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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Critique réalisée dans le cadre de « Masse critique ». Merci à Babelio et aux Editions Gallmeister.

Je n'ai pas lu de polar depuis longtemps, et j'ai choisi « Cible mouvante » pensant à une récréation, une évasion entre deux livres plus « sérieux », sans pour autant que dans mon esprit lire avec pour seul but le divertissement soit quelque chose de péjoratif.
Arrivée au terme du roman, je réalise à quel point mon attente avait quelque chose d'étriquée. Oui, je me suis divertie, oui je me suis évadée, mais je me suis rendue compte que le plaisir pris à la lecture n'avait rien à envier à celui ressenti à la plongée dans une oeuvre philosophique, un recueil de poésies un peu abscons, ou toute entreprise plus « intellectuelle ». J'étais victime, dans ma réflexion, d'un état d'esprit un peu trop « français », inconnu des anglo-saxons, pour lesquels l'entertainment est un art pris au sérieux, qui a tendance à considérer cette littérature comme un genre un peu mineur. Mea culpa.

Oui, on peut se divertir avec un art consommé de la littérature. L'exercice s'avère même parfois plus difficile, car il s'agit ici de respecter les règles d'un genre bien défini, en l'occurrence le polar, ce qui suppose une intrigue policière, de l'action, des personnages hauts en couleur, quelques meurtres et quelques coups de révolver. Tout cela est présent dans « Cible mouvante », et le lecteur avide de sensations fortes ne sera pas déçu.

Kenneth Millar, alias Ross MacDonald, a écrit ce roman noir en 1949.
Quand je me suis engagée dans la lecture, il m'est apparu que l'intrigue était secondaire, mon attention focalisée principalement sur les personnages tous plus pittoresques les uns que les autres, du détective Lew Archer, cynique mais sentimental à sa façon, désabusé mais pas totalement blasé, aux protagonistes qui gravitent autour de lui telles des figures aux mille facettes qui n'attendent qu'une chose : que vous leur tourniez le dos pour mieux vous abattre, au sens propre comme au figuré.
Dès les premières pages, j'ai éprouvé une certaine jubilation à regarder se déchirer, se flouer, se séduire et se repousser ces spécimens représentatifs de l'âme humaine dans toute sa complexité, soutenue par le style éblouissant de l'auteur : sans rechercher l'effet forcément spectaculaire, celui-ci a ciselé sa prose avec un art consommé de l'image évocatrice et souvent inattendue, distillant descriptions lyriques mais abruptes des paysages de bord de mer, des états d'âme du héros revenu de tout et à qui on ne la fait pas, des routes poussiéreuses sur lesquelles les décapotables américaines transportent argent et cadavres…
Impossible de ne pas penser au film de John Huston, « le faucon maltais », au « Grand sommeil » d'Howard Hawks (celui-ci ne disait-il pas, sous forme de boutade, qu'il recherchait toute personne qui lui explique l'intrigue du film…), à la nonchalance fatiguée d'Humphrey Bogart, la beauté vénéneuse de Lauren Bacall ou Mary Astor…

Mais la littérature a ceci de supérieur au cinéma que nous nous fabriquons nos propres images avec ce que nous sommes, et quand un lecteur s'attardera sur le style du détective qui lui raconte l'histoire, un autre ne manquera pas de choix pour visualiser les personnages féminins qui, je dois dire, emportent la palme haut la main de la perversité, comme bien souvent dans ce style de roman. Mais, et j'insiste, avec « Cible mouvante », la qualité est au rendez-vous, au plus haut point et de la plus belle des manières.
L'auteur ne relâche jamais son effort. Nulle phrase n'est banale, un mot, une métaphore chatouillent les neurones de la plus agréable des manières, avec ce tour de force que rien non plus n'est gratuit et que tout concorde à faire avancer l'intrigue sans que nous y prenions garde.
Ainsi, pour en revenir à ma première impression, j'ai cru naïvement me contenter de ma délectation à l'art consommé de l'auteur en faisant passer la résolution de l'énigme – ayant pour base le kidnapping d'un homme richissime – au second plan, et, je me suis aperçue à mon insu, arrivée à l'approche du dénouement, que j'étais bien plus curieuse que je ne le croyais du fin mot de l'histoire.
Aux abords des dernières pages, j'ai réalisé à quel point l'auteur avait fait monter crescendo le suspens sans avoir l'air d'y toucher, m'avait baladée à son gré, emprisonnée dans sa toile d'araignée.
Je n'ai rien vu venir. La fin m'a cueillie comme une débutante.
Pour conclure, je ne saurais que trop vous conseiller de plonger dans la lecture de « Cible mouvante » qui, en plus de vous faire passer un bon moment, vous épatera par son style percutant, efficace, qui sans nul doute a dû influencer et continue d'influencer toute une flopée d'écrivains envieux. La démonstration est si éblouissante qu'on ne peut que les comprendre et leur emboîter le pas…
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Les éditions Gallmeister se sont lancées dans la réédition des romans de Ross Macdonald (impitoyablement massacré par la traduction initiale comme nombre de ses compatriotes). Une nouvelle édition intégrale à ne pas rater pour les amateurs de polar. Moins connu que son contemporain Chandler, Macdonald (que je découvre) est un auteur et un styliste de tout premier plan. En créant le personnage de Lew Archer (incarné à l'écran par Paul Newman, ça me va), il ajoute de la profondeur psychologique au privé « hard-boiled », qui devient plus attentif aux sentiments et motivations des protagonistes.

Crumley et Ellroy seront fortement marqués par son oeuvre (La Trilogie Lloyd Hopkins lui est dédiée), excusez du peu.

« La guerre et l'inflation engendrent toujours leur vaste lot de salauds, et un beau paquet d'entre eux a choisi de vivre en Californie ». C'est donc dans les environs de Los Angeles que se rend Lew Archer dans Cible mouvante (le premier de la série où l'auteur crée le personnage), appelé par une milliardaire paralytique qui lui demande de retrouver son milliardaire de mari.

- Asseyez-vous, monsieur Archer. Vous devez vous demander pourquoi je vous ai fait venir. A moins que non ?
Je pris place sur une chaise longue à côté de son bain de soleil.
– Je m'interroge. Je conjecture, même. Je fais surtout dans le divorce. Je suis un chacal, vous savez.
– Vous vous diffamez, monsieur Archer. Et vous ne parlez pas comme un détective, je me trompe ? Je suis contente que vous ayez mentionné la question du divorce. Je veux qu'il soit d'emblée très clair que ce n'est pas mon objectif. Je veux que mon mariage tienne. J'ai l'intention de survivre à mon mari, voyez vous.Paul_Newman_Harper

L'intrigue, complexe, peuplée de personnages ambigus et secrets, pleine de rebondissements, est menée tambour battant. L'ambiance, noire, décadente et moite, mêle secrets de famille de la haute société milliardaire, où on se fait servir le café par un Philippin aussi stylé que mystérieux, et bars interlopes, où la pianiste cocaïnomane joue un jazz inventif dans une ambiance saturée de fumée de cigarettes, tandis que la femme fatale de l'histoire, enivrée au whisky, titube sur ses talons hauts. L'enquête du privé ressemble à un jeu de piste, les coups pleuvent, et les poursuites en voiture se font à 80 km/h. Bref, on est sur la Côte Ouest des Etats-Unis dans les années 40, on aime ou pas. Ajoutez à cela la vivacité des dialogues, l'humour discret et la beauté du style, alliant concision, vigueur, sens aigu du détail, et lyrisme retenu des descriptions : un régal
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Une belle rencontre avec ce détective privé cool et un peu cynique. Son enquête est menée promptement, il ne fait pas de cadeau, que ce soit aux "mauvais" mais aussi à ses "employeurs".
Histoire se passant après la 2ème guerre mondiale, dans des USA en reconstruction et en recherche de sensations. Lew se démarque en parcourant son chemin et en traversant cette ambiance allègrement sans fioriture et sans prise de tête.
Le petit plus qui m'a vraiment séduite, les traits d'humour parcourant les dialogues et les descriptions, tantôt noir, tantôt cynique. Ces petites phrases bien placées et à bon escient ainsi que l'intrigue et l'enquête rondement bien narrée m'ont conquise !
Lien : http://jenta3.blogs.dhnet.be..
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