Je ne sais pas si l'on me croira quand j'avouerai que j'ai mis beaucoup de temps et pris beaucoup de peine pour décrire cela. Du village de Trac-Nhiet, sur lequel flottait l'odeur douceâtre de la mort, il ne restait rien que des ruines et qu'un monceau de gravats labourés et calcinés. Avant de pouvoir tracer ces quelques lignes, j'ai marché comme un halluciné à travers ma chambre, j'ai ouvert et refermé vingt fois ma fenêtre pour mieux respirer, j'ai écouté le bruit de la rue, je me suis plongé le visage dans le lavabo, je me suis tourné sur chaise comme sur un gril, j'ai abandonné et repris ma page en haletant. (p. 54)
C'est que les forces du Viet-Minh n'ont rien de commun avec celles d'une armée européenne. C'est que les divisions du Viet-Minh ne sont qu'un agglomérat de régiments sans véhicules et sans matériel lourd, et qu'elles se forment, se dissolvent et se reforment avec l'aisance et la légèreté des vols d'oiseaux. (p. 44)
Malgré les apparences, les guerres servent à la réconciliation des hommes. Je crois donc que de votre guerre civile naîtra l'unité vietnamienne et que vous aurez enfin une patrie heureuse. (p. 361
Jules Roy
Agé aujourd'hui de 82 ans,
Jules ROY vient de publier ses
mémoires sous le titre "
Mémoires barbares" (Albin Michel). A cette occasion, il a reçu
Bernard Pivot pour un long
entretien dans sa maison de Vezelay, et retrace pour lui les grandes lignes de sa vie ; vie dont le maître mot aura sans doute été la
quête de vérité, au prix de radicales volte-face qui l'ont, aux yeux de certains,...