En matière d'absorption de l'espace, pour la première fois, j'ai ressenti qu'on pouvait s'approprier un volume en architecture, c'est très étrange à vivre, très agréable, mais presque dangereux, car par la suite, il est très difficile de revenir à un autre système de prise de vue. Si on peut faire une comparaison avec le travail du son, c'est comme si on passait d'un dictaphone a un Nagra, on change de dimension, la perception est différente, l'acuité est différente, tout est différent. Et j'ai beaucoup aimé la contrainte, parce qu'elle oblige à anticiper l'image, mais ça n'empêche pas qu'il y ait des surprises, ça peut arriver. Ce que j'aime, c'est faire de ces contraintes des avantages ou tout au moins des arguments: par exemple avec le poids et la lenteur, on est tout de suite dans des temps de pause plus longs qui ne permettent pas de faire des photographies dites instantanées. C'est un choix que j'ai fait très tôt, dans mon travail il n'y a pas d'instantanés. C'est construit comme une architecture, d'ailleurs pour moi, la photographie a à voir avec ça, et la lenteur ou plutôt le temps est un temps qui nourrit, c'est un temps sédimente, un temps qui a enregistré et qui restitue une relation, ça vous oblige à établir une relation avec le sujet.
Même si depuis des siècles, on se frotte aux images, le mot est toujours dominant.
Les œuvres photographiques dEric Poitevin savent se faire silencieuses. Représentations de la réalité, elles sont pourtant souvent considérées comme « abstraites », ce qui va à lencontre de ce revendique leur auteur. Dans un entretien réalisé à loccasion de lexposition Le meilleur des mondes, lartiste né en 1961 en France, évoque ses intentions.