C'est le roman qui a révélé le talent de Mishima. On y suit le parcours des vingt premières années de vie d'un héros qui ressemble comme un frère à l'auteur. L'écriture en est à la fois limpide et affectée, les termes et les temps utilisés sont variés, mais le tout révèle une grande maitrise et, pour le dire, un énorme talent.
Avant, pendant et après la guerre, nous suivons les tourments du héros qui cherche comment vivre sa particularité, c'est à dire, clairement, son homosexualité. Pas de revendications ou de plaidoyer dans cet ouvrage, seulement la description d'un jeune homme qui, épouvanté et fasciné à la fois par ses désirs intimes, en vient à se construire un masque de normalité afin de tenter de vivre. On y suit, dès l'enfance, puis à l'adolescence, les efforts désespérés du héros pour nier, puis contrer la nature de ses désirs. Un homme qui veut passionnément aimer les femmes, et se désespère de voir que ces dernières n'éveillent en lui aucun désir, alors que les jeunes garçons font flamboyer son imagination…
La rencontre avec la soeur d'un ami, la belle Sonoko, va lui permettre de se fondre dans le masque qu'il s'est construit, d'en affecter en être la représentation, mais cette illusion, cette méprise où s'entremêlent une simple amitié, la volonté de séduire, le désir ardent de la normalité et l'amour sincère de la jeune femme à son égard le conduira à l'inéluctable dénouement où tombera le masque.
C'est un joli roman sur le thème de la difficulté à assumer son identité. Certes, le Japon des années 40 et 50 est un milieu particulier, mais les difficultés du héros restent d'actualité.
Ce roman n'a rien d'une oeuvre militante, d'une plaidoirie : c'est avant tout une oeuvre littéraire, un roman qui raconte magnifiquement l'histoire d'un homme qui essaye de se construire et de se comprendre. Toutefois, c'est peut-être aussi une lecture classique à conseiller à ceux qui pensent encore que l'homosexualité résulte d'un simple choix conscient ou l'assimilent à une maladie : cette « confession » leur apportera un cinglant démenti.
Lien :
https://litteraturedusoleill..