Chauffe Maurice !
Luc Delta, notre beau héros testostéronné, part à la découverte de Jupiter, les jupitériens n'ont qu'à bien se tenir ! Maurice nous sert son antienne habituelle, un héros infaillible, faut pas lui chercher la chicaya.
Il y a un truc que je trouve toujours formidable chez Maurice (permets-moi de te tutoyer et de t'appeler par ton prénom, depuis le temps qu'on se connaît), les grands savants travaillent dans leur labo en plein espace avec des cornues d'un autre âge, mais si tu va fumer ta clope dans l'atmosphère vivifiante de Titan tu l'allumes avec un vrai gadget du futur : le briquet atomique ! Pause clope atomique !
Bon direction Jupiter, pour pouvoir s'y rendre, Luc Delta et Ernest Tavier ont été opérés afin que leurs poumons puissent (j'essaie d'utiliser le subjonctif moi aussi !) respirer avec n'importe quel gaz. Les cosmonautes ont des noms bien franchouillard, les aventures de Luc et Ernest, ça claque façon Grande Vadrouille ou Soupe au choux, n'est-ce pas, et la petite amie de Luc à un nom de poupée, Tamara, alors que les quatre savants s'appellent Un, Deux, Trois et Quatre…
Deux - « Pourquoi c'est toi Un, d'abord ! »
Un - « Parce que ! »
Cinq - « Bonjour, moi c'est Cinq ! »
Un, Deux, Trois et Quatre - « On n'a pas besoin de vous, désolé. »
Quatre à Trois en aparté : « Qui a laisser entrer ce con ? »
Évidemment, comme toujours chez Maurice, les théories scientifiques sont fumeuses, il serait plutôt adepte de la poudre de Perlimpinpin, mais avec l'emploi du subjonctif, ça fait tout de suite plus savant, plus compliqué, pour en saisir toute la subtilité, encore eût-il fallut que vous fûmâtes (plein d'accents circonflexes aussi, c'est cool) du faoz, du honx (quel galimatias !) et autres herbes odoriférantes venues de la Terre, du Centaure, d'Orion et de Deneb, qui vous aurait illuminé les synapses, l'extase, ça se mérite. Les jupitériens (des Warzz avec deux Z bien sûr) sont des nuages, que notre regard voit se superposer tels des palimpsestes… Euh, Maurice, tu as poussé le bouchon (atomique) un peu loin. le mec, il est en train de fumer et il voit des nuages autour de lui ! N'est-ce pas merveilleux ?
Je ne dirais pas que c'est le plus déjanté de ces romans, il date de 1968, et Maurice est encore un garçon sage, il fait vraiment de la science fiction, mais il se la joue poète aussi, sa description de l'atmosphère de Jupiter est empreinte d'un lyrisme et il vend bien sa câme le coco :
« D'ailleurs, depuis la première conquête spatiale par les Terriens — celle de la Lune — on avait perdu la désagréable habitude d'écrire des livres descriptifs et soi-disant scientifiques sur les mondes encore inexplorés. Les dogmes s'étant écroulés les uns après les autres et la simple réalité se démontrant souvent plus proche des rêveries des poètes et des romanciers, on attendait, pour classer une planète, d'y avoir mis le pied. »
En gros, si vous cherchez de la rigueur scientifique, passez votre chemin, la science trop sérieuse, c'est des carabistouilles et vive la poésie (ou un truc emberlificoté qui s'y apparente). En fait on ne peut pas parler vraiment de poésie, le style est quand même assez lourd, redondant et ridiculement ornementé, surjoué, mais c'est ce que j'aime y trouver chez Maurice, parce qu'il n'y a que lui pour proposer une science-fiction si joyeusement caricaturale et croquignolesque.
Bon, voilà, je m'étais dit en commençant cette critique que je n'avais pas grand choses à dire sur ce livre et les plus courageux se seront farci ma logorrhée qui ne les a peut-être pas éclairés, sachez que j'en suis désolé, mais je tiens à nous prévenir que je recommencerai.
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D’ailleurs, depuis la première conquête spatiale par les Terriens — celle de la Lune — on avait perdu la désagréable habitude d’écrire des livres descriptifs et soi-disant scientifiques sur les mondes encore inexplorés.
Les dogmes s’étant écroulés les uns après les autres et la simple réalité se démontrant souvent plus proche des rêveries des poètes et des romanciers, on attendait, pour classer une planète, d’y avoir mis le pied.
Luc évoquait les actinies des océans terrestres, les drosères et les sarracénies gobeuses de mouches et de papillons.
– Tu prendras de l’aspirine quand on reviendra...
– J’aimerais mieux un coup de whisky...
Luc riait de bon cœur. Il cria à son compagnon que s’il restait une bouteille de Cutty Sark, ce serait pour des occasions plus importantes qu’une simple migraine.