A contre-courant de l'engouement général, l'auteur n'a pas fait mouche sur moi avec
Ce qu'il faut de haine. Pourtant, des mouches il n'en manque pas dans ce roman, puisqu'un corps putréfié préalablement savouré par un sanglier, et désormais enveloppé d'un épais manteau d'asticots est découvert par une étudiante joggeuse dans une forêt icaunaise.
Le style est scolaire, comme pourrait l'être une rédaction de 4ème, lorsque le collégien croit tromper son professeur en écrivant gros et en rajoutant des mots inutiles pour atteindre le quota de lignes fixé à une copie double. Ici, il s'agit d'adverbes : « particulièrement éprouvant », « manifestement seule », « rigoureusement impossible », « lourdement trompée », « indiquée clairement », « mûrement réfléchi », « désespérément seule », « hautement improbable ». Les adjectifs font aussi l'objet d'une surenchère stéréotypée : la violence est insoutenable et les drames terribles. J'ajoute que lire la féminisation du mot officier en « officière » agit sur mes dents comme une craie grinçant sur un tableau noir et que nommer les rues et immeubles à chaque déplacement dans Paris n'apporte rien.
Jacques Saussey n'utilise jamais les mots société, entreprise, firme, établissement, négoce, commerce, manufacture ; il ne connaît que le mot « boîte » employé à de très nombreuses reprises, mot-valise ne contenant rien, condescendant voire péjoratif, facilité de langage montrant son absence d'intérêt et/ou son ignorance lorsqu'il évoque le monde économique.
Last but not least, les personnages sont banals et prévisibles. Un bras plâtré lors de sa rencontre avec la victime ne fait pas du tueur un Ted Bundy (c'était son truc à Ted le coup du bras plâtré), et la haine des DRH ne le transforme pas davantage en Burke Devore, héros de
Donald Westlake dans
le couperet. La découvreuse de corps est étudiante en médecine, sans jamais se rendre en faculté ; elle roule en Suzuki GSX-R, elle a les moyens.
Au final, l'écriture semble avoir été coûteuse en énergie ;
Jacques Saussey mâche le boulot du lecteur, décortiquant chaque geste, action ou réflexion dans une intrigue linéaire avec quelques incursions dans la tête du tueur. Un roman laborieux, un rendez-vous manqué, j'en resterai là avec cet auteur.