Ce tome fait suite à THOR MARVEL NOW T01 (épisodes 1 à 5) qu'il faut impérativement avoir lu avant. Il contient les épisodes 6 à 11, initialement parus en 2013, écrits par
Jason Aaron, et mis en couleurs par
Ive Svorcina. L'épisode 6 a été dessiné par
Jackson Guice, et encré par
Tom Palmer. Les épisodes 7 à 11 ont été dessinés et encrés par
Esad Ribic. Ce tome comprend également la couverture alternative réalisée par Gabriel Dell'Otto.
-
- Épisode 6 - Il y a 3.000 ans sur une planète sans nom, Gorr se déplace avec sa mère dans une zone désertique rocheuse. Elle lui enjoint de prier régulièrement les dieux pour qu'ils lui accordent leurs biens faits, tels qu'un peu de nourriture, un abri le protégeant des bêtes sauvages. Mais elle meurt assaillie par lesdites bêtes, sous les yeux de son fils. Plus tard, Gorr est devenu un adulte, et même un père, toujours sur cette planète si inhospitalière. Il perd sa femme et son enfant dans un éboulement. Il n'en peut plus de rendre grâce à ces dieux qui lui offrent un quotidien si cruel.
Il était effectivement nécessaire que
Jason Aaron donne un peu d'épaisseur à Gorr, l'opposant de Thor apparu pour la première fois dans le tome précédent. le lecteur sait déjà que cet antagoniste hait les dieux et a juré de tous les détruire, il ne reste plus qu'à découvrir la raison d'une telle haine. le scénariste utilise une trame simple : un individu sur une planète désolée, accablé par les coups du sort, qui en vient à blâmer les dieux quel que soit le panthéon considéré. Il finit par trouver une source de pouvoir qui lui permet d'assouvir sa vengeance dans les grandes largeurs. C'est très basique, et plutôt dépourvu de surprise ou de nuances.
Pour cet épisode,
Esad Ribic laisse la place à une autre équipe artistique afin de disposer du temps nécessaire pour dessiner les épisodes suivants en respectant la cadence de parution mensuelle.
Jackson Guice respecte à la lettre les indications du scénariste, sans grande inspiration. En fonction des exigences de la scène, le désert est vaguement sablonneux, ou plus rocailleux. Les personnages sont tous vêtus du même pagne. Les expressions de désespoir et de rage sont dramatisées jusqu'à l'exagération, et encore appuyées par l'encrage très professionnel de
Tom Palmer. le lecteur éprouve la sensation de repasser sans cesse par le même endroit, sans se faire une idée du relief ou de la géographie de la planète, et en se demandant comment les femmes peuvent enfanter dans de telles conditions, et comment le fruit de leurs entrailles peut survivre et dépasser le stade de nourrisson en subissant une telle pénurie de nourriture.
Les origines de Gorr s'avèrent très convenues, et sans grand intérêt. 2 étoiles.
-
- Épisodes 7 à 11 - En Islande en 893, le jeune Thor se réveille en pleine nuit, avec une jolie guerrière à ses côtés. Il a l'intuition que Gorr n'est pas mort. Des millénaires dans le futur, le Thor du présent a rejoint le Thor du futur en Asgard. le plus âgé constate que la disparition de la barrière d'entités noires qui l'empêchait de quitter les ruines de son royaume. Il conseille au plus jeune de se préparer pour le voyage et la bataille à venir en lui indiquant une salle où trouver de quoi se réconforter, pendant que lui-même va préparer la nef et chercher ses armes. Dans le passé, Gorr vient récupérer le jeune Thor pour le réduire en esclavage. Dans le présent, Shadrak (le dieu des bombes) se fait attraper par le Seigneur Libraire, dans la Cité de l'Omnipotence, le nexus de tous les dieux.
Le titre de ce tome indique clairement l'enjeu : dans le futur, Gorr est sur le point d'achever la construction de sa bombe fabriquée pour détruire tous les dieux. le lecteur n'a pas beaucoup de doute quant au déroulement de l'intrigue. Chacun des 3 Thor va assaillir Gorr à plusieurs reprises, subir des revers, jusqu'à temps que l'un d'entre eux parvienne à accomplir une percée décisive grâce à son obstination et sa force. Effectivement, le récit s'avère conforme à ce schéma. le scénariste réserve quand même 2 surprises au lecteur. La première concerne la portée de la bombe, avec la pointe d'humour sur l'existence d'un dieu des bombes. La seconde réside dans l'identité de 3 dieux parmi tous ceux réduits en esclavage par Gorr sur sa planète : Atli, Ellisiv et Frigg Wodendottir. Pour le reste, Aaron gère une distribution de personnages se concentrant sur Gorr et les 3 Thor. le lecteur éprouve la même sensation qu'à la lecture du premier tome, peut-être encore un peu accrue : une décompression destinée à donner de la place au dessinateur.
Esad Ribic est l'artiste qui a dessiné les premiers épisodes de cette série de Thor (débutée en 2012) et donc celui qui a défini son identité visuelle. Ses dessins conservent les mêmes caractéristiques : des formes délimitées par des traits très fins, donnant une apparence éthérée. À plusieurs reprises, le lecteur remarque qu'il utilise des vues en contreplongée pour donner plus de majesté à chacun des Thor, en s'inspirant de l'aura que leur conférait
Olivier Coipel dans une itération précédente de la série. le choix d'un détourage léger induit une forme légèreté à ce qui est représenté. de temps à autre, l'artiste représente plus d'éléments dans une case, par exemple pour la nef permettant de voyager d'Asgard à la planète de Gorr, pour les bâtiments d'Asgard dans l'épilogue, ou parfois pour les tenues de Thor. Dans ces cas-là, la légèreté des traits n'induit pas d'impression de fragilité de ce qui est représenté, ou de faiblesse.
Toutefois, le plus souvent, les personnages évoluent dans des environnements vides d'arrière-plans, comme s'ils flottaient ou se déplaçaient sur une scène vide de décors. Ce choix de narration visuelle accentue encore l'impression d'artificialité, avec des personnages évoluant sur une scène de théâtre vide. Pour contrebalancer cette sensation, le metteur en couleur effectue un travail impressionnant, largement au-dessus du simple coloriage. Il utilise le jeu des nuances d'une même teinte pour donner l'impression de sculpter les surfaces avec la couleur, se rapprochant d'un travail de peinture directe. En particulier il travaille le rendu de la peau pour représenter les muscles de Thor, faire ressortir les veines. En cela, il complète les traits encrés, ajoutant des informations visuelles qui relèvent d'habitude du dessin dans les comics. Les variations de teinte apportent également des informations sur le placement de la source d'éclairage, sur l'intensité lumineuse, et sur la manière dont chaque surface capte la lumière. Sous réserve de faire l'effort d'adaptation de lecture nécessaire, le lecteur peut alors retrouver une partie des informations d'habitude représentées par des traits encrés, dans les couleurs.
De la même manière
Ive Svorcina utilise la mise en couleurs pour donner des indications sur la texture du sol, pour représenter les veines du bois, pour habiller les fonds de case avec des camaïeux sophistiqués déclinant les teintes d'une même couleur. le lecteur accepte facilement que les combats se déroulant dans l'espace aient pour décor une nuit étoilée, sans beaucoup d'informations visuelles. Par contre il se lasse rapidement des zones désertiques, avec un trait pour indiquer le niveau du sol, de vagues contours pour indiquer la présence d'un rocher (pourtant bien habillé par les couleurs de Scorcina) et de vagues nuages de poussière mangeant une partie du décor. Il s'en désintéresse d'autant plus qu'
Esad Ribic ne semble pas non plus très impliqué dans la mise en scène des affrontements. Il ne cherche pas à réaliser un plan de prises de vue qui permette au lecteur de suivre le détail des déplacements et les conséquences des coups portés. Il fait des efforts pour montrer les personnages dans des postures impressionnantes. Mais en ce qui concerne Gorr, ces postures lui donnent un air d'acteur un peu imbu de sa personne, desservant sa crédibilité. La dramaturgie de l'artiste ressort comme trop éthérée, trop diaphane pour être vraiment capable de transcrire la brutalité des coups, la force des énergies destructrices.
Du fait de la forme de décompression narrative du récit, le lecteur ne s'y ennuie pas vraiment car les pages se tournent rapidement, et l'intrigue se suit aisément. Il a du mal à s'impliquer dans ce long combat linéaire du fait de son manque de densité visuelle. Par contre, s'il a une vague idée de ce qui se passe par la suite, il se rend bien compte que ce chapitre est indispensable pour comprendre la portée de ce qui arrive au Thor du présent par la suite. En particulier, il peut déceler les prémisses de ce qui va ébranler Thor dans
ORIGINAL SIN et dont le secret sera révélé dans Marvel Saga nº3, 2 récits écrits par
Jason Aaron. 2 étoiles pour un lecteur de passage, sans motivation pour découvrir la suite des épisodes écrits par
Jason Aaron, 3 étoiles pour un lecteur ayant repris sa lecture des aventures avec la série suivante, dans laquelle Thor Odinson s'est retrouvé indigne de manier le marteau qui a été soulevé par une femme.