Ni le temps ni la distance ne changeront la situation. Tu es un homme marié. Marié. Le mariage ne veut sans doute pas dire la même chose pour toi que pour moi, et si c’est le cas, alors on est incompatibles. Parce que je ne voudrais jamais être avec un homme qui tromperait sa femme, qui ne ferait pas tout pour sauver son mariage, qui trouverait une pauvre excuse pour justifier son comportement répugnant. J’ai honte d’avoir fait partie de ça et je suis furieuse que tu m’aies menti. Il n’y a pas de scénario où on se remet ensemble. Il n’y a pas de scénario où je cesse de te haïr. La haine est un mot fort, mais il est approprié, car tu incarnes tout ce que je hais. T’es un homme infidèle. T’es un menteur. T’es un lâche.
Je cherchais l’homme idéal depuis très longtemps, et aujourd’hui j’étais avec un pilote sexy qui incarnait tous mes désirs. Je l’avais rencontré à l’aéroport. Il était arrivé dans son uniforme de pilote en tirant son bagage, entouré de l’équipage du vol. Ils s’étaient arrêtés à la porte d’embarquement et attendaient l’ouverture du couloir menant à l’avion. Ne voulant pas laisser passer l’occasion, je lui avais glissé mon numéro de téléphone. Il m’a appelée quelques jours plus tard, et on connaît la suite.
Cela ne faisait que six mois, mais je n’avais pas besoin de plus de temps pour savoir que c’était l’homme avec qui je voulais passer ma vie.
Je me souciais de mes patients plus que je ne le devrais. C’était ma faiblesse, et j’essayais d’être plus pragmatique dans mon approche. Au lieu d’avoir une personne sans nom et sans visage sur la table, j’opérais quelqu’un à qui je tenais… comme un membre de ma famille. Mais c’était créateur d’anxiété et de peur, ça me plongeait dans un état émotionnel malvenu alors que j’avais besoin d’être solide, aussi j’essayais désormais de moins me préoccuper de la personnalité du patient.
Mais cette fois, c’était différent.
Car l’être que j’aimais le plus au monde avait tout à perdre.
J’attribuais mon respect des femmes à la façon dont j’ai été élevé. Mes parents nous ont tous traités de façon égale, et ma mère était une bosseuse qui s’occupait de l’immeuble au complet et avait gagné le respect de ses résidents. J’ai toujours connu mes parents comme des patrons dans leur domaine respectif, du coup je n’ai jamais songé aux rôles de genre traditionnels. Et l’un de mes plus grands mentors quand j’étais toubib était une femme, une praticienne et pédagogue d’élite dans le domaine de la médecine. Elle m’a appris plus de choses que quiconque.
Catherine m’a traîné en justice, m’a piqué la moitié de mon pognon, et m’a à peine regardé dans les yeux en le faisant. Ça m’a fondamentalement changé. J’ignore ce qui m’a tué le plus entre perdre ma femme et perdre son père sur la table d’opération. Tout a changé ce jour-là. J’ai fermé mon cabinet, annulé mes rendez-vous malgré les supplications de mes patients, puis j’ai demandé un boulot à maman, car rien d’autre ne m’intéressait. Toute la famille a essayé de me convaincre de ne pas le faire, mais j’ai fait la sourde oreille.