Comme de nombreux lecteurs avant moi, je me suis engouffrée bille en tête dans ce roman, ayant été préalablement fortement impressionnée par
Station eleven. Ma première surprise fut de retrouver dans
L'hôtel de verre un personnage de
Station eleven dont je tais le prénom pour préserver le plaisir de la découverte des futurs lecteurs.
Bienvenue sur l'île de Vancouver où un hôtel à l'accès difficile reçoit une clientèle friquée qui paye cher pour se sentir hors du temps et de l'espace en admirant la nature sauvage à travers de grandes baies vitrées, sans être réellement plongée dedans. L'hôtel est aussi le royaume de l'argent, une sorte de pandemonium dont le propriétaire, un requin de la finance, a mis au point une géniale arnaque : à partir d'une illusion d'optique bancaire sans fondement, gagner de l'argent bien réel. Les gogos sont attirés par les dividendes extravagants comme les moustiques par la lumière. Aussi, lorsqu'un mystérieux message gravé à l'acide apparaît sur une vitre, c'est un peu le casse du siècle qui met en émoi la communauté et ébranle ses fragiles fondations.
Je n'irai pas par quatre chemins. A mon grand regret,
L'hôtel de verre a été une lecture mitigée qui ne remet nullement en cause le talent d'Emily St John Mandel, dont le style et l'imagination sont hors normes. Sous sa plume, les frontières spatio-temporelles se brouillent, s'effacent. Elle entraîne le lecteur dans un monde où le temps et l'espace se diluent, une rêverie, dans lesquels ondulent et flottent des fantômes, aux prises avec une contrevie. Même le sexe des personnages est flou, une femme portant un prénom d'homme. Dans les moindres détails, tout a un rapport avec le temps ou la distance ; je pense au décalage horaire, à la condamnation à 170 ans de prison de l'escroc. D'une décennie, l'auteure fait un espace entre deux galaxies... Sous la surface de ses histoires, se cachent d'autres histoires parfois secondaires puis soudainement prépondérantes dont l'encastrement est virtuose. La construction est vertigineuse. Ce sont justement ces qualités qui m'ont posé un problème. Au fil des pages, je me suis égarée, j'ai perdu mes repères, je n'avais plus de boussole littéraire pour me diriger dans ce trop-plein de tout.
Pour conjurer le sort, j'ai aussitôt
L'hôtel de verre terminé, entamé la lecture de
la mer de la Tranquillité, mais en y retrouvant, une fois de plus les mêmes personnages et le même macrocosme, j'ai préféré interrompre et différer cette rencontre. Emilie St John Mandel est brillante, mais mon univers de lectrice et son univers de romancière ne sont malheureusement pas parfaitement compatibles. Dommage !