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Victor Ellenberger (Traducteur)
EAN : 9782070129584
336 pages
Gallimard (03/06/2010)
3.87/5   39 notes
Résumé :

Chaka est le livre le plus célèbre de l'écrivain de langue souto, Thomas Mofolo. C'est une épopée inspirée de la vie réelle de Chaka (1786-1828) qui fonda un véritable empire en Afrique australe avant d'être assassiné par ses frères. Voici ce qu'écrit JMG Le Clézio de ce livre où l'épopée est faite de la naissance d'un peuple : L'on entend ici la voix des pasteurs bassoutos, l... >Voir plus
Que lire après Chaka : Une épopée bantoueVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Chaka est un roman historique qui raconte la vie de Chaka, homme de la tribu cafre des Ifénilenjas (sur la côte est de l'Afrique du sud), fondateur mythique de l'empire zoulou au début du 19ème siècle.
Le but de l'auteur est d'expliquer, à la mode des griots, l'émergence de ce tyran que fut Chaka et de l'empire zoulou. Comment est-il venu à la souveraineté ? Comment a-t-il étendu son pouvoir? Comment il a mis en place un régime militarisé et totalitaire? Comment est-il devenu fou (même si le terme n'est jamais employé dans le livre), supervisant des massacres de milliers de personnes?
Il remonte aux années de formation de Chaka que sont son enfance et son adolescence, pour expliquer son désir de vengeance, son manque de compassion et son ambition sans borne. En effet, enfant renié par son père, il est en but dès son plus jeune âge à la cruauté de ses compatriotes et doit surmonter plusieurs épreuves avant d'arriver à l'âge d'homme. Ces difficultés forgent son caractère et il tente (et parvient) pendant toute sa jeunesse à être le meilleur pour être reconnu par son père et retrouver sa place naturelle (il est le fils aîné du chef de la tribu).
La moment de bascule intervient au reniement public et définitif par son père, malgré ses hauts-faits et son courage et la vengeance devient son unique raison de vivre, en considérant que la force donne tous les droits (et que la justice n'existe pas). C'est le grand tournant du livre et le drame qui explique la tyrannie et les massacres.
L'écriture est très intéressante car l'auteur s'adresse à son peuple, les Bassoutos, voisins des cafres, peuple dont est issue la tribu Zoulou. Il utilise beaucoup d'images pour expliquer des traits culturels qui peuvent être similaires ou différents entre ces deux peuples. le traducteur propose d'ailleurs des annotations avec des traductions mot à mot des images / proverbes qui sont très intéressantes pour entrer dans la représentation du monde de ce peuple.
La première partie du livre se lit très bien. On retrouve les différents éléments des mythes sur le façonnement des héros. Beaucoup de magie est impliquée, l'auteur faisant la différence entre les médecins-féticheurs (magie blanche) et les sorciers (magie noire).
La deuxième partie est intéressante sur la mise en place de la société guerrière zouloue (en particuliers, sur la transformation des règles du champs de bataille et de la discipline des armées). Je l'ai cependant trouvé pénible à lire à cause des nombreux massacres qui se suivent et de la plongée dans la folie de Chaka que plus rien n'arrête.
L'ensemble reste très intéressant à lire car cette “épopée bantoue” montre un visage de l'Afrique avant la colonisation que nous n'avons pas l'habitude d'aborder (l'histoire de l'Afrique semble souvent commencer à la colonisation et il est difficile de trouver des ouvrages sur son histoire plus ancienne). Ce livre a permis de combler un peu mes lacunes mais j'aimerais maintenant connaître les rapports entre les Zoulous, les Boers et les Anglais et dans l'ensemble l'histoire de la formation de l'Afrique du sud telle qu'on la connaît de nos jours.
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Ce roman est un diamant brut, riche en enseignement mais le récit est dur et cruel.
Chaka qui était à l'origine un « bon » garçon, se fait molester par ses semblables.
Un jour, il reprend sa revanche…. Obnubilé par le pouvoir récemment acquis, il veut toujours plus.
Il fait des choix sans penser aux conséquences. Son coeur s'assombrit.
La soif du pouvoir est telle qu'elle fait changer un homme.
A l'instar de ces hommes politiques qui veulent faire ployer le genou aux peuples, qui adoptent des « lois » au détriment des plus faibles. L'histoire se répète inlassablement à travers le monde.

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En s'inspirant du chef zoulou Chaka (1786-1828), Thomas Mofolo propose une épopée inspirée directement des grands poèmes épiques comme ceux d'Homère. La destinée qu'il conte est celle d'un homme ayant fondé l'un des plus grands empires de l'Afrique australe avant de se faire assassiner par ses frères, car trop envahi par sa soif de pouvoir. C'est aussi l'une des premières oeuvres de la littérature souto, une langue parlée par les Basothos en Afrique australe et plus précisément au Lesotho et en Afrique du Sud. Paru en 1925, Mofolo a écrit son livre pour les siens, moins d'un siècle après la mort de Chaka et quelques années après l'annexion du royaume Zoulou. Pour les Basothos, Chaka était un tyran sanguinaire, d'où la portée très à charge contre le personnage, car l'auteur présente l'homme comme tel, un être ayant propagé la terreur, la répression et la mort.

La première chose passionnante dans cet ouvrage est la capacité de l'auteur à naviguer entre le conte philosophique et moral, la forme documentaire et précise de la vie du peuple zoulou et l'imprégnation de fantastique qui s'introduit de façon habile dans le récit. Mofolo développe toute la vie de Chaka, de sa naissance jusqu'à sa mort, et dévoile en même temps la naissance d'un peuple. L'enfance du protagoniste fut cruelle, car il est issu d'une naissance illégitime et donc il fut rejeté par sa propre tribu. Humilié et frappé, Chaka forge son caractère à travers les difficiles épreuves qu'il doit subir sans broncher. C'est l'une des voies intéressantes pour comprendre pourquoi Chaka était si abominable une fois devenu le chef de son peuple. Mais en même temps, comme tout bon récit légendaire et de mythe ancien, la fatalité joue un rôle prépondérant dans le récit et la vie du personnage est construite sur des événements et des rencontres qui vont aboutir à sa ruine et à son châtiment inévitable. La cruauté qu'il a encourue va lui donner le goût d'une ambition démesuré et sans équivoque. Plus courageux et fort que les siens alors qu'il n'est même pas un jeune homme (la fois où il tue un lion alors que les autres fuient le danger et lorsqu'il ose affronter une hyène, prête à dévorer une femme, en pleine nuit) la jalousie et la lâcheté des siens, va le faire exiler et rencontrer le devin Issanoussi. C'est à partir de là que son destin est scellé, car il passe un pacte faustien avec cet être mystique. Afin de lui donner tout le pouvoir qu'il souhaite, Chaka va accepter tous les sacrifices à faire pour acquérir ce pouvoir, quitte à abandonner toute dimension humaine. Il va jusqu'à tuer sa bien-aimée Noliwè et bien plus tard sa mère Nandi, refusant ainsi tout amour et tendresse dans sa vie.

« Chaka » est donc l'histoire d'un homme qui veut se faire reconnaître par les siens, obligé de faire un voyage initiatique pour conquérir un pouvoir qui lui est dû (car il appartient à la descendance du sang royal). Comme les héros de la Grèce Antique, Chaka est un être plein de chair et de désir, piégé par les tentations humaines, celle du mal et de l'ambition. Protégé par son pacte de sang, il va progressivement prendre le pouvoir, créer son propre peuple (les Zoulous donc, le « peuple du ciel » ou le « peuple céleste »), anéantir les peuples ennemis, instaurer la peur et le despotisme dans son royaume et massacrer avec folie son propre peuple. La violence de son histoire est décrite sans filtre et sans transparence, Mofolo veut faire ressentir pleinement le goût du sang (avec sa terrible sagaie) qu'à Chaka, pour mieux nous faire comprendre la malédiction que porte ce dernier. Plus la narration avance, plus le personnage est haï par les siens, fait souffrir et souffre lui-même, devient un être solitaire et ne pense qu'à tuer jusqu'à l'absurdité, pour régner toujours plus et devenir en quelque sorte un Dieu. En effet, il transcende sa propre condition humaine, la magie le fait lier à l'au-delà et se laisse alors emporter par l'étendue de son devenir et de sa grandeur. Il devient forcément son propre ennemi et chute inéluctablement de son piédestal. La propre force que lui a donnée Issanoussi (un devin protecteur devenant un messager des ténèbres) est un poison que Chaka n'a pas su maîtriser.

Pour conclure, Mofolo s'inscrit avec force dans la lignée des tragédies antiques, en écrivant une création littéraire originale qui adopte le mode épique des grands poèmes et récits oraux (il donne l'impression que son récit fut conté et transmis de génération en génération depuis des décennies). Mofolo lie constamment la beauté du réel, mais aussi son horreur et les croyances surnaturelles de ce peuple africain. le réel et la magie sont indissociables, cela fait partie intégrante du quotidien et des gestes du peuple Zoulou. L'auteur plonge dans les détails des rituels, des coutumes, des cérémonies et des guerres pour nous donner une vision globale de cette époque, mais réussit en même temps à étirer son propos de façon universelle. Toute personne peut se retrouver dans le destin de Chaka, car chacun est maître de son destin et de son aventure, saisi par un désir de violence et de vengeance après avoir vécu une injustice et tenter par l'ambition d'être le plus grand. Mais c'est ce que nous apprend ce livre et la destinée de Chaka, symbole de la grandeur et de la chute de l'Empire zoulou avant l'arrivée du colonialisme, c'est de ne pas dépasser les limites et de comprendre les vérités terrestres et les messages secrets de l'au-delà, pour rester humain.
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Lecture agréable et plaisante de ce conte africain qui nous dit l'histoire de Chaka, roi des Zoulous (le mot zoulou signifie céleste). Personnage haut en couleurs, guerrier hors pair et sanguinaire, il avait recours à la sorcellerie pour s'assurer du meilleur. Manière de revisite du Dr Faust et du maraboutage sévère, le livre fait la part entre l'ascencion et la chute liée à la paranoïa commune aux dictateurs. A rapprocher du film "Zoulou" (1964) et de la série télévisée Chaka Zoulou (1986).
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Quelle épopée ! Ce livre est passionnant, emplit de magie, de batailles et aux allures de légende. L'auteur nous conte l'histoire de Chaka et donc également de la création du peuple zoulou.
J'ai trouvé intéressant le parcours du personnage principal, même si je ne l'ai plus aimé rapidement. Je m'étais prise d'affection pour cet enfant rejeté qui faisait preuve d'énormément de courage. Quelle tristesse de voir à quel point la soif de pouvoir peut faire tourner la tête des hommes, même cellez des plus gentils.
J'ai beaucoup aimé que les coutumes nous soient rapportées dans le texte, notamment la croyance pour le fétichisme et l'importance de suivre à la ligne les instructions des médecins-feticheurs.
Le récit était très vivant et j'ai apprécié la traduction. Je voudrais d'ailleurs souligner que le traducteur a ajouté des notes en bas de pages pour nous faire une traduction littéraire de certaines expressions, ce qui nous permet de voir les images utilisées dans la langue souto pour dire telle ou telle chose.
Je vous conseille de lire cette épopée où les actions s'enchaînent et où il n'y a aucun temps mort !
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Des pieds à la tête, on ne pouvait lui trouver aucun défaut; vraiment, c'était un être à part, à tel point qu'à la guerre de nombreux guerriers blessés et mourants exprimaient comme voeu suprême le désir que leur souverain se dévêtit devant eux afin de pouvoir le contempler une dernière fois et mourir ensuite en paix; et il leur accordait ce dernier désir de leur coeur
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 Allez rapporter au chef, leur dit Chaka, qu'un malheureux vagabond affamé lui arrive en ma personne, et que je lui demande de me recueillir et de m'accorder sa protection; dites-lui aussi que celui qui parle de la sorte est moins un homme qu'un lièvre au milieu des chiens: tous ceux qui l’aperçoivent n'ont qu'une idée, le tuer sans même un mot à son adresse; qu'il fait à cause de cela partie désormais de la famille des hiboux... mais dites-lui aussi que celui qui lui envoie ce message possède un cœur d'homme et une main qui sait manier les armes, que c'est quelqu'un qui excellerait à combattre pour lui dans les expéditions guerrières.
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Les contrées vers lesquelles s’avançaient les armées de Chaka étaient magnifiques et prospères, parsemées de villages et couvertes de cultures et il y paissait d’innombrables troupeaux ; mais une fois ses armées passées là, il ne restait en arrière, sur leur passage, qu’une morne étendue brûlée par le feu, sans un village, sans un champ, sans bétail, sauf peut-être quelques animaux sauvages. Hyènes et chiens sauvages voyageaient par bandes immenses à la suite des armées de Chaka, qu’elles escortaient sans se laisser jamais distancer.
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La célébrité c'est quelque chose de doux à posséder;je n'éprouverais aucun plaisir,en effet,à gagner le pouvoir même un pouvoir démesuré,si je n'obtenais pas la célébrité en même temps;cette célébrité,c'est dans le cliquetis des armes que je la veux,lorsque s'écroulent les vaillants hommes au cou robuste et que s'effondrent les hommes ardents au combat.Je veux que mon pouvoir souverain,ce soit moi-même qui me le sois acquis,et cela afin d'accroître encore ma réputation.
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Il y a quelque chose que je désire, Chaka, que tu comprennes bien : retiens donc mes paroles : le grand personnage qui t’a rendu visite dans les eaux de la rivière, c’est le Seigneur des batailles ; si tu ne verses pas le sang, il ne mettra pas en toi son plaisir. La médecine que je t’ai inoculée, c’est celle du sang ; si, donc tu ne répands pas le sang en abondance, elle se retournera contre toi, et c’est toi qu’elle fera mourir. Ton devoir à partir de maintenant, c’est de tuer, de massacrer sans pitié. Il faut que toi-même tu prépares la voie qui doit te mener à la splendeur de ta souveraineté.
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