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4,14

sur 383 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
C'est avec appréhension que j'entame cette critique, comme quand j'ai ouvert ce roman pour la première fois. de Joyce Carol Oates je ne connaissais rien; ni son style ni son univers, juste une auteure américaine très prolixe.
La petite Rebecca Schwart née sur le bateau qui emmène sa famille au Etats-Unis. le père, Jacob, la maman Anna et les deux frères Herschel et Gus ont fuit le nazisme.
Issu d'un milieu culturel plutôt élevé, lui professeur de mathématique citant Schopenhauer, la maman mélomane et pianiste vont se retrouver dans un lieu sordide, Milburn petite ville de l'état de New-York.
La petite Rebecca va devenir la fille du fossoyeur. Nous allons la suivre pas à pas sur ce chemin tortueux qu'est sa vie. Les parents sombrant peux à peux dans la folie, les enfants que l'on maltraitent. On continue on s'enfonce dans le gris puis dans le noir, de temps en temps, une petite éclaircie vient adoucir le récit comme cette sonate n°23 écouté à la radio. On ne sait pas où J.C.Oates nous emmène, pourtant je continue, les pages défilent :le premier travail de Rebecca, son mariage, son enfant; l'écriture est fluide, ces descriptions ces petits cailloux que la romancière laisse pour ne pas la perdre; des indices comme la sonate n°23 "appassionata".
Le personnage de Rebecca est magnifique, c'est une femme forte devant l'adversité.
Malgré la noirceur de ces parents j'ai eu de l'empathie pour eux. Seul Tignor, manipulateur, violent tout ce que je hais chez un homme m'a donné la nausée.
Nul besoin de dire que j'ai adoré ce livre, et madame Oates a rendu un lecteur de plus heureux. Pour les inconditionnels de musique je vous conseille la fameuse sonate n°23 de ce grand monsieur Beethoven.
Merci à Latina et aux lectrices qui se reconnaitront pour leurs conseils.
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Rebecca porte en elle une tumeur : la tumeur de son enfance dévastée…par son père, lui-même dévasté par son statut d'immigré allemand aux USA. Ancien professeur de mathématiques, il n'a trouvé qu'un emploi de fossoyeur et fait payer le prix fort à sa famille. Les 2 frères aînés fuient cette maison délabrée, ce père taciturne et violent, cette mère à moitié folle. Rebecca survit, tant bien que mal, à cette ambiance mortifère, pour finir par assister à l'horreur absolue : le meurtre de sa mère et le suicide de son père.
La tumeur que Rebecca a enfouie en elle continue à se développer, lentement, pendant son adolescence puis le début de sa vie adulte, car la violence se retrouvera encore sur son chemin...
J'attribue à JC Oates le titre de « docteur ès psychologie » pour sa maîtrise absolue de l'âme humaine, autant masculine que féminine. Deux pas en avant, trois pas en arrière, c'est comme ça qu'on avance dans ce roman. Tout comportement, toute pensée, est décortiqué, mais de manière tellement sensible, tellement juste, tellement bouleversante, que je ne peux que balbutier et m'incliner.

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La fille du fossoyeur est le second livre que je lis de l'autrice américaine Joyce Carol Oates.
Comment vous parler de ce roman de plus de sept cents pages que j'ai lu presque d'une traite en l'espace de deux jours ? Comment vous en parler sans trop en dire, rien que mon ressenti, un ressenti à fleur de peau, une histoire qui pourrait continuer à se promener dans mes jours et mes nuits.
Ici le bonheur n'est jamais loin de l'appréhension, comme s'il fallait s'en méfier, le tenir à distance, se dire que si le bonheur est là, le malheur lui se tient en embuscade, jamais loin pour dévorer les jeunes filles innocentes...
Survivre est le mot qui m'est venu souvent dans cette lecture addictive. Survivre aux démons de son enfance...
Ce roman est une comète qui m'a traversé de part en part. La fulgurance de l'histoire, la manière de l'écrire, de me la raconter, ses personnages écrits de manière si fouillée, jusqu'à entendre les battements de leur coeur. J'ai aimé tout cela. J'ai été dévoré par cela...
Tout au long de ma lecture, je me suis demandé où Joyce Carol Oates était allée chercher ce sujet, dans quel puits sans fond. Plus tard je l'ai su, toujours fouillant à droite et à gauche, elle ne s'en cache pas d'ailleurs, c'est l'histoire de sa grand-mère qui l'a inspirée.
C'est vrai que son écriture paraît habitée par un sentiment douloureux, cette écriture fine et aiguisée, féroce, capable d'aller fouiller les tréfonds de l'âme humaine.
J'aime qu'un écrivain m'enlève de mon territoire ordinaire pour me rincer dans tous les sens comme dans une vague frénétique.
J'ai l'impression que le souvenir de cette fulgurance qui a traversé deux jours de cette lecture estivale, va rester à jamais dans ma mémoire, je me souviendrai toujours de la fille du fossoyeur.
J'ai été troublé par ce texte d'une fluidité impressionnante malgré le sujet, j'ai été troublé comme on peut l'être en regardant une eau saumâtre, se dire qu'il y a peut-être de la vie là-dedans.
J'ai rendu grâce à Chopin et Beethoven de venir apporter quelques respirations à l'étouffement du texte. La sonate 23 Appassionata continue de vibrer en moi. J'ai rendu grâce aussi aux doigts agiles de Thelonious Monk...
En dehors de la musique, pourtant il y a de la lumière de temps en temps, une lumière comme la lame d'un couteau, blanche et tranchante. Comme le regard d'une jeune femme aussi qui regarde froidement devant elle.
La violence et le malheur courent sans cesse après cette petite fille pour tenter de la rattraper, cette petite fille captive de ses rêves d'enfance, mais les fuyant en même temps du moins ceux qui ressemblent à des cauchemars et qui reviennent, parce qu'on sait que les cauchemars ont justement cette fâcheuse tendance à agir ainsi...
Ce drame de l'enfance, comment l'évoquer sans rien dire ? Ne lisez aucune chronique avant de vous emparer de ce livre envoûtant car certains ont déjà fâcheusement tout raconté ou presque et c'est fort dommage.
Où trouve-t-elle la force de se relever parmi les décombres de cette enfance broyée où il y avait malgré tout quelques rais de lumière ? Peut-être dans cette phrase que lui a un jour dit son père, oui vous savez celui qui est devenu le fossoyeur : « Cache ce que tu sais. Comme tu cacherais une faiblesse. Parce que c'est une faiblesse d'en savoir trop parmi des gens qui en savent trop peu. » Est-ce à ce compromis qu'elle pourrait survivre ?
S'extraire d'où elle vient... Mais d'où vient-elle au juste, puisqu'elle vient de presque nulle part ?
Renoncer à ce destin qui la pourchasse de manière implacable.
Changer de nom, se teindre les cheveux... Cela peut-il suffire pour qu'un prédateur renonce à vous pourchasser ? Cela suffit-il à arrêter la malédiction qui pèse comme un anathème, inverser le cours des choses ?
D'ailleurs, le sait-elle, qui elle est vraiment ? D'où elle vient ?
Rebecca est fille d'une famille juive allemande, ayant fui en 1936 l'Allemagne nazie vers les États-Unis. Elle est née à bord d'un paquebot dans le port de New-York, devant Long Island.
Le mythe du Nouveau Monde était alors à la portée de leurs rêves.
Son père était professeur de mathématiques à Munich, passionné par la philosophie de Hegel et d Schopenhauer, sa mère pianiste, passionnée elle par Chopin et Beethoven.
Ils vont découvrir un autre monde, ce monde mythique qu'ils imaginaient autrement, le Nouveau Monde, loin de l'effroi, loin de l'horreur.
Le père va devenir fossoyeur dans une petite ville américaine de l'État de New-York. C'est la seule chance trouvée pour s'intégrer. La mère sombre très vite dans une sorte de dépression, attendant vainement l'arrivée du reste de sa famille ?
Ils vivent dans la vie ordinaire d'une Amérique hostile qui ne les acceptera pas. Est-ce ainsi l'explication de cet abime qu'ils ont construit chaque jour dans cet exil où ils n'ont jamais su trouver leur place ?
Cette chronique intime d'une famille en exil croise ici la douleur de l'histoire et ses hontes, la honte des États-Unis, celle du silence sourd du Président Roosevelt.
Le 13 mai 1939, le Saint-Louis, paquebot transatlantique allemand, quitte le port de Hambourg. À son bord, il y avait 937 passagers. La grande majorité d'entre eux sont des juifs allemands fuyant le Troisième Reich, qui ont réuni l'argent nécessaire pour un visa et un aller simple sur le Saint-Louis dans l'espoir de trouver refuge en Amérique. Refusé d'escale à la Havane, puis à New-York, le Saint-Louis a dû faire demi-tour pour l'Europe, alors sous la botte nazie. Beaucoup de ses passagers furent victimes des camps et exterminés...
Peut-être dans ce paquebot, y avait-il des membres de leur famille, qui sait, qui peut le dire... ?
Comment ces deux-êtres-là vont-ils alors sombrer dans une sorte de folie emportant le décor, tentant d'emporter les êtres qu'ils leur sont chers avec eux, par quel miracle Rebecca s'accrochera-t-elle pour ne pas tomber dans cette fosse béante ? A quels interstices du paysage saura-elle poser ses mains pour ne pas être emportée dans le vide ?
C'est comme cela qu'elle va devenir la fille du fossoyeur, qu'on l'appellera ainsi.
Elle a grandi dans la misère, la déchéance, une sorte de terreur qui faisait semblant de ne pas y ressembler. C'est l'horreur qui conduit à un drame familial d'une rare violence, achevant l'enfance, mais sont les stigmates seront des éléments fondateurs pour le reste de sa vie.
Comment survivre aux démons de son enfance qui n'en finiront jamais de la hanter ?
Elle va grandir, se relever, marcher, avancer, rencontrer des hommes et puis celui qui sera le premier homme de sa vie, ce ne sera pas la bonne pioche, comme on dit.
Tous les hommes sont-ils comme cela ? Les hommes seraient-ils tous des pervers, des prédateurs ? Aurait-elle tiré à jamais la mauvaise carte de la vie ?
Elle cherche, cherchera durant ces années, à percer le mystère et la violence de certains hommes sur les femmes, comme des millions de femmes depuis la nuit des temps sur toute la planète, depuis que l'humanité existe, cherchent aussi la réponse à cette question. À l'inverse de tant d'autres femmes qui ont tenté sans retour de faire entendre leur douleur auprès d'un commissariat de police ici ou ailleurs avec la vaine illusion même encore en 2023 d'y trouver un possible écho, ou là-bas encore pire dans l'État de New-York en 1959 chez le shérif homologué du coin qui dira que ces faits font partie des choses normales, elle sait par avance que cela ne servirait à rien et elle ne fera jamais le pas, acceptera les coups sans frémir, sans broncher, sans même à la fin cacher son visage avec ses mains... À quoi cela servirait-il de redoubler la violence ? Espérant seulement que son fils ne voit pas cela...
Rarement, j'ai lu ces mots, ces coups venir avec tant de douleur au ventre comme si c'était à moi que cet homme les assenait.
J'ai l'impression que le regard éperdu de cette enfant restera à jamais inoubliable pour moi.
Sans doute comme tant d'autres femmes, elle a peut-être pensé que cette violence était justifiée, que c'étaient eux qui détenaient la vérité, les hommes qui cognent, celui qui frappe sa femme, comme si c'était elle la coupable, comme si les choses étaient irrémédiablement inscrites ainsi.
J'ai craint pour Rebecca. Pour sa vie, pour son fils.
Peut-être y a-t-elle pensé, à son fils justement, plus qu'à elle, lorsqu'elle s'est convaincue que survivre était plus important que mourir ?
Le chemin pour sortir de cette violence, n'est-ce pas acquiescer en silence ? Mais est-ce que cela suffira pour survivre, à faire abdiquer cette incompréhension qui sommeille comme une colère sourde ?
L'écriture de Joyce Carol Oates est là à chaque instant, précise, ample, généreuse aussi.
C'est l'écriture qui dessine un très beau personnage de femme dans une métamorphose attendue, une fille, une femme, une amante, une mère et sa tendresse ainsi que sa férocité pour tenter de tenir debout.
C'est une manière de raconter une histoire, avec des flux de conscience qui vont et viennent, reviennent, ramènent de l'émotion à chaque vague qui revient, à chaque pas de Rebecca qui revient...
Qu'a-t-elle vécu, Joyce Carol Oates, pour décrire à ce point la dureté des hommes avec autant d'acuité ? Dire l'ordinaire sordide et poisseux de l'Amérique profonde...
Rebecca peut-elle échapper à ce destin d'avoir été la fille du fossoyeur ?
Derrière la noirceur, ce roman n'est-il pas au contraire le récit de la résilience, la métamorphose et la reconstruction d'une femme ?
L'épilogue que j'ai trouvé légèrement long m'a perdu un peu en chemin, mais je crois deviner qu'il était indispensable pour l'autrice, afin de fermer définitivement une porte essentielle à cette histoire. Son histoire peut-être, ou celle de sa grand-mère.
Il n'empêche que c'est un livre autant magistral que dérangeant.
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Ce livre ne m'a pas quittée , j'ai oublié le temps, j'ai oublié la nuit , en fait je n'ai fait que lire depuis la veille, puis tard dans la nuit, et dès que j'ai pu abandonner quelques obligations sociales et domestiques, je suis retournée avec bonheur dans ces pages. Un vrai pavé, qui vous happe et absorbe vos pensées, un réel univers tout en nuances ! Bref je n'ai pas été de bonne compagnie depuis 24 heures.
C’est l'effet produit par les grands romans émouvants qui mêlent destins individuels et histoire du monde. C'est sûrement une expérience partagée par nombre de lecteurs passionnés, car elle sait raconter une histoire, cette auteure qui aime les personnages ambigüs, profonds, humains.
C'est l'histoire d'une petite juive allemande qui naît en 1936 dans le port de New York dans la cale d'un navire transportant des migrants fuyant les persécutions en Europe. Joyce Carol Oates raconte la vie de Rebecca/Hazel, faite de tragédies, de changements d'identité, de renoncements, de secrets et mensonges. C'est un très beau destin de femme, une histoire de survie, au-delà de la violence des hommes, au-delà de l'holocauste, qui nous est comptée là, quelque chose de profondément humain.
Elle nous emmène dans l'esprit de Rebecca pour voir et ressentir avec elle, jusqu'à sa manière d'enfant de percevoir les mots entendus dans les conversations des adultes. Elle réussit à nous faire partager ses pensées, ses regrets, ses peurs, ses contradictions en utilisant l'italique qui se mêle habilement à la narration.
Elle réussit à nous troubler avec ses réflexions sur l'histoire, sa prétendue linéarité, et son sens du présent, son rapport à la vérité qui n'est pas forcément positive. Cette complexité n’est pas la seule qualité de ce grand roman ...
La correspondance du dernier chapitre m'a émue aux larmes…

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Il n'y a pas bien longtemps, j'ai eu l'occasion de croiser le chemin d'une grande dame, inconnue pour vous, mais une très grande dame quand même. Cette femme aujourd'hui âgée de 93 ans est le souvenir vivant de la seconde guerre mondiale. Cette grande dame montre son immatriculation tatouée sur son avant bras gauche avec "fierté" afin que nous et nos descendants n'oublions jamais les horreurs faites à Auschwitz. Elle fait des conférences dans les collèges pour que l'histoire ne se reproduise jamais.
Mais en dehors de son passé tragique, c'est une femme qui a une incroyable joie de vivre et elle force le respect.

Alors bien évidemment, en lisant la fille du fossoyeur, je n'ai pu que penser à cette femme et au fait que chaque personne vit les choses et réagit différemment face à l'adversité.

Les parents de Jessica ont vécu dans la peur, même lorsqu'ils sont arrivés et vécu aux USA. Une peur lancinante qui les a suivi toute leur vie.
Jessica n'a pas eu la vie facile non plus, entre une enfance difficile et un mariage raté. Elle a pris, elle, contrairement à ses parents, son destin en main.

L'auteure a réussi un véritable exploit en faisant à la fois un roman "historique" et psychologique, ou chaque personnage est travaillé.
Un livre qui fait mal par son histoire mais qui arrive à nous montrer qu'il faut se battre et que rien n'est jamais perdu.

Un livre qui fait réfléchir et qui devrait être lu par le plus grand nombre.
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Il est des romans qui nous touchent profondément car ils viennent titiller des émotions,des souvenirs inconscients qui font battre notre coeur à la chamade,tout à coup comme si les mots s'adressaient à nous! C'est le cas pour moi avec ce roman. L'histoire n'a pourtant aucun point commun avec la mienne. Il s'agit de l'intime,des états d'âme, des perceptions parfois indiscibles parce que non identifiées, et là,les mots percutent.
Dans La fille du fossoyeur, J.C.Oates nous raconte l'histoire d'une famille allemande en 36 qui émigre dans l'Etat de New-York pour fuir le nazisme. Rebecca nait sur le bateau,alors que tout le monde débarque. Les conditions de sa naissance sont très dures,voire culpabilisantes et c'est le début d'une vie de pauvreté et d'humiliation pour elle et ses frères mais aussi,bien sûr pour ses parents. Son père était professeur de mathématique et passionné de philosophie, sa mère mélomane et pianiste. le père accepte dans l'urgence d'avoir un lieu pour vivre,un poste de fossoyeur, persuadé qu'une autre vie va rapidement s'offrir à eux. Ça ne sera pas le cas et la famille s'enfonce dans la précarité, la honte et même la folie. Rebecca s'adapte comme elle peut et vit toutes les ambivalence et la confusion des sentiments inhérents à l'enfance et l'adolescence qui plus est dans un contexte aussi compliqué que le sien. Période qui s'achève par un drame d'une rare violence.
Nous la suivons ensuite dans sa vie de jeune femme prisonnière de l'engrenage de la violence conjugale que l'auteure décrit avec une justesse extraordinaire. Devenue maman, elle va cependant s'échapper avec son fils et devenir une autre pour survivre et permettre à l'enfant de devenir ce qu'elle rêve pour lui.
La seconde partie du roman nous transporte de l'ombre à la lumière. du moins en apparence, car certaines blessures ne peuvent pas guérir.
De multiples thèmes sont développés dans ce roman dont la puissance des non dits, les traumatismes intergenerationnels,la violence,l'amour etc mais ,ce qui rend ce roman exceptionnel à mes yeux, c'est véritablement la profondeur psychologique des personnages et tout particulièrement de Rebecca. Je ne connaissais pas Joyce Carol Oates et je suis impressionnée par sa capacité à rendre compte du ressenti de son personnage, de sa psychologie ,de ses conflits intérieurs. Elle tisse avec subtilité et finesse les liens qui constituent l'identité de Rebecca. Elle interroge l'espace de liberté qui nous est donné ou pas,pour échapper à ce qui nous a meurtri ; sur ce qui demeure des rêves qu'on a enterrés Ce cheminement est magnifié par un parcours musical en adéquation parfaite avec la force des sentiments qui s'expriment. Je n'ai pas résisté au plaisir d'écouter les morceaux cités pendant ma lecture, Beethoven, Grieg, Schubert etc . Ce qui a aussi contribué à renforcer ma sensibilité au langage de J.C.Oates. c'est un très beau coup de coeur.
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Je le sais : choisir un livre de Joyce Carol Oates peut me faire sombrer très vite dans l'horreur. Elle n'épargne rien, tous les détails page après page sont là, bien décrits, insidieux ou violents, sensibles ou blessants. Plus que la résilience, c'est la survie qui fait avancer Rebecca. La sienne et celle de son enfant. Ses parents, allemands réfugiés aux Etats-Unis, vont sombrer dans la violence, la folie. Ses deux frères auront le réflexe de se sauver la laissant seule au milieu de ces deux fantômes indifférents. Elle assistera au meurtre de sa mère, au suicide de son père et ne comprendra jamais comment elle a échappé à sa propre mort. Quand on ne connait que la violence depuis sa naissance, va-t-on la rechercher une fois adulte ? C'est ce que Rebecca va faire avec son premier mari. Elle descendra au tréfonds de l'horreur mais réagira en voyant son petit dans un bain de sang par terre. Elle fuira les hommes, les villes, cajolant son fils qui dans ces années de fuite va trouver dans la musique une façon de s'échapper de la vie terrestre. Elle rencontre enfin la stabilité avec Chet. Sait-elle que parfois il a des désirs de violence comme son ancien mari, le devine- t-elle dans sa survie ? Ils vont vivre pourtant un amour sans faille, un mariage et l'adoption de son fils par son compagnon, dix ans après leur rencontre. Il faudra la force d'un appel téléphonique la replongeant dans son passé pour comprendre qu'elle ne craint plus rien. Il y a une scène marquante : dans la rue un homme l'aborde, il est vêtu de guenilles et se présente comme son frère. Rebecca fera semblant de ne pas être celle qu'il reconnait. Elle s'appelle Hazel maintenant, elle a rayé son passé, protégé son enfant, il n'est pas encore l'heure de se retourner vers le passé et de faire face. Elle va le faire, plus tard prenant contact avec sa cousine qui devait la rejoindre pendant la guerre et qui partira dans un camp, les américains ayant refoulé le bateau contenant les réfugiés. Rebecca a plus de soixante ans. Avec ses lettres adressées à sa cousine elle forcera la carapace de celle-ci (la même que la sienne) et fera un formidable lâcher-prise. Et comme toujours dans la vie d'une femme c'est à ce moment- là que son corps sortira toute cette survie en déclarant un cancer. Une superbe histoire inspirée de la vie de la grand-mère de l'Auteure.
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Du grand Oates ! Quelle profondeur dans ce roman, ce roman d'une résistance acharnée à toutes les épreuves, à tous les chocs, à tous les accidents qui font l'histoire. Rebecca Schwart, née dans la crasse d'une cale de bateau dans le port de New-York, de parents allemands fuyant le régime nazi. Rebecca Schwart qui va supporter de grandir dans la maison en pierre du cimetière dont son père est le fossoyeur. Rebecca qui va résister à tout, les humiliations et les violences de toutes sortes. Des violences sociales dans cette Amérique qui ne voit pas d'un très bon oeuil l'installation de ces familles de miséreux arrivant d'Allemagne. Des violences physiques et morales quand jeune adulte elle va s'engager dans une liaison amoureuse toxique.

Et si tout cela ne forge pas le caractère ! Et pourtant, jamais elle ne perd espoir. Son fils sous le bras, elle reconstruira tout, pas à pas, pierre après pierre ... La survie à tout prix. Comme ces autres restés en Europe (ou renvoyés parce qu'indésirables aux USA) et qui furent enfermés dans des camps.

L'écriture dense, intense, profonde de l'auteure nous entraîne complètement, nous bouleverse parfois, nous malmène souvent. C'est de l'art en 650 pages, dont aucune n'est à jeter. Un roman qui brille d'intelligence dans un propos accessible à tous mais qui joue en permanence avec notre propre capacité de résistance.
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En 1936, la famille Schwart quitte l'Allemagne pour les États-Unis. Elle s'installe dans la vallée de Chautauqua. le père, qui était professeur dans un lycée allemand, est contraint d'accepter un emploi de fossoyeur. le rêve américain ne se réalise jamais pour lui et son épouse. Jacob Schwart est un père odieux, violent et mauvais, haï par tous ses enfants. « Il était un homme brisé. Un homme dont les rats avaient mangé les tripes. Mais il était aussi têtu. Retors. » (p. 87) Rebecca, la cadette, échappe de peu au drame qui anéantit sa famille. Désormais sans racines, elle fait de son mieux pour survivre et oublier d'où elle vient. « Elle avait un air têtu, une dignité raide. Elle ne se laissait marcher sur les pieds par personne. » (p. 43) Elle croit trouver le bonheur avec son époux, Tignor, mais ne l'attendent encore que danger, violences et désillusions. Rebecca doit se sauver et sauver son enfant. Elle s'enfuit à nouveau et devient une autre. Mais le passé n'a de cesse de la rattraper de différentes façons. Quelle que soit sa nouvelle identité, elle sera toujours la fille du fossoyeur.

Joyce Carol Oates sait écrire de très beaux destins féminins et des personnages puissants. Ce roman est la fabuleuse histoire de la résilience et de la survie d'une femme courageuse, solide et déterminée. de 1936 à la veille des années 2000, Rebecca Schwart gagne son indépendance et sa place. La fin du roman est une question lancée aux vents mauvais et au spectre hideux des génocides. La fille du fossoyeur est une claque littéraire qui interroge l'histoire, l'identité et la société.
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La fille du fossoyeur a été inspiré à l'auteur par la vie de sa grand-mère, avec un changement d'époque, puisque Rebecca, narratrice et personnage principal, est née en 1936, presque comme Oates elle-même.
La première partie présente Rebecca jeune maman obligée d'aller travailler à la chaîne pour nourrir son petit Niley, dont le père n'est guère présent. le retour de l'usine le long d'un chemin de halage où elle est suivie par un inconnu à l'allure étrange met déjà dans l'ambiance, et quelle ambiance !
La suite renvoie dans l'enfance de Rebecca, où elle est la dernière enfant de la famille Schwart venue d'Europe de l'Est et débarquée à New York juste au moment de la naissance de la petite fille.
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