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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Akira Mitzubayashi est un japonais atypique.

Le français est sa langue d'élection, il est un éminent spécialiste de Rousseau, sa femme est française et il a longtemps résidé en France, faisant constamment la navette entre son Japon natal et la France, son pays de coeur, et enseignant , au Japon, la littérature française des Lumières.

Aussi ne nous étonnons pas qu'il fasse un Petit éloge de l'errance, culturelle, linguistique et intellectuelle!

Errer, pour lui c'est d'abord faire un pas de côté,  se démarquer de la meute mimétique et docile, aveuglément soumise au chef.

 Se retrouver seul.

Et, avec ce pas de côté,  prendre le vent, changer d'air, chercher un angle d'attaque ou une perspective insolites,  et tenter de "faire société "par concordance de projets,  en créant,  avec d'autres errants,  une  société fondée non plus sur la tradition et l'obéissance mais sur un pacte social où chacun donne un peu de sa force et  de sa liberté pour le mieux-être de tous.

 Un "contrat social" à  la manière de Rousseau.

Puisant son argumentaire tant dans la littérature que dans la musique, recherchant ses exemples  tant  dans l'actualité récente que dans L Histoire, tant dans les oeuvres de son cher Rousseau   que dans les films de Kobayashi ou Kurosawa, il  dresse le portrait de ces quelques grands errants qui , en quittant le troupeau,  ont fait progresser l'humanité vers une société plus consensuelle et plus juste.

Il convient d'errer, donc, mais sans forcément bouger, car ce chantre de l'errance est un grand sédentaire : il s'agit plutôt d' inscrire son parcours dans une civilisation choisie, une langue d'élection , une culture par affinité.

 En se référant  à la sémantique  et à la temporalité  très particulières de la langue japonaise, il analyse en finesse ce qui , dans sa langue natale même,  constitue un obstacle à cette "errance choisie", à l' ouverture à ce qui est étranger, à  cette horizontalité des échanges,  cette inscription dans un temps relié au passé et ouvert sur l'avenir,  sans lesquelles  aucune rencontre, aucun pacte social n'est possible.

Passionnant, limpide et convaincant.

Et court, ce qui ne gâte rien.
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Mizubayashi nous parle de la difficulté pour l'individu, au Japon, de s'affranchir de la pensée collective. « La communauté nationale, ici, n'est pas le résultat d'un acte d'association libre et volontaire. Elle n'est pas une construction politique qui passe par un acte. Elle est plutôt d'essence ethnique dans la mesure où elle est caractérisée par la permanence et la pureté imaginaire du sang. Elle précède les individus ; elle les englobe et les engloutit. » Quiconque, au Japon, se démarque du groupe prend le risque d'être rejeté. Sur un plan historique également. L'auteur explique ainsi que peu de gens se sont opposés au gouvernement militaire des années 30 ou à la reprise du nucléaire après Fukushima. Il y a comme un « engourdissement » collectif qui peut très vite déboucher sur une irresponsabilité individuelle. L'auteur, enseignant de français et ayant vécu plusieurs années en France fait le parallèle avec la société occidentale, basée au contraire sur l'individu. Spécialiste de Rousseau, il s'appuie sur « Le contrat social », pour expliquer la différence fondamentale entre la pensée japonaise et occidentale.
L'errance, au Japon, commence donc avec le non-conformisme, dans de simples actions quotidiennes et constitue en cela un véritable défi à la collectivité.
Dans les derniers chapitres, l'auteur critique de manière très soutenue l'action du gouvernement actuel qui prône un retour aux valeurs nationalistes en voulant modifier la constitution de l'après guerre.
A l'aide d'exemples puisés dans le cinéma, la littérature, la musique…, ce petit essai est vraiment très instructif pour comprendre la pensée japonaise.
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Eloge de l'errance est un essai limpide qui expose la difficulté d'être différent dans la société japonaise. Akira Mizubayashi raconte ce qui l'a personnellement conduit à choisir d'être un non conformiste, un homme conscient de son autonomie et de ses responsabilités, mais aussi de sa solitude et de son étrangeté.
Le livre débute par la description magnifique et musicale de la séquence d'ouverture de Yojimbo de Kurosawa. qui introduit, d'emblée, la figure légendaire du ronin, ce samouraï médiéval qui s'exclut volontairement du groupe pour défendre les opprimés. Un autre film de Kurosawa, Sanjuro (1960) avec le même type de guerrier solitaire et errant marque à jamais le petit Akira. Suivent ensuite des anecdotes touchantes qui décrivent ses vaines tentatives pour s'incorporer au groupe, la honte qu'il a éprouvée enfant à se sentir différent, la première très humiliante où Il est moqué cruellement par le groupe et la seconde toute mignonne où il est compris par la maîtresse. Plus tard, jeune professeur, il se heurte aux règles hiérarchiques immuables en vigueur dans les universités nippones. Il se révolte alors contre ce pouvoir injuste et cette soumission à des règles préétablies qu'il oppose au contrat social de Rousseau. Celui-ci repose sur un pacte libre et volontaire des individus. Mizubayashi expose ensuite ce qui lui apparaît comme les racines historiques et linguistiques du conformisme japonais, la structure verticale et le présentisme de la langue. Puis il insiste sur le fait que cette culture aboutit à l'irresponsabilité généralisée. Ce fut le cas des militaires et politiques traduits devant le Tribunal militaire pour crimes de guerre au sortir de la Guerre et c'est le cas au moment où il écrit en 2011 après la catastrophe de Fukushima. Personne ne se sent personnellement concerné. La responsabilité individuelle est diluée par le groupe. Et les conséquences sont minimisées (avant d'être oubliées). Ensuite, il évoque ces grandes figures d'errants qu'il admire tant ( avec son père) les Rousseau, Mozart, Kurosawa, Kobayashi et Sôseki. Enfin dans l'épilogue il revient sur sa propre errance, celle qui l'a conduit à "épouser" la langue française pour se décentrer par rapport au Japon.

j'ai beaucoup aimé ce livre clair et concis, vivant et souvent touchant, qu'il ne faut pas prendre pour un essai philosophique. C'est très autobiographique, donc égocentré, avec des généralisations sans doute un peu trop faciles. J'aimerais bien savoir si l'ouvrage a été traduit en japonais et ce que ses compatriotes en ont pensé.
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Vouloir se retrouver ailleurs, prendre ses affaires (ou non) et partir, se défaire de ses attaches. Qui ne l'a rêvé ? En prenant en exemple son expérience et des grandes figures du Japon, l'auteur tente de trouver ce qui se trouve à la racine de cette volonté.
Finalement, l'errance n'est pas forcément physique. S'échapper par la musique, la littérature ou en remettant en question l'ordre social, c'est déjà partir. Les samouraïs de Kurosawa en sont les archétypes : ils sont sans maître, mais tous n'éprouvent pas le besoin d'en retrouver un, de s'inféoder à un ordre. Ils sont très bien comme ça, à mener leur vie, même difficilement. Or se mettre volontairement en marge de la société au Japon est très mal vu. L'auteur a lui-même une démarche approchante, en remettant à leur place ses supérieurs (encore plus mal vu).
Ce petit texte nous apprend donc qu'il est facile de devenir un errant : se positionner à côté des grandes idées toutes faites, les interroger et surtout, surtout, toujours faire preuve de distance, d'esprit critique et d'ironie. Vous n'échapperez jamais totalement à votre société, mais vous pouvez vous créer des espaces de liberté et de respiration.
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Je ne connaissais pas ce grand monsieur, j'ai choisi ce livre pour le thème de l'errance et de la solitude qui en est conséquente. Ce n'est pas un roman, je vois ce livre comme des petites touches de vie, du vécu, qui ont amené l'auteur à réfléchir sur le langage, sa construction, la société et ses fondements, japonais s'entend. C'est très intelligent, et surtout cela m'a renvoyée à nos constructions françaises (le pouvoir, la hiérarchie, l'obéissance, la soumission, l'insoumission et donc l'errance car ne pas se soumettre aux codes c'est prendre le risque de l'exclusion et donc de l'errance et donc d'une forme de solitude mais c'est aussi sauvegarder son honnêteté intellectuelle). Il finit très désabusé et pessimiste quant au devenir et de son pays, de la société en général et donc du monde et de l'humain. Alors, si je pouvais lui répondre, je lui dirais à quoi bon avoir écrit ce livre ? Je vais persister et lire d'autres oeuvres de Akira Mizubayashi car je ne veux pas terminer sur une demi teinte.
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Akira Mizubayashi nous offre avec "Petit éloge de l'errance" une réflexion poussée sur l'affirmation de l'individu au sein d'une société. Japonais ayant étudié en France, passionné par la langue de Molière, il compare le rapport au conformisme de ces deux pays sur différents terrains aussi variés que le cinéma, la musique, la politique, la philosophie, la linguistique ou la sociologie.
L'auteur ne place ainsi pas l'errance dans une dimension purement géographique, mais en fait un instrument solitaire de libération, de compréhension de soi pour mieux retourner à son humanisme et exister avec toute sa singularité, que se soit au sein ou en marge d'une société.
Une lecture très agréable empreinte de culture mais aussi d'émotion car ce petit ouvrage vif et intelligent est avant tout le témoignage de l'errance personnelle de l'écrivain lui-même.
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Cet essai est très intéressant, Akira Mizubayashi y aborde de façon intime et objective le thème de l'errance.

L'errance selon lui est la liberté de penser, une manière d'imposer son individualité face au groupe et d'aiguiser son esprit critique, spécifiquement face à la société.

C'est la société nippone qui est justement ciblée, Mizubayashi fait un constat juste et acéré sur le conditionnement des japonais.e.s, sur le mode de pensée unique qu'il faudrait suivre en dépit du bon sens.

L'auteur fait des parallèles avec le cinéma et la littérature, pour nous imprégner du sens que peut prendre l'errance.

Aussi, à travers ses souvenirs, il nous indique la voie difficile qu'est de se sentir différent avant d'en faire une force, et d'arriver à se positionner comme électron libre avec confiance.

Un livre court, mais enrichissant.
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Petit éloge de l'errance est un texte court écrit en français par le japonais Akira Mizubayashi. Il ne s'agit pas, ici, d'une errance physique mais d'une errance sociale et morale. En effet, l'errance fait référence à une sorte d'exclusion volontaire. L'auteur y fait une critique de la société japonaise qu'il qualifie d'obéissante et servile. Il aborde aussi sa propre errance volontaire de s'écarter de la masse. A noter que l'auteur ajoute à son texte beaucoup de référence et de citation pour éclairer ses propos. Bref, un livre très intéressant qui fait réfléchir.
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Petit éloge de l'errance est un texte court de Akira Mizubayashi,un essai Philosophique intime, une libération de soi vers l'absolu liberté vagabonde de son esprit en apesanteur, une recherche de liberté exploratrice de ses souvenirs ....
Les souvenirs d'Akira Mizubayashi culturels gravés au fer rouge dans l'abime de son caractère transporte le lecteur dans son enfance japonaise et ses traditions ancestrales avec des anecdotes personnelles figées dans le temps pour parfaire l'être qu'il est devenu . Beaucoup de cinéma jalonnent ses pages celui de Akira Kurosawa avec ses héros perdu dans l'errance voulue qui pour notre Auteur sera les premiers prémisses de son esprit vagabonds comme Masaki Kobayashi avec ses films surtout les sept samouraïs oeuvre mise à nue dans un chapitre, ou s'évapore la révolte face à un état japonais emprisonné dans une culture de soumission extrême envers l'empereur et sa puissance sourde de taire la minorité...
Rousseau sera le prisme diffractant la pensée de Mizubayashi avec son contrat sociale et ses autres écrits. catalysant l'essentiel de la philosophie errante de notre nomade cristallisé par sa culture du passée celle de son père. grand-père et ses ancêtres ....
Mizubayashi se meurt de la nouvelle génération japonaise et du recul des mentalités pour un retour vers une pensée castratrice de la personne pour une nation politique dominante refusant la république tel la constitution de la déclaration des droits de l'homme -
Même la musique éveille en lui par la sonate un éden de la pluralité harmonieuse tel une nation et son peuple Rousseauiste avec Mozart -les noces de Figaro -
Tous ses exemples éveillent l'errance comme Akira Mizubayashi avec la langue Française qu'il maitrise à merveille. s'ouvrant à la culture d'un autre pays détermine sa vision de couper avec les traditions pour vivre de ses propres valeurs .
Errance de l'enfance vers l'errance de l'imprudence
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Etre natif des bords du lac Léman, vivre en Asie, et lire un écrivain Japonais nous donner envie de lire Rousseau, natif des bords du lac Léman... c'est ça aussi l'errance.
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