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sur 3543 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Quatre ans après avoir remporté le prix Goncourt pour « Leurs enfants après eux », Nicolas Mathieu invite à suivre deux quadragénaires qui font le bilan de leurs vies…

Née dans un petit bled de l'est de la France, Hélène semble pourtant avoir réussie sa vie. Parvenue à "s'extraire" de son milieu grâce à de brillantes études, elle a un poste à responsabilités très bien rémunéré, un mari que beaucoup lui envient et deux filles charmantes. Alors certes, il y a eu ce petit burn-out qui l'a incitée à quitter Paris pour retourner dans une région natale plus reposante, mais sur l'échelle de la réussite sociale, il n'y a tout de même pas vraiment à se plaindre. Jusqu'au jour où elle croise Christophe, ex-star de l'équipe de hockey d'Epinal, dont toutes les filles du lycée étaient folles, mais qui est en instance de divorce et a perdu beaucoup de sa splendeur d'antan…

« Connemara » invite à vivre la crise de la quarantaine de deux êtres qui se demandent s'ils ont réussi leurs vies. Lui, vend de la bouffe pour chiens dans un bled qu'il n'a jamais pu/su quitter, tout en rêvant de rechausser ses patins à glace afin de pouvoir revivre ses plus grands moments de gloire. Sur papier, elle semble avoir réussi, sauf qu'elle se retrouve dans un système économique hypocrite qui brasse autant d'air que d'argent, tout en ayant l'impression d'avoir sacrifié/raté son adolescence. Leur rencontre va donc permettre à l'un de s'attirer à nouveau le regard rempli de convoitise d'une femme, de surcroît issue d'un milieu social plus élevé, de quoi revigorer son égo. Quant à l'autre, elle va pouvoir rejouer son adolescence en mettant à ses pieds une ancienne star du lycée qui n'avait d'yeux que pour les autres filles, de quoi rattraper le temps perdu et se sentir à nouveau belle et jeune, tout en assouvissant un léger sentiment de vengeance…

« Connemara » c'est la confrontation de deux mondes que tout oppose, de deux classes sociales qui vont se réunir dans une belle partie de jambes en l'air que l'on qualifiera volontiers d'amour. À l'image de la chanson populaire de Michel Sardou, Nicolas Mathieu va rassembler la France d'en haut et celle d'en bas, sans fausses notes, mais en faisant tourner des serviettes au-dessus des têtes qui ne sont plus vraiment blanches, mais parsemées de vilaines tâches…

Car même s'il nous sert une histoire d'amour, Nicolas Mathieu aime gratter là où cela fait mal, là où la crasse s'est accumulée au fil des ans. Dans un style totalement opposée à celui des réseaux sociaux, qui s'attellent à embellir notre quotidien à coups de photos triées sur le volet, voire même retouchées pour l'occasion, Nicolas Mathieu, lui, préfère décaper pour enlever les couches de verni. Outre un récit intime qui invite à découvrir les regrets et les frustrations de deux quadragénaires, il livre également une fresque sociale et politique qui se déroule durant l'élection présidentielle de 2017 et ne manque pas de déglinguer au passage ces consultants qui nous vendent de l'air à prix d'or. Un véritable régal !

Alors oui, « Connemara » est un récit lent, sombre et pessimiste, qui invite à se demander ce qu'est "une vie réussie", mais qui laisse également un peu de place à l'amour, tout en livrant quelques notes positives sur fond de Michel Sardou

Là-bas au Connemara… on dit que la vie, c'est une folie… et que la folie, ça se danse…
Lien : https://brusselsboy.wordpres..
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Dans son nouveau roman, Nicolas Mathieu poursuit la description naturaliste des classes populaires du Nord-Est de la France, qu'il avait débutée avec un brio indéniable dans « Leurs enfants après eux », qui approfondissait la question du déterminisme sociologique pesant sur l'avenir de ces enfants nés dans une région brisée par la désindustrialisation.

Ce qui frappe à la lecture du nouvel opus du lauréat du prix Goncourt, c'est qu'il ne s'y passe pas grand-chose. L'intrigue, volontairement minimaliste, ne comporte pas d'événements hors du commun, ni meurtre, ni violence particulière. Elle décrit le quotidien relativement banal de ses protagonistes, dévoilant en creux l'ambition essentiellement sociologique de son auteur.

Le roman pourrait se décrire comme un retour sur les itinéraires respectifs de deux enfants de Cornécourt, une bourgade de l'Est de la France, qui vont entrer en collision.

Hélène a bientôt quarante ans. Après des études de commerce réussies et une carrière bien remplie, elle vit dans une maison d'architecte sur les hauteurs de Nancy en compagnie de son cadre de mari et de ses deux filles, après s'être brûlée les ailes lors de son passage dans la Ville Lumière. Elle a réalisé son rêve en quittant la condition sociale modeste de ses parents et en rejoignant une bourgeoisie provinciale aisée.

Christophe, qui vient de passer le cap de la quarantaine, fut, le temps de son adolescence, la vedette locale de sa petite ville de naissance, grâce à ses prouesses d'hockeyeur sur glace. Contrairement à Hélène, il n'a pas quitté le milieu populaire de son enfance, préférant les copains ainsi que les fêtes, et vend à présent de la nourriture pour chien tout en rêvant de reprendre le hockey. Divorcé de son amour de jeunesse, il partage sa vie entre un père déclinant et son jeune fils.

Au travers des longs passages consacrés à l'environnement professionnel dans lequel évolue Hélène, Nicolas Mathieu règle leur compte aux cabinets de conseil avec un brio jubilatoire. Il passe au vitriol cette volonté de tout rationaliser, de tout calculer, de tout optimiser jusqu'à l'absurde, inspirée des méthodes anglo-saxonnes, qui a gangréné un monde du travail qui évoque parfois un asile de fous.

« Connemara » est évidemment une allusion au grand succès de Michel Sardou, cette chanson qui apparaît comme le seul dénominateur commun entre la France d'en bas, la France des oubliés de la mondialisation « heureuse », la France que le sociologue Christophe Guilluy appelle la France périphérique et la France d'en haut, la France des élites mondialisées, cette nouvelle bourgeoisie cosmopolite qui parle aussi bien l'anglais que sa langue natale. Un mariage entre deux habitants de Cornécourt comme une soirée HEC se terminent inéluctablement aux sons des accords qui accompagnent « terres brûlées au vent, des landes de pierre », les premières paroles du tube d'un chanteur de droite qui réussit à réconcilier le temps d'une chanson les classes populaires avec les futures élites du pays.

Le titre résume tout l'enjeu du roman, à savoir la collision entre Hélène, qui après un burn-out dans un cabinet de conseil parisien a rejoint Nancy pour y poursuivre sa carrière à un rythme moins effréné, et Christophe, qui s'est laissé vivre, boit toujours trop de bières avec ses copains d'enfance et est resté « fidèle » à la modestie de son milieu de naissance.

Dans son dernier opus, Nicolas Mathieu examine ainsi ce moment de frottement entre deux classes sociales, une certaine bourgeoisie provinciale et la France périphérique, à travers la liaison que vont entamer Hélène et Christophe, une relation qui semble se résumer à de longues parties de jambes en l'air dans des hôtels anonymes de la région, et qui ressemble pourtant parfois à une impossible histoire d'amour.

La liaison entre les deux enfants de Cornécourt est une métaphore de la possibilité d'une rencontre entre les gagnants de la mondialisation et ceux qu'elle a oubliés en route, dans une petite ville située entre Nancy et Epinal. L'avenir potentiel de cette relation est au fond la clé du roman, dans la mesure où, à travers le devenir de cette improbable romance, se joue la possibilité d'une forme de réconciliation entre deux France si dissemblables.
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On dit que la vie est une folie…

Trois ans et demi après son Goncourt, Nicolas Mathieu nous revient avec un roman aussi puissant que les précédents, véritable cri d'amour littéraire à cette province qui l'a vu naître, à ces vies simples et invisibilisées, et à ces moments de vie charnières où tout semble redevenir possible.

Connemara c'est une jeunesse spinalienne dans les années 80. Christophe y grandit modestement, Hélène un petit peu moins, mais ça se joue à la marge. Cornecourt, 15 000 habitants, l'école, le lycée, les premières soirées… Classique.

Et puis pour elle, l'influence de Charlotte, dont les éclats de la vie bourgeoise éveillent des envies d'avenir plus favorable. Et puis le hockey sur glace pour lui, sport régional fédérateur où il brille sans grands effets pour la suite.

Hélène sort avec Christophe, ils s'aiment, puis la vie les sépare. Classique je vous dis. Des études brillantes amènent Hélène à Paris où les sphères du consulting sans conscience lui ouvrent leurs portes. Elle réussit. Pas sûr qu'elle vive. Christophe, lui, reste vivre au pays. Enfin vivoter.

Vingt ans après, comme chez Dumas, les chemins se recroisent et il suffit d'un Tam tatam tatatatatam entendu à la radio pour que les souvenirs remontent, que la passion reprenne et que l'espérance d'un nouveau départ apparaisse. Comme si la vie était vraiment une folie que l'on pouvait éternellement danser…

En racontant Hélène et Christophe, Nicolas Mathieu raconte nos vies, et même si ça n'est pas tout à fait la mienne, ni probablement la tienne, il y a quand même à chaque page un petit peu de moi, et probablement un petit peu de toi.

À chaque chapitre, Mathieu décrit l'époque, insouciante des années 80 ou déshumanisée aujourd'hui, replongeant le lecteur dans sa mémoire intime, avant de reprendre le fil de son histoire. Il raconte la province comme un provincial, l'amour comme une histoire simple et la possibilité du rebond comme une bouée, peut-être utopique, mais qui le temps de sa durée fait du bien au coeur et aux âmes.

J'ai aimé retrouver l'écriture simple mais régulièrement fulgurante et débordante d'humanité de Nicolas Mathieu, qui n'est pas sans rappeler celle d'une Marion Brunet qui se serait égarée en Lorraine. J'ai aussi apprécié cette Lettre à France (from Sardou to Polnareff) d'aujourd'hui, désillusionnée mais faiblement éclairée d'une pointe d'espoir persistant.

J'ai aussi regretté quelques temps qui m'ont parus plus faibles dans la deuxième partie, heureusement compensés par un joli final. Et par la sensation à chaque page, de lire un écrivain qui n'a pas fini de compter et de nous raconter.
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Trois ans après l'obtention de son Goncourt, Nicolas Mathieu revient avec un formidable nouveau roman, Connemara qui raconte en parrallèle la destinée de deux personnages habitant dans l'Est de la France, sa région fétiche, entre quête de bonheur et désilusions professionnelles et personnelles.

Hélène est ce qu'on appelle une transfuge de classe . Après un burn out dans les open spaces parisiens, elle revient vivre sur les terres lorraines de son enfance tandis que Christophe, ex enfant prodige du hockey sur glace végète à l'aube de sa quarantaine, entre boulot alimentaire et divorce mal géré ..

Comme dans leurs enfants après eux, Nicolas Mathieu livre un grand roman social sur l'inhumanité du monde de l'entreprise, où la frénésie managériale et son langage singulier et débectant semblent complètement déconnectée du terrain.

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Romancier aiguisé de la casse sociale, plus encore que celui de la classe sociale, Nicolas Mathieu prouve aussi son immense talent pour rendre compte de l'intensité de l'adolescence (à ce titre, on notera que les nombreux flash backs sur l'adolescence sont racontés au présent, alors que le présent est raconté à l'imparfait).

Rarement cette période charnière qui cristallise tous les désirs et les espoirs les plus fous, hélas peu à peu brisés par les réalités du monde adulte n'aura semblé aussi vibrante et touchante que chez Nicolas Mathieu .

Surtout Connemara décrit avec énormément de justesse le vernis de cette France des périphéries urbaines, celle de l'entre deux, une catégorie sociale pas tout à fait populaire, mais pas vraiment classe moyenne non plus, celle des pavillons, celle qui connait la vraie angoisse du lendemain...

Le romancier affiche également énormément de tendresse pour ses personnages, tellement humains dans leurs renoncements et leurs mauvais choix et veut croire en la possibilité d'un amour.

Observateur précis et décapant qui manie avec maestria l'intime et le social, Nicolas Mathieu livre un panorama particulièrement bien senti de la France d'aujourd'hui .
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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« Parce que la terre, les lacs, les rivières, ça n'était que des images, du folklore. Cette chanson n'avait rien à voir avec l'Irlande. Elle parlait d'autre chose, d'une épopée moyenne, la leur, et qui ne s'était pas produite dans la lande ou ce genre de conneries, mais là, dans les campagnes et les pavillons…»
Dans ce roman générationnel (la mienne), politique et sociétal, chronique d'un quotidien où chacun vit comme il peut, Nicolas Mathieu narre la rencontre de 2 quarantenaires cherchant à ressusciter leur passé (malheureusement mort et enterré).
Hélène travaille dans une boîte de consulting, a deux enfants et vit avec Philippe lui même très pris par son métier. Pour chasser une vie de couple plutôt morose, elle reprend contact avec Christophe, le fantasme de ses 16 ans, ancien hockeyeur, désormais commercial et père séparé d'un petit garçon…Mais souffler sur les braises de leur adolescence peut-il suffire à mettre de la couleur dans une vie bien étriquée (et compliquée) ?
Avec ce texte, Nicolas Mathieu confirme son statut de portraitiste de talent. En effet, qu'il raconte la jeunesse en mal de repère ou la vie dans les villes pavillonnaires, son sens du détail fait merveille pour relater le temps qui passe et les désillusions et regrets afférents.
Il compose un roman doucement mélancolique, souvent désenchanté, qui sonne terriblement vrai (et dont la fin est juste parfaite). Nul doute que chacun s'y retrouvera (c'est d'ailleurs le plus effrayant 😬)
J'ai beaucoup aimé ❤️
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Je sors légèrement déprimée de ma lecture.
Hélène et Christophe ont 40 ans, fréquentaient le même lycée mais leur vie a pris des trajectoires différentes ; ils se recroisent...
Avec talent, un style sobre et un rythme posé, Nicolas Mathieu nous raconte les espoirs de l'adolescence, la méritocratie, la routine, le couple qui s'effrite, les classes sociales qui s'observent et les désillusions.
C'est parfois un tantinet caricatural mais ces parcours de vie nous parlent.
Les personnages sont peu attachants ; ils sont sans doute trop humains avec leurs failles, leurs compromissions, leurs jugements des autres et leurs attentes déçues.
Bien sûr, il y a le grand-père et le petit fils mais c'est peu.
Alors oui, je sors un peu déprimée mais quel roman social.
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Je ne suis pas sur de m'aligner complètement sur la ligne politique qui fera de Nicolas Mathieu le chef de file de la littératosphére.
Le gars en est à son 3e vrai roman. Chaque titre nécessite 3 ou 4 pages d'explication dans Elle:
« Aux animaux la guerre » c'est La Fontaine, bien sur, avec les animaux malades de la peste.
« Leurs enfants après eux » c'est l'Ancien testament évidemment, rappelant que les ouvriers d'Heillange sont comme s'ils n'avaient jamais existé ainsi que leur descendance.
« Connemara », facile, c'est Tam tata tatatatam et Sardou ,qui arrive toujours au bon moment: mariages, fêtes de village, anniversaire de Papy et fêtes des B.D.E. des écoles de commerce du TopTen.
L'action se passe à la veille des élections de 2017 et, dans une mise en abime involontaire, consacre Nicolas Mathieu en 2022, à la veille des présidentielles.
Ceci étant dit, il s'agit d'un excellent roman, presque totalement flaubertien.
L'auteur est un grand écrivain qui sacralise l'adjectif, l'adverbe et la métaphore courte.
« Elle respire l'odeur surette des draps qui n'ont pas été changé depuis le début du séjour »
«La mère de Charlotte ressemble à ces femmes qui font de la pub pour les crèmes antirides, chics et saines, la petite cinquantaine en sfumato , des joncs en or aux poignets »
« Sous ses fesses, l'extrême confort du matelas Simmons plaidait plutôt pour le statu quo »
« Elle leur adressa des photos d'elle dans sa salle de bain, des compliments comme de bons gros gâteaux pleins de levure. Au bout d'une semaine les deux hommes ne débandaient plus »
« Dire que son vieux s'était échiné quarante ans, et que tout finirait dévoré par les soins, le patrimoine muté en toilettes intimes, petit-suisses et divagations dans le parc arboré »
Et une petite dernière :
« Mais on n'était pas fier, à quarante balais, quand on était père et qu'on avait une vie d'adulte, de taper rousse, beurette ou interracial dans une barre de recherche »

Et bien voilà, le décor est planté dans le Grand-Est, entre Vosges et Lorraine.Régions devenues Territoire. L'auteur y déplie doucement, avec de nombreux flashbacks, une tapisserie narrative de très bonne facture réinventant presque le classicisme social.
Hélène , assurément personnage principal, n'est pas vraiment, comme j'ai pu le lire un peu partout, un « transfuge de classe ». Ces parents ne sont pas pauvres. C'est plus une histoire de culture.Mais ce n'est pas grave: elle boit du picon-biére tout en lisant Mona Chollet

Pour quelqu'un qui vient de faire un burn-out managérial à Paris, elle assure sacrément dans sa nouvelle société nancéienne de conseil, avec ses 2 filles et un mari ESSEC plutôt sympa.
Elle va donc baiser ( infinitif le plus fréquent du bouquin) avec son vieux pote Christophe.

On retrouve alors la question du déterminisme social , essentielle, à travers une constellation de personnages secondaires forgés dans l'acier et la boue.

Alors là il y a 2 aspects du roman qui m'ont vraiment intéressé:
une description formidable du monde du consulting. Là c'est vraiment top à tout point de vue. Dans la forme ( ah le volapuk du management, le portrait de Lison-génèration Z, les Mac partout etc…..) et dans le fond ( et oui ça ne sert pas à grand chose, mais peut-être un peu).
la découverte de la passion d'Epinal ( Nicolas Mathieu dirait spinalienne) pour le patin à glace.
Rien que pour cela le livre vaut son pesant de cacahouètes.

J'ai lu aussi qu'il était drôle (le livre). Je l'ai trouvé absolument mélancolique. Quand on se prend le Réel de plein fouet et que ça fait bien mal, ça a tendance à vous mettre un peu le moral dans les chaussettes.

La fin façon La La Land nous fait abandonner tout espoir.
Mais c'est peut être ça la moral du livre : Toi qui fredonne Connemara, abandonne tout espoir.
Et ce n'est pas si grave.
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Hélène s'ennuie. Elle qui a tout réussi, se tirer de sa campagne vosgienne, de belles études, une carrière, deux enfants…
Elle devrait être satisfaite et pourtant…
Christophe est resté à Cornécourt, à côté d'Epinal. Très populaire au lycée car qu'il était non seulement très beau mais aussi jouait dans l'équipe locale de hockey. Aujourd'hui il a un boulot de représentant, deux vieux potes, un vieux père dont la tête se met à battre la campagne, une ex-compagne qui décide de déménager et donc de s'éloigner avec le gosse.
Ces deux là vont se retrouver lors de rendez-vous clandestins, se rapprocher prudemment.. Christophe peut-il vraiment plaire à Hélène l'ambitieuse ? Hélène peut-elle imposer ses choix, ses goûts à Christophe ?
Parce qu'il faut plus que l'entente des corps pour faire un couple.
J'aime décidément l'écriture de Nicolas Mathieu, son style vif, incisif parfois. C'est un fin observateur de ses contemporains ce qui lui permet de dresser des personnages plus vrais que nature : la quarantenaire insatisfaite qui se laisse tenter par des aventures d'un soir sur les suggestions d'une petite stagiaire qui finalement est celle dont elle est la plus proche dans la boite. Ses frustrations de couple : monsieur qui dès que la porte familiale est fermée se lance dans le monde sans aucune inquiétude, scrupule. Il sait que la « maison » va tourner. Ses frustrations professionnelles : deviendra-t-elle associée de la boite ou est-ce le petit dernier recruté aux dents longues qui aura ce privilège ?
Christophe qui après avoir été un cador stagne dans son bled coincé dans ses problèmes de partage de garde, de père devenant Alzheimer, de velléités de retour sur le devant de la scène par une reprise tardive du hockey.
Son analyse des cabinets conseil genre Mc Kinsey qui gèrent non seulement les stratégies des entreprises mais aussi celle des administrations est très juste.
Sa construction aussi est habile. Des allers retours entre les personnages d'Hélène puis de Christophe, aujourd'hui et hier…
Et pourtant, si je ne me suis pas ennuyée une seconde, je ne me suis pas laissée embarquée comme avec « Les enfants après eux ». On retrouve d'ailleurs le thème d'un certain déterminisme social ici aussi.
C'est peut-être le personnage d'Hélène, son cynisme, son égoïsme même me l'ont tenu à l'écart.
C'est peut être l'abondance de la novlangue du management d'aujourd'hui dans certains parties qui m'a rebutée. Ce lexique est juste sur le fond mais qu'il est pénible de lire ce jargon jargonisant !
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Nicolas Mathieu est un observateur brillant et critique de son environnement. Il n'a pas son pareil pour démonter la machine capitaliste, croquer la vie des consultants (262-271 de très haute volée), arbitrer la lutte des classes, fustiger la mesquinerie provinciale, pointer la défaillance parentale ou douter de l'amour, cette supercherie moderne. le tout avec beaucoup de tendresse, sans jamais donner l'impression que l'époque le dégoûte. Cela donne des passages d'une rare acuité à retrouver pages : 19, 97, 111, 126, 135, 146, 174, 254, 294.
Son histoire de coucherie est somme toute banale. Des images d'Épinal. Normal, nous sommes dans les Vosges (« On a si peu de raisons de se réjouir dans ces endroits qui n'ont ni la mer, ni la tour Eiffel, et où les soirées s'achèvent à vingt heures en semaine et dans les talus le week-end »).
Hélène et Christophe approchent la quarantaine avec leur sentiment d'échec. Leur désillusion les aimante. Ils se noient dans l'adultère comme d'autres se jetteraient d'un pont. Classique. Oui mais Nicolas Mathieu raconte de manière sublime l'ennui commun des mortels. Barde de notre temps, il témoigne de cette France étriquée, accrochée à ses gloires passées, indécise devant le grand chambardement d'un monde qui la rend nostalgique ou la répand sur les ronds-points. Plus qu'un Sardou, auquel il emprunte le titre de son livre, il y a du Souchon chez Nicolas Mathieu : la poésie n'est jamais loin de la cruauté. Empathique mas pas dupe. Curieux mais vigilant. Une satire sociale en suçotant des bonbons acidulés.
Je ne lui fais que deux reproches. le premier, c'est d'être encore trop long. J'ai eu parfois envie de m'échapper, d'aller voir Kessel ou London, car j'étouffais dans ses banlieues d'une « laideur raisonnée ». le second, c'est la redondance de ses sujets. Nicolas Mathieu répète à l'envi qu'il n'écrit que sur ce qu'il connaît. 1. Ce qu'il connaît est-il toujours digne d'intérêt ? 2. A t-il fait le tour de ce qu'il connaît ? L'avenir nous le dira.
Bilan : 🌹🌹
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J'aime les romans de Nicolas Mathieu, son style alerte, son sens de la formule, son regard sur ses personnages, son analyse des problèmes de l'époque et des différences de classe, sa manière de raconter les vies dans les pavillons de banlieue. J'avais été enthousiaste à la lecture de Nos enfants après eux, lu avant son Goncourt et chavirée par son Rose Royal. Alors j'attendais sûrement beaucoup de son Connemara et je crois que je suis un poil déçue.

L'histoire on la connaît, celle d'Hélène et Christophe à l'approche de la quarantaine. Un mi-temps où on commence à faire les bilans. Elle était première de classe, elle a réussi ses études, sa carrière et son mariage, elle est « montée » à Paris. Elle a fait ensuite un burn-out et est retournée vivre à Nancy avec son mari et ses deux filles dans une très belle maison. Lui était la star ado du hockey à Epinal, il n'a jamais quitté sa petite ville, il a un travail peu passionnant, il végète avec ses potes de toujours. Il vient de se séparer et élève en résidence alternée un petit garçon, il vit encore chez son père. Ils vont se retrouver, s'aimer peut-être alors que tout les sépare désormais, si ce n'est leurs rêves adolescents.

C'est comme à l'accoutumée, bien écrit, facile et agréable à lire même si cette fois, j'ai trouvé quelques longueurs quand l‘auteur décrit la vie professionnelle d'Hélène. le roman est très pessimiste car la vie y est difficile autant pour celle qui a réussi selon les critères de notre société que pour celui que beaucoup considéreront comme un raté. Peut-être aurais-je été plus emportée si Nicolas Mathieu s'était un peu plus concentré sur l'histoire de ce couple qui finalement est un peu survolée ? Peut-être un rayon de soleil et d'optimisme m'a manqué ? Peut-être était-il trop proche des précédents et j'étais en attente d'un plus que je n'ai pas trouvé ? C'était une bonne lecture mais cette fois, ce ne fut pas un coup de coeur, même si attention, cela reste de belle facture.
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