J'ai repris ce livre entamé il y a peut-être 2 ans, et dont j'avais parcouru les premiers courts chapitres, et ma foi, je ne me serais jamais attendue à la suite....
Pour commencer, j'ai été un peu déroutée par la digression sur la nouvelle de Denon qui me paraissait bien longue et détaillée sans motif apparent. Je n'arrivais pas à saisir s'il s'agissait d'un roman ou d'un essai, au point de devoir m'assurer de la mention « roman » sur la couverture.
Ensuite je n'ai pas tout de suite saisi le lien entre des personnages disparates, à savoir, l'unité de lieu. J'avais l'impression de passer d'un souvenir à une réflexion philosophique à une anecdote arrivée à un ami, bref, la piste n'était pas claire.
Enfin, le comportement même des personnages s'avère de plus en plus déroutant. Cette dégénérescence m'a rappelé, dans une bien plus modeste mesure bien sûr, la folie qui surgit dans des textes comme le Maître et Marguerite ou Laitier de nuit. Une certaine légèreté accompagne aussi ce grand foutoir, par exemple quand Véra, l'épouse de
Kundera, lui reproche que les personnages qu'il manipule l'empêchent de dormir. Ou quand les considérations très intellectuelles de Vincent sont remplacées par une obsession pour le trou du cul d'une jeune femme qu'il vient de rencontrer.
Peut-être que mon malaise vient de ce que je me suis focalisée sur les événements propres à chaque protagoniste, au lieu de considérer l'ensemble comme un tableau où plusieurs scènes se déroulent simultanément. Je m'attendais à ce que l'une ou l'autre soit développée prioritairement, et de ce fait, j'ai sans doute « mal » lu le livre.
En revanche, j'ai beaucoup apprécié la technique de
Kundera consistant à mettre à jour les mécanismes sous-jacents à l'origine de certaines paroles ou actions des personnages. Il explique notamment comment l'entomologiste tchèque arrive à corrompre un souvenir pour qu'il corresponde à l'image qu'il se fait de sa participation à l'Histoire, une sorte de légende personnelle. Il analyse également les changements d'attitude chez Pontevin et son disciple Vincent, l'un envers l'autre et envers les autres, selon les situations. Les ressorts psychologiques sont très finement étudiés.
L'issue m'a laissée un peu perplexe, j'ai trouvé, sans mauvais jeu de mots, que ça tombait un peu à l'eau. Va pour le grand foutoir final mais cette rencontre entre Vincent et le chevalier, même si sa brièveté est justifiée, je me suis sentie laissée en plan.
Au final, bilan mitigé. J'ai lu ce roman avec des attentes biaisées certes, mais même avec le recul il ne m'a pas beaucoup touchée. Je reconnais volontiers des qualités à ce texte, sa construction originale, l'analyse psychologique réussie, le sens de la dérision de l'auteur et des réflexions stimulantes sur
la lenteur, les « danseurs » ou la quête de reconnaissance et de gloire. Reste le sentiment d'une lecture sans grand plaisir.