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3,86

sur 551 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Une œuvre très particulière, qui est entrée dans les classiques de la sf avec en plus deux adaptations cinématographiques en 1972 et 2002.


Le docteur (psychiatre) Kelvin débarque sur la station atmosphérique Solaris sur la planète du même nom. Il y est accueilli par Snaut et Sartorius, qui se cachent et visiblement, ils sont perturbés. Gibarian qu'il devait rejoindre s'est suicidé. Quand Kelvin rencontre en « chair et en os » sa femme qui s'est suicidée il y a dix ans, il s'interroge, au bord du gouffre. Est-il devenu fou ? Ou l'océan vivant de cette planète, objet de près de 78 ans d'études contradictoires, au point d'en faire une science à part : la solaristique est à l'origine de ses visions matérialisées ?


Une œuvre courte (320 pages) et dense. Une écriture poétique et hypnotique. Ce n'est pas de la sf conventionnelle, mais presque un essai philosophique, métaphysique sur l'inconnu, les possibilités de communication inter-espèces. Quelque chose de plus grand que nous, qui visiblement nous dépasse. Que faire face à l'inconnu ?
Vous cherchez des réponses ? Passez-votre chemin, je n'en ai pas trouvé. Je le savais en début de lecture. L’œuvre est suffisamment connue (encore que je croyais que Solaris était une étoile) pour savoir dans quoi on s'embarque, mais je me suis retrouvé happé par le texte. le background est vieillot mais on le laisse rapidement de côté. L'écriture est solide, beaucoup d'incursions dans le scientifique tant réel qu'imaginaire (et je suis bien en peine de faire le tri entre le vrai et l'inventé) et les descriptions imagées sont intéressantes à lire.
J'ai lu le livre en une journée et n'ai pas voulu le lâcher avant la fin. Pour un résultat nul, mais je le savais par avance. Allez comprendre pourquoi j'ai bien aimé...


Une atmosphère particulière, qui se rapproche pour l'ambiance de 2001 : L'Odyssée de l'espace, plus que de Rendez-vous avec Rama du même auteur (comme l'indique le quatrième de couverture).
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Il y a vraiment des époques qui vous persécutent. L'auteur a connu une sauvage guerre mondiale et l'assaut du fascisme le plus hideux qui soit. Il a aussi composé avec l'instauration d'une dictature collectiviste dans son pays et dans les pays voisins.
Pour rester libre de ses choix de vie, il n'a pas terminé ses études de médecine . Il les a reprises des années plus tard. Dans son étroit espace de liberté, il a trouvé le moyen d'écrire un nombre important de roman de SF traduits de l'autre côté du rideau de fer et en russe aussi.
Il a résisté et il a trompé son monde avec un langage qui lui est propre et dont l'ambigüité se dévoile ou se dérobe en fonction de l'approche du lecteur.
Solaris est un monde dont l'océan est vivant et global. Il est tout et il est bien plus que la somme de ses parties.
L'équipe qui étudie ce monde , le fait au prix d'une folie se traduisant par des hallucinations troublantes et réalistes qui s'invitent dans la réalité. Elles créent des mondes issus des souvenirs des victimes effrayées souvent .
L'aspect science-fiction est bien présent dans cette oeuvre . L'océan global est tangible et la station spatiale aussi.
Ce roman a généré deux films, un pour chaque côté du rideau de fer.
Deux sujets parallèles et imbriqués s'offrent au lecteur à mon humble avis misérable :
1- Comment peut-on communiquer sur un mode individuel avec un être totalisant , qui est tout et qui contient tout, qui est la totalité d'un environnement et qui est aussi ,l'environnement en soi et un sommet de l'étrangeté. Un être indéfinissable , car il est au-delà de la compréhension et des méthodologies qui essayent de le définir et de le comprendre. Les chercheurs essayent de l'étudier. Ils l'étudient en vain alors donc ,il reste une question absolue.
2- Par ailleurs les hallucinations et la folie que cet être génère chez ceux qui sont physiquement proche de lui vient avant tout du psychisme et de l'univers individuel des personnages qui le côtoient.
Cette folie oblige les personnages et le lecteur , à réfléchir à comment composer avec les démons personnels , avec le passé en général et avec des êtres issus des souvenirs, qui deviennent réellement présent dans une palpable réalité ? En n'étant pourtant que des habitants de la mémoire ,et le reflet de souvenirs plus ou moins construits.

Je suis longtemps passé à côté de Solaris car je suis assez rétifs aux organismes qui sont construit à l'échelle d'un monde.
Solaris plus que jamais montre que les univers de SF sont souvent des métaphores, malgré leur fonctionnalités romanesques et leur réalisme accomplis dans certains cas.
Comment communiquer avec le totalitarisme. A quoi mène une tentative définir le totalitarisme par ses effets ,quand on le vit concrètement et que l'on s'y confronte?
Toute cette folie conduit à être attentif à ce qu'il génère à l'intérieur du cerveau de celui qui y est confronté et à où se blottit l'étincelle de libre arbitre qui sauve l'avenir à default de sauver le présent.
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Incursion dans la SF, très loin de la planète Terre.
Kelvin est un psychologue propulsé sur la Station qui surplombe la planète-océan Solaris, pour tenter de percer son mystère et d'établir un contact avec elle. Il y retrouve deux autres spationautes, devenus paranoïaques et à moitié fous, et surtout terrifiés par les "visiteurs" qui apparaissent parfois dans leur chambre sous les traits d'êtres familiers. Ce phénomène ne tarde pas à toucher Kelvin, et va le pousser à faire des découvertes sur lui-même.

Quel roman étrange ! Typiquement le genre de science-fiction qui me fascine, nimbée de beauté et de réflexion, où l'on explore avec rigueur et poésie (c'est compatible !) à la fois tout un univers et l'âme humaine.
Avec mon esprit littéraire, je n'ai pas tout compris aux raisonnements scientifiques qui expliquent certaines particularités de Solaris, mais j'ai adoré le soin apporté par Stanislaw Lem à créer et faire vivre cette planète. J'ai été emportée par les descriptions de cet océan de plasma soumis à deux soleils (un rouge et un bleu), et en perpétuel mouvement. J'ai été épatée par le résumé des nombreux ouvrages rédigés par différents chercheurs se contredisant ; quelle imagination il faut, pour inventer un tel univers avec autant de précisions ! J'ai également été subjuguée par les sentiments, les émotions, les rêves qui peuplent cette histoire, et par les pensées qui s'en écoulent : "Nous ne voulons pas conquérir le cosmos, nous voulons seulement étendre la Terre jusqu'aux frontières du cosmos." -et cela date de 1961, Elon Musk n'était même pas né.

Bien qu'ardu et tortueux, exigeant, c'est un roman qui m'a émue par sa beauté et son humilité, et qui m'a envoûtée par sa perspective imaginaire. J'ai hâte de voir le film que Tarkovski en a tiré.
(Et si vous n'avez toujours pas trouvé de destination pour vos vacances, je vous suggère cette petite balade en apesanteur.)
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Planète océanique scrutée depuis 100 ans par les hommes, Solaris est l'objet de toutes les hypothèses. Face à ses manifestations multiples et complexes, sous forme par exemple d'extraordinaires symétries éphémères, les suppositions ont fonctionné à plein régime : l'océan est-il un méga-cerveau ultra-évolué ? n'est-il au contraire qu'une forme de conscience balbutiante ? ou alors régressive ?

Si la planète focalise autant l'attention, c'est probablement parce que bouillonne en souterrain la question mystique ultime qui taraude l'être humain : le fantasme du Grand Contact, celui que l'homme aurait enfin avec l'Autre, absolu, extérieur, un esprit supérieur qui serait à la fois explication ultime et onguent rafraîchissant sur nos affres existentielles.

Kelvin qui a consacré sa thèse à cette planète, débarque enfin, plein d'allant, dans la petite station d'étude où ne subsistent plus que deux scientifiques. Première douche froide : s'ils n'ont pas encore totalement perdu les pédales, ceux-ci en sont à 2 doigts ; on dira pudiquement qu'ils ne brillent ni par leur entrain ni par leur jovialité ; un stage intensif de décompression avec Christophe André serait à prévoir dans les meilleurs délais ; haute-tension palpable, atmosphère électrique, le burn-out n'est pas loin.

Kelvin va-t-il lui aussi perdre la boule sur la planète aux deux soleils ? on l'excuserait : dès son premier réveil, il découvre Harey à ses côtés, sa petite amie qui s'est suicidée 10 ans plus tôt, et qui plus est, bien décidée à ne pas le lâcher d'une Moonboots.

Il se rend compte rapidement que ses 2 autres collègues sont eux aussi accompagnés d'avatars venus de leur lointain passé. Serait-il possible que le méga-cerveau-océanique vienne fouiller dans les cerveaux humains et se serve de leurs anciennes empreintes pour créer des clones 3D ? Ses intentions sont-elles malveillantes ou bienveillantes ? Cherche-t-il à les étudier ou leur faire un cadeau ?

C'est passionnant de voir évoluer les réactions de Kelvin vis-à-vis de cet avatar de la femme qu'il a aimée. La rejetant tout d'abord, presque horrifié, il finit, par un processus finement décrit, par s'attacher à elle plus qu'à son projet scientifique. Traqué par la claustrophobie et le contact autistique avec ses collègues, il se raccroche avec une avidité enfantine à cette seule source d'affection.

Le rapport veille/rêve est également habilement exploré : les rêves de Kelvin ont parfois une acuité qui dépasse largement ses états d'éveil, ce qui est extrêmement perturbant, ça va de soi. Qui n'a jamais eu ce genre de doutes terribles sur l'ambiguïté de ses états de conscience ? D'où découle la question suivante : comment l'homme peut-il prétendre à la compréhension de l'univers s'il ignore tout de son propre inconscient, planète elle-même inaccessible ?

Un doctorat en physique atomique sera un petit plus appréciable pour comprendre certains passages, mais pas d'inquiétude, on s'y retrouve toujours en remplissant les trous par l'imagination.
L'imagination de l'auteur, elle, est totalement débridée, il a craqué les coutures et se donne à fond, hypothèses farfelues, images inédites, hypothèses théologiques galopantes, un bon creusage de tronche qui va faire passer à votre cerveau un sacré quart d'heure, mais qui vaut le voyage.

L'auteur a la finesse de ne rien trancher, rien fermer, il ne nous assène rien sur le coin du museau comme grand final, mais nous laisse avec toutes nos questions existentielles + les siennes, bon ben merci quand même.

Ce livre de 1961 et son hypothèse bottante de cerveau-océan reste en tête fort longtemps après la dernière page.



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« Je voudrais soulever la question de la motivation de l'apparition des créations F. J'introduirais la question de la manière suivante : que sont les créations F ? Ce ne sont pas des individus autonomes, ni des copies d'individus déterminés. Ce ne sont que des projections matérialisées du contenu de notre cerveau sur le thème d'un individu donné. »

Ces créations F sont une variante du thème des revenants, mais inscrites dans un cadre de science-fiction puissamment original. Je n'avais jamais lu de romans de Stanislas Lem, cet auteur polonais pourtant réputé et qui a fait partie de « l'âge d'or » du genre. J'ai été impressionné par celui-ci, paru au début des années 1960, mais qui a gardé toutes ses couleurs éclatantes.

Solaris est une planète que les humains étudient depuis de fort longues années sans avoir pourtant réussi à la comprendre. En apparence seul un océan d'une matière visqueuse et animée l'occupe, à l'exception de quelques « îles » stériles. de cet océan surgissent parfois de nombreuses créations éphémères, sortes de Palais du Facteur Cheval, qui se dissolvent plus ou moins vite. Elles peuvent néanmoins être observées de près, et même, pour les plus résistantes, être arpentées par des humains. Mais au fil du temps, malgré l'importante bibliographie issue de ces recherches et observations, les humains ont réduit leur présence.

Au début du roman un scientifique, Kelvin, arrive sur cette station mobile, qui flotte quelques mètres au-dessus de cet océan. Un de ses maîtres, Gibarian, l'occupe, avec deux autres savants, Snaut et Sartorius. Ou plutôt l'occupait car Gibarian s'est donné la mort quelques jours plus tôt…

J'ai lu ce roman sans avoir d'idée, même vague, de ce qu'il contenait. Et je me suis laissé envoûter par cette narration, qui abrite toutes sortes de niveaux de lecture. La simple histoire de revenants est magnifique, avec ses zones d'ombres, mais il y aussi du psychologique, du scientifique et même du religieux… cela m'a donné fortement envie de poursuivre avec d'autres romans de cet auteur.
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Depuis sa découverte, il y a plus d'un siècle, Solaris fait les délices et les tourments de la communauté scientifique terrienne. Entièrement couverte d'un océan aux comportements imprévisibles et fantastiques, cette mystérieuse planète hébergerait de la vie. Mais quel type de vie exactement et comment entrer en contact avec elle ? Deux difficiles questions qui n'ont toujours pas trouvé leurs réponses malgré des décennies de recherche acharnée. Passionné depuis toujours par Solaris et ses énigmes, le docteur Kelvin se rend pour la première fois sur la planète où l'attend une désagréable surprise. Dans la station Solaris à moitié désertée, les quelques membres de l'équipe scientifique restants semblent dévorés par l'angoisse et la paranoïa, mais aucun n'accepte de révéler au nouvel arrivant les raisons de cette déliquescence. L'existence de Kelvin va brutalement basculer quand il fait la rencontre en chair et en os d'une jeune femme qu'il a aimée jadis, Harey. La belle, la charmante, la si sensible Harey qui s'est suicidée dix ans auparavant sur Terre après leur rupture… Entre terreur et espoir, Kelvin va tenter de percer le Mystère Solaris afin de sauvegarder sa santé mentale et, par la même occasion, celle des autres habitants de la station.

« Nous ne recherchons que l'homme. Nous n'avons pas besoin d'autres mondes. Nous avons besoin de miroirs. » C'est peut-être dans cette phrase lâchée par un membre de la station à bout de nerfs que réside toute l'essence de « Solaris », étrange roman à la frontière du récit de science-fiction et du conte philosophique. L'errance de l'homme dans l'Espace n'y est pas motivée par la soif de découverte ou la curiosité, mais par le besoin d'y retrouver une image de l'humanité sublimée : l'homme-conquérant, l'homme-explorateur, l'homme-héros. Mais que se passe-t-il quand l'Espace nous tend soudain le miroir tant désiré ? Comment supporter la cruauté, l'impitoyable véracité de ce reflet-là ? Avec finesse et brio, Stanislas Lem explore les tréfonds les plus douloureux de l'âme de ses personnages et nous livre une fascinante leçon sur l'être humain et son rapport à l'Inconnu. Ecrit dans un style un peu froid et comportant quelques longueurs, « Solaris » n'en reste pas moins un récit d'une indéniable profondeur et agréablement atypique : de la bonne science-fiction à l'ancienne, engagée et subtile, qui captivera les amateurs de Bradbury et d'Asimov.
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Ecrit en 1961, ce roman de science-fiction m'a pourtant paru très moderne particulièrement pour les questions qu'il soulève.

Trois hommes se retrouvent isolés dans une station spatiale sur une planète singulière où se lèvent alternativement deux soleils, l'un rouge et l'autre bleu, et où règne un océan omniprésent et sans nul doute omnipotent.
Kris, le personnage principal, arrivé le dernier dans la station, découvre en même temps que le lecteur de quoi il retourne (suicide du collègue qui l'avait appelé en renfort) et fait diverses expériences pour comprendre ce qu'il se passe. En proie à bien des doutes, il croit devenir fou lorsqu'il tombe nez à nez avec sa femme morte il y a des années, pense parfois qu'il est en train de rêver, tente d'apporter une explication scientifique… et nous suivons ses pensées alors que l'intrigue se resserre.

J'ai beaucoup aimé le côté mystérieux et quelque peu inquiétant du décor et de l'atmosphère dès lors que Kris entre dans la station. Nous n'avons alors de cesse de comprendre ce qu'il s'est passé et ce qu'il va se passer ensuite. Il n‘y a guère d'action à proprement parler, les réflexions sont plus nombreuses ainsi que de longs passages scientifiques. Les réactions de Kris m'ont parfois surprise voire agacée ; il me semblait quelque peu passif ou bien d'humeur changeante. Mais j'ai aimé le propos développé par l'auteur autour de la conquête spatiale, de la volonté de l'homme de tout vouloir modeler à son image alors que d'autres « natures » peuvent exister dans l'Univers sans que l'homme ne puisse les expliquer... ni ne parvienne à communiquer avec. Cette emprise sur les pensées et les rêves est également troublante.

Cette lecture a été addictive jusqu'au bout, presque hypnotique. Elle me laissera des images marquantes en tête.
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Solaris, c'est cette planète si éloignée de la Terre qui a fait tant débats il y a deçà plusieurs décennies, une espèce d'océan aux comportements imprévisibles et mouvants. Une station orbitale y avait été envoyée pour la comprendre, pour l'appréhender, la démystifier, même. Mais le contact ne fut pas simple et incompréhensible. le temps s'écoula, lentement, les résultats ne vinrent pas et les crédits budgétaires diminuèrent de façon drastique. Aujourd'hui, la station est quasiment à l'abandon lorsque Kelvin, solariste convaincu et grand psychologue de formation, y atterrit après un long voyage depuis la Terre de plusieurs mois…

Mais quels sont les évènements qui ont précipités la chute de la station orbitale. A son bord, il n'y reste plus que deux personnes, et… des visiteurs ! Qui sont-ils ? D'où viennent-ils ? Ces « visiteurs » sont arrivés peu de temps après que les membres de l'équipage envoyèrent une dose massive de rayon X afin de faire réagir l'océan à ces nouveaux stimuli. Est-ce Solaris qui les enverrait pour engager un contact ?

L'homme n'est pas prêt pour certains voyages.

Qui sont ces « visiteurs » ? Simplement des images psychiques enfouis tout au fond de l'esprit des visités, simplement des êtres faits n'ont pas de chair et de sang mais de pensées humaines que l'homme a voulu oublier. Sur le plan humain, ils se régénèrent indéfiniment et semblent plus « vrai » que nature.

L'homme est un conquérant et dans ce but, il n'a pas hésité à bombarder une planète inoffensive sans même en étudier les conséquences à court - moyen - long terme. Il voulait savoir pour dominer. Il a reçu en échange non pas des extra-terrestres mais des visiteurs issus de son propre cerveau... dans les profondeurs les plus enfouies de la mémoire. Et ce qui a été stocké au plus profond de la mémoire, ce qu'on a tenté d'oublier, ce qui a été refoulé est forcément douloureux, profondément douloureux...
Lien : http://leranchsansnom.free.fr/
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Quel étrange roman que ce célèbre Solaris !
Depuis plusieurs décennies, les scientifiques de la Terre se heurtent au mystère de cette planète lointaine aux deux soleils bleu et rouge, animé par un fascinant océan fait d'une sorte de matière plasmatique, ou protoplasmique, dont on ne sait pas s'il est un être vivant. Une station à été installée sur place pour permettre à quelques scientifiques de percer ses secrets. Le Dr Kelvin est le dernier arrivé, en remplacement du professeur Gibarian, étrangement décédé. Les deux scientifiques, Sartorius le physicien et Snaut le cybernéticien ont l'air dérangés, entre terreur et isolement. Kelvin va découvrir peu à peu que des êtres étranges, d'apparence humaine mais avec on ne sait quoi de modifié, sortes de fantômes issus des souvenirs douloureux de chacun d'eux, sont matérialisés par l'océan et ne les quittent pas d'une semelle. L'océan les régénèrent si on veut les éliminer. Pour Kelvin, ce sera Harey, sa compagne de la Terre qu'il n'a pas su empêcher de se suicider. Entre séjours à la bibliothèque de la station où sont consignées sur des décennies toutes les théories humaines et contradictoires sur la nature de l'océan solarien, observation et conversations avec ses inquiétants collègues et avec Harey, non moins inquiétante dans les interrogations multiples qu'elle suscite (elle a conscience qu'elle n'est pas la vraie Harey, veut-elle à nouveau se faire du mal, en faire à Kelvin, est-il son jouet pour une expérience ?).
Le récit est marqué par l'omniprésence d'une atmosphère pesante, oscillant entre rêve et angoisse, dans un univers aux cieux colorés, où des formes étonnantes sont générées par cet océan tout-puissant au mystère décidément insondable. Les personnages inquiètent, l'atmosphère de huit-clos devient peu à peu irrespirable, alors même qu'il ne se passe presque rien. La patte de Stanislas Lem est en cela remarquable, le lecteur qui pourrait s'ennuyer dans les longs passages descriptifs des théories scientifiques sur l'océan y trouve des briques dont il pense pouvoir trouver l'utilité pour dénouer le mystère, et souffler un peu dans ce climat oppressant. Ce même lecteur suit avec anxiété l'évolution des relations entre Kelvin et Harey...vont-ils pouvoir vivre à nouveau le grand amour ou tout espoir de "normalité" est-il vain dans cet univers factice et truffé de faux-semblants ?

Un roman très exigeant, psychologique, hypnotique, au propos quasi philosophique sur l'altérité, l'incommunicabilité, Dieu, la place de l'Homme dans l'univers, la science et le doute, la culpabilité...où l'auteur témoigne d'une érudition scientifique remarquable, et nous livre de très belles pages de littérature (la dernière page est superbe). Ce roman se mérite, il est parfois difficile d'accès, il nécessite de la concentration pour bien en apprécier les qualités qui en ont fait un jalon légendaire de la grande SF d'anticipation.
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Kris Kelvin, un psychologue, arrive par capsule dans la station orbitale qui tourne autour de la planète Solaris. Nous sommes à des années lumières du Système Solaire. Solaris a été découverte environ 100 ans avant la naissance de Kelvin, elle a engendré une littérature abondante de milliers d'ouvrages. Une grande bibliothèque qui sent le vieux bois lui est même dédiée au coeur du vaisseau spatial. Kelvin s'y sentira à l'aise, essayant de deviner le mystère de la planète en se plongeant dans des monographies anciennes, se nourrissant des théories de grands physiciens fascinés par Solaris

Kelvin raconte, à la première personne, ses premiers pas dans la station orbitale. On y croit, on s'y voit. 
Il rencontre Snaut. L'homme est îvre et paraît cacher un secret. Il finit par avouer la mort de Gibarian, le scientifique qui a fait venir Kris Kelvin. Il tente de le mettre en garde: 

« Si tu voyais quelqu'un d'autre, tu comprends, quelqu'un qui ne serait ni moi, ni Sartorius, tu comprends, alors... »

Comme un chat qui pense vous faire un cadeau quand il vous apporte une souris dans sa gueule, une des hypothèses formulée sera que l'Océan, cerveau protoplasmatique rangé dans la catégorie Métamorphe, fait des offrandes aux derniers hommes de la station orbitale. Comme s'il avait lu en eux, comme s'il s'était livré à des vivisections psychiques. 


L'histoire de ce classique de la science-fiction est connue puisqu'il a donné deux films. On en sort avec de belles images dans la tête, une mélancolie du bout de l'univers. Lem excelle à rendre le malaise qu'on peut éprouver au contact d'une entité mystérieuse, hors-norme et pourtant totalement pacifique. le contraste vient de là: les hommes de la station orbitale sont minés par leur psychisme, le retour matérialisé des fantômes de leur vie. Et les fantôme sentent ce malaise, jusqu'à être poussé au suicide, mais les fantômes peuvent-ils mourir ?

Fantastiques descriptions de l'Océan, longuement répertorié et analysé dans la littérature scientifique que compulse Kelvin, et qui a donné naissance à des mots comme mimoïde, longus. L'auteur décrit un organisme en perpétuelle transformation, parfois solide, parfois liquide, non agressif mais rendu dangereux par son imprévisibilité. Feuilleté bitumeux, pellicules, grappes piriformes, grumeaux, cratères, vagues, excroissances, bourgeons, l'océan se dilate, se tuméfie, gargouille, devient phosphorescent, opalescence, abîmes vertigineux...

Ces phases de descriptions et ces mises en abyme dans la littérature du passé forment un contrepoint méditatif au récit tragique de ce qui hante les trois habitants de ce disque d'un rayon de 100 mètres de diamètres. Beau roman de l'attente, du lointain, on en sort puissamment dépaysé. Et on comprend qu'il ait donné envie à des cinéastes. 

Lien : http://killing-ego.blogspot...
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