Je ne vous ferai pas l'affront de résumer la pièce la plus célèbre du répertoire Shakespearien, la plus longue aussi, pour vous raconter plutôt quelques anecdotes sur sa création et son interprétation.
Les siècles ont passé mais cette pièce est certainement l'une des plus disséquées et des plus étudiées.
L'origine d'
Hamlet se perd dans les limbes de l'histoire du nord de l'Europe, pays celtes ou scandinaves, mais il est à peu près certain que
Shakespeare a tiré l'essentiel de sa pièce d'un ouvrage écrit au XIIème siècle par
Saxo Grammaticus (que je vous recommande d'ailleurs) qui se veut une histoire du Danemark et qui s'intitule La geste des Danois. L'un des chapitres est consacré au Prince de Jutland, Amlethus, qui simula la folie pour venger la mort de son père.
En ce qui concerne son interprétation, les nombreuses escarmouches en France furent bien souvent le résultat des erreurs de traduction. Je ne sais pas si on trouve encore aujourd'hui la traduction d'
Hamlet due à
Marcel Pagnol, mais dans une excellente préface, celui-ci révèle les erreurs de traduction qui firent de la pièce un momument d'absurdités au début du XXème siècle (et à la fin du XIXè aussi d'ailleurs). Les grands sujets de discussion portèrent sur son aspect physique et sa folie.
A titre d'exemple, voici quelques erreurs dûment relevées par
M. Pagnol :
Lors du dialogue entre
Hamlet et Ophélie, au troisième acte, les propos tenus par le prince sont relativement crus et obscènes. Les traducteurs s'empressèrent donc de gommer cet effrayant aspect mais il en résulta des phrases compliquées et ridicules, et pour tout dire...incompréhensibles.
Enfin, une erreur de traduction fut également à l'origine de discussions sans fin sur l'une des tirades les plus célèbres, et probablement d'une erreur de compréhension. Jugez plutôt : Au début de la pièce, après qu'
Hamlet ait vu le fantôme de son père, il entame un monologue qui va expliquer toute sa conduite future. le vers anglais était celui-ci : "While memory holds a seat, In this distracted globe !". La plupart des traducteurs crurent qu'il s'agissait du globe terrestre, et par conséquent, le vers français n'avait aucun sens.
Marcel Pagnol proposa alors une autre solution. Et si par "globe"
Hamlet voulait dire sa tête, son crâne ? Après avoir vu le fantôme, il sentait qu'il devenait fou... distracted globe. On peut donc se demander si le pauvre
Hamlet a simulé la folie jusqu'au bout, ou bien s'il était plutôt la proie de crises nerveuses, et de folies passagères contre lesquelles il ne pouvait rien...
Bref, le mieux est encore de lire et de relire
Hamlet, qui a toujours été une de mes pièces préférées, et que, personnellement, je considère comme le chef d'oeuvre du grand maître.
A noter également, que parmi toutes les adaptations cinématographiques, de
Laurence Olivier à Kenneth Brannagh, aucune n'a trouvé grâce à mes yeux, hormis l'adaptation de la formidable pièce de
Tom Stoppard "Rozencrantz et Guilderstein sont morts" interprétés par les excellents Tim Roth et Gary Oldman. Avis aux amateurs.