La connaissance de l'homogénéité de la nature en général, et de la forme humaine en particulier; le sentiment prompt qui nous fait juger aussitôt de l'une et de l'autre comme par instinct, nous donnent la clef de toutes les vérités. Au contraire, n'a-t-on pas cette connaissance, est-on privé de ce sentiment, on n'a que de fausses idées des choses. C'est à l'ignorance et au manque de tact qu'il faut attribuer tant de bizarreries et de travers que l'on remarque dans les ouvrages de l'art, dans les productions de l'esprit, dans nos actions et dans nos jugements. De là le scepticisme, l'incrédulité, l'irréligion de notre siècle.
Parmi cent fronts qui paraissent arrondis dans le profil, je n'en ai pas encore trouvé un seul qui présentât un nez aquilin proprement dit. Sur le même nombre de fronts carrés, ou qui approchent de cette forme, je ne m'en rappelle pas un seul dont les progressions ne soient pas marquées par des cavités profondes. Quand le front est perpendiculaire, jamais le bas du visage n'offre des parties fortement courbées encercle, à moins que ce ne soit le dessous du menton.
Toutes mes recherches physiognomoniques seront inutiles, et j'aurai perdu ma peine, si je ne parviens point à détruire un préjugé absurde, indigne de notre siècle, et non moins contraire à la saine philosophie qu'à l'expérience, ce préjugé, que la nature rassemble de différents côtés les parties d'un même visage.
Dans toutes les organisations, la nature opère du dedans au dehors; chaque circonférence aboutit à un centre commun;la même force vitale qui fait battre le cœur meut aussi le bout des doigts. Une même force a voûté le crâne et l'ongle de l'orteil. L'art ne fait qu'apparier, et en cela il diffère de la nature.