AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de zebaron


Dans ce genre d'ouvrages, j'ai souvent peur que l'auteur cherche à faire l'étalage de ses connaissances plus qu'à les transmettre. Ce n'est pas le cas de Lodge, heureusement, que l'on sent animé par un véritable désir de communiquer au plus grand nombre possible sa passion pour la fiction dans le but non pas tant de former des « singes bavasseurs », des critiques littéraires mais bien d'allumer des feux chez des écrivains de fiction, des « joueurs ». En effet, avec son style éditorial, humoristique, concis, il aborde des oeuvres de la littérature comme dans l'intention de mettre au défi son lecteur. Comme s'il disait : « Tiens, je te décortiques ceci, je te fais le condensé de ce qui s'est fait jusqu'à présent, parce qu'il faut savoir avant de commencer, bref je te donnes tous les outils, maintenant à toi de jouer. »

D'accord, le fait qu'il n'a pas manqué de sauter sur l'occasion d'une oeuvre anthologique, « savante», pour faire la promotion des romans dont il est l'auteur – par exemple au chapitre « Les noms » il cite en exemple Nice Work, Jeux de maux et Jeu de société - m'a un peu fait tiquer mais bon, après tout, qui pourrait le lui reprocher ? Évidemment, l'art de la fiction, ce n'est pas que ça.

L'ouvrage prend la forme d'un essai divisé en courts chapitres thématiques traitant d'un aspect de ce domaine passionnant qu'il appelle aussi bien la rhétorique que, comme son titre l'indique, l'art de la fiction. Chaque chapitre ouvre sur généralement un, parfois deux ou trois extraits tiré de romans choisis parmi ceux qui font partie du patrimoine littéraire de l'humanité. La plupart sont en Anglais. Les traducteurs de Lodge ont fait le choix judicieux de les présenter tels qu'ils sont dans leur langue originale et de rajouter à la suite une traduction en Français. Chaque extrait est utilisé à titre d'exemple pour illustrer tel ou tel aspect de la fiction. Par exemple, dans le chapitre consacré à « l'imagination de l'avenir », Lodge analyse – rien de surprenant - un extrait tiré de 1984 de George Orwell.

Attention, ne nous laissons pas berner par la préface ! Même si l'auteur annonce avoir conçu son livre sans ordre chronologique, de façon à ce qu'il puisse être consulté « à la carte », au hasard, il a intitulé son premier chapitre « le début » et le dernier « la fin », ce qui nous astreint à une lecture linéaire. L'essai réunit une série d'articles qui ont été publiés dans un journal Anglais, l'Independant on Sunday dans les années 90 mais, en réalité, le lecteur désinvolte aura l'impression de manquer le fil conducteur de l'ouvrage s'il ne le parcourt pas d'un bout à l'autre, encouragé par le « work in progress » en trame de fond. En effet, l'auteur réussit à introduire des notions techniques et pointues de littérature qui vont revenir à travers ses articles qui couvrent des sujets plus vastes et généraux. Exemple, il explique ce que c'est que la métaphore dans le chapitre dédié au symbolisme, ce que c'est que le style indirect libre dans le chapitre consacré au monologue intérieur, si bien que ça vaut le coup, en fait surtout pour le lecteur moins initié, de suivre l'ordre chronologique. Remarquons que malgré tout ce côté pédagogique, les articles sont hyper concis et le survol nous laisse sur un véritable sentiment de satisfaction.

Lodge a déjà enseigné la littérature anglaise à l'Université. « Déformé » par ce métier, c'est donc essentiellement dans le corpus de cette tradition en particulier qu'il va piger pour ses exemples. Néanmoins, cela ne nous donne pas l'impression d'une limite, puisqu'il emprunte aussi ailleurs, dans la réserve de la littérature mondiale contemporaine notamment, pour citer un passage tiré du « livre du rire et de l'oubli » de Milan Kundera dans son chapitre consacré au réalisme magique. Il ne faut pas sous-estimer un « spécialiste » pour qui cette étiquette trop étriquée ne colle manifestement pas, qui connaît aussi bien son Proust, son Zola, que Virginia Woolf, Richardson, George Eliot et William Thackeray, pour n'en nommer que quelques-uns.

Jusqu'à quel point l'auteur a réussi son pari, si ce dernier était de susciter chez des lecteurs le goût de l'écriture ? Il suffit d'en juger par l'appréciation que j'en fais sur mon compte babelio !
Commenter  J’apprécie          52



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}