Dans ces travaux, quelque modestes et obscurs qu'ils pussent paraître, il développa une qualité d'écrivain qui lui fut plus tard d'un grand secours pour des ouvrages de plus haute portée : la précision, l'évidence, une sorte de lucidité élégante dans les descriptions (je prends l'épithète dans le sens où les mathématiciens l'emploient), qui fut l'un des caractères les plus personnels de son style.
C'est à partir de 1852 que Ch. Blanc se voua entièrement à l'étude de l'histoire et de la philosophie de l'art. A dater de ce moment, il ne cessa de visiter avec une curiosité ardente, et suivant les besoins de ses travaux, les musées et les collections de l'Europe. Il acquit ainsi la véritable érudition du critique, celle qui ne s'obtient que par la vue et par la comparaison des oeuvres. Il sut les pénétrer dans tout leur détail, aidé qu'il était dans ses analyses par ses études d'atelier et par son commerce avec les artistes.
Le souci de son perfectionnement, le désir de voir directement les chefs-d'oeuvre de l'art, de remonter aux sources de l'inspiration, d'interroger les lieux où l'idéal s'est révélé, s'agitent en lui avec une activité nouvelle, se tournent vers un objet depuis longtemps envié. Il prend sa résolution: rien n'y fera obstacle. Il ira visiter Athènes et demander au ciel de la Grèce d'étendre sur lui son influence et de lui donner ses illuminations.
L'Histoire des Peintres parut pendant plusieurs années d'une manière qui semblait confuse. Chaque fascicule était consacré à un artiste d'école différente. Un jour il s'agissait d'un Italien, et le lendemain d'un Espagnol; tantôt c'était Albert Durer et tantôt Louis David. La confiance, cependant, ne fut jamais ébranlée. D'ailleurs chaque biographie paraissait se suffire en elle-même.
L'Histoire des Peintres est l'oeuvre la plus volumineuse de notre auteur; elle n'est peut-être pas celle dont il faisait le plus de cas pour vivre dans le souvenir de la postérité.