Merveilleuse
Madame Bâ qui ouvre pour nous le grand livre de l'Afrique vraie. Un livre dont le papier provient à n'en point douter des arbres généalogiques dont sa maman maîtrisait parfaitement les racines, les troncs et les branches. « Ma mère était une forêt » dit elle-même Marguerite Bâ.
Kayes, un petit village typique de l'Ouest du Mali, du côté où le fleuve Sénégal se la coule douce. C'est là que notre héroïne – le mot n'est pas usurpé – a vécu une enfance rude mais heureuse. Désormais grand-mère après avoir abandonné ses études de droit pour élever huit enfants sans beaucoup d'aide de « son trop beau mari », extra –conjugalement très sollicité et aujourd'hui décédé, elle mène un combat pour retenir ses compatriotes, la plupart d'entre eux rêvant d'une vie en France. Un miroir aux alouettes lui indiquent son instinct, sa sagesse et son instruction.
Or, son petit-fils Michel, exfiltré par un oncle un peu véreux, se trouve justement dans ce supposé eldorado pour y assouvir sa passion du foot avec la certitude rêvée d'y faire une immense carrière, à l'image de ses idoles qu' étant petit il distinguait entre les parasites sur l'écran télé du village.
Madame Bâ ne veut pas laisser un enfant vulnérable sous l'emprise de trafiquants aussi prompts à s'enrichir sans vergogne sur le dos des rares jeunes sportifs qui percent que de se débarrasser sans fioriture des nombreux autres. Elle a donc décidé d'aller arracher elle-même son petit-fils à ce réseau malfaisant.
Mais pour voyager en France, elle doit d'abord obtenir un visa par le biais du formulaire ad hoc. le hic, c'est qu'il lui est absolument impossible de décliner son identité sans raconter ce qui la constitue. Ni de mentionner sa profession sans la resituer dans le cadre local. Et ainsi pour chaque rubrique. Bref, ce formulaire 13-0021 n'est pas du tout adapté à sa situation.
Un avocat français, venu chercher une expérience en Afrique, accepte de l'aider dans ses démarches, mais il va de soi que chaque minute est facturée, fût-ce en tenant compte de la réalité économique locale. Principe très vite abandonné, sa cliente n'ayant pas les moyens de payer en proportion de sa verve intarissable. Au début angoissé par le temps non rentabilisé qui passe, il va peu à peu se décrisper, écouter, encourager
Madame Bâ à poursuivre son histoire et terminera subjugué.
Tout comme le lecteur d'ailleurs.