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4,64

sur 4650 notes
Maus est une expérience littéraire sans concession. Sans concession sur le portrait du père de l'auteur, rescapé juif de Auschwitz, irascible, avare et dur qui partage ses souvenirs de la Shoah. Sans concession sur la monstruosité de la Solution finale racontée à l'échelle d'une victime qui révèle ainsi ce qu'il y a de plus inhumain chez l'homme. Sans concession enfin pour les émotions du lecteur malmené qui doit plusieurs fois arrêter sa lecture pour en digérer le récit brutal.
J'ai été bouleversée par cette mise à nue de l'Histoire au travers du passage de relais de la mémoire de l'Holocauste d'un père à son fils. Art Spiegelman délivre un chef d'oeuvre en racontant une histoire intime, celle de sa relation difficile avec son père, et celle de sa fantomatique famille polonaise décimée par les nazis, celle de son sentiment de culpabilité vis-à-vis de ceux qui ont survécu et de ceux qui sont morts entre 39 et 45. le récit est d'une efficacité percutante grâce à ces personnages décrits dans un soucis de vérité qui les rend profondément humains tant dans ce qu'il y a de plus bon mais aussi de plus mauvais.
Les mots me manquent pour expliquer à quel point cet ouvrage est une lecture qui marque durablement et profondément.
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Maus est considéré comme un chef d'oeuvre de la bande-dessinée. A l'instar de From Hell, j'ai beaucoup attendu avant d'entamer cette lecture qui est semble t'il un passage obligé pour tout bdphile qui se respecte. Je dois reconnaître après lecture que cette réputation n'est point usurpée.

Alors, non, ma note n'est pas à inscrire dans un suivisme de bon aloi. Ma note ne se justifie pas également parce que le sujet est grave.

J'ai été envahi par la puissance de cette oeuvre d'une grande justesse. On évite l'écueil du pathos grave et de la facilité. C'est d'abord beaucoup d'émotion qui nous explose à la figure. Je n'ai pas pu me retenir. J'ai pourtant vu maintes fois La liste de Schindler (1994) ainsi que le Pianiste (2002) qui traitent également de la déportation des juifs polonais dans les camps de concentration durant la Seconde Guerre Mondiale.

Cependant, ce n'était pas pareil. le combat de cette homme contre les forces du mal m'a abasourdi tant l'horreur est indéfinissable. Ce refus de l'inéluctabilité de la mort m'a profondément ému. Il est à noter que Maus est sorti avant ces deux chefs d'oeuvre du cinéma. Et puis, j'ai lu récemment la bd Auschwitz et je dois bien reconnaître qu'il y a une énorme différence dans le traitement ainsi que dans la portée.

Pour approfondir mon idée, je dirai que ce n'est pas parce qu'on croît connaître le sujet qu'on peut faire abstraction de la qualité intrinsèque de cette oeuvre. J'ai découvert d'autres détails tout à fait intéressants et qui ont renforcé ma conviction personnelle. le devoir de mémoire est absolument indispensable. Néanmoins, ce constat s'impose comme une évidence et ne saurait être elle-même un leitmotiv pour juger de ce récit. D'autres critères sont à prendre en considération.

Je ne suis pas un fana d'une ligne graphique noir et blanc. Cependant, je pense que celle-ci s'imposait incontestablement s'agissant d'une telle oeuvre. Bref, le dessin est en accord avec l'histoire. Je peux même avouer que quelquefois les traits ont été splendides. C'est un savant mélange de courbes stylisées et spontanées. Une force visuelle incontestable !

Le choix contesté d'avoir opté pour des animaux ne me paraît pas non plus hors de propos. Cela ne me choque pas plus que cela. J'ai pensé que l'auteur raconte des choses tellement « inhumaines » que le choix des animaux s'est imposé naturellement, si vous voyez ce que je veux dire…

Je dis souvent dans mes avis que telle ou telle bd n'a pas d'âme. Ici, c'est tout le contraire : c'est un débordement d'âme ! Quand on referme celle-ci, on ne peut s'empêcher d'y repenser. Il m'a d'ailleurs fallu la lire en plusieurs jours tant chaque chapitre est riche d'événements et également d'émotion.

Maus est à la fois une oeuvre intime et collective. C'est une belle réussite sur les deux tableaux alors que l'exercice de style est difficile. C'est d'abord un récit autobiographique d'un personnage aux abords antipathique car grincheux et avare. Au début du récit, je me suis dit : « c'est pas possible, c'est fait exprès !». Mais quelle justesse et quelle sincérité dans les propos! Je ne peux qu'approuver cette démarche.

Puis, le lecteur est également destiné à être le témoin de ce drame qui dépasse le strict cadre de l'histoire personnelle. Quand la peur, l'angoisse, la maladie et la mort assaillent des millions d'hommes et de femmes dans une boucherie sans pareille. Nous sommes loin de la « politique de civilisation » ! D'ailleurs, le passage sur les enfants a été particulièrement insupportable (mais pas dans le mauvais sens du terme).

Je suis très enthousiaste par rapport à cette oeuvre qui hantera ma mémoire. C'est riche en émotion et en sentiments. Dans une collection de bdphile qui se respecte, c'est un livre à posséder incontestablement !

Note Dessin : 4/5 – Note Scénario : 5/5 – Note Globale : 4.5/5
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Il est des oeuvres à l'universalité évidente qui réunissent les hommes. Parmi celles-ci, on peut citer pêle-mêle : la 9e symphonie de Beethoven ; le David de Michel-Ange ; Les Misérables d'Hugo, etc. Une liste qui s'enrichit au fil des siècles et nous enrichit. C'est ce qui caractérise une grande oeuvre : son pouvoir de fascination au-delà de toutes les considérations culturelles, cultuelles et intellectuelles. Un « ignorant » de Mozart, par exemple, se laissera facilement séduire par le célèbre second mouvement de son concerto N°21 pour piano et orchestre parce qu'il diffuse un état de grâce communicatif, sans besoin d'autre explication.
Maus est de ces oeuvres.
C'est une bande dessinée, la belle affaire ! C'est surtout, et presque essentiellement, une mise en forme de l'informe, autrement dit nos pulsions gratuitement destructrices. Pulsions ici collectives et organisées en masse qui, par la voix d'un narrateur (Art Spiegelman), sont relatées à travers le destin – ce chemin de croix ou d'étoile qui saigne ! – d'un père précipité dans le chaudron de l'enfer historique : Vladek, le survivant qui se souvient. Histoire qui, de la sphère intime, grâce au génie graphique et narratif de l'auteur, va devenir publique, offerte à la conscience humaine, et entrer dans le patrimoine de l'Art mondial.
Le sujet a évidemment son importance, mais traité par de médiocres mains, il n'aurait pas eu cette intensité.
Et comme s'il ne pouvait représenter une réalité qui le concerne au plus profond, Spiegelman substitue aux acteurs de cette tragédie, elle aussi universelle, les traits d'animaux.
La Fontaine aurait aimé.
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Maus raconte le témoignage d'un rescapé d'Aushwitz délivré à son fils. C'est donc sous un angle complexe et multiple qu'Art Spiegelman aborde la Soah : l'autobiographie, la biographie et l'essai sur la mémoire, le tout illustré par un univers anthropomorphe. Les juifs sont des souris, qui essayent d'échapper à une meute de chats qui les traque.
Maus, c'est l'histoire d'un juif de Sosnowiec, pris dans l'engrenage meurtrier du nazisme.
Maus, c'est l'histoire d'un déporté survivant du plus grand génocide de l'humanité.
Maus fait partie de ces livres qui prennent au tripe, mouillent les yeux et serrent le coeur. On ne referme jamais Maus avant de l'avoir fini, même pour dormir.
Et, au delà de la transmission de la mémoire, c'est l'histoire d'un père et d'un fils qui reconstituent progressivement le puzzle d'une famille décomposée.
Un classique, un chef d'oeuvre, qui élève la bande-dessinée au rang de littérature.
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Il faut être sincère ...le graphisme n'a rien d'attirant, l'album paraît sombre, en gribouillis, les personnages des petites souris ne sont pas des plus beaux quand on y jette le 1er coup d'oeil. J'ai tenu à lire cet album d,abord pour les éloges que j'ai lu à son propos mais passé quelques pages...j'ai tout oublié et je me suis retrouvé entre New York et L'Europe de L'Est des années 30-40.

Et là, je ne l'ai plus lâché. Il est vrai que Maus n'est pas un album qui se lit par ci, par là...par à coup! c'est une oeuvre qui nous habite. A près de 300 pages, c'est avec Vladek que nous sommes; nous écoutons son histoire. une histoire que nous connaissons mais qui nous laisse tout de même sans voix, qui nous secoue à l'intérieur, une histoire que j'ai lu en tremblotant parfois. elle fait froid dans le dos. Une histoire qui a fait travaillé ma mémoire. Une histoire pour ne pas oublier la souffrance d'un peuple, la souffrance de tous ces peuples qui ont vécu des atrocités.

Vladek a épousé Anja, issue d'une famille riche, il auront un fils: Richieu. Vladek se décrit comme un homme assez débrouillard et Anja comme une femme douce et intellectuelle. La guerre va séparer cette famille et ils seront déportés à Auschwitz et Birkenau tandis que leur fils mourra, tué par sa tante qui refuse d'être déportée.



Ce qui frappe dans cette lecture, de prime abord, c'est le choix d'un album comme média pour un récit aussi lourd puis le choix de personnages animaux. Au fur à mesure de ma lecture, le choix de la souris pour les juifs et le chat pour les Nazis a pris toute sa pertinence. J'ai été impressionnée par ce récit rempli de courage, d'inventivité, de persévérance.

Le personnage de Vladek est impressionnant, il s'est "organisé" (ce mot a pris une nouvelle signification pour moi) dans les camps de concentration de manière incroyable. Il a fait preuve d'une persévérance presque à tout épreuve. Mais nous réalisons au fur et à mesure qu'il paye encore sa survie. Il porte en lui, indélébile (comme ses numéros qui les ont marqué dans les camps), les traces de la guerre et des camps. Son avarice, sa manie de conserver de ne pas gaspiller, frise l'obsession. Art, second fils de Vladek et auteur de l'album, est pris entre une personnalité qu'il abhorre et un père qu'il aime. C'est émouvant de voir leur relation et triste de percevoir la colère qui habite Art et la solitude de Vladek suite au suicide de la mère, Anja. Il y a une telle incompréhension entre Art et ce père, avare, nerveux et raciste. le récit des années de guerre semble être le seul point qui les rallie...le seul moment où ils ne se disputent pas! C'est triste.

la structure narrative est excellente, nous nous laissons porter par ce récit lentement avec des allers-retour si fluide que nous devenons triste à voir le peu de pages qui reste. Puis tout d'un coup, j'ai réalisé que j'étais emportée par l'histoire... ces petites souris sont devenues plus expressives, le tracé de crayon plus clair et j'ai compris que Spiegelman a été ingénieux dans son choix...c'est alors que j'ai porté plus attention aux graphismes et que je l'aimé. J'ai aimé que parfois certaines images du passé étaient incluses dans le présent. Par exemple, lorsqu'Vladek évoque les Juifs pendus qui avait essayé de tuer des allemands à Auschwitz. Leurs jambes apparaissent dans les bois( à la place des branches d'arbres) alors que Vladek et Art sont dans la voiture en Floride. C'est un procédé qui fait penser à des flashback et révèlent avec finesse comment Vladek le vit. Son passé envahit son présent à chaque jour!

Les réflexions autour de ma lecture sont infinies: la question de la mémoire collective, comment la préserver? Peut on réellement comprendre les faits qui se sont déroulés dans cette période? Comment une personne peut aller aussi loin dans la violence, le massacre et une autre aussi loin dans la survie? Mais c'est aussi un devoir de mémoire pour les souffrances de tous les peuples comme ceux de l'esclavage, par exemple. Je me suis souvenue d'une commémoration pour la fin de l'esclavage lors d'un séjour Martinique qui m'avait tant appris sur le commerce triangulaire, la vie dans les plantations. La souffrance de tout un peuple, la violence d'un autre. C'est encore ça, la puissance de Maus: cette capacité de nous interpeller au plus profond de nous même, de ne pas oublier que la vie, c'est le devoir de tous! C'est ce que j'ai ressenti, moi!



Art Spiegelman signe une oeuvre très intime, il partage son histoire, sa mémoire et c'est poignant. C'est terrible même! Il y a tant à dire sur cet album. Je pense que le mieux, est encore de le lire!

C'est une lecture que je recommande ABSOLUMENT!!!!!!

Lien : http://lalistedemafa.over-bl..
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« Je veux être traité comme un être humain. »
Celles et ceux qui me lisent, l'ont déjà remarqué : je ne lis pas de BD. Je n'y suis pour rien, chez moi, c'était un genre pas fréquentable, ce n'était pas de la lecture !!! Alors, je suis une inculte indécrottable, car même libérée depuis longtemps des injonctions en matière de lectures, il ne vient absolument pas à l'idée d'en lire, ni, pire encore, de m'intéresser à ce qui se fait dans le domaine.
Parmi toute une liste d'ouvrage, il m'a fallu consulter, peser, réfléchir…forcément, je ne connaissais rien de son contenu. J'ai donc choisi, et bien choisi. Je n'imaginais pas que la BD pouvait être sérieuse, grave, et de qualité supérieure à bon nombre de "vrais livres".
Art Spiegelman a choisi de mettre en image l'histoire de es parents et plus généralement, de raconter l'Holocauste. Tout part, d'un fils (l'auteur) qui rend visite à son père, Vladek à qui demande avec insistance de mettre sa mémoire à nu.
Nous assistons donc à un chassé-croisé entre le présent, et le passé. du passé, nous apprenons, ou réapprenons l'histoire d'un génocide, mais d'une manière plus originale grâce à l'image. J'ai trouvé cela bien réussi. le graphisme, tout en noir et blanc, est très réaliste. L'originalité tient dans la manière de présenter les personnages sous formes d'animaux : les juifs sont des souris, d'où le titre Maus, les allemands, des chats (faut-il y associer le jeu macabre du chat et de la souris ?), les polonais sont des cochons…. Les dessins sont souvent à couper le souffle, dignes des meilleures photographies de l'époque qu'il m'a été donné de voir.
Du présent, nous apprenons la relation, difficile, conflictuelle, entre un père et son fils. Un fils complexé par la mort en déportation d'un frère ainé.
« La photo n'a jamais fait de caprices ni posé le moindre problème…c'était l'enfant modèle et moi le casse- pieds. C'était perdu d'avance. »
Une relation difficile entretenue par le suicide inexpliqué de la mère, et très tôt remplacée par une belle- mère assez mal appréciée. Ce père est présenté comme un grand-père capricieux, facilement tenté par le chantage médical, et dont la relation particulière avec l'argent est poussée jusqu'à la caricature. Mais au fond, quand on connait l'histoire de cet homme, on comprend un peu plus.
Présenté, ici, en intégralité, l'ouvrage était à l'origine paru en deux tomes. Chacun des tomes est également découpé en chapitre, pour une lecture facile et aérée.
Ce fut pour moi une agréable découverte qui offert une journée de lecture bénéfique, instructive, profonde, et originale à la fois. J'en avais bigrement besoin.


Lien : http://leblogdemimipinson.bl..
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Avec "Maus", Art Spiegelman a signé une oeuvre monumentale et justement récompensée par le Prix Pulitzer en 1992. Ce roman graphique est né de discussions entre le dessinateur et son père, Vladek, qui a échappé à l'holocauste et qui, comme d'autres survivants, ne parlait pas de son vécu. Les scènes d'introduction des chapitres permettent de prendre pleinement la mesure du fossé qui sépare les deux générations : la culpabilité de la première qui a survécu à la Shoah et celle de la deuxième qui ne l'a pas connue. Ainsi, dès la page 14, les chiffres tatoués sur le bras de Vladek apparaissent discrètement alors qu'il dit à son fils qui projette d'écrire un livre sur sa vie que personne ne veut entendre ce genre d'histoire.

Il accepte cependant de se prêter à l'expérience et raconte son mariage en 1937 et la naissance d'un premier fils en Pologne. Un an plus tard, le nazisme s'étend en Europe et la population juive est emportée dans une spirale de haine, de racisme et de violence. A travers les années de la guerre, "Maus" montre les expropriations, le front de l'Est, les camps de prisonniers, les pendaisons, le ghetto, les déportations, les camps de concentration. Et bien que la communauté juive soit représentée par des souris et les nazis par des chats, la distance instaurée par cette métaphore n'adoucit en rien la violence du récit qui nous est fait.

J'ai été très sensible au fait que le dessinateur conserve dans son oeuvre l'idée que l'anglais n'était pas la langue maternelle de son père et qu'il ne l'a jamais parfaitement parlée. "Maus" témoigne aussi des différences entre ce qui a marqué la mémoire de ceux qui ont vécu l'horreur des camps et ce que les recherches documentaires ont mis en évidence comme la présence d'un orchestre dans le camp (p. 214) dont Vladek n'a aucun souvenir. Mais au-delà des faits rapportés, j'ai été émue par le souci absolu de vérité qui se traduit de manière frappante au bas de la page 176 lorsqu'Art déclare à sa femme : « Tiens, tu vois, dans la réalité, tu ne m'aurais jamais laissé parler si longtemps sans m'interrompre. »
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Maousse.
Maus [souris] est un monument du 9e art alors qu'à première vue, il peut dérouter et rebuter par ses partis pris (multiplicité des cases, noir & blanc, zoomorphisme), son sujet et son manque de lisibilité. Roman graphique à large spectre nouant plusieurs thématiques insécables, ouvrant sur des interrogations abyssales qu'elles soient exposées ou suggérées ainsi du frère d'Art Spiegelman, Richieu (1937-1943), disparu dans le ghetto polonais de Zawiercie qui hante les esprits et à qui Maus est dédicacé en partie ou encore du suicide silencieux d'Anja Spiegelman (1912-1968), mère de Richieu et d'Art, survivante des camps de la mort, le grand oeuvre dessiné d'Art Spiegelman a une dimension littéraire que le prix Pulitzer attribué en 1992 soulignera. L'auteur va tenter d'extraire de la mémoire de son père Vladek, rescapé d'Auschwitz, un récit des camps d'extermination. Les entretiens enregistrés sont ensuite traduits en bande dessinée nourrie d'une documentation substantielle même si elle demeure discrète. L'histoire entrelace le présent de l'auteur, en 1978, à New York et le passé de son père, au mitan des années 1930, à Czestochowa, en Pologne jusqu'en 1945, à la Libération. le ghetto, la traque des Juifs de Pologne et la Shoah constituent l'ossature historique sur laquelle les destins individuels se fracassent. Vladek est un survivant. Il a su saisir les moindres interstices pour s'accrocher à la vie malgré la violence, le sadisme et la mort omniprésents. Maus est aussi la transcription d'une filiation conflictuelle, le fils ne comprenant qu'après-coup son père, en décalage, presque à regret. le parti pris de l'auteur à transposer ses personnages dans un univers animalier est pertinent pour les chats (les Allemands) et les souris (les Juifs) parce que le zoomorphisme crée une distanciation qui amène le lecteur à ne pas s'identifier aux personnages afin de conserver une attitude critique comme au théâtre. le procédé est moins convaincant quand l'auteur transforme les Polonais en porcs ou les Français en grenouilles. L'édition polonaise sera d'ailleurs houleuse. Quoi qu'il en soit, la lecture de Maus est immersive et ne laisse pas indifférent. En faisant un travail de mémoire, Art Spiegelman marque celle du lecteur pour longtemps.
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relecture en 2021. La transmission d'une période de vie d'un fils à son père est un exercice qui s'approche du funambulisme. Surtout lorsque ce père est un juif polonais, rescapé d' Auschwitz et que le récit en BD représente les personnages sous formes d'animaux aux espèces rivales, les chats (nazis), les souris (juifs) et plus neutre, les cochons qui figurent les polonais (pas si neutres dans l'affaire). Immédiatement l'anthropomorphisme ou le zoomorphisme étonnent, mais c'est une forme choisie par l'auteur qui en a fait ses références.
Vladek Spiegelman épouse une riche héritière de l'industrie textile et fait prospérer l'affaire avec son beau-père. L'époque est délicate en Pologne en 1939 pour les souris ; après plusieurs tentatives de cachette, la famille est arrêtée et déportée ; leur premier fils Angie sera sacrifié. Vladek et Anja, sa femme, survivront à Auschwitz et viendront vivre aux USA en 1950. Anja, dépressive se suicidera en 1968.
Artie ou Art, le second fils connaît une relation conflictuelle avec son père Vladek, homme autoritaire, raciste (envers les noirs), radin, égoïste… bref pas facile à fréquenter. Dix années lui seront nécessaires pour finaliser son oeuvre qui est la retranscription d'interrogations successives faites à son père.
Peut-être la mémoire du père a-t-elle été défaillante, peut-être a-t-il enjolivé des situations qui paraissent assez étonnantes vu le contexte, ou peut-être a-t-il eu beaucoup de chance ???
Le fils a rendu hommage, et même si le père a menti, l'ouvrage est là et il vit !

Lien : https://www.babelio.com/conf..
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Un témoignage émouvant de l'holocauste qui se démarque par sa forme et sa sincérité. Aucun des travers de Vladek n'est mis sous silence. Il est radin, raciste, maniaque, caractériel et pourtant, on ne peut s'empêcher d'admirer sa détermination à survivre. le fils, Art Spiegelman a tout fait lui-même. Scénario, dessin, dialogues. On entre dans le récit avec facilité grâce à son point de vue, et une quantité de petits détails qui font la richesse de l'oeuvre. La débrouillardise, les combines pour se procurer à manger, les planques, les trahisons. C'est un témoignage saisissant qui prend le temps, avec une fluidité exemplaire. le dessin m'a convaincu, et je suis incapable de dire si des visages humains auraient changé quelque chose à ma lecture. Il y a un risque de simplifications en désignant des peuples par un animal, d'autant que les melanges étaient fréquents. Cette généralisation est compensée par des nuances (masques de polonais, les comportements traitres et nobles alternent). Bref une oeuvre indispensable pour cerner l'époque la plus noire.
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