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sur 1023 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
On peut dire qu'il arrive au bon moment.
Ces débats sont à présent partout, et la majorité silencieuse, avec ou sans présupposés, doit se pencher sur ces questions sous peine de ne plus rien y comprendre.
Mise à jour demandée des logiciels : ( bien / mal ),( progressiste / réactionnaire ),( je / nous )
Voilà, l'intersectionnalité est dans la place, issue de plusieurs dizaines d'années de maturation dans les laboratoires de la radicalité, offrant un regard neuf et une ligne révolutionnaire (au sens qu'elle pointe des causes précises, et que leurs modifications entraineraient, selon elle, des conséquences immédiates ) à nous sociétés occidentales.

On pourrait facilement s'inquiéter de la recrudescence des radicalités dans l'arène du pragmatisme, débordant des travées que l'Equilibre leur a normalement réservées, pétries qu'elles sont de raccourcis, sophismes et autres paradoxes.
Paradoxe d'ailleurs, c'est bien à ces points de frictions qu'une pensée s'aiguise et grandit, s'ébauche de ses scories en s'affrontant à ses contradictions.
Que de ces pensées, wokes aux adeptes du grand-remplacement, naissent des paradoxes, n'a rien d'étonnant ou d'invalidant quant à leurs développements. C'est le fait de s'y confronter, de devoir convoquer des référentiels plus vastes pour tenter de les contourner, d'arbitrer, qui poussent à abandonner le noir et blanc, rite de passage exsudant normalement l'idée de sa gangue dogmatique : la radicalité comme enfance d'une pensée.
On pourrait y voir l'éternelle querelle des anciens et des modernes, d'ailleurs…
Le « avec nous ou contre nous » comme un vilain appareil dentaire…

Mais le monde des idées est coutumier du fait… rien que notre bon vieux capitalisme n'a toujours pas dépassé, sur beaucoup d'aspects, l'âge de raison; les limites physiques planétaires bien enterrées, recouvertes de linge sale et de cartons de pizza. La croyance au progrès technologique permanent (d'où une croissance énergétique continue) procède à la manière de la religion. On croit.

Pourquoi tenter d'élargir le spectre de manière un peu tautologique ?
Pour souffler, prendre une pause… et ce livre le permet, car en plus de servir de « le débat actuel, pour les nuls », il sait poser les questions à ceux qui en ont éclusé, déroulant le champ des possibles à mesure que chacun ferait preuve de sincérité, son héros Roscoff comme monument-marronnier du roman français contemporain (liste des auteurs que vous connaissez ci-jointe), maniant brillamment une épice nationale au dosage compliqué : le cynisme.
C'est une des réussites de ce roman : juste ce qu'il faut… quelques gouttes de doute…
Certes, il plaira davantage aux anti- qu'aux pros, mais impossible de ne pas y voir une démarche honnête.

Ce livre se concentre sur la partie la plus paradoxale pour nous, français, la race.
Il laisse de côté, non sans y faire allusion, l'autre grand versant, voie ombrée de plus grandes difficultés, le genre.
Il est très habile à dérouler, sous la patine du souvenir, l'histoire récente des mouvements anti-racistes, ses lignes de forces, ses figures, de touche-pas à-mon-pote, à l'époque plus affirmative du collectif égalité(*), de la genèse d'une certaine socio-anthropologie anglo-saxonne, à sa diffusion massive sous le pavillon de l'intersectionnalité actuelle.

(*) Souvenir de ma grande soeur, Fanny, composant un article pour feu le magazine Tribeca parisien, interviewant en cette fin de millénaire l'écrivaine Calixthe Beyala, posant la question de la « discrimination positive », nous laissant bras ballants devant sa contradiction avec certaines valeurs de la république, au nom du progrès moral, nous qui étions de gauche…)
...
Respirons bien.
Devant nous est proposée par la société une Rapunzel « racisée et conscientisée », transformée, par la magie de la publicité, en Reine de Sabamazon…
On reprend… ?

Bien construit, bien fléché (et sans couleur flashy), bien rythmé, bien écrit., il se pose en attendant que le génie romancier anglo-saxon se charge d'en écrire l'un ou l'autre de définitif, Lionel Shriver comme candidate déclarée (bien qu'on devrait moins se marrer qu'avec Philippe Muray…)
(*crac*)
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C'est l'histoire d'un universitaire francais qui ecrit un bouquin sur un poete americain. Pratiquement inconnu. Un poete communiste qui a quitte l'Amerique pour s'exiler en France. Un poete jazzman qui a grandi dans un quartier de la bourgeoisie noire (notez le terme, svp.) de Washington et a fait ses etudes au sein de l'universite noire (vous suivez?) Howard. Un communiste qui a fui le McCarthysme pour se retrouver a Paris dans l'entourage de Sartre et a fini par s'isoler dans un coin perdu pour composer, en francais, des poemes a la Villon.


Sortir un poete de son anonymat c'est le reve de tout chercheur universitaire. Dans le cas du heros de ce livre ce sera son cauchemar. On l'attaque parce qu'il n'a pas accorde a la race du poete assez d'importance. Ce qui a toute l'importance pour ses detracteurs. Ce qui prime tout. Et lui qui a vu en ce poete un homme doue, interessant par sa demarche, sans s'appesantir sur la couleur de sa peau et tout jauger par elle, qu'est-ce qu'il est, lui, pour ses detracteurs, et pour la plus grande partie de son entourage? Un sale raciste blanc.


Heureusement le livre est ecrit avec beaucoup d'humour. Et le heros est assez minable pour qu'on puisse et le prendre en pitie et se gausser de lui. Il n'est pas sympathique, pas du tout, mais le livre par contre, tres sympa. Oui, tres sympa. Alors je le referme en souriant. Abel Quentin m'a concocte un beau roman, m'a servi un piquant morceau de fiction.
Heureusement , n'est-ce pas?, que la fiction n'est pas la realite.

Parce que la realite? La realite, c'est un auteur francais de livres jeunesse qui ecrit un livre antiraciste mais se voit interdire de publication aux USA parce que son heros est noir. Un blanc qui ecrit sur un noir? Predation identitaire! Sacrilege! La realite, c'est une autrice neerlandaise qui se voit interdire de traduire une poetesse noire. Appropriation culturelle! Grand crime devant l'Eternel!
Ah! Quelle erreur, madame Beecher Stowe, d'avoir ecrit La case de l'oncle Tom! Ah! Monsieur Cooper, demandez pardon aux mohicans!


Le politically correct est devenu woke. Un seul woke vous parle et tout est racise. Et le bon antiracisme de ma jeunesse est en passe de devenir un racisme anti-blanc. Ce blanc qui doit faire tous les matins a son reveil son mea culpa. Pas n'importe quel blanc. le blanc occidental, celui qui a des genes imperialistes, colonialistes, esclavagistes. Contrairement par exemple aux blancs arabes ou autres non blancs que leur passe conquerant, colonialiste, esclavagiste, ne gene ni eux ni personne. Il n'y a que le blanc occidental, degenere par definition, qui doit demander pardon autour de soi pour son passe.
La bonne vieille lutte des classes est submergee par des luttes identitaires. La pas bonne vieille censure religieuse est remplacee par une censure racisee.


Et moi? Je crois que je suis reste fidele a l'anti-racisme de ma jeunesse. Un anti-racisme simple et pas complique. Tous les hommes (femmes) sont egaux. Tous les hommes (femmes) sont beaux. Chacun son teint. Chacun sa couleur. Tous beaux. Mais que voulez-vous? Tous ces nouveaux wokes, avec leur intolerance, leur acharnement, leurs interdits bebetes, leur nouvelle censure, ils me les cassent!
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Je continue de rattraper mon retard et d'écluser un peu ma PAL. Au menu ces jours ci, ce roman d'Abel Quentin dont le premier roman "Soeur" m'avait beaucoup plu.

Jean Roscoff est un universitaire de gauche, ancien militant de SOS Racisme, nouvellement à la retraite. Pour occuper celle-ci, il reprend un projet littéraire: écrire un livre sur un poète américain, Robert Willow, réfugié en France, à la suite du Maccarthysme. Déçu du communisme, celui-ci va avant de connaitre une fin tragique, publier quelques recueils de poèmes en français.
Ce livre aurait du rester confidentiel, mais Jean Roscoff a négligé un point: Robert Willow était noir. Les réseaux sociaux vont lui tomber dessus, avec une violence verbale d'abord, mais qui ira ensuite jusqu'à l'agression de sa fille.

J'ai trouvé la mise en place du roman, jusqu'à la parution du livre un peu longue, un peu répétitive. le rythme s'accélère ensuite et le déchaînement qui va suivre, magnifiquement décrit par l'auteur, m'a effrayée : je n'ai pas beaucoup ri à cette lecture,
Et ce vieil universitaire, ivrogne, non politiquement correct, m'est devenu infiniment sympathique. Il essaie lui au moins de comprendre ceux qui le crucifient, il se documente, il étudie leurs théories et admet qu'il a sans doute quelques torts. Face à la meute, dont aucun ou presque n'a lu son roman, il est cependant démuni. Et cette meute n'est pas seulement constituée d'internautes hystériques, la mise en accusation est relayée par des journaux réputés. Qu'en est-il du travail de journaliste dans ces cas-là ?

J'ai pensé en lisant ces lignes à la plaidoirie de Richard Malka au procès de Charlie (lisez son livre magnifique) qui pointe les compromissions et les lâchetés d'un monde bien pensant qui laisse l'intolérance progresser sous couvert de ne pas stigmatiser.
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Après avoir refermé le voyant d'étampes, je comprends mieux ses multiples sélections aux différents prix de cette rentrée littéraire.

Jean Roscoff, membre de la première heure du mouvement Sos racisme et universitaire alcoolique à la retraite trouve enfin le temps de revenir à l'une de ses premières passions mise de côté depuis tant d'années : l'écriture. Passionné par le communisme et la poésie, Jean se lance dans la rédaction d'un hommage au poète Robert Willow, ancien membre du parti bolcheviste et proche de Sartre mort précipitamment après avoir foncé dans un platane avec sa Peugeot 404.
Après avoir essuyé plusieurs revers, Jean est aux anges lorsqu'il trouve une petite maison d'édition spécialisée dans la poésie qui accepte de publier son ouvrage. Malheureusement, la promotion de ce livre va être source d'une véritable descente aux enfers… Jean, gauchiste dans l'âme, va se retrouver au milieu de nombreuses polémiques qui, à l'heure du 2.0 se propageront sans qu'il ne soit possible de les contrôler…

Par ses personnages, Abel Quentin nous propose ici un ouvrage aux propos très engagés et parfois grinçants montrant certaines dérives identitaires et idéologiques qui, de part le développement des réseaux sociaux peuvent avoir un véritable effet boule de neige sur la toile et plus seulement aux États-Unis. En commençant la lecture de ce roman, je ne m'attendais pas à lire un livre aussi poussé et d'une telle richesse intellectuelle qui pourrait s'apparenter à un essai. Actuellement un peu déconnectée des actualités, j'ai eu l'impression de me retrouver dans la peau de Jean en découvrant certaines idéologies ou concepts inconnus pour moi. J'ai pris conscience que « la question du politiquement correct » est en constante évolution surtout ces dernières années.

Par ce fabuleux travail d'écriture, Abel nous offre le pari réussi de nous proposer un ouvrage audacieux et singulier qui pousse à la réflexion et dont on n'oubliera pas de sitôt la lecture...
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Voilà un grand moment que j'ai lu le Voyant d'Etampes, porté par des critiques enthousiastes et une presse favorable. J'ai bien ri en le lisant, je me souviens, et ai même embrayé sur un autre livre du même auteur, piquée par la curiosité.

Depuis, après un retard considérable pris dans la rédaction de mes billets babeliesques -un petit coup de mou devant la vanité de la chose ou un sérieux poil dans le clavier (beurk ! C'est vilain, ça , mais depuis que la main tapote des touches au lieu d'écrire, que dire? ) - après avoir, sans grand effort, chroniqué soeurs, plus évident et moins ambitieux, je m'aperçois que je ne sais toujours pas trop qu'en dire, de ce Voyant...

Je me méfie de mon penchant à ne pas vouloir hurler avec les loups ou bêler avec les agneaux, selon le cas.

Que reste t il d'une lecture qu'on a trouvée bien ficelée, bien écrite, d'un humour vachard et très parisien (compliment empoisonné !), faisant son héros d'un loser pathétique qu'on n'arrive ni à détester ni à aimer?

Jean Roscoff rate tout:
-son divorce qui n'a rien résolu et fait de lui un vieil enfant dont on n'ose couper la couveuse,
- sa liberté d'expression avec sa fille qu'il aime mais dont il est obligé de supporter sans moufter la compagne, une vraie caricature de lesbienne féministe décomplexée,
-son boulot (il a écrit une thèse sur l'innocence des Rosenberg, sortie le jour où le monde avait la preuve de leur traîtrise).

Dans la débine, il a une idée fulgurante et originale. Un bouquin sur un poète américain, Robert Willow, émigré en France, d'abord à Paris, dans les cercles existentialistes, puis à Étampes où il se coupe du who's who parisien et se met à écrire des poèmes avant de mourir dans un accident de voiture.

Tout à sa mission de découvreur de talents méconnus Jean Roscoff oublie un détail qui lui paraît bien accessoire: Robert Willow était noir.

Oublier de "raciser " son sujet ! "Quel crime abominable", aurait dit La Fontaine. Et d'ajouter:"On le lui fit bien voir." ..

On le lui fait bien voir aussi, à l'auteur du Voyant, si scandaleusement frappé de cécité raciale...

Déchaînement des réseaux, réveil bruyant des " woke" (j'ai découvert que ce n'était pas un instrument de cuisine mais plutôt une sorte de police de la pensée exercée par les "éveillés",woke en ricain, les "conscientisés", les "sachant" et "bien-disant" (ça c'est du français, et du meilleur !) qui empêchent de penser en rond..).

Lâchage en rase campagne du pauvre Jean, honni par sa maison d'édition, ses pairs de l'université, ses proches et amis... Un pestiféré, quand je vous dis qu'on est en pleine fable De La Fontaine, cet autre Jean !

Sortie piteuse du loser héroïque... sauvé in extremis par un tour de passe-passe romanesque que je vous laisse découvrir , comme un pied de nez à la malchance... le Voyant d'Étampes, finalement, c'était pas si mal vu..

Oui, l'idée est bonne, oui, c'est drôle et ça fait du bien de voir étrillée cette bêtise du politiquement correct qui muselle la liberté de penser et pas seulement celle d'écrire. Oui, on passe un bon moment.

Mais ce n'est pas un chef d'oeuvre impérissable.

Trop dans le vent, trop parisien (et voilà, c'est dit!) , parfois presque complaisant dans ses couplets ou dans ses charges -comme ces raconteurs de blagues qui s'arrêtent pour laisser s'épancher les rieurs...

Abel Quentin "tenait" un sujet, avait trouvé le ton, mais La Bruyère aurait dû lui donner des leçons de concision et Montaigne d'analyse. .

Il faut plus de doigté, de légèreté si l'on veut stigmatiser les moeurs du temps et/ou plus de profondeur, moins de facilité si l'on veut en capter l'essence et les formes .

Eh ben voilà ! Je suis arrivée à dire ce que j'en pense de ce Voyant-là... Ouf ! Mon woke à moi m'appelle dans la cuisine:les carottes sont cuites.
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Un démarrage sur les chapeaux de roue, le style est grinçant, ça dézingue à tout va.
On entre dans l'univers de Jean Roscoff, un universitaire né en 1960, qui se met en tête, l'heure de la retraite ayant sonnée, de ressortir des cartons un vieux projet abandonné ; écrire sur la vie du poète noir américain et communiste Robert Willow.
Pétri de bonnes intentions, et caressant le rêve de redorer son blason (sa carrière n'ayant pas été vraiment fulgurante), le soixantenaire fantasme une reconnaissance sur le tard ou à tout le moins quelques débats germanopratins, tout valant mieux que l'indifférence, croit-il …
Le monde de Jean Roscoff va subitement s'ouvrir sous ses pieds, quand il va se retrouver lynché sur la place publique par tous les twittos, journaux et médias de France. Il va devenir la cible des haters, trollers, et va subitement se heurter aux nouveaux modes de communication en ce qu'ils ont de plus terrifiant. Il va faire l'expérience du monde de la haine numérique et se retrouver en terre inconnue confronté aux nouvelles écoles de pensée en vogue ; culture woke, cancel culture, face à un nouveau langage dont il ne maîtrise pas les termes ; racisé, antagoniser, invisibilisation, …
Jean Roscoff va ainsi se voir reprocher d'avoir pêché par prédation identitaire : « On lutte aux côtés des autres minorités, mais on ne parle pas à leur place. La négrophobie, seuls les Noirs peuvent en parler. » (p.191)
Si la première partie du livre est réellement jubilatoire, le rythme s'essouffle un peu dans la deuxième. Les longues digressions sur le communisme, le maccarthysme ou les existentialistes m'ont ennuyée et n'apportent pas grand-chose à l'histoire, un peu comme si l'auteur voulait nous montrer qu'il maitrisait bien les sujets de son héros… le livre aurait gagné à être plus concis, les propos redondants cassant le tourbillon initial.
Les personnages secondaires sont attachants quoiqu'un peu caricaturaux, la fille lesbienne qui soutient son père contre vents et marées, l'ex-épouse qui continue à veiller presque malgré elle sur son vieux débris d'ex-mari alcoolique, Marc le pote de toujours, devenu brillant avocat, qui ne connaît pas la crise financière.
Ce livre maîtrisé nous offre une vraie réflexion sur la puissance des réseaux sociaux, des médias et les bouleversements induits sur notre société, nos modes de pensée et nos libertés. « Peut-on encore tout dire ? », sans craindre de se faire clouer au pilori sur la place publique.
Une réflexion intéressante sur le mode de fonctionnement des médias aujourd'hui, le lynchage anonyme sur les réseaux sociaux, un équilibre périlleux entre liberté d'expression, respect d'autrui, nécessité de vérité et besoin de ne pas nuire.

Une petite remarque aux Éditions de l'Observatoire : le livre est truffé de coquilles « le table », « toute le bureau », ou de fautes grossières de syntaxe, Marie devient subitement Maria … assez déroutant ! le correcteur était en vacances ?
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Dans le cadre de ma participation au groupe de lectures pour le site internet 20minutes.fr, il nous a été proposé de lire les romans finalistes de l'avant-dernière sélection Goncourt. La troisième et ultime sélection avant la proclamation du grand gagnant aura lieu le mardi 26 octobre. le lauréat sera, quant à lui, connu le mercredi 3 novembre 2021.

En ce qui me concerne, ma lecture s'est portée sur « le voyant d'Etampes » d'Abel Quentin, paru pour la rentrée littéraire aux Editions de L'Observatoire.


Ma citation préférée du livre :

« (…) l'injure est entrée dans les moeurs. L'injure est devenue un mode d'expression. Elle a empoisonné toute la société. »


Pourquoi ce livre ?

Parce qu'il fait partie de la seconde et avant-dernière sélection des livres en lice pour le Prix Goncourt 2021.
Parce qu'Abel Quentin s'est déjà vu nominé pour son premier roman « Soeur » au Prix Goncourt et a été finaliste du Prix Goncourt des lycéens 2019.
Parce que le personnage de Jean Roscoff est l'anti-héros par excellence et l'auteur le place au devant de la scène comme protagoniste principal. Cela change des choix faciles de certains écrivains.
Parce qu'Abel Quentin offre une vision assez ironique et cynique des évolutions de la société et notamment de certaines dérives identitaires offertes par des pseudo bien-pensants.


L'essentiel en 2 minutes

L'intrigue. Jean Roscoff, professeur d'université à la retraite, alcoolique notoire décide pour occuper son désormais temps libre et obtenir sa réhabilitation intellectuelle, de ressortir l'un de ses projets d'écriture consacré à un poète américain méconnu, Robert Willow. Hélas pour lui, la parution de son livre ne va pas du tout se passer comme il l'avait escompté.

Les personnages. Jean Roscoff, sexagénaire, alcoolique en situation de marasme intellectuel et familial – Marc, son meilleur ami dans les moments faciles de vie – Agnès, son ex-femme, work-alcoholic sévère et Léonie, leur fille dotée d'une propension à l'échec comme son père.

Les lieux. Paris, XIXème arrondissement et Etampes, une petite bourgade de l'Essonne où Robert Willow se tua sur l'une de ses routes, début des années 1960.

L'époque. Contemporaine.

L'auteur. Abel Quentin, avocat à Paris en est à son deuxième roman. Son tout premier roman, paru en 2019 a fait partie de la sélection au Prix Goncourt et finaliste du Prix Goncourt des lycéens la même année.

Ce livre a été lu par Musemania's Books avec à la fois intérêt pour des sujets très actuels comme par exemple le harcèlement dans sa globalité ou encore le choc des cultures et des âges mais également avec parfois un brin de scepticisme quant à certaines longueurs jugées superflues. Cela n'enlève en rien le talent de l'auteur d'offrir un roman bilan de vie d'un sexagénaire que nous pourrions tous devenir. Rien que pour le final audacieux, on en oublie vite les verbiages antérieurs.
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Un roman qui cogne.
Avec une écriture affûtée, Abel Quentin dénonce de manière féroce et satirique, la bien-pensance, le rouleau-compresseur d'internet et de son anonymat qui permet d'harceler en toute impunité, l'interdiction de la nuance, le communautarisme...
Il s'en prend aussi à cette gauche mitterrandienne qui a laissé ses privilèges prendre le pas sur ses convictions, ses révoltes, etc.
Il est questions d'idéologie, de choc des générations, d'intolérance souvent, de politique, d'idéaux perdus et d'un regard sans complaisance sur notre société.
Tout en laissant le lecteur libre, tentant de ne pas juger, « Le voyant d'Etampes » est un brûlot, une plaidoirie
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C'est l'histoire d'une disgrâce, d'une chute organisée. La victime ? Jean Roscoff, 65 ans, un universitaire fraîchement retraité, un peu raté, divorcé, alcoolique, père d'une fille lesbienne. Sa carrière professionnelle à été décevante, il en est conscient mais il va se prendre en main et écrire un livre hommage à un poète méconnu : Robert Willow, un américain communiste contraint de fuir le Maccarthysme et de s'exiler en France, dans le bouillonnant St-Germain-des-Prés d'après guerre puis dans la petite ville tranquille d'Etampes, dans l'Essonne. Les poèmes de Willow ont bouleversé Jean Roscoff. C'est donc pour lui un sujet littéraire idéal. Il va s'y donner corps et âme.

La première partie de ce roman m'a paru plutôt
longue, parfois à la limite de l'ennui. Abel Quentin prend son temps pour présenter tous ses personnages dans les moindres détails, il insiste lourdement sur leurs idées, leurs opinions, leurs rapports avec les autres et le monde actuel. Roscoff, notre anti-héros, à été militant socialiste sous François Mitterrand, il a participé à la marche des beurs en 1983, il a soutenu la création de S.O.S. Racisme et était au concert de la Concorde. toute sa vie durant il s'est battu pour l'égalité et a combattu le racisme, il se sent irréprochable et pourtant une polémique odieuse va se développer contre lui à la parution de son livre. Son crime ? Lui qui est convaincu de l'universalité de l'homme, sans distinction de race, a juste omis de préciser que Robert Willow était noir ! Il l'a purement et simplement déracisé. Un acte raciste commis par un homme blanc, synonyme d'oppresseur... C'est là que les réseaux sociaux et la machine à broyer et à detruire sans discernement vont se mettre en branle.

A partir de ce moment, le roman s'anime, le rythme s'accélère et la narration monte en puissance. Ce pauvre Roscoff ne comprend rien à ce qui lui arrive, il se fait laminer sans raison et lâcher par son entourage. L'atmosphère devient angoissante à la limite de l' étouffement. On se prend de pitié pour cet homme vieillissant, brisé, traîné arbitrairement dans la boue.
C'est une descente aux enfers édifiante que nous conte Abel Quentin. Il met beaucoup d'humour et de pertinence à décrire notre société contemporaine, ses aberrations, ses excès et l'urgence de remises en question.
L'écriture est précise, fluide, bien ciselée. le ton est tantôt acéré tantôt sérieux et didactique. Malgré une première partie lente et de nombreuses longueurs, j'ai trouvé l'intrigue bien conçue, bien ficelée. Elle réserve des surprises de taille jusqu'à la dernière page. C'est un roman subtil et percutant. Je regrette de ne pas avoir pu le lire dans des conditions optimales pour l'apprécier à sa juste valeur.... mission de baby-sitting oblige !

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Satire du milieu universitaire et de la société française dans son ensemble, ce roman est drôle et tragique, portrait d'un homme caricaturant une génération dépassée par la vague woke qui traverse le pays et le monde. Sans prendre parti, Abel Quentin glose sur ce phénomène et ironise sur l'extrémisme des deux pôles, créant un anti-héros aussi touchant qu'insupportable par son inertie et son côté lunaire (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2023/04/25/le-voyant-detampes-abel-quentin/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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