AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,11

sur 588 notes
Magnifique. Dur. Emouvant. Passionnant.
J'ai appris énormément sur l'après-guerre allemand, et sur moi-même finalement.
Difficile d'avoir un avis tranché sur Koja-Jérémias : salaud ? gentil pris dans les méandres de l'histoire et qui tente de sauver sa peau.
En tout cas, c'est un roman dont on ne sort pas indemne.
Commenter  J’apprécie          70
C'est un pavé de 1100 pages. Les 50 premières, j'ai eu beaucoup de mal. Mais après, tout se dénoue et devient très intéressant. Je ne sais pas comment décrire ce roman...Le personnage principal est un vrai malade, un salaud, on nous décrit des atrocités, il y a des références historiques très intéressantes. Par contre quelques longueurs. Dommage. Enfin bref "La fabrique des salauds" est le roman d'une métamorphose monstrueuse, celle qui transforme un homme en nazi.
A lire!
Commenter  J’apprécie          50
Les tribulations d'un germano-letton devenu SS (malgré lui?).
Ce roman d'espionnage de 850 pages traite le sujet rarement évoqué de la position des allemands vis à vis de l'anti sémitisme et du pangermanisme hitlérien. L'histoire commence en Lettonie en 1905 au moment de la première révolution russe (la Lettonie a fait partie de l'empire russe jusqu'en 1920) et se termine en 1972 au moment des attentats de Munich. Deux frères faisant partie de la minorité germanique lettonne sont enrôlés dans la SS, puis vont monter en grade et en responsabilités. Devenir bourreau pour ne pas être victime. le personnage principal va devenir espion, agent double voire triple pour l'Allemagne la Russie et Israël. Il va contribuer à faire arrêter Adolphe Eichmann, mais aussi protéger les dossiers de criminels de guerre secondairement intégrés à la vie politique de la RFA ; (comme les anciens khmers rouges au Cambodge). Ses aventures, dramatiques mais aussi picaresques, sont pimentées par le fait que les 2 frères vont épouser l'un après l'autre leur soeur adoptive orpheline, juive sans le savoir.
Excellente fable sociopolitique, bien documentée que l'on dévore malgré sa longueur.
Commenter  J’apprécie          100
"L'homme est faible, un bouchon de liège dans le courant. Au bout du compte, il ne s'agit que de tomber sur la bonne vague."
Et j'avoue que cette vague m'a remué, ballotté, sacrément secoué.
Koja Solm est hospitalisé aux côtés d'un jeune hippie Basti, Sebastian Mörle. Nous sommes en 1970. Basti est soigné pour une fracture du crâne, des tuyaux évacuent le liquide céphalo-rachidien qui compresse le cerveau. Il n'a vraiment pas envie d'écouter Koja son voisin, un vieil homme, qui lui a une balle dans la tête.
Koja lui raconte sa vie, son enfance et surtout sa jeunesse d'allemand des pays baltes surveillant des personnalités économiques et politiques pour le compte des nazis et fournissent à ces derniers des cartes en vue d'une invasion programmée. Aux côtés de son frère aîné Hub, habillés de leurs chemises couleur "excréments repassés de près" ils ont écumé la Lettonie, et l'ont vidée de ses Juifs. Leurs crimes et leur parcours de salauds au service de la SS ont été mille fois racontés notamment dans "Les Bienveillantes", livre qui m'a laissé un souvenir encore plus dérangeant...
Koja -diminutif de Konstantin- a une âme d'artiste, et une personnalité écrasée par celle de son frère Hub, qui porte le mal en lui. Hub, devint un collaborateur zélé d'Himmler.
Koja est, quant à lui, ce bouchon suivant la vie au fil des courants qu'elle lui offre et trouvant tous les moyens pour être toujours du bon côté du manche. Il est capable de trahir sans état d'âme, de trahir ceux qui l'on fait grandir, comme les principes pour lesquels il s'est engagé. Ce qui en fait à mes yeux un salaud d'un autre genre que Hub qui lui, sans frémir, droit dans ses bottes, tuait arme en main, des bébés juifs dans les fosses communes d'Europe de l'Est.
Et puis, il y a Ev, leur soeur adoptive... Soeur ? pas sûr!
Et Koja, profitera de cette capacité d'adaptation pour servir tous les maîtres de l'Allemagne, passant de l'un à l'autre, depuis les russes communistes,en passant par la CIA puis le Mossad.
Un traître ? Oui, mais..il fut grandement aidé par les différents textes législatifs votés par les gouvernements d'Allemagne dès la fin de la guerre, textes qui permirent à certains nazis de retrouver une virginité et d'accéder aux hautes sphères de l'État Allemand...
Les pires ignominies ne nous pas épargnées.
Il y a salauds et salauds...
Roman ? Non, les plus anciens se souviendront de Franz Josef Strauss....Les plus jeunes se renseigneront sur cet homme politique.
Avec réalisme et une certaine dose d'humour parfois, Chris Kraus nous offre un roman dérangeant, malgré de nombreux personnages secondaires et des intrigues qui perdent un peu le lecteur parfois.
Nombreux furent, sous toutes les époques, les caméléons oubliant morale et droiture, capables de trahir des idées et des engagements pour un poste de pouvoir. Sans aucun état d'âme.
Lien : https://mesbelleslectures.co..
Commenter  J’apprécie          240
Dans un hôpital bavarois, le vieux Koja Solm raconte son histoire à son camarade de chambrée, un jeune hippie adepte de philosophie bouddhiste.
Une traversée du XXe siècle à travers la vie d'un homme au destin hors normes, une saga familiale et historique ambitieuse qui offre une réflexion profonde sur la morale, la frontière entre le bien et le mal.


Chris Kraus donne la parole à un homme que L Histoire et les deuils ont peu à peu changés en monstre. Par lâcheté puis instinct de survie, par intérêt pécunier ou pour protéger ceux qu'il aime, Koja devient un manipulateur puis un tueur.

Inspiré par son histoire familiale (le grand père de l'auteur était un nazi), ce roman de presque 900 pages est une fresque historique captivante. Un condensé d'histoire et d'événements marquants. J'ai été particulièrement surprise et choquée par la seconde vie offerte à certains nazis par les services secrets, pour leurs compétences acquises en commettant, pour certains, parmi les crimes les plus atroces qu'ait pu connaître l'humanité.
L'auteur dépeind un monde politique corrompu jusqu'à la moelle, sans foi ni loi, où les alliances sont aussi changeantes que la météo.


Les personnages principaux sont antipathiques au possible mais leurs relations sont captivantes car hors normes. le triangle amoureux formé par Koja, Hubert et leur soeur adoptive Ev, permet des réflexions intéressantes sur l'inceste, notamment sur sa définition. Les revirements amoureux, les trahisons, sont au rendez-vous.


Malgré quelques longueurs, notamment sur le dernier tiers du roman, les chapitres courts, les passages du passé au présent, le cynisme de l'auteur, les personnages ambivalents, les rebondissements et changements de décors (Lettonie, Allemagne, URSS puis Israël), maintiennent l'intérêt du lecteur jusqu'au bout.
La fin ne plaira pas à tout le monde car elle est un peu (trop?) surréaliste mais elle offre au moins une dernière image marquante soumise à multiples interprétations.


Un roman historique foisonnant, au cynisme grincant à la Amélie Nothomb, cinématographique, à découvrir.
Commenter  J’apprécie          110
Il était une fois en Germanie, de dix-neuf cinq à dix-neuf soixante-quatorze (pour reprendre la phraséologie du narrateur).
Sur près de 70 ans, Koja Solm nous raconte son histoire et l'histoire de l'Allemagne. Ca commence en Baltikum (provinces baltes de l'Empire russe) et se termine à Munich. Entre temps, dans un tourbillon de 1100 pages, Solm nous aura fait traverser une Europe à feu et à sang, emporté par L Histoire et guidé par l'amour et la haine. Car c'est avant tout une histoire de famille qui nous est contée : deux frères nobliaux vivaient en paix, une soeur adoptive survint, et voilà la guerre déclarée : mensonges, trahisons, dissimulations -et amour fou. Là-dessus, la vraie guerre éclate, les deux frères exécutent scrupuleusement leurs missions d'officiers SS, jusqu'à devenir les perdants de l'Histoire. Mais les histoires (la petite et la grande) rebondissent et s'engouffrent dans celle des services secrets. Et là, on va de découverte en découverte.
Car ce qui est prodigieux dans ce roman phénoménal, c'est qu'une grande partie des faits et personnages ont réellement existé. On pense halluciner ; jamais on ne le croirait au cinéma, on accuserait le scénariste de nous prendre pour des abrutis. Et pourtant... on nous a pris pour des abrutis.
Ce roman interroge et apporte beaucoup de réponses : comment devient-on nazi ? pourquoi devient-on espion ? jusqu'où peut-on s'avilir pour garder celle que l'on aime ? comment devient-on un salaud ? qui sont les salauds de l'Histoire ? Et Chris Kraus lui-même de s'interroger, dans sa post-face : "comment la société de la RFA a-t'elle réussi à trouver le chemin de la démocratie en dépit de l'intégration des anciens nazis ?" (bon, la société française aussi a su recycler ses collabos les plus zélés).
C'est donc une oeuvre impressionnante, dont on ne ressort pas indemne. Il y a des passages inévitablement éprouvants, mais l'ensemble est incroyablement passionnant -et parfois très drôle, aussi. Comme une grosse farce absurde à laquelle le narrateur lui-même aurait du mal à croire.
Quant au style, il est éblouissant : un mélange de Nabokov, Hilsenrath et Grass, qui fait que ce roman nous dévore tout autant qu'on le dévore.
Wunderbar.
Commenter  J’apprécie          3517
Résumé :

Nous sommes en 1970 dans un hôpital de Munich. Contraint de l'écouter après qu'il l'a menacé, un jeune hippie découvre l'histoire de son voisin de chambre Koja Solm, un vieil homme au passé chargé.
Solm explique avec ironie et sarcasmes comment il est passé des services secrets dans sa ville natale de Riga aux Einsatzgruppen (escadrons de la mort) en Pologne. Comment, presque à son corps défendant, il est devenu un parfait nazi : « de mon côté, en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, je devins un bon nazi. Je ne m'en rendis même pas compte. Nombre d'entre nous en firent autant, presque à leur insu, car devenir un bon nazi était comme devenir un bon chrétien. Les bons nazis étaient une évidence. Il n'y en avait pas d'autres, et les choses se faisaient d'elles-mêmes. »
La suite Solm la raconte avec la même dérision : après la guerre, il s'est mué en agent double ou triple du KGB, du BND, de la CIA et même du Mossad, comme si son passé de criminel de guerre n'avait aucune importance, lui donnait même une valeur irremplaçable. Mais l'histoire de Koja Solm, par delà celles de son pays et de sa famille, des aristocrates germano-baltes de Lettonie (à partir de la révolution russe de 1905, un pays qui connut toutes sortes de tourments), est aussi une douloureuse histoire d'amour, celle de son frère et la sienne avec leur soeur adoptive, une femme belle, déterminée et... juive.
L'humour ne diminue en rien, bien au contraire, l'épouvante et l'aberration des faits historiques relatés dans ce remarquable roman fleuve de 900 pages. Car si Chris Kraus nous émeut parfois, et nous amuse souvent d'une raillerie irrésistible c'est, à n'en pas douter, pour mieux nous imprégner inoubliablement de ce que le XXe siècle en Europe a eu de plus dramatique et révoltant. Ce que Hannah Arendt a qualifié de banalité du mal...

Opinion :

magnifique roman. Histoire invraisemblable du ménage à trois familial. Incroyable les liaisons entre Israël et les anciens nazis.

C'est un roman sur les choix que l'on fait, sur le libre arbitre, sur les décisions que l'on arrête et dont on ne maitrise pas les conséquences.
Beaucoup le compare aux "Bienveillantes" de Jonathan Litell
Commenter  J’apprécie          00
La confession des agissements d'un ancien nazi ne peut qu'être pénible. Dans La fabrique des salauds, c'est un hippie reposant dans une unité de traumatologie d'un hôpital allemand qui subira ce pensum. Alité auprès d'un certain Konstantin (Koja) Solm atteint d'une balle à la tête, le hippie bienveillant, encourageant au début la discussion avec son colocataire, constate au fil de la narration des événements existentiels de son colocataire, que ce dernier est vraisemblablement la pire canaille qu'il se dit lui-même être.
Gradé au sein des SS, après la défaite du IIIe Reich, Koja se met au service des plus grandes agences du renseignement (BND, Stasi, CIA, Mossad, KGB), et « en simulant la pitié, feignant la loyauté et contrefaisant l'amitié » Koja, au nom de la stabilité familiale et de l'amour filial, se commettra irrémédiablement et profondément dans les trahisons et les exactions terroristes.
Contrairement au narrateur du roman Les Bienveillantes de Jonathan Littell, celui de la fabrique des salauds tente constamment de justifier ses actes à l'aide d'une grille d'analyse passablement tordue. Mais le malaise ressenti à la lecture des mémoires du nazi fictif de Littell n'a pas été aussi fort avec ce roman-ci.
Le propos reste toujours difficile à entendre et à ce titre, Chris Kraus ne ménage pas ses effets et ses efforts : une écriture évocatrice mise au service d'une documentation approfondie, ça donne un roman historique puissant.
Commenter  J’apprécie          280
C'est un monument de littérature dédiée à la nature humaine, le combat intérieur d'un homme écartelé entre le bien et le mal, une histoire où il n'y a pas de gagnant, juste des hommes ou des femmes égratignés, blessés, brisés par la vie.
Koja, Konstantin Solm, la soixantaine passée est dans une chambre d'hôpital qu'il partage avec Basti, Sebastian Mörle, hippie trentenaire fumeur de joints et aficionado du bon karma. Koja a une balle dans la tête et Basti un drain dans la boite crânienne qui permet à l'infirmière de lui extraire un liquide sirupeux en cas de crise.
Koja va raconter à Basti son histoire, celle de sa famille allemande en Lettonie, son grand-père, Grosspaping, pasteur de père en fils, noyé par les bolcheviques, son père Théo Johannes Ottokar Solm artiste peintre, sa mère Anna, élevée par son grand-père, le baron von Schilling, et son frère ainé, Hubsi, Hubert Solm, qui aura pour lui la bienveillance fraternelle et pas toujours opportune de veiller sur lui.
Il raconte son enfance, le jour où ses parents recueillent Ev, une orpheline qui deviendra leur soeur mais bien plus sous l'influence d'un contexte historique chaotique, la montée du nazisme et la seconde guerre mondiale.
« La fabrique des salauds » est la genèse de ces trois frères et soeur emportés par les remous de l'histoire, qui vont grandir au milieu d'un contexte politique compliqué, allemands dans la Lettonie du début du XXe siècle, confrontés à un communisme post révolutionnaire et un national-socialisme germanique montant.
Le roman de Chris Kraus raconte ce combat intérieur auquel se livre un individu lorsqu'il doit survivre dans une société en pleine crise, en pleine mutation. Ce qui peut apparaitre au début comme une option évidente s'avèrera au grès des évènements être la pire des ignominies. C'est un roman sur les choix que l'on fait, sur le libre arbitre, sur les décisions que l'on arrête et dont on ne maitrise pas les conséquences. Ce n'est qu'à la fin, lorsqu'il est trop tard, que l'on sait si l'on a fait ces bons choix. Alors, peut-on juger ces gens du peuple pour leurs actes de façon uniforme ? Certes non, car il y a ceux qui ont inventé cette haine et imposé leur cruauté à des millions d'innocents, mais il y a aussi ceux qui sous prétexte de la grandeur à leur pays, noble intention, ont par la force des choses basculés dans l'horreur et enfin ceux qui n'ont fait que suivre, impuissants mais néanmoins acteurs, voleurs à la sauvette de privilèges. L'histoire de chacun appartient à chacun, et les raisons qui l'ont animée aussi.
Ce roman fait la démonstration qu'il est difficile de juger, et bien sur impossible d'excuser, ces gens qui ont commis l'indicible, car ils n'ont fait que suivre le courant d'une histoire qu'une poignée de fous, les vrais responsables, ont écrite et imposée par la force. Il ouvre la boite de Pandore, celle qui renferme toutes nos petites ignominies étouffées, nos petites haines frustrées, le germe du meurtrier qui est en chacun de nous. Il est un miroir pour que nous réfléchissions à ce que nous aurions fait si nous avions été à la place d'un Koja ou d'un Hubsi.
La haine est un puit sans fond qui, lorsque l'on s'y penche, fascine. Elle a le pouvoir de régenter une vie.
« La fabrique des salauds » est un grand roman qu'il serait dommage d'ignorer. Certainement un ouvrage majeur, aussi puissant que « Les bienveillantes » de Jonathan Littell.
Traduction de Rose Labourie.
Editions Belfond, 10/18, 1100 pages.
Commenter  J’apprécie          766
J'ai mis longtemps à lire ce gros roman : je me suis parfois perdue parmi les patronymes et les différents pseudonymes des nombreux personnages (on est dans le milieu du renseignement), entre les grades des officiers allemands et les différents services de l'armée (on est au coeur du régime nazi), parmi les différents pays appartenant à ce qu'on appelait le Baltikum dans les années 1920 (on va en traverser plusieurs, les fuir, y séjourner, y retourner) ; bref : j'ai eu des efforts à faire, mais il n'était pas question pour moi de lâcher cet exigeant, passionnant et dérangeant roman. Koja Solm raconte à la première personne une vraie saga familiale qui commence avec ses grands-parents, continue avec ses parents que les circonstances historiques soumettent, entre autres, à une considérable chute dans l'échelle sociale, se poursuit avec la carrière de Koja (Konstantin) et Hub (Hubert) Solm dans le régime nazi, et qui s'achèvera… Je vous laisse découvrir comment elle s'achèvera. Koja, son frère Hub et leur soeur adoptive Eva sont les trois principaux personnages de la Fabrique des salauds. « […S]eule une petite partie des événements et intrigues politiques décrits ici est entièrement imaginaire » nous prévient l'auteur dans son avant-propos. Il détaillera un peu cette assertion dans les « Remerciements ». Et La Fabrique des salauds m'a réservée bien des surprises. On sait tous, je crois, que bon nombre de nazis ont été « recyclés » à des postes divers, en Allemagne ou dans d'autres pays, comme l'ont été bon nombre de collabos en France. Mais comment est-ce arrivé ? combien de compromissions, de trahison, d'horreurs ? Et que dire des relations entre le Mossad et les services secrets allemands qui sont donnés ici pour réels, et qui, après rapide vérification, s'avèrent !
***
Koja Solm, 70 ans, est à l'hôpital au début des années 70 quand il commence une lettre : « Je dois te signaler, Ev […], je dois t'écrire, même si je devine que je n'aurai plus jamais de nouvelles de toi » (p. 20). Après le premier chapitre, pour ma part, j'ai complètement oublié que Eva était la destinataire de ce récit. Jusqu'à ce que je trouve une autre adresse à Ev : « […] comme tu le sais, Ev, je n'ai jamais eu la fibre spirituelle », page 477, j'avais l'impression que Solm racontait sa vie et celle de ses proches au hippie féru de philosophie orientale qui partageait sa chambre d'hôpital. Et c'est le cas… Dès le deuxième chapitre, le « vous », c'est monsieur Basti, le hippie. Les échanges entre les deux occupent même entièrement certains chapitres qui se lisent comme des pauses dans le récit. Après la page 477, même en faisant attention, j'ai de nouveau oublié que certains chapitres (tous ?) font sans doute partie de la lettre à Ev autant que du récit au hippie, mais c'est difficile à admettre dans la troisième partie... Ce jeu entre deux destinataires possibles vient assurément modifier la perception de ce qui est raconté !
***
Ce superbe roman m'a dérangée à plus d'un titre. Au début, je me suis même surprise à éprouver une certaine sympathie pour Koja qui semble incapable de prendre des décisions, se laisser gouverner par la personnalité de Hub et le suivre aveuglement pour différentes raisons dont Ev n'est pas la moindre. Mais non, cette aboulie n'est qu'apparente, et Koja se révèle un parfait salaud, parfois lâche, toujours opportuniste, même quand il est parfaitement conscient de l'horreur de ses actes, et imperméable au remord. Sauf une fois : les preuves du seul acte pour lequel Koja a du remord se trouvent dans l'enveloppe que lui apporte Hub à l'hôpital… Je crois que le ton que Chris Kraus prête à Koja pendant tout son récit, humour, sarcasme, ironie (le nom de John Irving fait partie des « géants » que Krauss remercie, p. 885), ce ton ajoute paradoxalement à l'horreur et touche le lecteur encore plus profondément. Bizarrement, ce pavé m'a rappelé, par certains côtés du personnage de Koja et les questions qu'il pose sur la responsabilité et sur le mal, le très bref roman le Silence de la mer, de Vercors, que j'ai lu très jeune et qui m'a durablement marquée…
Commenter  J’apprécie          200




Lecteurs (1703) Voir plus



Quiz Voir plus

Quiz: l'Allemagne et la Littérature

Les deux frères Jacob et Whilhelm sont les auteurs de contes célèbres, quel est leur nom ?

Hoffmann
Gordon
Grimm
Marx

10 questions
423 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature allemande , guerre mondiale , allemagneCréer un quiz sur ce livre

{* *}