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Critique de jlvlivres


« Une fois (et peut-être une autre) » est un petit livre écrit par l'écrivain grec Kostis Maloùtas, traduit pat Nicolas Pallier (2019, Editions Do, 140 p.)
Cependant, avant de le lire et d'en faire la critique, il me paraît important de lire « (x) fois », roman de l'Irlandais Samouïl Ascott, traduit par Coline Lapierre (2019, Editions Od, 136 p.)
www.babelio.com/livres/Ascott-xFois/1157953

Une fois, ces conseils formulés, on peut attaquer ce livre écrit à quatre mains, voire à huit. Ce qui aurait pu passer pour un livre magique, ou sacré, indien écrit par Vishnu, Dieu de la paix si l'on en croit Pierre Dac.
Tout commence comme par un préambule « L'un des aspects les plus séduisants de la réalité est son imprévisibilité, y compris lorsqu'elle se comporte de la plus simple et prévisible des manières — quoique d'aucuns aient pu soutenir que c'est dans ce cas précis que réside sa magie ». Exit donc la magie, il va falloir s'ancrer dans la réalité.
Second préambule avec l'introduction de Wim Wertmayer et Joaquín Chiellini, écrivains renommés sans doute, le premier allemand, et le second uruguayen.
« Au début du mois de novembre 1999, le 7 précisément Wim Wertmayer publia son roman, une oeuvre qu'il avait commencé à élaborer une décennie plus tôt ». le tout auprès de la maison d'édition Weißwald. Peu de précision sur le pays ou même la ville, ou tout autre renseignement géographique. « le personnage principal du roman ne s'appelait pas Youri. Ni Enrique ; Abébé ; Daisuke ». Cela restreint les confusions et les procès à venir pour plagiat. Non c'est simplement « le Sec ». Un pseudonyme sûrement, mais facile à retenir, à moquer avec son profil de saucisson.
Contrairement à mon habitude, je ne vous ferai pas état de sa biographie, même restreinte, ni la liste des ses oeuvres, sauf une, citée dans un ouvrage de Samouil Ascott (1943-2013) « (a number) times ». C'est un premier roman d'un auteur irlandais, critiqué dans « The Dublin Times » comme étant un « un roman dont le souffle ne s'épuise pas à l'intérieur de ses quelques pages ». L'auteur y cite notamment un roman allemand de ce Wim Wertmayer. C'est une des rares références que j'ai pu trouver.
Quoiqu'il en soit, le roman « Une fois (et peut-être une autre) » narre sommairement la vie de ce « le Sec ». Vie sans traits extraordinaires. « Il était né un dimanche, jour de repos, cadet d'une fratrie de trois enfants. C'était un soir pluvieux, les membres de la famille accouraient à pas glissants sous leurs pardessus trempés, impatients, et pas mécontents d'échapper à la pluie ». Personnage qui a fait toutes sortes de métiers (serveur, agent d'entretien, colleur d'affiches, distributeur de prospectus, etc) et finira même en vendeur en librairie. La déchéance en quelque sorte. Marié, sans enfants, il mourut « presque seul à l'âge de cinquante-quatre ans ». La fratrie compte également deux soeurs « la Grande et la Petite ». Elles lui offrent « un pull rayé » pour son anniversaire, ce qui est signe d'une bonne entente familiale.
Presque simultanément, le lendemain pour être exact, 8 novembre 1999, les Editions « Libros de Papel Transparente » publiaient en Uruguay un livre de Joaquin Chiellini. Hélas, sans doute par manque de moyens publicitaires, le livre n'est vendu qu'à trois exemplaires. Il est vrai, que pour avoir séjourné une courte semaine à Montevideo, j'avais été frappé par le peu de librairies dans la ville. C'est véritablement le jour et la nuit d'avec Buenos Aires voisine, où l'on trouve même des librairies d'occasion, chose assez rare en Amérique du Sud, sauf au Chili et Argentine. J'y avais même déniché un numéro ancien (1883) de la revue « Lutèce », où il y avait entre autres le « Sonnet des Voyelles » de Rimbaud.
Il faut reconnaître à Kostis Maloùtas le sérieux de ses recherches concernant cette littérature uruguayenne. Certes, on connait les traductions de l'oeuvre épique décrite par Augusto Roa Bastos du Paraguay voisin. La guerre du Chaco ou guerre des Trois Frontières, y est décrite de façon remarquable dans ces villages pauvres de l'intérieur. Un grand moment que ce village, Itapé, dominé par une statue du « Christ Lépreux », qui surplombe les habitations dans « Fils d'Homme » traduit par François Maspero (1995, Seuil, 372 p.) parce que les habitants lui ont refusé abri et nourriture. Et cet autre village voisin, Sapukai quasi détruit par l'explosion d'un train chargé de dynamite dans la gare où attendaient civils et soldats. le sérieux des recherches de Maloùtas est attesté par l'histoire du livre de Chiellini, qui fort de ses trois exemplaires vendus, est resté oublié pendant sept années avant qu'un critique ne le relance. Il est vrai que le pays traverse une crise économique liée à la crise bancaire argentine de 2002 et aux alternances entre partis « blanco » et « colorado ».
C'est compter sans l'acharnement de Guillermo Hurtado, lecteur méticuleux, qui, ayant acheté livre de Chiellini, demande à Rodrigo Caiman, le directeur de « Libros de Papel Transparente » des précisions sur Chiellini, ainsi que sur Wertmayer à son éditeur Dieter Moogerfooger. Ils se retrouvent à Montevideo pour diner dans le quartier de Pocitos, au bord du fleuve « il parait que la viande est très bonne ici », ce qui est une vérité. La viande uruguayenne set en effet de très bonne qualité, servie dans des parilladas, où l'on voit la viande griller. On la voit aussi grésiller et rejeter son sang sur les vêtements des convives, lors du service, quelquefois olé-olé. Dont une « Parillada Trouville » sur l'Avenida Churraco. Etonnant de trouver ce nom, avec le club éponyme, club sportif, mais aux prétentions et publics plus que chics.
Bref, lors de cette réunion, les deux livres et leurs traductions, de l'allemand ou de l'espagnol, sont examinées, ligne après ligne, comparées, passées au crible sur leur endroit et leur envers. Cela constitue un nouveau roman, écrit par quelques paires de amains, je ne compte plus. Et comble de surprise « l'intrigue du roman avançait en parfaite symétrie avec le développement de l'embryon et du foetus, cette conjecture peinait à convaincre ». Seul point positif de cette confrontation, la présence de la femme. Ainsi, ne faut-il pas l'oublier, le fait d'avoir à relier un réseau de points numérotés, dont, heureuse aubaine, les Editions Do nous transmettent la solution dans leur dessin de couverture. Solution qui ne fournit pas beaucoup plus de clés, c'est aussi une volonté des deux auteurs (ou de Kostis Maloutas) (ou de tous ensemble). Ce qui est peu normal, l'intérêt du livre n'étant pas là. Ce serait un peu comme lire « La Disparition » de George Perec (1989, L'Imaginaire, 328 p.) et n'y pas voir « un rond pas tout à fait clos finissant par un trait horizontal ».
Autant reprendre le projet de Pierre Ménard de ré-écrire « Don Quichotte » à l'égal de celui de Cervantès suggérant que « la vérité, dont la mère est l'histoire, émule du temps, dépôt des actions, témoin du passé, exemple et connaissance du présent, avertissement de l'avenir ». Mais ce serait outrepasser l'écriture de Jorge Luis Borges qui ne parle nulle part de « le Sec » et de ses soeurs, ni dans « Fictions », ni même dans « L'Aleph ». Pour en être tout à fait sûr, j'ai vérifié dans « El Aleph Engordado » de Pablo Katchadjian (2009, Imprenta Argentina de Poesia AIP) tiré à 200 exemplaires). Texte augmenté de « El Aleph » et qui, aux quelques 4000 mots de l'original « El Aleph », Pablo Katchadjian a ajouté 5600 autres. Ce qui, évidemment n'a pas plu aux héritiers de Jorge Luis Borges, d'où procès intenté par sa veuve Maria Kodama (et le soutien de nombreux auteurs hispanisants).
Sur ces faits débarque Lamkos Tautosi, à Toronto. Il a longtemps vécu en Afrique, ayant effectué un long séjour « dans les villages reculés de la chaîne des Maloutis au Lesotho, où le vent, le givre et les tempêtes constituaient une réalité quotidienne ». Mais il y a rencontré Buang, « femme pleine d'énergie et d'attention ». Et donc Lamkos est triste. « Lamkos Tautosi pense à Buang. Lamkos Tautosi pense à sa femme et pleure des larmes de sang ».
Exit la tristesse et Toronto. Retour au bureau de Dieter Moorgerfooger. Dans lequel Lamkos Tautosi offre à ses interlocuteurs le livre que le groupe d'auteurs réunis par l'éditeur allemand concevait. C'est le livre dont les personnages précédents sont les personnages.
Bref, je suis un peu perdu, et malgré d'avoir dessiné les traits entre le rébus à points, et n'ayant pu analyser mon test de Rorschach ainsi produit, je m'en retourne à une analyse du texte.
Où je suis encore un peu plus perdu, c'est le fait que Kostis Maloutas est tout à fait plausible en tant qu'écrivain grec. Quoique mon exemplaire de « Une fois (et peut être une autre) » des Editions Do soit en fait les épreuves non corrigées. Il me manque peut-être la version originelle de ce livre. Recherche donc auprès des Editions Ekati, et j'ai trouvé une copie de « Mια Φορά (Kαι Iσως Aλλη Mια), soit (une fois (et peut-être une autre)) premier ouvrage de Kostis Maloutas (2015, Ekati, 112 p.). Il y a même un second livre « Το Τελευταίο Σήμερα» (Le dernier aujourd'hui) (2017, Ekati, 112 p.). Il y est question d'un roi qui ne pouvait pas accepter que le soleil soit celui qui fasse tourner les pages du journal, alors il décida de le remplacer. « Maintenant, le soleil est à nouveau haut et nous sommes ici en train de transpirer. C'est un jour comme un autre. Nous traversons l'indéfini aujourd'hui. Nous sommes le 14 juillet 2014, dans la cinquième année civile du sixième calendrier. Aujourd'hui pourrait être un autre jour ». Il faut donc chercher ailleurs dans l'idée de l'auteur, si il est affirmé que c'en est bien un, d'avoir écrit ce (ou ces livres) et de l'avoir soumis aux Editions Do.

Donc, on reprend depuis le début. Olivier Desmettre, le directeur des Editions Do, a édité un livre, et même plusieurs. Et ces livres sont bons et agréables à lire. C'est tout à son honneur. Il a même édité Kostis Maloutas avec son « Une fois (et peut-être une autre) », après l'avoir fait traduire du grec par Nicolas Palier. Fortuitement, il édite aussi « (x) fois », roman de l'Irlandais Samouïl Ascott, traduit par Coline Lapierre (2019, Editions Do, 136 p.). Il est vrai que c'est effectivement son métier que d'éditer des livres.
Samouil Ascott, tout d'abord. A une lettre près (un « c » au lieu d'un « k ») c'est l'anagramme de Kostis Maloutas. La référence à la critique du « The Dublin Times » est tirée du site des Editions Do. D'ailleurs le journal de Dublin, ou d'Irlande est « The Irish Times » ou « Irish Independent », « Irish Mirror » ou « Irish Sun » pour les journaux nationaux. « Dublin Gazette » ou « Dublin Live » pour les locaux. Quant aux publications littéraires ce sont « Dublin Review of Books », « The Irish Literary Times » et la plus récente et agressive « The Stinging Fly ». Rien sur cet auteur dans ces trois revues. Rien non plus dans les deux volumes de Granta sur la littérature irlandaise moderne, généralement en pointe pour les nouveaux auteurs « New Irish Writing » (Granta #135) et « Irish Short Story ».

Dans le même genre, on pourra lire les oeuvres complètes de l'Oulipo, avec ses contraintes. Et parmi elles, mises à part Raymond Queneau et Georges Perec, qu'il faut lire de toutes façons, on pourra lire tout Jacques Roubaud, dont « le Grand Incendie de Londres », réédition des 5 premières branches du Projet en un seul volume (2009, Seuil, Fiction & Cie ). Ou plus abordable « le Voleur de Nostalgie » de Hervé le Tellier (2005, le Castor Astral, 218 p.) dans lequel un journaliste du nom de Giovanni d'Arezzo publie des recettes de pâtes. Puis il reçoit une lettre d'un lecteur de Florence qui dit s'appeler lui aussi Giovanni d'Arezzo. Jusque-là rien d'anormal. « J'ignore par quels détours tu as pu choisir ces prénom et patronyme. D'Arezzo est sans doute assez noble pour faire oublier la banalité du Giovanni et l'ensemble a, j'imagine, ce qu'il faut d'italianité pour créer l'exotisme et la distance. Moi qui vis avec depuis toujours, je n'ai rien à lui reprocher ». Surpris, il consulte le bottin local et envoie trois mêmes lettres à d'autres Giovanni d'Arezzo. Deux lui répondent, un professeur de Bologne à la retraite et un autre, incarcéré à la prison de Pise. Une correspondance s'installe, avec des souvenirs mensongers, des sentiments simulés et de vraies fausses confidences. Tout cela précède les trahisons, mensonges et erreurs d'interprétation. On apprendra tout sur les « fusilli alla paolo », les « gnocchi aux épices » ou les « farfalle au thym ». En prime des confidences sur les corrélations entre la « Vita Nuova » de Dante et le sens des « Noces de Cana » de Véronèse
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