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sur 641 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  

C'est l'histoire du Japon d'aujourd'hui. C'est l'histoire d'un homme qui choisit de disparaître. C'est l'histoire d'un pays en pleine mutation. C'est l'histoire d'un homme qui décide de changer de vie. C'est l'histoire d'un pays dévasté par la catastrophe de Fukushima. C'est l'histoire d'une fille qui veut retrouver son père. C'est l'histoire d'un pays gangréné par les yakusas. C'est l'histoire d'un homme qui décide de tout quitter. C'est l'histoire d'un amour terminé. C'est l'histoire d'un détective américain qui part au Japon sur les traces du père de son ancien amour. C'est l'histoire d'un gamin désoeuvré. C'est l'histoire de plusieurs solitudes. C'est l'histoire d'hommes et de femmes qui tentent de se reconstruire. C'est l'histoire d'hommes qui ont choisi de devenir des évaporés…

"Il faut que vous sachiez d'abord qu'ici, au Japon, un adulte a légalement le droit de disparaître.
- Il n'y a pas d'enquêtes de police.
- C'est comme une fugue. On dit yonige, ça veut dire "fuite de nuit". Dans le fond, c'est une sorte de déménagement, mais sans laisser d'adresse."

Kaze fait le choix de disparaitre en pleine nuit, comme le font des milliers de japonais chaque année. Sa fille, Yukiko, comédienne serveuse exilée aux États-Unis, décide de retourner au Japon pour retrouver sa trace. Pour ça, elle compte sur l'aide de son ex amant, le détective poète Richard B, toute ressemblance avec un auteur américain n'est pas purement fortuite. Des destins qui se croisent, des vies parallèles, des gens qui s'éloignent, pour ne plus jamais se recroiser…

"Un rêve passe derrière ses paupières, au fond de ses yeux noirs, comme un reflet d'obscurité dans l'eau d'un puits."

Avec Les Evaporés, Thomas B. Reverdy nous livre un roman magnifique, étonnamment actuel, porté par une écriture sobre et pleine de poésie, nimbé de l'ombre bienveillante de Richard Brautigan. A la fois polar, histoire d'amour et état des lieux du Japon post-Fukushima, une vraie belle surprise comme je les aime.

Ces temps-ci, je dois bien reconnaitre qu'il m'arrive parfois d'avoir d'irrépressibles envies de m'évaporer…

Un très grand merci à Babelio et aux éditions Flammarion.

Lien : http://bouquins-de-poches-en..
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Kazechiro travaille dans une banque, où il gère les portefeuilles de gros clients. Il a toute la confiance de son supérieur qui le convoque un jour pour déjeuner dans un endroit raffiné. Il pense qu'il va recevoir une promotion et au lieu de cela, le patron le licencie.

Il cherche à comprendre quelle faute il a pu commettre pour expliquer la situation et fouille dans ses dossiers. Il comprend bientôt que ce n'est pas lui qui a commis des erreurs mais qu'on le soupçonne d'avoir mis à jours des actions frauduleuses, comme le confirme les menaces qu'il reçoit des Yakusas.

Il décide de disparaître en emportant ses dossiers et devient ainsi un « évaporé » Johatsu en japonais. Il quitte tout, famille, maison change de nom. Sa femme inquiète appelle leur fille Yukiko partie, il y a plusieurs années en Californie.

En même temps, Akainu, un adolescent de quatorze ans qui a fui le nord du Japon à la suite du tsunami où sa famille a disparu, est témoin d'un meurtre : le gérant d'un magasin qui ne voulait pas payer la « protection » des Yakusa se fait assassiner. Akainu est obligé de fuir car sa vie est en danger. Il s'évapore lui-aussi et fait la connaissance de Kaze (la nouvelle identité de Kazechiro.

Yukiko décide de revenir au Japon et emmène avec elle son ancien petit ami toujours amoureux d'elle, poète et détective Richard B pour qu'il l'aide à retrouver son père.

Nous allons donc suivre le destin de cet homme et du jeune garçon et leur aventure vers la recherche de la vérité sur fond de Mafia japonaise, tsunami catastrophe nucléaire tandis que Richard B essaie de les retrouver……





Ce que j'en pense :



Ce roman est époustouflant à plus d'un titre. D'abord la notion d « évaporation » qui serait impossible chez nous. On peut d'évanouir dans la nature sans que personne ne fasse quoi que ce soit : la police ne fait pas de recherche car la famille se sent déshonorée donc ne demande pas d'aide. C'est une solution qui permet d'échapper aux dettes pour les personnes qui ont tout perdu lors du tsunami et ont encore les traites de la maison à payer alors qu'ils n'ont plus rien.

On peut faire le parallèle avec le deuil : peut-on oublier quelqu'un qui a disparu, on ne sait rien il peut être vivant ou mort donc comment entamer un travail de deuil.

Il y a le deuil de l'identité : un évaporé n'est plus rien, il a changé de nom, tout un pan de sa vie est partie et sa famille avec.

Reverdy évoque aussi les fugues des adolescents : celle de Yukiko qui a quitté la maison de ses parents quand elle était ado mais aussi sa grande fugue quand elle est partie vivre en Californie. En parallèle la fuite d'Akainu, il pense que se parents sont morts, donc il part loin des lieux du drame pour survivre et aussi pour ne pas connaître la vérité. « il faut que vous sachiez d'abord, qu'ici, au Japon un adulte a le droit de disparaître… c'est comme une fugue. On dit « yonige », ça veut dire « fuite de nuit ». Dans le fond, c'est une sorte de déménagement, mais sans laisser d'adresse. » P 173

D'un autre côté, qui n'a pas été tenté dans son existence de disparaître ainsi, sans laisser de traces, abandonnant un part de sa vie dont on ne veut plus. Mais, ici c'est une question de vie ou de mort, de survie alors qu'en Occident, c'est échapper à un mode de vie qui ne convient plus, donc deux univers totalement différents.

L'auteur décrit très bien l'évolution du Japon après le tsunami qui a emporté tout sur son passage, les biens matériels mais aussi le mode de vie, la culture, une civilisation qui s'envole elle-aussi. Les habitants qui ont tout perdu sont devenus des réfugiés dans leur propre pays.

Il y a d'un côté la gestion catastrophique du tsunami, car le gouvernement a tout minimiser, le nombre de morts, de disparus, mais aussi les malversations, les aides détournées, les spéculations. le pays croule sous l'eau, la boue, les ruines et certains ne pensent qu'à s'enrichir. Il y a aussi ceux qu'on envoie nettoyer, débarrasser les maisons et qui reçoivent des irradiations dont le taux rappelle Tchernobyl.

On note l'omniprésence des Yakusas que certains défendent car ils représentent une forme d'ordre, de famille toute puissante. (C'est tellement rassurant quelqu'un qui se conduit en dictateur et fait régner la terreur. «Au Japon, les sociétés de crédit sont détenues par les Yakusas. Quand les gens ne peuvent plus payer, ils exercent des pressions, ils menacent. E ne sont pas des banquiers, les gars… Les Yakusas sont partout. Les politiques leur ont vendu le pays. P 218

On pense toujours au Japon, comme à la patrie de la sagesse : les temples, les grands Maîtres de méditation (Deshimaru, Dôgen…) la cérémonie du thé, la lenteur et là on trouve la violence.

Il y a des chapitres savoureux par exemple un rêve de Kyoto où toute l'histoire du Japon défile, les Samouraïs, les femmes en Kimono… Ou un rêve de Fukushima, chapitre superbe sur la désolation les détritus la vision apocalyptique de fin du monde.

L'auteur nous montre l'évolution de Yukiko, avec son immense chevelure noire qui la recouvre comme une vague. Il y a une belle scène d'amour entre elle et Richard, mais y a-t-il un avenir pour eux. le détective fait des rencontres savoureuses en cherchant Kaze, il rencontre un journaliste qui a fait un travail sur « les évaporés » et également un vieux Fraçais qui lui explique la genèse des Yakusas.

Enfin, je retiendrai le clin d'oeil de Thomas B. Reverdy à un écrivain qu'il admire : le nom de notre détective américain Richard B fait référence à Richard Brautigan dont il cite au passage quelques vers qui sont écrits en italique dans le texte.

C'est le premier roman de Thomas B. Reverdy que je lis et c'est un festival, une pépite, tant il est plein de poésie malgré la violence de la situation. L'écriture est belle, déliée. Il nous entraîne avec lui dans ce Japon en ruine qui ne sait plus bien où son ses repères et quel son avenir. Il y aurait encore beaucoup de choses à dire sur ce roman, donc foncez, lisez-le, vous ferez un voyage magnifique.

J'avoue une fascination pour ce pays, depuis que j'ai découvert les grands Maîtres de méditation et Kawabata mais que je connais si mal et l'auteur m'a confortée dans mon désir d'approfondir sa culture et son histoire.



Note : 9/10
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Le « monde flottant » désigne au japon une catégorie de personnes : les exclus de la société, les marginaux, les prostituées, les drogués, les brigands, les paumés en tout genre et les personnes disparues, appelées aussi les évaporés.
Les évaporés ne font pas l'objet d'une enquête de police, car il n'y a pas de corps à rechercher et les proches ne l'ébruitent pas car cela jette le déshonneur sur la famille.

Un an après la catastrophe de Fukushima, Kaze, un homme japonais proche de la retraite, disparaît subitement. Pour sa femme, il s'est comme évaporé, dissous dans la nuit. le roman se passe un an après la catastrophe (tsunami et catastrophe nucléaire) et nous emmène dans ces territoires abandonnés et contaminés.
Sa fille, Yukiko, qui vit depuis de nombreuses années aux Etats-Unis, rentre au Japon accompagnée d'un ex-petit ami, Richard B. détective de surcroit, afin d'enquêter.
Richard B. croit aux miracles et laisse les choses venir à lui et se faire ou pas, se révéler seules aux yeux de ceux qui savent les voir.

L'écriture est profonde et poétique, empreinte de délicatesse et d'une sorte d'évanescence, à l'image des romans japonais, bien que l'auteur soit français.
On oscille entre une enquête mais menée tout doucement, sans créer de remous, de heurts, sans rien bouleverser, et un voyage aux confins de l'inconnu, dans un no man's land détruit, ravagé et dangereux mais où la menace est invisible et silencieuse.
Est-ce en acceptant de se perdre totalement qu'on peut espérer se retrouver ?
Un roman magistral et bouleversant.
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Kaze. Un nom de samouraï pour un homme qui a décidé de disparaître. Au Japon, tu as le droit de t'évaporer, de devenir un de ces « johatsu » – un homme décidé à s'effacer.

Yukiko. Un nom aux cheveux noirs et luisants, une belle japonaise vivant à San Francisco bien décidée à retrouver son père disparu, un certain Kazehiro.

Elle aussi a connu la fugue dans son adolescence, puis le changement de vie en quittant son Japon natale pour devenir comédienne ou serveuse sur la côte Ouest. Inquiète, elle ne peut que prendre ce long courrier à travers l'océan, retourner chez elle, pour retrouver ce père qu'elle a plus ou moins abandonné des années plus tôt. A son bord, un certain Richard B. qui l'accompagne, un ex-amant ou amoureux toujours.

Richard B., le non-héros du bouquin de Thomas B. Reverdy. de San Francisco, il n'hésite pas à suivre sa belle japonaise, parce qu'il l'aime encore et aussi parce qu'il est détective privé. Un de ces détectives privés à l'ancienne, avec grosse moustache et chemise à carreaux. Mais, il est surtout un peu paumé, lui qui se sent plus poète que détective, lui qui rêve plus de Babylone que de Kyoto, lui qui rêve de la pêche à la truite en Amérique plutôt que de sushis sur cette île où il ne comprend pas un mot.

Richard B., bien sûr, tu auras deviné l'hommage de l'auteur à ce grand écrivain américain…

Une nouvelle histoire japonaise. Un billet pour le Tokyo-Montana Express dans la poche de ma chemise à carreaux rouges, je déambule moi aussi sur les traces de ces évaporés. En fait, je les comprends parfaitement. Je ressens cette nécessité de disparaître, les aléas de la vie font que seul un nouveau départ peut s'ouvrir sur l'avenir. Sans se retourner et en allant de l'avant. Un gigantesque tsunami devient le complice parfait pour de nombreux évaporés. Complice, excuse, peu importe. Disparition provoquée par la Nature ou par soi-même. Une explosion nucléaire, une zone interdite, des contaminés, héros ou rebus, je navigue à flot dans ces eaux boueuses et ce désastre écologique. Lentement l'histoire dérive sur Fukushima, sur ses conséquences et sur cet après. Ceux qui ont eu la chance de lire ce bouquin ont peut-être reçu ce même frémissement à la lecture d'un chapitre particulier : Un rêve à Fukushima. J'aurais eu envie de te le citer. Mais je ne m'en sens pas le droit, ce passage m'appartient, je l'ai relu plusieurs fois, je le relirai encore. Il est puissant, envoutant.

« Les évaporés » ou l'art de ressusciter Brautigan à Fukushima.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Quel étrange roman... Mais est ce vraiment un roman ? J'ai vraiment eu l'impression d'être plongée dans la réalité, dans le quotidien du Japon.


Le père de Yukiko a disparu. Au Japon, disparaître du jour au lendemain est admis. Et personne, ni la police ni la famille, n'entreprend aucune recherche.
Alors Yukiko, résidente américaine depuis une quinzaine d'années, décide de retourner au pays en compagnie de Richard B. détective privé et toujours amoureux d'elle malgré leur ancienne rupture.

C'est un roman formidable dans lequel on pénètre au coeur du système économique du Japon tenu en partie par les Yakusas, dans lequel on découvre les ravages causés par les catastrophes de Fukushima et des environs, des kilomètres de terre dévastée, des milliers de vies brisées. le Japon ne sort pas grandi de ses observations. Mais ce qui le met à l'honneur, ce sont ses habitants, leur solidarité, leur culture, leurs coutumes.

Et surtout, ce qui m'a profondément touchée, ce sont ces disparus. D'abord, les disparus volontaires, devenus invisibles dans leur propre pays, comme le père de Yukiko qui veut fuir la pègre, ou d'autres touchés par les dettes, ceux encore qui fuient le chômage et la honte qui l'accompagne. Tous ces Johatsu qui se retrouvent du jour au lendemain sans avenir, mais aussi sans passé, et qui ne veulent pas faire supporter à leurs familles le poids du déshonneur.
Et puis, tous ces disparus, ces évaporés de la surface de la Terre suite aux catastrophes naturelle ou nucléaire. Tous ces anonymes qu'on ne peut plus nommer. "La misère est une énergie renouvelable".

Les situations décrites sont lourdes, pesantes, difficiles mais paradoxalement légères car l'écriture de Thomas B. Reverdy est ainsi. On sent l'empathie qu'il a pour les Japonais à travers ses personnages. On ressent son formidable respect face à tous ceux que le malheur frappe et qui se relèvent sans geindre, sans plier.

Et que dire aussi des sentiments amoureux qu'exprime, ou n'exprime pas son personnage de détective privé et poète. C'est beau, c'est touchant, c'est tendre et maladroit.


Un beau roman entre ombre et lumière, entre visible et invisible, entre partir et revenir. Et qui me fait dire que : Parfois, la vie ne tient qu'à un cheveu...
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Une dernière lettre pour son épouse et une fuite dans la nuit...Kaze a décidé de devenir un de ces "johatsu" qui disparaissent sans laisser de traces, qui s'évaporent tout simplement. Au Japon, le fait n'est pas rare et les familles, marquées par la honte et le déshonneur, ne cherchent pas à retrouver le disparu. Mais Kaze a une fille qui vit en Amérique et qui ne veut pas en rester là. Yukiko embarque son ex, Richard B., détective poète et rêveur et toujours amoureux d'elle, pour un voyage vers le Japon sur les traces de ce père évaporé.


Bien loin du Japon affairiste où les salarymen croisent les lolitas dans les couloirs bondés du métro, c'est du côté des laissés-pour-compte que nous convie Thomas B. REVERDY, dans les bas-fonds de Tokyo où se côtoient yakusas, chômeurs et prostituées, dans le parc d'Ueno où sous de grandes bâches bleues vivotent rejetés de la société et rescapés de Fukushima, dans la zone irradiée où pour gagner quelques sous, certains jouent leur santé, leur vie. On découvre la face cachée du Japon après la catastrophe de 2011 où les spéculateurs s'enrichissent sur le malheur et la mort. Mais ce livre n'est pas sombre pour autant, au contraire, il y a beaucoup de poésie et de tendresse dans les personnages, leurs questionnements, leurs choix, des personnages tellement humains, qu'ils cherchent ou se cherchent, que l'on s'y attache comme à des amis proches. Un roman d'amour, un polar, un roman social, bref un roman magnifique.
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Ni le titre ni la page de couverture ne m'avaient préparée à une telle découverte! L'auteur nous laisse entrer dans la vie quotidienne , dans les réflexions et même dans les rêves de Kase, celui qui choisit la fuite, de sa fille, la belle Yukiko et de son amoureux Richard l'américain, de l'adolescent perdu Akainu..
et j'ai découvert avec eux un Japon qui souffre, des personnages qui fuient la tragédie de Fukushima. L'écriture est simple, belle et poétique. Cet ouvrage m'a charmée, touchée, émue aux larmes.
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Un roman émouvant et intense, riche en réflexions sur la vie tout simplement.
Ecrit en 2013, ce roman dépeint un Japon côté misère et laissés pour compte dont on a peu l'habitude. Kaze s'évapore une nuit : il quitte sa maison, son épouse et disparait pour refaire sa vie car sa famille est en danger s'il reste. Il va croiser le destin d'un garçon de 14 ans qui se retrouve seul après le drame de Fukushima. Tous les deux, pour des raisons différentes, fuient des yakuzas (la mafia locale). La fille de Kaze revient au Japon avec son ex-petit ami américain qui est détective et elle espère retrouver son père. On lit les aventures des uns et des autres, leurs rêves, leurs espoirs.
Mais Thomas B. Reverdy connait l'art de décrire un paysage, de nous y projeter et nous en montrer toute la poésie intemporelle malgré les vicissitudes. Il nous offre des pages sublimes qui relient le passé et le présent d'un même lieu.
Que dire de ce livre sinon qu'il a une portée universelle, devisant de la vie plus ou moins facile selon nos choix et les choix de ceux qui nous gouvernent. Que l'on soit au Japon, en Russie (Tchernobyl) ou ailleurs les problématiques semblent être les mêmes. L'accident nucléaire fut un immense drame dont le pays se remet avec peine. On nous dévoile quelques non-dits, des activités troubles. Il y a toujours ceux qui s'engraissent au détriment de la majorité qui subit.
Ce roman m'a happée, bouleversée. Une belle histoire, avec une fin japonaise.
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Délicatesse, c'est ainsi que je pourrais qualifier en un mot ce roman : délicatesse dans l'écriture et dans l'expression des sentiments, délicatesse pour évoquer l'indicible. Je remercie les Editions Flammarion pour leur confiance et pour ce beau moment de lecture.

Ce roman est une évocation du Japon contemporain, après la catastrophe de Fukushima. Richard B., détective américain un peu rêveur et poète, accepte d'aider Yukiko, son ex petite amie, à retrouver son père, Kaze au Japon. Dans ce pays, lorsque quelqu'un disparaît, il n'y a pas de recherche officielle de faite : on considère qu'il s'est évaporé c'est-à-dire que c'est un choix de la personne pour fuir le déshonneur ou des dettes. Dans le cas du père de Yukiko, il s'agit de fuir les yakusas et de protéger sa famille de pressions exercées par ces derniers. Employé dans une grande entreprise, il se retrouve mêlé au système mafieux, instauré pendant la catastrophe de Fukushima, pour le rachat des terres polluées et la totale maîtrise des marchés de reconstructions. On découvre à travers ce livre, le monde parallèle de Sanya à Tokyo et des camps de réfugiés autour de Sendai, où beaucoup d'évaporés séjournent : cet univers du travail au noir, où seules les forces des bras comptent, permet à des entreprises peu scrupuleuses et à la mafia japonaise de faire effectuer les bases besognes à ces hommes exclus. Kaze sera amener à aider un jeune garçon Aijanu, sans abri, qui survit depuis sa fuite lors du tsunami dans cet univers glauque, où la faiblesse n'est pas tolérée..
Richard a pour principal difficulté de comprendre le mode de fonctionnement de ce pays, où il se retrouve analphabète, et où la superstition est toujours très prégnante. Son amour pour Yukiko, toujours vivace, semble être sans issu. de son côté, celle-ci, fait un point sur sa vie, sur les raisons de sa fugue au Etats-Unis, sur ce qui la lient à son pays natal.

« Les évaporés » est un roman, qui mêle harmonieusement plusieurs genres, mais ce qui marque le plus c'est la quête existentielle de l'ensemble des personnages. Chacun recherche le sens à donner et à prendre à un moment précis de sa vie : les choix qui seront prix décideront du sens de leur existence : choix amoureux, choix de vie, choix d'être confronté à la réalité et à la vérité, choix d'accepter ce que l'on est…. C'est tout cela.
De plus, l'auteur réussit l'exploit, et non sans humour, de nous faire partager les contradictions et la complexité de la société japonaise. L'utilisation de mots dans la langue originale permet de décrire très précisément et de manière presque anthropologique les moeurs, coutumes, la vie quotidienne japonaise. La catastrophe de Fukushima est évoquée de manière poétique : j'ai été très marqué par le passage sur la description du paysage lunaire de la région. Et encore une fois, on ne peut que faire le constat amer que ce sont les plus fragilisés qui seront exploités et exposés aux radiations et aux produits toxiques.

L'écriture est magnifique, pleine de délicatesse, de subtilité. Un moment de grâce pour moi. J'ai été presque déçue que le livre se termine déjà.
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C'est un nouveau Masse Critique qui m'a permis de découvrir cet auteur, dont je n'avais jamais entendu parler, et son dernier titre, Les évaporés. Tout d'abord, je tiens à remercier les éditions Flammarion et Babelio, car encore une fois, c'est une très belle découverte que je fais grâce à ces partenariats.

Il est évident que les moeurs japonaises sont très différentes des nôtres, et que des incompréhensions découlent forcément de ces différences. L'une de ces particularités du pays du Soleil Levant, c'est que tout adulte a le droit de disparaître, personne ne le recherchera. On dit qu'il s'est évaporé, tout simplement. La police ne fait rien car une disparition n'est pas un crime. La famille ne fait rien car elle est déshonorée. Ainsi, lorsque Kaze décide de s'évaporer, personne au Japon ne partira à sa recherche. C'est pourquoi sa fille, Yukiko, quitte son pays d'adoption, les États-Unis, et revient dans son pays de naissance afin de faire ce que personne au Japon ne fera jamais : retrouver son père. Elle entraîne dans sa quête Richard B., détective américain avec qui elle a vécu une histoire d'amour. Yukiko et Richard vont donc enquêter au Japon, remonter les pistes qui les mèneront à Kaze et aux raisons qui l'ont poussé à disparaître...

Au travers de cette écriture magnifique, de cette enquête, de cette histoire d'amour, c'est un Japon meurtri, un Japon de misère et de pauvreté, que nous présente Thomas B. Reverdy. Un Japon qui a subit les tremblements de terre, Fukushima, la domination des Yakuzas. Un Japon intransigeant et cruel pour ceux qui essaient de se reconstruire à partir de rien. Loin d'être une enquête palpitante, les recherches que mènent Yukiko et Richard sont plutôt une fenêtre ouverte sur ce Japon d'aujourd'hui, nu, tel qu'il est... Ce pays pourtant magnifique et qui nous fait tellement rêver.

Un roman, qui est loin d'être joyeux, certes, mais qui est très agréable à lire, et surtout qui témoigne de la souffrance de cette société japonaise suite aux tragiques événements que nous lui connaissons.
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