Une page Noire dans les romans de premier cycle? Oho, c'est pas banal et ça sent le récit épeurant.
Voilà certes un roman débutant dont le sinistre récit marque les esprits, et c'est d'autant plus vrai que les romans d'horreur destinées au lectorat des 7-8 ans ne sont pas légion, peu s'en faut! Une fois encore, les petits romans de Québec Amérique se démarquent.
Nous suivons Rosalie, qui amorce une journée particulière. Sa soeur aînée, Anisha, est la gagnante du grand prix chaque année à la foire scientifique et cette année encore, elle compte en mettre pleins la vue. Rosalie n'est cependant pas l'enfant surdouée qu'est Anisha et sa présence dans cette école remplie d'enfants brillants a de quoi étonner, elle la première. Elle espère néanmoins que son projet sur les fruits suscitera un peu d'intérêt. Elle se crée un chapeau couvert de fruits à l'occasion de la foire et heureusement, le résultat semble impressionner ses camarades, une fois à l'école. Mais Anisha reste secrète sur son projet pour cette année, Rosalie devra donc attendre comme les autres le grand dévoilement. Cependant, un étrange phénomène semble se produire avec son chapeau...
Un récit vraiment prenant et troublant, parsemé de petits indices qui permette de comprendre que la situation est étrange, surtout avec une relecture. C'est étonnamment cruel comme histoire quand on y songe et il y a quelque chose de très glauque dans cette idée qu'à eu Anisha, malgré son désir d'être "ethique"
En réalité, on peut le deviner: Rosalie EST le projet, quoique qu'on se demande ce qu'elle est. Il est fort cruel de voir que tous les enfants savaient que Rosalie n'était pas un être humain et s'en sont même moqué. Ils sont restés de marbre face à sa détresse quand elle a lentement repris sa "forme d'origine" et finalement, ils l'ont "dégustée", Rosalie étant à l'origine un tas de fruits. On navigue sur cette question de la personnalité et de la conscience quand aux êtres non-humains". Rosalie vivait des émotions et avait une personnalité. Elle avait même des forces! Mais au final, sa propre créatrice n'a vu en elle qu'un prix de science et non un être pensant. Elle était d'une froideur déconcertante à la fin, regardant son "projet" remprendre sa forme de base, sans égards pour sa peur viscérale. On voit un unique oeil à travers les fruits de son corps verser une larme avant de disparaitre pour de bon. Une image forte. Pauvre Rosalie.
C'est donc un roman d'horreur à chute étonnamment bien monté et imaginé pour ce groupe d'âge. Et définitivement glauque. le fait qu'il n'y a ni sang ni créatures ni décor sinistre m'enlève rien à l'épouvante qu'on peut ressentir face à cette fin. On peut extrapoler sur les enjeux de la science liés au fait de jouer avec la vie et de la peur qu'on peut ressentir face à un énorme mensonge qui nous rend vulnérable.
Autres points positifs: Anisha est d'ethnie noire, ce qui est, je le signale, encore assez rare dans les romans, et elle a deux papas! La structure du roman est intéressante: on met un peu de la fin au début, une manière de laisser entrevoir la fin et d'attiser la curiosité d'emblée. Après une seconde lecture, le début est carrément horrible. On retrouvera quelques dessins en noir et blancs, dont je remarque un trait un peu inquiétant dans les visages humains.
Avis aux petits amateurs de récits glaçants, surprenants... et sucrés!
Évitez de manger pendant cette lecture.
Pour un lectorat du premier cycle primaire de deuxième année (7-8 ans). Et pas pour les coeurs sensibles!
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