« L'océan pensait, vivait, agissait ».
Stanislas Lem,
Solaris, Folio.
L'arrivée d'un nouvel astronaute, Kelvin, sur
Solaris permet de mieux connaître cette planète et les deux scientifiques de service dans la station. Les deux soleils ne retiennent pas l‘attention, même s'ils contribuent au plaisir des yeux. Il faut s'intéresser à « l'océan, cerveau protoplasmique, enveloppant toute la planète ».
En clair, comment entrer en contact avec une autre intelligence ? Voilà la question scientifique à résoudre.
Lem ne tombe pas dans les trop nombreux clichés d'extraterrestres à cornes ou pattes vertes, mais imagine un
« océan qui pensait, vivait, agissait ». Or cette intelligence est capable de créer des répliques humaines, puisées dans les souvenirs et images des scientifiques en poste, c'est dire si ceux-ci sont perturbés par des créatures visibles et présentes, qui appartiennent à leur passé, à leurs fantasmes.
« L'océan savait reproduire… un corps humain, un corps humain perfectionné,, modifié dans sa structure infra-atomique, afin de servir des desseins inconcevables » . « fantôme nourri des souvenirs et d'images confus, puisés chez son Adam »
Kelvin débarque donc dans un entourage perturbé où chacun défend son intimité et ses secrets.
Là est à mes yeux le deuxième intérêt de cette histoire : un roman d'amour qui fait penser au beau film d'
Alain Resnais, « je t'aime, je t'aime ». Harey, créature de l'intelligence océanique, est l'incarnation du passé de Kelvin, résurgence d'un amour tragique défunt. Mais la nouvelle Harey est un être innocent, un réceptacle de sentiments, susceptible lui-même d'attachement … Faudra-t-il revivre un ancien amour ou le recommencer avec un être neuf , si semblable à ‘ex-femme aimée ?
Les romans de Sf valent moins par leurs justifications pseudo scientifiques laborieuses, que par les réactions humaines dans un environnement inédit, ou face à des situations totalement nouvelles. On ne s'attarde donc pas sur les justifications et précisions sur des « symetriades » et autres accessoires, pour vivre avec le nouveau venu cette passion qui le dévore - avec une « femme » dont il se méfie,
Kelvin reste sur ses gardes, autant face à ses camarades que devant cette résurrection d'une femme aimée, puis abandonnée ; il éprouve des sentiments mêlés de culpabilité - le passé, et
d‘espoir, un futur ?
Deux films ont adapté ce récit :
Solaris, troisième long métrage d'
Andreï Tarkovski, sorti en 1972,
Solaris, un film américain réalisé par
Steven Soderbergh, sorti en 2002.