Ce récit est surtout un magnifique appel à l'espoir. Page après page, sa petite musique nous dit que, parmi tant de raisons que nous avons chaque jour de nous sentir écrasés par un monde qui semble glisser de plus en plus vers le mépris, la négation même de la condition humaine, il est aussi des raisons de penser, de croire envers et contre tout que rien n'esr perdu. Parce qu'il existe un lieu comme la librairie Jonas. Parce qu'il en existe d'autres, si petits soient-ils en apparence, mais toujours innombrables, où se réunissent, et continueront de se réunir et d'agir , là où ils sont, à leur échelle grande ou petite, ceux qui croient toujours en une résistance à la déhumanisation.
En tout cas, repensant aux "amis de la baleine blanche", je me dis que, grâce à eux et à tant d'autres baleinophiles en tous genres qui leur ressemblent, épars dans le monde, non, les livres, la lecture, les lecteurs ne sont pas des espèces en voie de disparition. -François Maspéro, novembre 2006 ( p.18)
Des libraires qui savent ce qui se passe dans leur quartier et plus loin, ça peut aider à sortir de l'isolement, ça peut donner des idées, des ailes. Avec des idées et des ailes, on peut gêner, mais oui, mais oui...c'est peut-être dangereux. des libraires qui ont toujours un coup à boire, un bout de saucisse à croquer, une oreille attentive, c'est vraiment bizarre, suspect peut-être ? (p.26)
Jonas , c'est une librairie dans laquelle on ne vend pas beaucoup de best-sellers mais plutôt les découvertes des libraires, des livres qui deviennent des occasions de rencontre. Est-ce vraiment dangereux ? Ce sont aussi des libraires qui apprennent aux gamins qu'un sujet de devoir ne se trouve pas tout cuit dans un livre, qu'il ne faut pas avoir peur de penser et de parler, qu'on peut même commencer à réfléchir ensemble et que les grands ne sont pas toujours les plus malins. (p.26)
Le livre est un objet porteur de tous les bonheurs, de toutes les découvertes, de tous les orages. Il provoque le regret, le doute, la ferveur, la foudre, la compassion, il invite à l'action, au rêve , à la méditation. Porteur de feu, de fumée, de cendres, de rouge flamboyance, de douces espérances, il ouvre au passage de l'esprit. (p.30)
Dans notre vitrine, nous avions inscrit une phrase de Bertolt Brecht : "Ne dîtes jamais: "c'est naturel", afin que rien ne passe pour immuable". Peut-être notre confrérie de porteurs d'idées, de baladins du texte, peut elle se reconnaître dans ce dénominateur commun, que rien ne passe pour immuable. (p.33)