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sur 1161 notes
Le Cantal, Aurillac où vivent les parents du père et de la mère, une ferme isolée dans la vallée de la Santoire, cette rivière qui irrigue l'oeuvre de Marie-Hélène Lafon, et le récit d'une vie ordinaire si ce n'était la violence qui accable la mère.

Car elle est battue la mère de ces trois enfants, Isabelle, Claire et Gilles. Trois enfants qui savent combien le père est ombrageux, colérique, et injuste. Il n'aime guère son fils dont il trouve qu'il est trop proche de la mère. Les filles et surtout Isabelle lui ressemblent, elles, pense-t-il. Et puis il y a eu ce mariage qu'il n'a pas vraiment voulu, mais cela se faisait comme cela en 1959, un mariage source de vie mais aussi de tragédie ; il a réussi sa vie professionnelle : une ferme conséquente, du personnel, et une femme qui n'avait pas à se plaindre de ses conditions de vie et fait honneur à ses parents.

Pourtant on découvre au fil des pensées de la mère, de ses appréhensions, de ses tentatives pour s'évader de ses ruminations, la lente descente aux enfers, jusqu'à l'insoutenable, la dépression qui la conduit à ne plus espérer se rebeller, l'habitude dans ce milieu de ne rien laisser paraître, et surtout la peur qui se fait permanente. le malheur ordinaire, banalement ordinaire, tristement ordinaire. Comment s'en sortir ?

Marie-Hélène Lafon nous immerge dans le monde paysan des années 1960, où l'émancipation des femmes est encore si faible ; c'est le mari qui donne l'argent du ménage, il faut faire bonne figure à la messe du dimanche et surtout lors des visites mensuelles chez les parents et beaux-parents. Une parenthèse salvatrice lorsque toute la famille se retrouve chez les parents de la mère.

Un roman qui raconte sans pathos, avec une précision délicate, l'indicible, les détails d'un quotidien tranquille s'il n'y avait la peur, utilisant des expressions qui installent l'époque au plus vrai, et si ce sont mots de la mère qui témoignent de ce qui va se passer, c'est bien le père qui est le personnage principal de l'histoire, lui dont les ruminations une nuit d'insomnie traduisent son incompréhension vis-à-vis de sa femme. Les deux points de vue sont évoqués et ce sont les mots sobres mais tellement présents de Marie-Hélène Lafon qui emportent le lecteur dans une lecture intense et fascinée par la puissance du récit. Un très grand texte.
Lien : https://camusdiffusion.wordp..
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A peine ce livre ouvert, j'ai senti sur mes épaules le poids de cette histoire. Dur,, âpre, dérangeant tellement fort, impossible de le lâcher avant la dernière ligne. Et bien après la lecture, quelque chose qui reste comme une boule au ventre en y repensant. Marie-Hélène a vraiment les mots justes.
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Retour dans le Cantal pour ma puissante et subtile Nobel à moi :
« le feulement de la Santoire qui monte jusqu'à elle dans l'air chaud et bleu »
https://blog-de-guy.blogspot.com/2022/10/mo-marie-helene-lafon.html
Le panorama des âpres collines, s'efface cette fois derrière l'intimité pudiquement et profondément décrite d'une femme humiliée, battue.
Je redoutais de reprendre la lecture de ces 118 pages intenses tant ce livre m'a bouleversé tout en étant irradié par la façon de raconter.
La maumariée rumine, et même les gestes du quotidien ne peuvent recouvrir un destin désespérant.
« Les deux combinaisons, le chemisier, la jupe ; elle les dépose sur le dessus de la corbeille ; elle ne reconnait pas son corps que les trois enfants ont traversé ; elle ne sait pas ce qu'elle est devenue, elle est perdue dans les replis de son ventre couturé, haché par les cicatrices des trois césariennes. Ses bras, ses cuisses, ses mollets, et le reste. Saccagé ; son premier corps, le vrai, celui d'avant, est caché là-dedans, terré, tapi. Il dit, tu ressembles plus à rien. Il dit, tu pues, ça pue. Et il s'enfonce ».
Peut-on remercier l'auteure de nous faire partager si justement la pesante résignation de cette femme et son ressentiment ?
Une citation de Giono ouvre un récit où pas un mot n'est de trop ni pas assez.
« le sanglier solitaire hume vers les fermes. Il connaît l'heure de la sieste. Il trotte un grand détour sous les frondaisons, puis de la corne la plus rapprochée, il s'élance.
Le voilà. Il se vautre sur l'eau. La boue est sur son ventre. La fraîcheur le traverse d'outre en outre, de son ventre à son échine. Il mord la source. »
Nous sommes tout de suite dans la cour :
« Il dort sur le banc. Elle ne bouge pas, son corps est vissé sur la chaise, les filles et Gilles sont dans la cour. Ils sont sortis aussitôt après avoir mangé, ils savent qu'il ne faut pas faire de bruit quand il dort sur le banc. Claire a refermé derrière elle les deux portes, celle de la cuisine et celle du couloir. La table n'est pas débarrassée, elle s'en occupera plus tard, quand il aura fini la sieste. »
L'exercice de citation que je me contrains d'interrompre est pourtant utile pour s'imprégner de son style limpide qui permet de comprendre cette femme avec tous ses dilemmes. Il vaut mieux l'acheter (16, 50€) pour un moment de lecture permettant de mieux appréhender notre humaine nature.
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On retrouve le style impeccable (implacable?) de M.H.Lafon: pas de dialogue, une description objective - et un peu froide - des choses, des lieux, des situations, des gens.
L'auteure puise toute sa matière dans ses souvenirs d'enfance: une ferme isolée dans le Cantal, les vaches, le lait, le Saint Nectaire, qui font de ces fermiers pas riches des agriculteurs plus aisés que la moyenne.
Le récit va porter sur le sort de la femme: battue dès le premier mois de son mariage, elle sera enfermée dans le rôle que sa mère autoritaire lui a assigné: élever ses enfants, ne pas contrarier son mari, et garder la face vis-à-vis du monde. Ne rien montrer, ne rien dire.
Malgré ce devoir imposé, elle trouvera la force de provoquer la séparation.
Après cela, on la quitte, et on se retrouve avec le bonhomme, qui s'accomodera plutôt bien de la situation nouvelle qui lui est imposée.
Il ne faut pas chercher dans ce roman une "histoire". On y trouve une vie, le déterminisme social, et une description par le menu d'un monde rural révolu, celui d'avant la pilule et le divorce par consentement mutuel.
Et si l'on a aimé, auparavant, la prose ciselée de M.H.Lafon, on sera heureux, - après une "Histoire du fils" qui n'a comblé que les jurés des prix littéraires, tétanisés par le risque de passer à côté d'une auteure importante -, de retrouver la prof de lettres qui tient à trouver le mot juste, la petite fille du Cantal qui voit et retient tout, structurée par la rivière qui bordait la ferme de ses parents, par sa montagne et par ses sources.
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Les sources m'ont terrassées. Continuer à lire avec la peur au ventre ou ne pas continuer mais ne pas connaître la fin, voilà qu'elles ont été mes pensées pendant ses deux jours de lecture.


Les années 60, au milieu de l'Auvergne, une ferme isolée, une famille : le père ( dont on ne connaît pas le nom), la mère et leurs 3 enfants : Isabelle, Claire et Gilles. Un agriculteur qui bat sa femme toutes les semaines et qui la bat psychologiquement. la peur habite cette femme et commence à envahir les enfants. A l'époque on ne divorce pas ou peu, c'est la honte, alors comment fait-on?

Marie-Hélène Lafont a réussi son histoire tout en retenue et en non dit. Une belle prouesse pour un livre fort sur la condition féminine et les violences physiques et psychologiques. On n'en sort pas indemne.

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L'amour n'est pas dans le pré. Bravo madame Lafon, Chez les taiseux, la peur se loge jusque dans les armoires. Vous avez retranscrit à merveille l'atmosphère de la vie dans cette famille. Pas de dialogue, on traverse le livre, on ressent le mal être : ça nous bouleverse.
Ce roman m'a beaucoup parlé à bien des égards et je me suis reconnue.

la deuxième partie du livre relate la vison du père.
Il faudra encore que beaucoup d'eau coule sous les ponts pour que les mentalités changent.
Merci pour la justesse des maux.









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Une source, c'est le jaillissement de la vie, un écoulement paisible et prometteur.
C'est le titre doux du dernier roman de M.H.Lafon qui ne l'ai pas.
C'est une histoire de famille.
Il y a la mère, sans prénom, mariée depuis presque 8 ans, vissée dans une existence qu'elle veut fuir, elle a 30 ans.
Elle a trois enfants : Isabelle, Claire et Gilles.
Le mari, lui a un prénom, Pierre et il est violant.
La mère veut sauver ses enfants.
Trois parties et trois dates :
1967, 1974 et 2021.
C'est la structure et la construction du livre.
C'est la petite et la grande histoire.
Nos vies sont l'épaisseur du temps qui passe.
M.H.Lafon confie qu'il s'agit en partie d'une autobiographie qui est un élément percutant, délicat, brûlant et violant dans son parcours d'écriture.
On retrouve le style ciselé et épuré de l'auteure pour mon plus grand plaisir de libraire.
Lisez ses romans.

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Dans le silence d'un dimanche après-midi de juin 1967, la Mère assise dans la cuisine attend le réveil du Père . Elle attend avec fébrilité car elle sait la violence dont cet homme est capable.  Dehors les enfants jouent. Dans cette grande maison , dans cette belle  ferme,  la mère subit et elle ne sait pas comment fuir .

7 ans plus tard c'est le père qui parle, de sa vie depuis le départ des siens. Puis en 2021, c'est la cadette qui raconte la fin de l'histoire.. 

Dans ce texte court, on retrouve le style ciselé et concis de Marie-Hélène Lafon. le texte est beau et limpide comme l'eau de source. 

Ces sources qui sont autant de vérités que la vision de ceux qui nous racontent leur histoire.

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Marie-Hélène Lafon est professeur de lettres et ses romans sont des petits bijoux littéraires. Elle a obtenu le prix Renaudot en 2020 avec « Histoire du fils ». J'ai également beaucoup aimé son dernier roman « Les Sources » qui est court mais très dense. L'écriture est travaillée, précise et sans fioritures. La lecture de Véronique Vella incarne à merveille la voix de Marie-Hélène Lafon qui nous plonge dans le quotidien d'une famille d'agriculteurs dans les années 60, frappée par la violence conjugale. L'ambiance tendue qui devient glaçante est parfaitement transmise, je vous recommande donc la version audio « Les sources » et je remercie Netgalley et les éditions Lizzie pour m'en avoir permis l'écoute !
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« Ils se sont mariés un 30 décembre, et elle pense souvent qu'elle est entrée, en se mariant avec lui, dans une sorte d'hiver qui ne finira pas. » (pages 64/65).
Court texte en 3 dates, comme un prolongement de Histoire du fils. Fin des années 1960, violences conjugales verbales et physiques ; violences dont on connaît l'exact début, mais pas la cause précise ; violences parce ce que c'était comme cela au temps du « chef de famille » selon la loi ; violences tues parce que c'était comme cela, tous savaient, tous se taisent ; violences tues par orgueil, on doit tenir sa place, on ne divorce pas ici. Tout ce passe là-haut dans la ferme isolée, là où le printemps est plus tardif, là où le vent la lumière l'herbe humide devraient suffire.
Trois dates, trois voix dans un style différent. Si on retrouve l'art du pastel, cher à l'autrice, dans les 67 premières pages on passe au monologue intérieur quand le violent s'exprime ; dans tous les cas l'écriture reste serrée, au plus près du sujet, sans pathos, avec une grande empathie, un décorticage minutieux de cette pathologie universelle et dramatique qui altère (au sens géologique du terme) l'âme et le corps des Femmes.
L'autrice, professeure de lettres classiques écrit sans ostentation mais le « t » final à Ogino est dérangeant.
Lien : https://qasbat-tadla.webnode..
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