Wallander est déprimé, anxieux même. Rydberg, son collègue, son ami, son guide, vient de mourir, il lui manque. L'évasion d'un des meurtriers qu'il avait fait mettre en prison l'a affecté aussi. Et voilà qu'il se retrouve sur une affaire de citoyens de Lettonie morts dans un canot pneumatique échoué près d'Ystad, affaire sensible qui lui vaut de voir rappliquer immédiatement une femme du ministère des affaires étrangères et deux inspecteurs de Stockholm! A l'annonce de cette collaboration (surveillance?) inhabituelle, il en vient à se considérer comme incapable. D'ailleurs, comme un fait exprès, dès le début de l'enquête sur la mort des deux lettons, Wallander commet une erreur impardonnable. À cela s'ajoute la solitude qu'il ressent quand il rentre seul dans son appartement. Son père lui a bien dit de se trouver une nouvelle femme, mais il est pris par son travail. Sa fille est loin, à Bromma et leurs relations ne sont pas simples. Il est seul, tout seul. Faut-il qu'il change de vie, et quitte la police? Bref, Wallander est déprimé.
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Quand le hasard des évènements l'amène à se rendre en Lettonie, les Pays Baltes sont encore sous tutelle russe, mais les frontières avec l'Ouest s'ouvrent progressivement, et la Lettonie est tout près d'être indépendante. Mais à ce moment-là, le chaos règne, tout peut basculer. L'ambiance est étrange. Qui est ami? Qui est ennemi? En qui Wallander peut-il avoir confiance? L'enquête prend une autre forme, clandestine en quelque sorte. Tout devient confus. La façon de se comporter de la police d'un pays totalitaire n'a rien à voir avec celle d'un pays démocratique comme la Suède. La dictature a transformé les habitants qui sont devenus peu causants et surtout méfiants. La surveillance est encore partout. Plus que l'intrigue, ce sont les attitudes, les dialogues des policiers et des habitants d'un pays de l'Est - encore totalitaire - qui constituent l'intérêt principal de ces chapitres lettons.
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Étrange roman. Pendant le premier tiers, Wallander enquête à Ystad, il est déprimé et rien ne se passe. Pendant le deuxième tiers, Wallander se demande ce qu'il fait en Lettonie (et nous aussi), il boit trop et finalement c'est nous qui déprimons, car on est en présence de faux-semblants et de doubles jeux. Et il rentre à Ystad. Pendant le troisième tiers - mais on ne peut pas parler du troisième tiers. Il est si différent du reste du récit. On peut juste citer une phrase du début de ce troisième tiers : "Wallander avait peur… Il aurait pu s'écrier avec les mots de
Dante : Abandonne tout espoir. D'ici nul ne revient, au moins aucun policier suédois vivant." Mais pour trouver un meurtrier, Wallander est prêt à prendre tous les risques. Très bon roman. Très étrange. Suspense garanti.