses lectures, tout la ramène dans ce pays dont on l'a arrachée subitement un jour d'Avril 1986.
Et puis il y a le deuil : celui d'un pays, d'une ville –Pripiat- abandonnée du jour au lendemain par ses habitants car on ne peut plus y vivre. Celui de tous ces gens obligés de tout laisser sur place, déchirés de devoir quitter leurs terres, leurs animaux, leur vie même pour se retrouver entassés dans des immeubles à Kiev sans aucune perspective de retour. Sans compter toux ceux qui sont morts des suites de la catastrophe. Un deuil national qui pèse encore aujourd'hui parmi la population. Un deuil plus personnel qui touche aussi bien Léna qu'Ivan : chacun, à sa manière, est affecté par cette tragédie amis c'est Ivan qui est le plus touché. Non seulement il perd Léna, partie brutalement pour la France, mais il perd aussi sa petite soeur, son père…
L'écriture d'Alexandra Koszelyk est belle, presque lyrique. Elle donne du souffle à cette histoire déchirante, à cet amour sublimé par la distance (dans le temps et l'espace), à ces deux adolescents dont on attend (dont on espère) les retrouvailles. Un très beau moment de lecture !

Commenter  J’apprécie          332
Gros,gros coup de coeur pour un 1er roman, c'est réussi, et je dois avouer que certains passages m'ont vu verser quelques larmes. Livre marquant que l'histoire de ces deux adolescents de 13 ans épris l'un pour l'autre,que le destin va brutalement séparer à cause d'une erreur humaine sur la centrale de Tchernobyl : mai 1986.
Pripryat, ville moderne construite pour les ingénieurs et les ouvriers de la centrale de Tchernobyl, se situant à 3 kms.
Dans cette ville deux adolescents : Léna et Ivan vivent dans leur " bulle" ,leur voie est toute tracée, inséparable depuis leur plus tendre enfance ,ils envisagent leur avenir sereinement.
Mais par une faute d'inattention d'un des ouvriers ,la plus grande catastrophe nucléaire va avoir lieu en mai 1986.
Sans aucune explication, son père etant ingénieur à la centrale,Léna se voit deracinée brutalement,en fuite vers la France avec sa grand-mère et ses parents.Un long voyage en train qui ne lui laissera que des souvenirs irrėels et confus.Ils rejoignent leur famille russe déjà exilée en France.
De ces années d'exil,Léna ne s'en sortira pas indemne ,malgré tous ses efforts elle n'arrive pas à s'intègrer, toujours, elle se sentira étrangère.L'absence d'Ivan sera pour elle une torture ,une plaie non refermée, elle est sans nouvelles.
Grâce à sa grand-mère qui l 'entoure d'amour,contrairement à ses parents qui eux ,ne la comprennent plus et dont elles'eloignera petit à petit, elle n'oubliera pas ses origines au travers les légendes racontées dans sa langue natale,le soir lorsque la nuit tombe ,à la lueur d'une bougie.Ces rites feront que Léna gardera toujours l'espoir enfui en elle de retourner la-bas.Le jour arrive où jeune femme devenue,avec tous ses diplômes ,elle s'envole vers sa terre natale, sur les lieux de son enfance où elle espère retrouver Ivan.
Un petit joyau d'écriture par la justesse des mots ,très poétique, retraçant avec finesse l'ambiance ,l'atmosphère de ces années communistes en Ukraine ,le rêve du monde occidental qui vera s'épanouir ses parents en Bretagne,en parallèle trois ans plus tard la chute du mur de Berlin,et le retour : le choc,sa ville natale, méconnaissable, dévastée et envahit par la nature. Retrouvera t-elle Ivan? A vous de le découvrir.
Un magnifique roman dévoré en apnée ,à lire de toute urgence!! ⭐⭐⭐⭐⭐
Commenter  J’apprécie          280
"L'amnésie était sa terre de résilience"
D'entrée de jeu, il faut dire que ce roman est bouleversant, il laboure en nous l'exil, inconsolable pour ceux qui l'ont connu, cette transmission de l'amour filial passant au fil des générations.
L'histoire, c'est celle de deux adolescents vivant en Ukraine, leurs parents travaillent dans la centrale nucléaire de Tchernobyl.
Une date, un jour suffit à briser des milliers de vie, le 26 avril 1986, le réacteur numéro 4 prend feu.
L'histoire, alors s'écrit au passé, Léna fuit avec ses parents le drame pour aller vivre en Normandie, son amour adolescent, son alter ego: Ivan, lui n'a pas cette chance.
La vie les sépare, Léna tente de survivre en refoulant cette vie d'avant jusqu'au jour où L'amnésie ne peut plus lui servir de résilience.
Alors, elle retourne dans ses terres dévastées retrouver celui qu'elle aime.
Ce roman traite merveilleusement bien de l'indicible que la mémoire commande pour survivre . Cet bouleversant écrit de la grand mère de Léna qui lui raconte sa survie à la grande famine en Ukraine, l'énergie, le moteur qui permettront à Léna de refranchir ce pays qui est le sien.
Bouleversant roman dont je recommande totalement la lecture.
Commenter  J’apprécie          273
Un premier roman qui a provoqué beaucoup d'échanges sur la blogosphère et qui m'intriguait, par le fait.

Alexandra Koszelyk nous raconte une histoire d'enfance confrontée à la terrible catastrophe nucléaire ukrainienne, les vies à reconstruire ailleurs et la joie de vivre de l'enfance qui disparaît.
C'est un joli roman bien troussé, qui s'adresse plutôt à un public adolescent, en regard de la dramaturgie assez simple opposant enfance heureuse et bouleversement familial. il casse rapidement le joli monde des premières années insouciantes pour suivre le parcours de deux enfants de Pripiat, arrachés à leur quotidien un jour d'avril 1986.

Éveil à la sensualité, amours d'adolescents, déracinement, exil, séparation. Les grands thèmes d'un roman apprentissage se bousculent, complétés par cette capacité de la jeunesse à savoir se réinventer, ou être capable de résilience. Dommage que cela soit un peu convenu et trop bien léché. Il faut dire qu'étant plutôt affûtée sur la thématique Tchernobyl, je n'ai eu que l'accroche de la séparation d'amours platoniques de Léna et Yvan pour piéger mon intérêt.
Et je n'ai justement pas accroché.

L'auteur a la plume joliment descriptive, sensible et poétique. Pour un premier roman, il donne du potentiel à une carrière d'auteur.
A suivre donc...
Commenter  J’apprécie          262
C'est un livre qui me faisait de l'oeil depuis longtemps et que j'ai enfin découvert en l'empruntant à la médiathèque où je travaillais il y a encore quelques jours, puisque celui-ci avait obtenu un prix des lecteurs là-bas.

Pour l'histoire, nous sommes en 1986 au début du récit, très précisément au moment où tout a basculé le 26 avril avec Tchernobyl. La catastrophe nucléaire qui a détruit tant de vies en Ukraine, y compris celles de Léna et d'Ivan, deux ados de treize ans qui sont ami•es depuis des années et qui s'aiment mutuellement. Tchernobyl va les séparer, puisqu'Ivan va rester avec sa famille dans la zone, alors que Léna est déracinée et doit suivre ses parents en France.

Avant de parler de la catastrophe nucléaire, ce livre parle de l'exil. En effet, nous suivons la vie de Léna qui a dû quitter son pays, son école, ses ami•es et Ivan. Ivan qui représentait tant pour elle. Ivan qui, d'après le père de Léna, est mort. Mais elle ne veut pas y croire et souffre de cette absence. Vingt ans plus tard, devenue adulte, Léna reviendra dans sa région natale, à la recherche de ses origines et de son amour perdu..'

La coïncidence a fait que j'ai commencé ce roman quelques temps après la guerre en Ukraine, alors même que, de nouveau, des personnes ont dû tout laisser derrière elles et fuir leur pays. C'est exactement de cela dont l'autrice nous parle ici : le déracinement. C'est un sujet très intéressant et important mais j'aurais aimé suivre un peu plus Ivan, resté en Ukraine, pour savoir ce qu'était l'après Tchernobyl.

C'était une jolie histoire d'amour, un roman assez fort sur l'exil et la perte des repères, mais qui évoquait que trop peu le désastre de Tchernobyl sur la région, malheureusement. Malgré ce petit bémol, j'ai beaucoup aimé ce livre, que j'ai lu pratiquement d'une traite, emportée par la plume poétique de l'autrice ! C'est son premier roman mais elle a su montrer son talent d'écriture, si bien que j'ai envie de lire ses autres ouvrages !
Commenter  J’apprécie          250
En avril 1986, la catastrophe de Tchernobyl envoyait sur les chemins de l'exil des dizaines de milliers de personnes.
Ces anonymes, qu'ils soient liquidateurs ou simples habitants de Prypiat, ont depuis été le sujet de plusieurs oeuvres aussi fortes qu'émouvantes telles que le sublime film La Terre Outragée de Michale Boganim ou l'inoubliable livre La Supplication de Svetlana Alexievitch (sur lequel se base d'ailleurs en partie la mini-série événement Chernobyl de la chaîne HBO).
En ouvrant le premier roman de la française Alexandra Koszelyk, ce n'est pas une coïncidence si l'on retrouve en préambule une citation de Svetlana Alexievitch puisque, tout comme l'autrice ukrainienne, Alexandra a choisi de nous parler des petites gens qui ont souffert après l'explosion de la Centrale. Une façon pudique et intimiste de raconter un drame silencieux et de revenir sur l'histoire du peuple ukrainien à travers une histoire d'amour qui n'a jamais eu lieu.

Histoire d'un exil
Lena et Ivan ont 13 ans lorsque l'impossible se produit et que le feu nucléaire met fin à l'insouciance de leur enfance. Inséparables, les deux adolescents vont pourtant devoir se quitter.
Tandis que Lena quitte l'Ukraine pour la France avec ses parents scientifiques, Ivan, lui, reste dans l'attente de l'évacuation par l'armée vers Kiev et un hypothétique relogement.
Près de 20 ans plus tard, alors que Lena pense avoir enfin trouvé l'amour, elle comprend que rien ne pourra l'empêcher de retourner sur sa terre natale, cette Ukraine désormais meurtrie par la Zone et dont le peuple a enduré, une fois encore, les pires souffrances en silence.
Mais Ivan, cet amour d'enfance qu'elle n'a jamais oublié, vit-il encore dans ces ruines à jamais irradiées ?
À crier dans les Ruines n'est pas seulement un extrait d'un superbe poème d'Aragon, c'est aussi un adieu déchirant qui renferme en substance la mélancolie poignante d'une Lena qui n'arrive pas à oublier.
Alexandra Koszelyk a beau nous planter le décor et passer rapidement en revue la catastrophe au début de son roman, c'est bien l'histoire de cette enfant déracinée qui occupe le reste de l'ouvrage, entrecoupée il est vrai des quelques lettres sans réponse d'un Ivan de plus en plus amer avec le temps.
Avant toute chose, À crier dans les Ruines nous parle de l'exil de tout un peuple à travers l'histoire de Lena, une « privilégiée » qui a pu passer à l'Ouest avant que l'Armée soviétique ne l'emmène manu militari à Kiev.
Malgré cette échappée, voilà que la jeune femme est confrontée au mutisme de sa famille qui désire simplement oublier la catastrophe et les sacrifices. Dans sa description minutieuse des états d'âmes de Lena, Alexandra Koszelyk délivre en réalité un message universel sur ces familles arrachées de chez eux par la faim, la guerre et la catastrophe. Elle explique, patiemment et avec poésie, que quelque chose manque toujours au plus profond, un deuil jamais vraiment terminé qui ne trouve sa conclusion que dans le dernier des soupirs.

Ces légendes surgies du passé
À crier dans les Ruines utilise rapidement la passion pour la littérature de son héroïne et l'amour d'Ivan et Lena pour les mythes et légendes pour raconter une autre histoire, celle que façonne les hommes pour les réunir et les retenir.
Régulièrement, par sa grand-mère Zenka ou par des histoires glanées ici ou là, Lena se plonge dans les légendes — ukrainiennes ou non — pour trouver des échos de sa propre souffrance, de ce manque qui la ronge.
Alexandra Koszelyk construit d'ailleurs son récit dans une forme similaire, sorte de conte presque trop beau pour être vrai d'un amour qui dure vingt ans et qu'on tente de réanimer malgré les frontières et les dangers.
À travers la littérature et ses souvenirs, Lena recompose un pays comme l'a fait sa grand-mère avant elle. Et c'est certainement dans ces moments-là que le roman se montre le plus fort et le plus beau, quand il dépeint les souvenirs des uns et des autres, des blessures sous la peau.
Lorsque Zenka raconte l'Holodomor ou lorsque Ivan nous explique comment il a (sur)vécu.
Même si Alexandra trébuche à plusieurs reprises dans son style qui manque encore de maturité, même si parfois elle semble sur-écrire certains passages pour le plaisir des yeux, il reste toujours une sincérité et une beauté qui voudraient capter l'intime de ses personnages pour expliquer la grande catastrophe par la petite, celle de ces gens dont l'Histoire n'a pas retenu le nom.

Romance à l'ombre du Soviet
Tandis que Lena nous raconte l'après-Tchernobyl, Alexandra, elle, en profite pour brosser un portrait-double, celui d'une URSS qui s'écroule malgré sa puissance et celui d'une Ukraine qui regagne sa liberté.
La romance entre Lena et Ivan, qui semble parfois prendre des accents antiques (ce n'est pas un hasard si son autrice enseigne le grec et le latin) et refléter d'autres moments dramatiques de l'histoire — moments où les ruines continuent à murmurer une éruption volcanique ou un autre accident nucléaire jamais révélé — , cette romance ne peut finalement pas gommer le monde autour.
On assiste avec stupeur à la chute du Mur et à l'indépendance de l'Ukraine pendant que Lena grandit et tenter d'avancer avec ce creux au fond d'elle qui ne veut pas la lâcher.
Finalement, c'est d'identité que parle À crier dans les Ruines, celle que nous nous construisons dès la plus tendre enfance et qui nous définit avec le temps. Brutalement arraché de ses racines, de sa langue, de ses rêves, peut-on vraiment être la personne que l'on veut ou nous manquera-t-il toujours une pièce dans ce grand puzzle de notre existence ?
Mélancolique et pourtant pleine d'espoir, Alexandra Koszelyk nous répond que rien n'est impossible, qu'il faut chasser les souvenirs du passé même sur les terres les plus reculées pour trouver ce qui compte avant tout : cette histoire derrière nous.

Malgré quelques errements stylistiques, Alexandra Koszelyk raconte au lecteur une histoire poignante où romance tragique, catastrophe historique et identité familiale se mêlent pour accoucher d'un vibrant hommage aux sacrifiés de Tchernobyl.
C'est ainsi qu'À crier dans les Ruines apparaît à la fois comme un adieu et un retour, une identité perdue et un passé retrouvé, très loin là-bas dans la Zone irradiée.
Lien : https://justaword.fr/%C3%A0-..
Commenter  J’apprécie          254
Plus le temps passe, plus j'ai plaisir et intérêt à découvrir L Histoire à travers le roman, et en particulier ces situations, contextes ou événements qui ne sont pas perceptibles sous le radar de l'actualité ou les livres d'histoire.
Ainsi en est-il de ce roman qui s'en vient poser une réalité et de la vie sur un fait historique, connu mais figé dans la représentation que j'en avais : Tchernobyl. Connu l'accident nucléaire, connu la zone sinistrée, mais qu'est-ce qu'être de Tchernobyl, y avoir habité, y habiter encore ou en être parti? quel lien subsiste-t-il à la terre d'avant l'accident, quel est l'impact de ce dernier sur l'identité, le rapport à la terre, la famille, la communauté?
C'est ce qu'explore ce roman délicat, à travers le récit d'une jeune fille dont la famille a fui en catastrophe quand son amour de jeunesse est resté, que ce souvenir hante et qui revient vingt ans après.
Un roman éclairant, qui me donne envie de retrouver sur le même sujet, dans un registre que je sais d'avance émotionnellement plus fort, le regard de Svetlana Alexievich dans La supplication.
Commenter  J’apprécie          220
À crier dans les ruines aborde un sujet qui ne m'attire pas forcément : des amours adolescentes sur fond de catastrophe de Tchernobyl. Dans le genre, il y a plus fun.

Pourtant, je me suis laissée prendre par le premier roman d'Alexandra Koszelyk.
J'ai aimé le style vif de l'auteur, j'ai appris beaucoup de choses sur la catastrophe et sur ses conséquences et je me suis vite attachée à Léna et à Ivan. Sans compter l'hymne à la nature qui a eu une résonance particulière en moi.

Il ne s'agit cependant pas d'un coup de foudre car le roman est imparfait. L'histoire d'amour est convenue, la fin est lisible rapidement. Il y a quelques incohérences : par exemple, comment la famille de Léna peut-elle fuir si facilement, pot-de-vin ou pas ?
Et à trop vouloir donner d'infos sur Tchernobyl, le roman prend parfois des allures de docu.

La plume est jeune aussi je pardonne ces carences et je vais m'employer à suivre de près le travail d'Alexandra Koszelyk.
Commenter  J’apprécie          206
Le lyrisme incroyable de ce texte. Sa poésie, sa manière d'être habité. La manière aussi dont j'ai retrouvé l'Alexandra avec laquelle j'avais conversé si intensément... J'ai croisé beaucoup de gens imbus de leur culture, d'érudits qui se meuvent sur la pointe de leur vanité à coups de citations glorieuses pour masquer leur insignifiance. Elle est le contraire. Elle a l'antiquité qui s'écoule dans chaque souffle, dans chaque regard et dans chaque phrase, les mythes et leurs signes qui affleurent à chaque métaphore. Une manière de les incarner et de les maintenir comme des références vivantes qui m'a absolument émerveillé.

Ainsi, elle a écrit un chant homérique, une odyssée, quelque chose de classique, d'éternel, de délicieusement anachronique, pétri de tous ces codes qu'elle aime, de ces tournures élégantes comme des sonates, comme des poèmes, comme un chant de l'âme dans le style. Une atemporalité dans le ton, relié à l'éternité, que le présent tyrannique de nos sociétés instantanées n'ose plus que très rarement. Ce qui m'est resté de cette première lecture, c'est cela, l'envoûtement de cette musique où j'ai retrouvé l'élégance de mes livres d'adolescence. L'esprit forgé aux mêmes sources, le coeur vibrant des mêmes temples. On se retrouve ici comme à la naissance de la tragédie. Ce qui m'a effaré d'admiration c'est cela. Cette audace à ne sacrifier à aucun code putassier, pour coller à la mélodie de son âme, pour livrer un roman qui authentiquement lui ressemble. Il a sa voix. Et l'effet que fait sa présence quand on la connaît un peu.

Sans doute, beaucoup attendent Tchernobyl, son désastre, sa contamination, ses conséquences horribles. L'habituel sensationnalisme que les gros titres et les séries télé exaltent. Alexandra raconte une histoire d'amour shakespearienne, deux adolescents épris l'un de l'autre. Lena et Ivan. Elle est la fille d'un technicien de la centrale qui prend immédiatement l'ampleur de la catastrophe. Il décide soudainement de fuir loin de cet apocalypse. La jeune fille en a le coeur brisé. Cette histoire sera celle de son déracinement. de cette assimilation douloureuse à la France, loin de son pays martyr. Les jeunes gens s'écrivent. Les lettres ne leur parviennent pas. le temps passe. Elle découvre la culture, les livres qui lui disent qui elle est. Il continue de lui écrire, de loin en loin, jusque dans l'amertume d'un oubli supposé et d'un retour impossible. Jamais pourtant le souvenir et la pureté du lien fondateur qui les unit ne s'efface.

Et la tragédie de Tchernobyl résonne dans leur intimité. Dans leur monde. Partout, comme le cataclysme qu'elle est et qui figea Pripiat, la ville voisine de la centrale nucléaire. Alexandra commence son récit par un retour vers la zone interdite. Vers l'enfance. Vers une innocence perdue. Vers cet amour interrompu mais jamais effacé dans la distance, figé comme cette grand roue étrange, installée la veille de la catastrophe. Cet amour qui est finalement la seule continuité de sa vie, son fil d'Ariane. Elle revient comme Orphée, en quête de celui dont elle est endeuillée. Sa vie est passée comme un songe, vite, alors qu'elle s'est arrêtée là. Au moment de son arrachement. Elle entend à nouveau cette langue qu'elle ne sait plus parler et qui étend son regret sur ces silences. l'absence d'Ivan dont parfois elle a traqué le souvenir dans d'autres bras. Elle revisite sa mémoire amputée. Cet oubli de soi dont on ne se remet jamais vraiment quand on a dû s'exiler.

La nostalgie. La fragilité des existences dont les certitudes peuvent être balayées du jour au lendemain. La violence des vies qu'on doit recommencer. L'exigence des avenirs qui réclament notre passé en offrande. La majesté de la nature où nous ne sommes que des ombres fugitives, des initiales gravées sur le tronc d'un arbre. Ce roman parle des forces qui nous dépassent et des divinités, des esprits et des Parques qui président encore à notre destinées. Il y a de la magie dans le regard d'Alexandra, qui sait encore comment convoquer dans ces mots le souffle antique des muses qu'elle aime.

Il y a ici la fièvre des grands romans russes, Anna Karénine bien-sûr, Gogol et Tourgueniev. La grandeur et la sensualité de Kundera. Les amours tourmentés écrits par les soeur Brontë. Il y a ici toutes ces réminiscences. Des romans que je n'ai pas lus depuis ma petite vingtaine et dont cette oeuvre m'a ramené les frissons. Une fresque à laquelle je ne m'attendais pas, une ampleur, une ambition à laquelle nos regards distraits ne sont plus accoutumés.

Mais cette symphonie sensible, érudite, poétique et harmonieuse m'a totalement enivré.

Il y a des livres qui, longtemps après qu'on les ait lus, continuent de vivre en nous, des personnages et des images qu'on a aimés comme des sortilèges.
Lien : http://www.nicolashouguet.co..
Commenter  J’apprécie          200




Lecteurs (966) Voir plus



Quiz Voir plus

Les Amants de la Littérature

Grâce à Shakespeare, ils sont certainement les plus célèbres, les plus appréciés et les plus ancrés dans les mémoires depuis des siècles...

Hercule Poirot & Miss Marple
Pyrame & Thisbé
Roméo & Juliette
Sherlock Holmes & John Watson

10 questions
5287 lecteurs ont répondu
Thèmes : amants , amour , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}