Il y a trois sortes d'hommes politiques : ceux qui troublent l'eau ; ceux qui pêchent en eau trouble ; et ceux --- les plus doués --- qui troublent l'eau pour pêcher en eau trouble.
Ce qui nous semble être de la mégalomanie n’est pas toujours une psychose ; – ce n’est souvent qu’un masque commode pour un individu désespérant de lui-même.
(p. 15)
La politique c’est le refuge où les crimes qui normalement devraient immanquablement entraîner la mise en prise ou la condamnation à mort, les trahisons qui normalement devraient déclencher une indignation enflammée, les mensonges qui normalement devraient disparaître sous les rires et les sarcasmes de tous, sont non seulement largement préservés de ces conséquences naturelles en soi, mais où ces crimes, ces trahisons et ces mensonges sont considérés comme des confirmations absolument naturelles, sinon même glorieuses, de la nature humaine. Mais le plus grave, c’est que non seulement des gens de même sensibilité politique, mais aussi l’opinion publique tout entière, voire l’opposition politique, fassent preuve en de telles occasions d’une mansuétude que l’on n’est jamais en mesure de manifester pour des individus qui sont des fripouilles sans aucun alibi politique, pour leur propre compte et à leurs risques et périls. (pp. 59-60)
Abandonner sans fausse honte une opinion reconnue comme une erreur, c'est peut-être la plus merveilleuse façon qui soit donnée à notre esprit d'épargner ses forces; et celles en même temps dont nous faisons le moins usage.
Un certain nombre d'individus croient qu'ils ont évolué, et de toutes leurs qualités seule la vanité coïncide avec ce qu'ils imaginent.
Les relations de toute nature entre les hommes sont soumises à la loi du dépérissement tout comme l'individu. Mais ces relations une fois mortes sont rarement enterrées à temps et elles pourrissent à l'air libre, voilà surtout ce qui remplit l'atmosphère de la société et même du monde d'un parfum si âcre.
Ce n'est pas la psychanalyse qui est nouvelle, mais Freud. De même que ce n'était pas l'Amérique qui était nouvelle, mais Christophe Colomb.
Nos paroles tournent autour de nos idées parce que nous ne sommes pas capables d'exprimer pleinement une pensée par des mots, sinon la bonne intelligence - du moins entre gens intelligents - serait établie depuis longtemps. Mais nos pensées tournent aussi autour de nos paroles, et c'est bien ce qui est grave. Si nous avions la force ou le courage ou la possibilité de penser totalement hors des mots, nous serions plus avancés que nous le sommes maintenant.
Tu t'imagines avoir transformé un individu par tes talents d'éducateur, et pourtant tu n'as réussi la plupart du temps qu'à en faire un histrion, un hypocrite ou un lâche.
Si tu protèges avec trop de dévotion le jardin secret de ton âme, il peut facilement se mettre à fleurir de façon trop luxuriante, à déborder au-delà de l'espace qui lui était imparti et même à prendre peu à peu possession dans ton âme de domaines qui n'étaient pas destinés à rester secrets. (p.17)