Ce sont des mots...
Ce sont des mots, des mots, des rimes et des rêves,
des rêves à mi-voix que nul n'a jamais dits,
des matins d'ombre qui n'auront pas de midis ;
ce sont hélas des mots confus, des chansons brèves.
Ce sont, en songe, les syllabes envolées
d'un mot magicien qui gardait l'avenir,
des visions qu'en vain je cherche à retenir,
ce sont des soirs lourds de tristesse inconsolée.
Ce sont encor, ce sont quelques Images pâles
dont on doute au soleil mais qui prennent, de nuit,
un aspect éternel de douleur ou d'ennui;
ce sont des mots, ce sont des Images banales.
Ce sont, au lieu des appels clairs et des aubades,
au lieu du grand soleil qui fêtait mon départ,
ce sont à peine, au loin, des murmures épars
et c'est la nuit dans une chambre de malade.
Les cris d'amour, les voix de l'orgueil ont fait trêve.
Au lieu du chant majestueux que j'ai rêvé,
sur un air d'autrefois, toujours inachevé,
ce sont, hélas, des mots confus, des chansons brèves.
Le Palais désert.
J'habite un grand Palais désert,
peuplé de souvenirs étranges
et qui s'élève dans les airs
sous un ciel qui jamais ne change.
Sous un ciel perplexe et menteur
qu'en vain l'œil interroge et sonde,
où de lourds oiseaux migrateurs
s'en vont en bandes vagabondes.
Je suis captif d'un Palais noir
où jadis des Reines sont mortes;
et j'ai voilé tous les miroirs
et j'ai peur en ouvrant les portes.
Depuis longtemps, depuis toujours,
mon espérance fût déçue,
après maint tour et maint détour
de découvrir enfin l'issue.
Aussi je subis ce destin
sans me plaindre, sans rien attendre,
en rêvant aux exploits lointains
de Rois qui ne sont plus que cendre.
Et, pour charmer languissamment
l'immuable ennui qui me cerne,
j'écris avec mon diamant
des Chansons sur les vitraux ternes.