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sur 1022 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Jean Roscoff,  professeur à la retraite au mi-temps de la soixantaine, divorcé mais pas remis de sa séparation avec Agnès, son ex, père de Léonie qui vit désormais avec sa compagne Jeanne, veut se lancer dans l'écriture d'un essai sur Robert Willow, poète américain trop méconnu à son goût, mort au volant de sa voiture au début des années 60 comme Albert Camus, cette écriture lui permettant d'avoir un autre but que celui de boire et peut-être se donner une seconde chance comme écrivain.

En effet il espère ainsi se réhabiliter auprès du monde littéraire car son premier essai sur l'affaire des époux Rosenberg, accusés d'espionnage à la solde des russes et exécutés, se voulait déjà une réhabilitation de ceux-ci mais le hasard voulu que l'ouvrage paraisse juste avant une révélation qui mettait à mal son travail le poussant à revenir à l'anonymat même si ce ratage reste collé à son nom. Mais les temps ont changé et le monde de la critique et des jugements aussi. Cette fois-ci, c'est l'absence de ce qui, pour lui, semble un détail, qui plus est injustifié, va le confronter à la fulgurance du monde des années 2000, de la rapidité avec laquelle un livre ou tout autre publication, peut se trouver au coeur d'une polémique. Les réseaux sociaux mais également les médias vont se lancer dans une campagne de dénigrement de l'ouvrage, accusant Jean Roscoff d'idées dans lesquelles il n'a jamais navigué, bien au contraire, puisque, comme il ne cesse de le clamer, il a fait partie de ceux qui depuis longtemps se sont engagés dans la lutte contre l'exclusion et la différence.

"Tout cela était grotesque, c'était Robert Willow qu'on réhabiliterait et non pas ma propre personne, et alors je réalisais que Robert Willow, était un prétexte que j'utilisais pour obtenir ma propre réhabilitation, pour me faire mousser, moi. (p116)"

Avec cet essai s'adressant, pensait-il, à un public restreint, celui de la poésie, il va se retrouver sous le feu des attaques devant faire face, seul car, c'est bien connu, ceux qu'il croyait ses soutiens vont quitter un par un le navire en plein naufrage, à un monde qui lui est inconnu et étranger, celui des réseaux sociaux mais également des commentaires masqués, sans fondement parfois mais ineffaçables, des attaques venues de toutes parts, relayées par la grâce des écrans et claviers.

Jean n'est pas armé pour lutter car il n'a pas les outils pour, ne comprend pas ce déchaînement et voit peu à peu tous ses arguments, ses justifications se retourner contre lui. Derrière des pseudos, ses détracteurs se répandent, accusent, l'insultent et vont le pousser à se cacher, à se terrer dans le Brionnais, coupé du monde pour tenter de reprendre pied et envisager une contre-attaque.

Abel Quentin décortique à la fois les processus engagés par les anonymes qui répandent et s'évertuent à démolir, sous le couvert de l'anonymat qu'offrent internet et réseaux sociaux, une oeuvre (et par extension une personne), la vitesse à laquelle la toile d'araignée nocive s'étend, s'alimente et comment face au fléau son héros dépassé et sincère, va sombrer, s'enliser face à une marée incontrôlable qui ne fera que s'auto-alimenter lui fournissant même, par naïveté, matière à polémiquer.

Richement documenté, Abel Quentin se lance dans la dénonciation du fléau de notre époque, le harcèlement reprenant des campagnes de purge anciennes comme celle du maccarthysme aux Etats-Unis d'un côté et des luttes qui s'engagèrent dans le monde littéraire, entre autres, à l'annonce de la réalité de ce qui ce cachait derrière les grandes idées du communisme, confrontant les débats d'hier, les affrontements d'alors avec ceux qui se jouent désormais à coups de messages lapidaires et destructeurs. 

Une construction menée entre le parcours d'un écrivain déboussolé, les références littéraires, politiques, culturelles et sociales aux Etats-Unis et en France, un ton savamment dosé entre mécanismes, rouages de la machine médiatique mais également entre la vie privée du héros et son regard à la fois réaliste, désabusé et ironique sur lui-même et sur ce qu'il découvre du monde auquel il est confronté, sans en comprendre toujours les règles et le fonctionnement, font de l'ensemble un témoignage édifiant de ce qui résulte de la moindre erreur, absence ou prise de position. Jean est à la fois touchant dans son désarroi mais également naïf, ne voyant pas son entourage peu à peu se désolidariser, l'abandonner à son sort quand les intérêts ne sont plus là ou que les éclaboussures du scandale risquent de les atteindre. 

J'ai aimé mais j'ai eu du mal à rester totalement concentrée je l'avoue, sur le récit par moment, peut-être parce que l'axe de celui-ci et sa densité ne trouvaient pas toujours écho en moi, même si je lui reconnais un énorme travail de contextualisation dans les différentes époques, sujets, reprenant pour tous à la fois les tenants et les aboutissants.

Une lecture qui est le reflet de notre époque, de ses dangers pas toujours visibles à première vue, où chaque mot compte, où tout doit être pesé, justifié car risquant d'être déformé, interprété et où personne, je pense, n'est armé pour lutter face à un ennemi invisible au pouvoir dévastateur.

J'ai aimé.
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Livre sélectionné pour le prix Summer 2022 de la Fête du Livre de la ville de Bron.

Ouf, trois fois ouf !
J'ai enfin terminé ce livre, non sans mal. Si je ne m'étais pas engagée à lire TOUS les livres de la sélection, celui-ci aurait très vite été abandonné.
Ce nombrilisme, ce vieux beau portant un oeil égrillard sur "les jambes fuselées" des jeunes filles, ce maître de conférence désabusé, ce retraité désoeuvré, cet écrivain raté qui se raccroche à la biographie ( commencée il y a 40 ans ! ) d'un poète méconnu et méprisé ( son alter ego ? ), ce divorcé dépressif, ce père "intermittent", cet alcoolique, cet ancien adhérent de SOS Racisme qui se raccroche à ses vieux "faits d'arme", quel ennui ! Même ses déboires ne me touchent pas...
Attention, ce n'est pas que l'auteur écrit mal, non, c'est ce qu'il raconte qui est insipide, à mes yeux, peut-être seulement à mes yeux d'ailleurs.
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Comment, trois étoiles seulement ? C'est-à-dire que ce ne sont pas trois étoiles mais cinq d'une part et à peine deux de l'autre. Les Français ayant la passion des raffinements infinis dans leur manière d'évaluer, je souscris au moins à ce trait national et concentre derrière ces trois étoiles des heures (exagération épique) passées à maturer ma réflexion.
J'ai aimé ce roman sans l'aimer. Je ne lui ai pas fait la gueule, je ne l'ai pas battu froid, je ne l'ai pas oublié pour lire autre chose. Je m'y suis tenue. Et au fil de son déploiement, j'ai goûté sa construction, apprécié la richesse de son personnage principal. J'ai ri de temps en temps. J'ai aimé aussi le rythme, le séquençage et la fin. C'est un très bon roman.
Que Jean Roscoff soit un personnage engagé, fer de lance de « touche pas à mon pote », de ces intellectuels de gauche qui ont accompagné 1981, qu'il ait orienté tout son travail universitaire à partir de son engagement politique pro communiste m'a semblé très bien vu. Qu'il ait vécu aux crochets de sa femme plus fortunée aussi. le parallèle que l'on fait ensuite entre cette idéologie et celle de la reconnaissance des discriminations identitaires permet une distance critique par rapport aux années 2020. En acceptant cette comparaison, on accepte de lire ces luttes comme l'arrière-plan d'ambitions plus personnelles et on voit bien que la charge émotionnelle adossée à ces enjeux pourra faire sourire quelques années après. le regard amusé et incrédule que l'on porte aujourd'hui sur les débats entre trotskistes et maoïstes vaudra bien celui des générations futures sur les oppositions entre intersectionnalistes et universalistes semble nous dire Abel Quentin. Pourquoi pas, en effet.
Mais ce roman m'a mise mal à l'aise aussi. Comme je n'ai jamais trouvé beaucoup d'attrait aux pastorales irénistes, je ne crois pas que ce soit la noirceur (sans jeu de mots) de Jean Roscoff qui ait joué. Des affreux cyniques et attachants, des vieux cons, j'en ai lu ! Des insupportables pédants aussi. Des détritus en fin de tout. Chez Roth, chez Houellebecq, chez Beckett, Flaubert avant eux. Que le narrateur se défie malicieusement de ses personnages ou que ces-derniers se sachent indéfendables, tout comme Roscoff l'avoue bien volontiers, plaide toujours en faveur d'un second degré assumé, d'une mauvaise foi qui accepte de n'être qu'un vernis. La rédemption par la lucidité. En général, je jubile. Pas là.
Alors quoi ? La peinture qui est faite de notre époque et des batailles autour des concepts de racialisation, d'intersectionnalité est admirablement exécutée. Celui qui n'aurait rien lu, rien entendu sur la question peut s'en faire une idée assez précise. Pour les autres, c'est une brillante synthèse des conséquences et des enjeux d'une problématique centrale à notre temps. Evidemment, sous couvert d'analyse quasi sociologique, comme c'est notre Jean Roscoff - universitaire mitterrandien raté, divorcé alcoolique et misanthrope - qui nous fait la leçon, on biberonne avec les faits un bon paquet d'explications de mauvaise foi, de faux-semblants et d'autojustifications foireuses. Ce qui contribue à la truculence du récit. Ce qui gauchit les fondements objectifs de l'analyse aussi. Mais comme ça se voit comme le nez au milieu de la figure, on se dit qu'on n'est pas dupe. Et on rigole de la misère attachante de ce sacré Jeannot. Quel magistral looser celui-là ! Ah, ah, ah ! Quand il exagère, c'est pas avec le dos de la cuillère, lui ! Voui.
Mais qui y a-t-il dans ce roman pour apporter un contre-point ? A part ce sympathique faux-cul de Roscoff, qui ? Personne. Et ce n'est pas parce qu'il nous confesse combien le camp adverse a raison et à quel point il est pathétiquement foutu qu'il va pouvoir parler d'autre chose que de ce que la dénonciation du racisme systémique fait à un brave tocard comme lui. Ce qui n'est pas, reconnaissons-le, le champ le plus large pour aborder la question. Hmmm, peut-être qu'il y a là une première explication à mon malaise.
Mais on l'aime bien ce Roscoff ! On s'y attache d'autant que les furies populaires sont sans appel et qu'il va déguster. Ce qu'il prend dans la tronche, l'ami ! Son appartement, ses comptes en banque, ses coordonnées personnelles, sa réputation, sa fille même, tout y passe ! Triomphalement boomer, il n'a pourtant comme seul tort que d'avoir vécu en parasite improductif aux crochets d'une idéologie gauche caviar aujourd'hui complètement dépassée. Trop vieux pour prendre la vague suivante et trop égocentré pour accepter de la laisser passer sans avoir son mot à dire. Est-ce que ça vaut les tombereaux de haine qui vont se déchainer contre lui ? Absolument pas, évidemment. Résolument à côté de la plaque, il ne mériterait que les grotesques bastonnades d'un théâtre de guignol.
Et c'est là que je suis gênée aux entournures pour la deuxième fois. Car aucun salopard ne mérite qu'on le crucifie sur la place publique. La vindicte populaire dans ses débordements, ses approximations et ses excès ne devrait jamais supplanter la subtilité d'un éclaircissement. Ou l'exercice d'une justice impartiale. La colère populiste est l'ennemi de la complexité. La liberté d'expression ne devrait jamais céder à aucune intimidation « Monsieur l'abbé, je déteste ce que vous écrivez, mais je donnerai ma vie pour que vous puissiez continuer à écrire. » comme ne l'a pas dit Voltaire.
Bien sûr. Mais à ce compte, il est toujours innocent celui auquel s'en prend la foule injurieuse. Roscoff aurait pu taillader des bébés canards, trucider des boulangères diabétiques ou enculer des mouches, ça ne justifiait pas que l'on force sa serrure ou qu'on le roule dans la fange des bas-fonds du net. L'emballement public, la disproportion aveugle et absurde des réactions absolvent Roscoff. Sans que son prétendu crime ait eu besoin du moindre inventaire. Sans que le lecteur ait eu plus qu'un mea culpa aviné et ricanant. Les gens sont tellement bêtes, on vit une époque tellement folle que ça exonère de toute remise en cause. Ouf.
La littérature doit-elle se faire le porte-voix d'une cause morale ? Certes non. A-t-elle pour obligation d'être objective ? Absolument pas. Elle peut peindre des ratés et une société perdue. On ne lui demande que de le faire bien et c'est ici le cas. Mais il ne faudrait pas prendre ce roman pour ce qu'il n'est pas. Une analyse sociologique brillante de nos travers contemporains. Un phare éclairant judicieusement nos errances extrêmes. Non, ce n'est qu'un brillant hommage au ricanement gêné d'une arrière garde dépassée.
A ce compte, les raisons des réticences qui m'avaient fait venir si tard à un livre dont le thème m'appelait pourtant sont venues ajouter à mon inconfort de lecture. C'est parce que le Voyant d'Etampes avait été mis en concurrence pour le Goncourt 2021 avec La plus secrète mémoire des hommes et que j'avais lu des commentaires enflammés en faveur du premier contre la prétendue illisibilité du second que j'avais repoussé ma lecture. Aucune envie de découvrir ce livre qui servait de prétexte à certains pour en discréditer un autre. Ma lecture achevée, je suis davantage consternée encore par ce débat. Les deux romans parlent, chacun à leur manière, d'un écrivain noir. En privilégiant le point de vue obtus et enlisé d'un universitaire blanc dans le Voyant d'Etampe. En déroulant une réflexion sur le sens de l'écriture dans La plus secrète mémoire des hommes. Que la belle facture de ces deux ouvrages n'ait pas suffi à les sauver d'une polémique qu'ils dénonçaient pourtant tous les deux de manière anticipée dans leur narration m'a tristement confirmé que, dans cette histoire, la littérature seule n'était pas vraiment en jeu.
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Est-ce qu'une personne n'ayant pas subit d'oppression peut-elle prétendre comprendre les difficultés d'un opprimé ?

Un livre que je n'aurais probablement jamais remarqué si mon mari ne me l'avait pas offert.

Cette lecture m'a donné du fil à retordre, car j'ai fait beaucoup de recherches sur Internet sur des définitions, sur des personnes connus, sur des lieux, ect… Bref, mes neurones ont chauffé et j'ai aimé ça !

Par contre, j'ai malheureusement ressenti une lourdeur côté politique, mais qui a eu le mérite d'offrir des connaissances et des points de vue différents.

Dans cet ouvrage, il est question de racisme, de wokisme, d'appropriation culturelle et de différences générationnelles.

Ce roman de qualité est intéressant aussi bien sur le plan intellectuel, documentaire et informatif.

Je n'avais pas l'envie folle de retrouver le personnage du livre... sans réussir à m'accrocher, j'ai préféré vite en finir.

D'autres amis Babelio ont aimé ce roman, et je vous invite à lire leur billet qui vous donnera bien plus envie que celui-ci.
Je vous conseille le merveilleux billet écrit par Chrystele (HordeduContrevent).

Il y a autant d'avis que de lecteurs, et je fais cette fois partie de celles et ceux qui ont eu un rendez-vous manqué.

"Un combattant de la liberté apprend de façon brutale que c'est l'oppresseur qui définit la nature de la lutte, et il ne reste souvent à l'opprimé d'autre recours que d'utiliser les méthodes qui reflètent celles de l'oppresseur." - Nelson Mandela
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Jean Roscoff, ancien professeur d'Université, retraité, soixante cinq ans, alcoolique, a une fille Léonie qui est en couple avec Jeanne.
A l'orée de cette retraite, il décide d'écrire un livre sur Robert Willow, poète afro-américain, décédé sur la route d'Étampes, après avoir louvoyé parmi les existentionalistes parisiens.
Ce livre paraîtra à la toute petite maison d'édition Dialogue, tenue par Paulin Michel. Pour couvrir l'événement, celui-ci organise une soirée avec quelques invités. Parmi eux se trouve un homme qui tient un blog très suivi. Delà vont commencer les déboires de Jean Roscoff. L'écrivain sera pris dans une spirale où l'on se demande comment cela va se terminer ?
A notre époque, les réseaux sociaux créent beaucoup de ravages et peuvent annihiler toute une vie.
J'ai dévoré ce livre, même si au début, j'ai eu du mal à rentrer dans cette histoire. Dans ce livre, on en apprend beaucoup sur les nouveaux termes utilisés sur les réseaux sociaux tels le woke, l'appropriation culturelle ou bien l'effet Barbra Streisand.
L'auteur nous livre un roman original avec une écriture fluide, malgré quelques redondances .
Merci aux 68 Premières fois et aux Éditions de L'Observatoire de m'avoir permis de découvrir ce livre.
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Il s'agit d'un bon roman incontestablement, mais dont les qualités sont ruinées par pléthore de fautes d'orthographe et de syntaxe qui, par le nombre et la grossièreté, permettent de douter de la sincérité de tout et de tous.


À titre de seul exemple :


Il s'esclaffa et je souriai faiblement"... "Je m'endormai vers quatre ou cinq heures du matin..." et le pompon, à plusieurs reprises : Robert Willow - le poète dont le narrateur écrit la biographie - était "métisse" !


À ce niveau, récurent dans le livre, , il ne s'agit plus de coquilles, mais c'est pathétique et révélateur du naufrage général !


Le voyant d'Étampes a reçu le prix de Flore. Voilà une récompense qui n'est pas de nature à me réconcilier avec l'ensemble des prix accordés on sait trop bien comment ...
Lien : https://fureur-de-lire.blogs..
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Alcoolique, divorcé et retraité, Jean Roscoff se lance dans la biographie de Robert Willow, poète américain méconnu, pour racheter sa carrière universitaire médiocre. Ce qui semble être une bonne idée prend vite une tournure inattendue : son livre, supposé rester plutôt confidentiel, se prend un tollé sur les réseaux sociaux, Roscoff ayant oublié, ou omis intentionnellement, de mentionner que Willow était… noir. Anti-raciste universaliste ayant fait la marche des Beurs en 1983, il ne lui était même pas venu à l'idée que la nouvelle gauche « conscientisée » pourrait le prendre pour un raciste notoire – et c'est bien là tout le noeud du problème.

On m'a présenté ce livre comme un coup de génie, le meilleur roman de cette rentrée. Autant sur le plan intellectuel, documentaire et informatif, je ne peux qu'être d'accord, Abel Quentin décortique les évolutions politiques des mouvements anti-racistes, sonde les profondeurs du monde littéraire avec ses lois et ses tribunaux propres et dévoile les sombres mécanismes des cabales médiatiques rendues possibles par l'explosion des réseaux sociaux. Il n'y a pas à dire, c'est riche, brillant et hautement intelligent. Pour autant, je ne me suis pas du tout attachée à ce personnage d'anti-héros vieillissant, déconnecté du monde dans lequel il vit, ressassant sa marche des beurs comme s'il méritait la salut par à ce simple fait d'armes. J'ai trouvé dans le récit beaucoup de longueurs pendant lesquels le narrateur d'apitoie sur son sort de pauvre homme incompris aux nombres intentions et ça m'a lassée du récit. La complexité du propos et des nombreuses idées évoquées a rendu ma lecture difficile. Moi qui lit de manière hachée, un petit bout par-ci par-là dans les transports, j'ai eu l'impression d'être restée en dehors de l'histoire, de la polémique, de la thèse du livre.

Ce que j'en retiens finalement, c'est cet affrontement entre deux mondes et deux générations qui ne se comprennent pas, ce qu'on constate tous les jours quand on discute avec nos aînés : notre société s'est largement complexifiée, et notamment sur les notions de race, de minorités et de cancel culture. L'auteur nous amène à réfléchir, en nous donnant des éléments historiques, philosophiques et contextuels sur des sujets de société mais difficile de savoir quelle est l'idée qu'il défend lui, Abel Quentin, à travers ce livre. Se positionne-t-il seulement par rapport à son sujet ?
Lien : https://theunamedbookshelf.c..
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Je vais faire l'économie d'un résumé du roman car étant la 180ème chronique sur ce site, d'autres l'ont très bien fait avant moi.
J'ai eu beaucoup de mal à rentrer dans ce livre et à le finir, ce que j'ai fait par égard pour le travail de son auteur et pour essayer de comprendre pourquoi je ne peux m'associer au concert de louanges qu'il a suscité.
Ce que j'attends d'un roman, c'est me permettre de m'évader des contingences quotidiennes et me libérer des débats souvent stériles qui agitent les média et la classe politique ; lorsque je veux approfondir un thème de société ou un débat politique, je me tourne alors vers des essais.
Abel Quentin mélange ici les deux genres, le personnage de Jean Roscoff n'étant là que pour aborder des thèmes très à la mode, médiatisés à outrance : féminisme radical, réseaux sociaux devenus des tribunaux populaires où chacun peut se retrouver jeté en pâture pour un mot ou une idée qui ne plaît pas, privilège blanc, wokisme, cancel culture dont il est à noter que la majorité nous arrive directement des États-Unis, sans contextualisation. Je me suis sentie engluée dans ces concepts parfois fumeux dont nous abreuvent les média. Les personnages sont relativement stéréotypés et n'ont pas de profondeur, si ce n'est par les caricatures que l'auteur leur fait incarner : Jean, le militant de SOS racisme qui s'en gargarise encore 30 ans après, la femme de Jean, droguée au travail et à la réussite, Marc, l'ami de Jean, ancien militant de SOS Racisme et cacique du PS à la réussite capitaliste insolente, Jeanne, la passionaria extrémiste du combat contre l'homme blanc oppresseur, l'éditeur veule qui lâche son auteur face au lynchage médiatique.
Malgré une lecture laborieuse et un sentiment d'ennui à certains passages, j'ai, cependant, aimé l'écriture brillante, l'intelligence, l'autodérision et l'ironie mordante avec lesquelles Abel Quentin dénonce tous ces extrémismes qui nous dressent les uns contre les autres (Blancs contre Noirs, femmes contre hommes,…). L'auteur se livre, au passage, à une critique acerbe de tous ceux qui pérorent sur des livres, en particulier de certains de ceux qui s'autoproclament critiques littéraires sans avoir lu l'objet de leur anathème. J'ai apprécié de me retrouver plongée dans une période que j'ai bien connue étant de la génération du personnage. le livre est fort bien documenté et rend l'atmosphère des années 60 très réelle avec les figures de Sartre, James Baldwin, les interrogations sur le communisme, le combat pour l'égalité des droits pour les Noirs aux États-Unis...
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Lu pour le prix des lectrices Elle.
Les sujets abordés pourraient permettre de qualifier ce livre de documentaire plutôt que de roman tellement l'actualité est présente dans cette histoire.
Le premier tiers de la lecture a été un calvaire, j'ai tenu pour deux raisons, la première parce que j'ai « un contrat moral avec un hebdomadaire » (pour reprendre les mots d'une babeliote jurée comme moi) et parce que certains autres lecteurs ont fait remarquer que l'intérêt du livre résidait dans les deux derniers tiers.
J'ai donc poursuivi et malgré de trop nombreuses longueurs, je me suis laissé piquer par l'intérêt et ai trouvé que le mal qu'il décrivait était bien retranscrit. Il y a plusieurs sujets en fait : les réseaux sociaux qui lynchent les auteurs, les Blancs qui usent de leurs privilèges blancs, qui sont racistes sans même s'en rendre compte et le décalage entre les générations, plus encore dès lors que la retraite pointe le bout de son nez.
Ce pauvre Jean va écrire un livre et sera cloué au pilori sur les réseaux sociaux. Chacun ira de sa diatribe sans même le laisser s'exprimer sur ses intentions réelles et les émotions qui l'ont incitées à écrire. Chacun, entendez des anonymes qui rejettent en bloc une idée différente en recourant même parfois à l'insulte (toujours plus facile quand on est planqué derrière son écran). Et la finalité de tout cela, quelle est-elle ? A part la destruction de l'écrivain et de sa famille, aucune réflexion ne sera engagée pour que s'affrontent réellement les opinions. L'opinion publique jettera l'opprobre sur lui. Alors notre homme s'interroge : ces accusateurs pourraient-ils avoir raison ? Pourquoi ? Il veut se justifier et expliquer sa façon d'appréhender les choses mais on ne le laisse pas faire. Ces juges, eux, n'écoutent pas, ils condamnent sans laisser la défense s'exprimer, sans même la rencontrer. On se croirait au temps de l'inquisition, le procès est plié avant même son commencement.
Et ensuite ? On zappe, on trouve un autre os à rogner, un autre homme à déchiqueter.
Et l'autre sujet, délicat, sur les Blancs qui défendent les Noirs pour des raisons purement égoïstes : montrer qu'ils ne sont pas racistes et asseoir leur suprématie de Blanc.
Cela m'a fait penser à l'époque de Martin Luther King où certaines personnes de la communauté noire l'ont pris à partie car selon elles, il confortait la suprématie blanche en discutant avec les Blancs et en favorisant l'intégration des Noirs, intégration qui signifiait « faire ce que les Blancs attendent des Noirs ».
Un sujet peut être analysé sous différents prismes mais il faudrait que malgré les divergences d'opinion, la discussion puisse avoir lieu, du débat peut naître un consensus, et à défaut, l'échange peut toujours susciter des réflexions.
Mais à l'ère d'internet, cela semble compliqué.
Livre révoltant !
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Voici un roman agréable à lire: le ton est vif, l'humour est bien dosé et le personnage principal est attachant malgré ses défauts ou à cause de son regard sans concession sur lui-même.
Le Voyant d'Etampes aborde le sujet du woke qui a éclos outre-Atlantique et qui commence à faire des ravages chez nous. Il le fait intelligemment en expliquant clairement en quoi consiste ce mouvement. Il revient aussi sur l'histoire de la lutte contre le racisme en France depuis les années 1980 - pour le personnage principal- et remonte même jusqu'aux années 1950 avec Sartre et Albert Camus.
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