Que de soupirs d'agacement n'ai-je poussé pendant ma lecture ! Encore une fois, il s'agissait de lire un livre offert il y a maintenant 3 ans (je les égraine dans le temps, pour éviter la saturation). J'ai poussé le vice jusqu'à le terminer malgré l'ennui et la consternation. Rien de trop dangereux cette fois, c'est juste profondément long, d'un étalement infini, avec une pointe de nombrilisme. Soit que je sois merdologue, comme le dit
Blanche Gardin, soit que j'ai désespéré de toucher la construction « remarquable » et la « poésie qui finit malgré tout par l'emporter » - merci les critiques presse - , je me suis enfilée les 300 pages jusqu'à la lie. Il faut dire qu'à cette fin, le bouquin est plutôt bien construit : des chapitres courts, 5 pages maximum, avec des titres complètement claqués au sol, bref idéal pour une cure de 10 pages matin et soir avant les repas. Mais à ce genre de prescription je vous renvoie plutôt vers l'huile de foie de morue : au moins, ça a du goût.
Le pitch est certes original, propulser un Richard Braudigan-like au Japon, mais après la catastrophe de Fukushima. Un genre d'uchonie quoi. Avec, d'après la quatrième de couverture, un aspect roman policier, mais qui au final ne le sera pas. L'auteur nous précise dans une note finale que tout est vrai, bien renseigné. Oui, tellement bien documenté que cela sert de prétexte à étaler sa science dans plusieurs monologues qui sont improbables dans la bouche de leur personnages. La « poésie » qui, apparemment, imprègne le livre, culmine sans doute dans les deux chapitres qui ont failli avoir raison de ma persévérance. L'un est une scène de fesse sans ponctuation, un peu gratuite, imprévue, où il doit falloir crier au génie d'écriture. L'autre est une scène de description de paysage où le narrateur inclus le lecteur par un « vous » qui rappelle les heures les plus sombres d'un Livre dont vous êtes le héros, les jets de dés en moins. Au milieu du reste, des citations random du vrai Braudigan en italique qui m'ont laissée sans voix face à leur vacuité.
Une critique ne serait pas complète sans enfiler mes lunettes de féministe. Il y a en tout et pour tout deux personnages féminins identifiés : Yukiko et sa mère. A la fin des 300 et quelques pages, j'étais toujours dans l'incapacité de dire QUI est Yukiko, car à part de longues descriptions de sa chevelure, et les répétition d'extase autour de sa beauté, c'est un peu vide. Il y a un exotisme latent, une essentialisation de ce personnage en particulier qui m'a dérangée. Même si le Braudigan original a pu écrire ce genre de truc, il aurait été sympa que l'auteur en fasse autre chose que de répéter à l'unisson « elle est Japonaise » pour lever toute nécessité d'approfondir son personnage.
Soyons pas misandre, ce même genre de processus est utilisé avec Akainu, pour lequel est répété qu'il a « quatorze ans », en guise de justification à la moindre de ses actions. Voilà pas besoin de décrire, vous vous mettez juste à sa place quand vous aviez son âge et c'est pareil ! La ficelle est grossière, et à force, je souhaitais ardemment que son anniversaire passe enfin.
En résumé, le livre est oubliable, sera oublié, probablement, dans quelques années. Il n'en restera que cette critique pour que je m'en souvienne.