Chacun de nous est une flamme vivante, et Jésus-Christ a allumé cette flamme. Souviens- t'en, Rebecca.
Les paroles de Rose Lutter résonnaient à ces oreilles.
Elle essayait encore de croire.
Elle avait treize ans, elle était mineure. Elle serait pupille du comté du Chautauqua jusqu'à ses dix huit ans.
Le piano reprit. Mère et fille écoutèrent ensemble. Rebecca s'accrochait à la main de sa mère comme si elle risquait de tomber d'une grande hauteur.
Cette beauté, et l'intimité de cette beauté, Rebecca en chérirait le souvenir toute sa vie.
Elle méprisait profondément la faiblesse des femmes. Elle en avait honte, elle en était furieuse. Car c'était l'éternelle faiblesse des femmes, la faiblesse de sa mère. La faiblesse d'une rage vaincue.
Rebecca n’avait pas l’intention de rester sobre, ce soir-là. Elle en avait marre d’être toujours aussi sérieuse, cafardeuse, ses amies le lui reprochaient assez. Une gueule d’enterrement, bon Dieu. Aucun type ne veut sortir avec une fille cafardeuse. Rebecca s’entendait rire et sentait son visage s’empourprer, et elle savait qu’elle était sacrément jolie, c’était pour cela que Nils Tignor était attiré par elle.
Non qu'elle croie en un dieu quelconque. Sûrement pas.
Il y avait toutefois des brises capricieuses, de temps en temps.
De soudaines rafales de vent. Un vent violent comme celi avec lequel elle avait grandi, soufflant de l'immense lac Ontario, secouant la vielle maison de pierre. Un vent cruel et suffocant qui vous empêchait de respirer. Qui arrachait le linge de la corde à linge et pouvait même renverser les poteaux. Mais il y avait des vents plus doux, des brises aussi douces que des souffles. Et c'étaient eux qu'elle apprenait à reconnaître. Eux qu'elle attendait avec impatience. Eux qui guideraient sa vie.
Ne TOUCHE pas à l'enfant. Cette rage terrible en toi, qu'elle reste en toi.
Ce qu'elle craignait le plus : faire mal à Niley. Secouer ce sale môme têtu jusqu'à ce que ses dents s'entrechoquent, jusqu'à ce que ses yeux chavirent.
La vérité la plus profonde de l'âme américaine est qu'elle a la superficialité d'une bande dessinée [...].
Aucun acte érotique n’existe isolément, pour n’être vécu qu’une fois et oublié. L’érotique n’existe que dans le souvenir : remémoré, ré-imaginé, revécu dans un présent continuel.
« Une femme ouvre son corps à un homme, il le possédera comme s’il lui appartenait. Quand un homme vous aime ainsi, il finira par vous haïr. Jamais un homme ne vous pardonnera la faiblesse qu’il a de vous aimer. » (p. 445)
J'ai déjà du mal à ne pas devenir fou moi-même, mère, je n'ai pas l'intention d'être responsable de ta folie à toi.