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sur 200 notes
Libération, le 10 mars 2010 :«C'était une disparition inquiétante, c'est désormais une mort suspecte. le corps du militant basque Jon Anza, disparu 18 avril 2009 après avoir pris le train à Bayonne, a été identifié jeudi dans une morgue de Toulouse où il a été conservé pendant dix mois […].»

A partir de cette affaire, Marin Ledun, avec le concours de son personnage, le jeune journaliste Iban Urtiz, va s'attacher à reconstituer les faits, remonter la trame des évènements, des personnes impliquées, et nous dire ce qui aurait pu se passer dans le cas de Jon Anza.

D'entrée de jeu, dès les premières pages, il nous impose d'assister, spectateurs impuissants, à l'enlèvement, aux brutalités et aux tortures sur le jeune Jokin, lesquelles vont prendre un tour que les tortionnaires n'avaient pas prévu.
« le coup de feu lui bousille le tympan droit. Il n'entend plus qu'un sifflement strident. Il ouvre les yeux : il n'est pas mort. La balle a traversé la planche de bois contre laquelle il est appuyé. le type a juste cherché à lui faire peur. le verrou est tiré, il est seul et il s'est pissé dessus. »…
« Ils prétendent le libérer bientôt, puis le frappent encore. Ils simulent une exécution. Ils lui détachent les mains, lui enfilent de force un sac-poubelle sur la tête. Crâne rasé déchire le plastique avec les ongles pour ne pas s'étouffer. Il ne sait même plus ce qu'il fait là. Il ignore totalement ce que les cagoulés attendent de lui. »

Au cours de son enquête, il va se heurter à la méfiance des proches de Jokin Sasco, le jeune militant de l'ETA disparu. Par son statut de journaliste, toujours soupçonnés d'être à la solde des flics et le fait qu'il soit un « erdaldun », un non basque malgré son patronyme, il suscite la méfiance, voire l'hostilité de Marco Elizabe, un journaliste basque plus ancien, peu enclin à partager ses informations.

Mais il va s'accrocher, rencontrer la jeune soeur de Jokin Eztia, son ancienne amie Eléa Vizcaya, qui a subi elle aussi « l'incommunication ». Selon la législation espagnole, l'« incommunication » (incomu-nicaciôn) désigne la période suivant l'arrestation d'une personne présumée être liée à une organisation terroriste pendant laquelle peut avoir lieu un interrogatoire sans présence d'un avocat et/ou d'un médecin de son choix, dans un lieu tenu secret de tous pour une durée théoriquement limitée à 13 jours.
Ces périodes sont souvent l'occasion pour les policiers de torturer des suspects pour les briser et obtenir des aveux.

Au cours de son enquête, Iban Urtiz va remonter une dizaine de dossiers de disparitions de jeunes basques, classés sans suite. Iban va aussi mettre à jour les relations troubles qui existent entre les polices Française et Espagnole, au cours de cette « Guerre sale », qui faisait suite aux tristement célèbres GAL (Groupes Antiterroristes de Libération). Coopération poussée à l'extrême, puisque des forces de police espagnoles viennent procéder à des arrestations illégales sur le territoire français, avec la bénédiction de la police Française, pendant ces décennies 60, 70, 80.

En plus du personnage de Jokin Sasco, qu'on ne voit pas, mais dont on sent la présence obsédante tout au long du roman, de sa soeur et de son amie Eléa, on croise une galerie de personnages pas très recommandables, le procureur de la République Delpierre, dont l'intégrité est sujette à caution, Garcia et Pinto, hommes de main de la police antiterroriste espagnole, qui emploient eux-mêmes des méthodes de terroristes. Les compagnons de lutte de Jokin ne sont pas exempts de reproches, et l'incertitude dans laquelle ils sont quant au sort de Jokin, sert leurs intérêts politiques.

Et tout au long du roman, la rumeur, sur le sort de Jokin. Iban va se mettre en danger, échapper à une tentative d'assassinat à la voiture piégée, mais persévérer, chercher, gratter et au bout du compte découvrir la vérité, mais il aura à en payer le prix, et quel prix !

Dans ce roman, Marin Ledun dénonce sans complaisance les errements des polices française et espagnole, serviteurs zélés d'un système politique. Son roman est sec, précis, dans l'action et dans les faits, bruts, violents. A aucun moment la tension ne retombe, nous sommes maintenus en plongée dans des eaux très troubles, durant les 462 pages que dure le roman. Ce roman a les accents d'une cruelle vérité, et la lutte inégale que livrent ces minorités basques pour leur identité culturelle et politique force le respect.

De plus, cet ouvrage superbement documenté apporte, pour ceux qui ne connaissaient pas, un éclairage particulièrement bienvenu sur la question basque, et l'implication des barbouzes françaises dans cette « Guerre Sale. »
Un très beau roman, très noir, et très serré, comme un bon café.
Je recommande !

Éditions Ombres Noires, 2014
Lien : https://thebigblowdown.wordp..
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Trépidant, dérangeant, glaçant, L'Homme qui a vu l'homme a tout du roman brillant et intelligent. On se pose des questions, on s'insurge, on apprend. Voilà un roman mené avec brio ; inutile d'aller chercher des romans américains ou scandinaves lorsqu'on a d'aussi bons crus sous la main !
Lien : http://encres-et-calames.ove..
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Fortement inspiré d'un fait réel, la disparition, en 2009, de Jon Anza, un militant basque membre d'ETA dont le corps sera retrouvé à la morgue de l'hôpital de Toulouse un an après, l'homme qui a vu l'homme revient par le biais de la fiction sur les cafouillages de l'enquête dénoncés par la famille du militant, qui accuse ouvertement l'Etat français de couvrir des exactions dignes du GAL. L'affaire sera cependant classée sans suite par la procureure de Toulouse en 2013.

Envoyé par la rédaction de son journal à la conférence de presse donnée par la famille de Jokin Sasko, un militant disparu depuis plusieurs semaines et que les autorités n'ont pas l'air de chercher, le journaliste Iban Urtiz, basque seulement de nom, spécialiste des chiens écrasés pour un journal du Pays basque nord, découvre un monde dont il ignore tout. Comme la plupart des lecteurs de ce roman sans doute. On suit pas à pas l'enquête de ce journaliste opiniâtre, « erdaldun » (littéralement « celui qui parle une autre langue » (sous-entendu « que le basque »), l'étranger). Rapidement obsédé par ce qu'il découvre des agissements des cellules anti-terroristes (enlèvements nocturnes de civils suivis de séquestration et tortures durant plusieurs jours, avant de relâcher la victime dans la nature), Iban Urtiz cherche à comprendre. Il veut la vérité. Seulement militants, etarras, politiques, flics, barbouze, tout le monde ment, tout le monde a peur et veut sauver sa peau.

Un roman noir, politique, haletant, nerveux. « le terrorisme gauchiste et le terrorisme étatique, quoique leurs mobiles soient incomparables, sont les deux mâchoires du même piège à cons… » dit un personnage de J.-P. Manchette (merci Wikipedia, m'en rappelais pas). Ledun est dans cette veine (toutes proportions gardées, hein), celle aussi de Daeninckx, des romans à dimension sociale et politique marquée. Même si l'envergure littéraire est loin de celle de Manchette, le style, rythmé, nerveux, sec, est dépourvu d'effets appuyés ou de fioritures, et l'intrigue (complexe) est maîtrisée et avance vite. Une introduction habile et efficace au terrorisme d'Etat.

De plus il est particulièrement touchant et intéressant de lire ce roman ici, où l'on peut encore voir taguées sur les murs lesimage Jon apostrophes à Sarkozy et Zapatero : « Nun da Jon ? » (Où est Jon ?)
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J'ai rencontré l'auteur il y a quelques mois déjà, que je ne connaissais pas du tout et qui a su me convaincre de lui acheter un livre et de prendre celui-ci! Et je n'ai aucun regrées, une histoire qui tourne autour d'un complot politique, mais sans trop en faire, on reste tout de même principalement sur l'enquête d'enlèvement. Et pour une fois dans ce genre de roman la fin est réaliste, je ne vous en dis pas plus pour ne pas casser votre future lecture.

Par contre, c'est un roman qui se déroule aux pays basques du coup les noms des personnages sont un peu durs à suivre ainsi que quelques expressions qui sont fort présentes au début mais cela s'estompe assez vite.

Nos deux journalistes principaux vont se plonger corps et âme dans une enquête de disparition, car ils savent que quelque chose de politique se trame en dessous, mais ils ne savent où ils vont mettre les pieds, mais la réalité va vite les rattraper.

L'auteur nous emporte dans ce conflit avec douceur sans trop nous acculé de politique afin de rester sur l'enquête, mais en nous mettant au coeur du système basque, se situant à la frontière franco-espagnole où les choses sont un peu à part. Je ne connais pas cette région, je ne peux donc pas dire si ce roman se base sur des faits réels, mais en tout cas l'auteur est très convaincant et en lisant ce roman, j'avais l'impression de lire une histoire vraie (elle l'est peut-être dans les grandes lignes) mais si c'est le cas, je me demande où va le monde... et vive la liberté de la presse!
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Nous sommes en 2009 . La tempête Klaus vient de faire des ravages. Un journaliste va enquêter sur la disparition d'un ex militant de l'ETA.
Avec L'homme qui a vu l'hommeMarin Ledun signe un thriller nerveux et percutant. L'histoire est encrée dans le réel et le style sans fioritures de l'auteur fait des merveilles.
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Je remercie Babelio et le prix SNCF Polar pour m'avoir permis de découvrir ce livre.
Un bon polar laisse parfois place à une longue critique, dithyrambique qui plus est, mais ici je vais faire court même si j'ai été conquise par cette lecture.
J'ai beaucoup apprécié, l'auteur fourni nombre d'informations sur l'ETA, l'histoire du pays basque. La toile de fond est bien entendu liée à l'histoire politique compliquée de cette région, ce qui m'a permis de découvrir certaines choses.
Il est important de rappeler que Marin Ledun nous propose une fiction tirée d'un fait réel, son thriller tient la route et il m'a très vite captivé.
Concernant l'histoire elle est particulièrement bien développée.Ce sont les journalistes qui mènent la danse, on avance au rythme de leurs découvertes.
ce roman m'a sorti un peu de ma zone de confort, je ne suis pas une habituée de ce genre d'histoire, toutefois j'ai passé un bon moment.
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A cause d'une histoire de porte anti-feu j'avais buté lors de la lecture de mon premier Marin Ledun...oui parce que dans le métier on parle de porte coupe-feu , comme quoi il faut pas grand chose pour avancer difficilement dans un livre. Ceci étant j'avais apprécié le thème et compris en le rencontrant que pour l'auteur également le thème du harcèlement au travail était très très important....Bref, appréciant l'homme j'ai donc voulu récidiver avec L'homme qui à vu l'homme malgré toutes les bonnes critiques ( je sais je suis un peu casse-couille).
La vache !!!!! Marin m'a chopé dès les première page et impossible de le lâcher. Il m'a fait découvrir une tragédie dont j'ignorais jusqu'à inexistance, il m'a emporté avec ces personnages plus vrais que nature....Bref au delà d'une réflexion politique il m'as fait passer un grand moment de plaisir et c'est ce que moi j'attends d'un livre...Alors M'sieur LEDUN, respect et chapeau bas.
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Voilà près d'un an que Iban, 27 balais, a atterri au Pays basque. Journaliste dans le quotidien Lurrama, il va prendre le taureau par les cornes en apprenant la disparition de Jokin Sasko, un militant. Malgré son nom à la consonance locale Urtiz est un erdaldun (*qui ne parle pas le basque). Il va s'engager dans un combat pour connaître la vérité qui va l'entraîner au coeur d'une sale guerre – mais existe-t-il des guerres propres ? - où les escobars (hypocrites), les bourreurs de mou (menteurs), les charcutiers (tortionnaires), les stratèges font mumuse. Nous sommes en 2009.

La suite sur : http://bobpolarexpress.over-blog.com/2015/02/eztia-ma-soeur.html
Lien : http://bobpolarexpress.over-..
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Difficile de ne pas se laisser submerger par la tension qui émane de ce roman. Pourtant, dès le premier chapitre, le lecteur sait ce qui est arrivé à Jokin et qui sont les différents protagonistes. Mais comme Iban, il souhaiterait connaître qui tire les ficelles dans cette affaire. L'intérêt du roman tient donc dans la manière dont Iban va mener son enquête : va-t-il découvrir ce qu'il s'est passé ? Comprendra-t-il qui sont les têtes pensantes de l'opération ? Et surtout, va-t-il parvenir à rendre publiques certaines de ses découvertes fracassantes ?

J'ai vraiment aimé ce polar car, tout au long du récit, mes certitudes ont été mises à mal. J'ai tâtonné en même temps qu'Iban pour comprendre le pourquoi, j'ai retenu ma respiration à de nombreuses reprises lorsque le journaliste mettait sa vie en danger pour faire avancer ses recherches. Dans ce roman, difficile de déterminer qui sont les « gentils », on a plutôt tendance à croire que tout le monde se trouve, à plus ou moins grande échelle du mauvais côté de la barrière : ceux qui tentent de faire entendre leurs opinions en utilisant la violence, ceux qui luttent contre le terrorisme en utilisant des méthodes plus que douteuses ou encore ceux qui s'engagent d'un côté comme de l'autre dans le but unique de se faire de l'argent.

Ce roman a été inspiré par la disparition d'un militant basque, Jon Anza, d'après ce que j'ai pu lire ici. Je ne sais où se trouve la frontière entre la réalité et la fiction dans ce que nous raconte Marin Ledun mais je peux vous dire que j'ai été assez horrifiée en imaginant ce qu'il a pu [ou peut encore] se passer, dans la « lutte contre le terrorisme » pas si loin de chez nous…
Lien : http://www.maghily.be/2015/0..
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Tout commence par une grosse bavure: un homme enlevé, séquestré, torturé pour interrogatoire et qui claque entre les mains de ses geôliers...Une grosse boulette difficile à planquer sous le tapis.
L'homme en question est un militant d'ETA.
Ses bourreaux: des flics (ou presque).
La famille porte plainte pour cette disparition inquiétante, organise une conférence de presse, fait tout le boucan qu'elle peut mais les efforts pour retrouver Jokin restent vain. Seuls 2 journalistes s'intéressent à la question. Chacun de leur côté.
L'un a un réseau long comme le bras.
L'autre débarque tout juste dans ce pays basque, patrie de son père, mais ne connait pas encore les us et coutumes locales.

Je dois reconnaître que le thème, la question basque, ne m'a pas spécialement captivée. Mais peu importe le contexte en fait. Je suis rentrée dedans quand même, comme si j'avais lu n'importe quelle histoire de journaliste acharné qui veut coûte que coûte comprendre les enjeux d'une guerre sale entre un groupuscule armé et un gouvernement aux méthodes douteuses. Un thème assez universel finalement. J'ai surtout été happée par l'écriture de Ledun. Oppressée même. J'ai mis un moment à comprendre d'où venait cette sensation d'urgence et ce stress à la lecture...c'est lié d'une part aux phrases courtes, aux formules chocs. Mais aussi à l'utilisation du présent. Tout est raconté au présent. Et ça fonce à 100 à l'heure. Direct dans le mur. Comme un bon roman noir.

Ledun laisse entendre qu'il s'est inspiré de faits réels pour écrire son roman, alors pour peu que vous soyez un peu sensible à la cause basque, pas une seconde à perdre pour découvrir qui est l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'homme...se faire enlever.
Lien : http://lesgridouillis.over-b..
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